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CA PARIS (pôle 4 ch. 4), 10 novembre 2020

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 4 ch. 4), 10 novembre 2020
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 4 ch. 4
Demande : 18/06590
Date : 10/11/2020
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 28/03/2018
Référence bibliographique : 5839 (domaine, cautionnement), 6010 (date d’appréciation du déséquilibre), 6017 (clauses portant sur l’objet principal, durée), 6296 (contrat de cautionnement, durée), 6133 (clauses relatives à la durée du contrat), 6396 (bail d’habitation, cautionnement des loyers)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8639

CA PARIS (pôle 4 ch. 4), 10 novembre 2020 : RG n° 18/06590 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Considérant que celui-ci fait valoir que la stipulation de son engagement de caution pour une durée de vingt ans auprès d'un loueur professionnel doit être considérée comme abusive du fait du déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au sens de l'article L. 212-1 du code de la consommation ; qu'il en déduit que cette clause doit être réputée non écrite en application de l'article L 241-1 dudit code et que, par conséquent, il s'est valablement libéré de cet engagement par sa lettre recommandée avec accusé de réception du 24 mars 2018 ;

Considérant cependant que si, comme l'a relevé le premier juge par des motifs qui ne sont pas contestés, ces textes du code de la consommation trouvent également application à un acte de cautionnement lié à un contrat de bail, M. X. ne justifie pas d'un déséquilibre significatif au jour de la conclusion du contrat, se bornant à faire valoir qu'il est actuellement retraité sans d'ailleurs justifier de ses revenus ; qu'en outre, il prétend à tort que cet engagement l'obligerait à verser une somme de 633.600 euros en multipliant le montant du loyer sur dix années, ce qui est un calcul purement hypothétique sans lien avec la réalité de son engagement ;

Qu'ainsi, et comme l'a jugé le tribunal d'instance cette durée de vingt ans ne constitue pas une clause abusive, faute pour M. X. de justifier du déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties qu'il allègue ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 4 CHAMBRE 4

ARRÊT DU 10 NOVEMBRE 2020

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 18/06590 (9 pages). N° Portalis 35L7-V-B7C-B5MI3. Décision déférée à la Cour : Décision du 8 février 2018 - Tribunal d'Instance de Paris 2ème – R.G. n° 11-17-000045.

 

APPELANT :

Monsieur X.

Né le [date] à [ville], [adresse], [...], Représenté et ayant pour avocat plaidant Maître Barthélémy L. de l'AARPI VALMY AVOCATS, avocat au barreau de PARIS substitué par Maître Baptiste DE C., toque : C0386

 

INTIMÉES :

Madame Y.

Née le [date] à [ville], [adresse], [...], Représentée et ayant pour avocat plaidant Maître Nicolas P., avocat au barreau de PARIS, toque : C1408

Société civile LA CLAIRVOYANCE

agissant poursuites et diligences de son associé gérant et/ou tous représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Siret n° XXX, [...], [...], Représentée par Maître François T. de l'AARPI T.-S., avocat postulant au barreau de PARIS, toque : J125, Ayant pour avocat plaidant Maître Pascal M.-S.-G. de la SCP MARIE-SAINT-G., avocat au barreau de Paris

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l'article 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 8 septembre 2020, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marie MONGIN, conseillère, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : M. Michel CHALACHIN, président, Mme Marie MONGIN, conseillère, M. Christophe VACANDARE, conseiller, qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Cynthia GESTY

ARRÊT : contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par M. Michel CHALACHIN, président et par Mme Cynthia GESTY, greffière, présente lors de la mise à disposition.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Suivant acte sous seing privé en date du 3 décembre 2012, à effet au 10 décembre suivant, la société La clairvoyance a consenti à Mme Y. un bail d'habitation d'une durée de trois ans pour un appartement situé à [ville] au 4ème étage, comprenant trois pièces, une entrée, une cuisine, deux WC et une salle de bains, moyennant un loyer mensuel de 2.500 euros, outre une provision pour charges de 140 euros.

Un acte de cautionnement a, le même jour, été signé par M. X.

Par la suite Mme Y. est devenue salariée de la société SSP gérée par M. X., de 2014 jusqu'à son licenciement au mois d'octobre 2016 intervenu après que la salariée a pris acte, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 6 avril précédent, qu'elle ne pouvait plus accéder à ses outils de travail. Dans le cadre d'un contentieux prud'homal, un accord transactionnel a été conclu le 13 mars 2017 prévoyant le versement par la société SSP de la somme de 55.000 euros, somme qui a fait l'objet d'une saisie conservatoire par M. X. entre les mains de la CARPA le 17 mars suivant.

Par deux courriers en date du 24 mars 2016, adressés à la société La clairvoyance respectivement par M. X. et son conseil, le premier afin de résilier le cautionnement qu'il avait donné et, le second, pour indiquer au bailleur que Mme Y. sous-louait son appartement sur le site internet Airbnb.

M. X. a fait établir un constat d'huissier du site internet Airbnb par procès-verbal en date du 26 février 2016.

Après avoir sollicité sur requête la désignation d'un huissier afin de procéder à diverses constatations sur l'occupation du logement loué à Mme Y. ainsi que sur les conditions d'occupation du logement sis [...] où résidaient les parents de Mme Y., et obtenu de l'huissier désigné un procès-verbal en date des 3, 17, 19 et 22 août 2016, la société La clairvoyance saisissait le tribunal d'instance du 2ème arrondissement de Paris afin d'obtenir, notamment, la résiliation du bail et l'expulsion de Mme Y. et la condamnation in solidum de celle-ci et de M. X. à lui verser diverses sommes à titre de dommages-intérêts ainsi qu'à titre d'arriérés locatifs.

M. X. a contesté la validité de son cautionnement ; Mme Y. a, pour sa part, contesté avoir sous-loué son appartement, et fait valoir qu'une partie de son plafond s'était effondrée au mois de mai 2017 et qu'elle subissait un préjudice de jouissance dont elle a demandé l'indemnisation.

Par jugement en date du 8 février 2018, le tribunal d'instance du 2ème arrondissement de Paris, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, a :

- Rejeté la demande de résiliation judiciaire du contrat de bail pour sous-location, et les demandes subséquentes,

- Rejeté en conséquence les demandes de dommages et intérêts,

- Condamné in solidum Mme Y. et M. X. au paiement d'une somme de 32.839,18 euros au titre de l'arriéré locatif, terme de décembre 2017 inclus,

- Dit que cette somme produira intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement,

- Rejeté la demande de suspension du versement des loyers,

- Autorisé Mme Y. et M. X. à se libérer de leur dette en 18 mensualités de 900 euros chacun, la dernière étant majorée du solde de la dette en principal, intérêts et frais,

- Dit que les mensualités seront exigibles le 5 de chaque mois à compter de la signification du jugement,

- Dit qu'en cas de défaut de paiement d'une échéance à sa date exacte, suivi d'une mise en demeure restée infructueuse durant quinze jours, l'échelonnement qui précède sera caduc et que la totalité des sommes dues deviendra immédiatement exigible,

- Rappelé que conformément à l'article 1244-2 du code civil, la présente décision suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier et que les majorations d'intérêts ou les pénalités encourues à raison du retard cessent d'être dues pendant le délai fixé par la présente décision,

- Avant dire droit sur la demande au titre d'un préjudice de jouissance et sur la demande de compensation, Ordonné une mesure d'expertise relative à la chute du plafond de l'appartement loué à Mme Y.,

- Réservé toute demande ainsi que les dépens.

La société La clairvoyance et M. X. ont successivement interjeté appel de ce jugement par déclarations en date des 28 mars et 4 avril 2018, procédures qui ont été jointes sous le numéro de répertoire général 18/6590.

[*]

Dans ses dernières conclusions en date du 2 mars 2020, la société La clairvoyance demande à la cour de :

- Infirmer le jugement entrepris uniquement en ce qu'il a rejeté la demande de résiliation du bail et ses conséquences,

En conséquence,

- Prononcer la résiliation du bail du 3 décembre 2012 aux torts et griefs de Mme Y.,

- Ordonner l'expulsion, sans délai, de Mme Y., ainsi que celle de tous occupants de son chef, des lieux qu'elle occupe à Paris [adresse], au 4ème étage, porte droite, si besoin avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier,

- Condamner Mme Y. à payer à la société La clairvoyance les sommes suivantes :

* 52.800 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la sous-location irrégulière des locaux

* 5.000 euros à titre de préjudice moral

* 3.500 euros par mois à titre d'indemnité d'occupation à compter du prononcé de la résiliation du bail jusqu'à la libération effective des lieux

* 6.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner Mme Y. en tous les dépens qui comprendront, outre le coût de la présente assignation, le coût du procès-verbal de constat établi par Maître Valérie G. les 3, 17, 19 et 22 août 2016, dont distraction pour ceux le concernant au profit de Maître François T., Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

[*]

M. X. dans ses dernières conclusions en date du 21 février 2020 sollicite de la cour qu'elle :

1/ À titre préliminaire :

- Infirme le jugement du tribunal d'instance du 2ème arrondissement de Paris en ce qu'il a rejeté la demande de résiliation judiciaire du contrat de bail pour sous-location,

- Prononce la résiliation du bail du 3 décembre 2012 aux torts et griefs de Mme Y., et

- Ordonne l'expulsion sans délai de Mme Y., ainsi que celle de tous occupants de son chef, des lieux qu'elle occupe à Paris [adresse], au 4ème étage, porte droite, si besoin avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier ;

2/ À titre principal :

- Constate le déséquilibre significatif entre les droits et obligations de la société La clairvoyance et de M. X. dans le cadre de l'engagement de caution, et

- Constate l'impossibilité pour la société La clairvoyance de se prévaloir de l'engagement de caution de M. X. du fait de sa disproportion manifeste ;

Et, en conséquence :

- Infirme le jugement rendu par le tribunal d'instance du 2ème arrondissement de Paris le 8 février 2018 en ce qu'il a condamné M. X. au paiement d'une somme de 32 839,18 euros au titre de l'arriéré locatif, terme de décembre 2017 inclus, et

- Juge que M. P. [la cour comprend qu'il s'agit d'une erreur matérielle et qu'il faut lire M. X.] n'est redevable d'aucune somme à l'égard de la société La clairvoyance ;

3/ À titre subsidiaire :

- Constate que la réparation du préjudice subi par le bailleur du fait d'une sous-location irrégulière du locataire n'entre pas dans le champ contractuel de l'engagement de caution régularisé par M. X., et

- Constate que la mention manuscrite régularisée par M. X., laquelle lui est seule opposable dans le cadre de son engagement de caution, ne prévoit pas le cautionnement des dommages et intérêts et clause pénale sollicités par la société La clairvoyance,

Et, en conséquence :

- Confirme le jugement du tribunal d'instance du 2ème arrondissement de Paris en ce qu'il a rejeté les demandes de dommages et intérêts dirigées à l'encontre de M. X., et

- Juge que M. X. n'est redevable à l'égard de la société La clairvoyance d'aucun dommages et intérêts au titre de la sous-location irrégulière des locaux, et du préjudice moral ;

4/ À titre très subsidiaire, si la cour devait juger valable l'engagement de caution de M. X. :

- Infirme le jugement du tribunal d'instance du 2ème arrondissement de Paris en ce qu'il a autorisé M. X. et Mme Y. à se libérer de leur dette en 18 mensualités de 900 euros chacun, la dernière étant majorée du solde de la dette en principal, intérêts et frais ; et

- Autorise M. X. à s'acquitter de la dette locative de Mme Y. envers La clairvoyance en 36 mensualités ;

5/ À titre reconventionnel, les demandes de M. X. à l'encontre de Mme Y. :

- Infirme le jugement du tribunal d'instance du 2ème arrondissement de Paris en ce qu'il a débouté M. X. de sa demande tendant à condamner Mme Y. au paiement de 55.440 euros au titre des loyers payés par M. X. au nom et pour le compte de Mme Y.,

- Condamne Mme Y. à rembourser à M. X. le montant des loyers versés pour son compte par M. X. au bailleur pour la période du 10 décembre 2012 au jugement de première instance intervenu le 8 février 2018, soit :

* A titre principal la somme de 55.440 euros,

* A titre subsidiaire la somme de 49.400 euros, et

* A titre très subsidiaire, la somme de 26.292,82 euros.

- Condamne Mme Y. au paiement de 17.100 euros à M. X. au titre des loyers payés par M. X. au nom et pour le compte de Mme Y. pour la période du 8 février 2018 à ce jour,

- Condamne en tout état de cause Mme Y. à relever indemne M. X. de toute condamnation prononcée à son encontre, et

- Condamne Mme Y. à payer à M. X. la somme de 5.000 euros en réparation du préjudice moral subi ;

Enfin, en tout état de cause :

- Condamne in solidum la société La clairvoyance et Mme Y. à payer à M. X. la somme de 7.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de premier instance et d'appel ;

[*]

Mme Y. demande quant à elle dans ses conclusions en date du 27 février 2020 à la cour de :

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- Dit et jugé que La clairvoyance ne rapporte pas la preuve d'une sous-location effective du logement,

En conséquence,

- Débouter La clairvoyance de sa demande au titre d'une prétendue sous-location, laquelle repose exclusivement sur la dénonciation calomnieuse de M. X.,

- Dire et juger que M. X. n'a pas été appelé en garantie avant la présente affaire et qu'il ne rapporte pas la preuve d'avoir payé des loyers de Mme Y. qui ne constitueraient une partie des salaires dues à Mme Y.

- Débouter M. X. de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

Statuant à nouveau :

A titre principal,

- Dire et juger la demande de M. X. prescrite,

- Donner acte à Mme Y. de ce qu'elle a repris le paiement des loyers depuis le mois d'août 2017 et a apuré sa dette locative,

- Dire et juger que le bailleur doit indemniser le locataire au titre de la privation de jouissance du logement et des préjudices matériels et moraux subis et ce depuis le mois de mai 2017 jusqu'à ce que le logement soit remis en état,

A titre, subsidiaire et si par impossible la cour devait estimer que Mme Y. reste débitrice pour quelque raison que ce soit,

- Ordonner un sursis à statuer dans l'attente que la créance de Mme Y. ait été fixée par le tribunal de manière à pouvoir exercer la compensation.

En tout état de cause,

- Débouter La clairvoyance de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions.

- Dire et juger qu'en raison de la faute civile commise par M. X., ce dernier ne peut pas réclamer à Mme Y. sa moitié de l'apurement de la dette locative, dont il est seul à l'origine.

- Débouter M. X. de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

- Dire et juger que la malveillance de M. X. à l'encontre de Mme Y. est démontrée (non-paiement des salaires, dénonciation calomnieuse, saisie de l'indemnité transactionnelle, etc.).

En conséquence,

- Condamner M. X. à payer à Mme Y. la somme de 25.000 euros à titre de dommages-intérêts,

- Condamner M. X. à lui payer la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux autres entiers dépens de première instance et d'appel.

[*]

L'ordonnance de clôture est en date du 3 mars 2020.

A l'audience du 17 mars 2020, un renvoi a été ordonné à celle du 8 septembre 2020 ; à cette dernière audience, il a été indiqué que l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe le 10 novembre suivant.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE,

Sur la demande de résiliation du bail :

Considérant qu'à l'appui de son appel, la société La clairvoyance rappelle que le contrat de bail prévoyait l'interdiction de sous-louer le logement objet de ce contrat et se fonde sur les constats d'huissier dressés les 26 février et 3, 17, 19 et 22 août 2016, évoquant les refus qui lui ont été opposés par les sociétés Airbnb France et Airbnb Ireland UC à ses demandes d'information du nombre de locations de ce local, ainsi que sur le refus par le conseiller de la mise en état de délivrer une ordonnance de communication de pièces par un tiers ;

Considérant que ces constats d'huissier établissent que Mme Y. a mis ce logement en location sur le site internet Airbnb, ce que celle-ci ne conteste pas, reconnaissant qu'elle avait d'importantes difficultés financières dues aux problèmes qu'elle rencontrait avec son employeur, la société SPP gérée par M. X., qui avait cessé de lui verser une partie de son salaire ; mais elle conteste avoir réalisé des locations, ce que effectivement les documents produits n'établissent pas ;

Que si le tribunal a admis l'existence d'une réservation pour la période du 21 au 31 mars 2016, au vu du procès-verbal en date du 26 février 2016, lequel constate que l'appartement n'est pas disponible durant cette période, cette indisponibilité à la location n'établit pas qu'elle résulte d'une réservation ; qu'en toute hypothèse, comme l'a retenu le premier juge, cette seule sous-location n'est pas d'une gravité suffisante pour justifier la résiliation du bail ;

Qu'en outre, le procès-verbal réalisé au mois d'août 2016 n'établit nullement que ce logement serait destiné à la sous-location, l'huissier n'y ayant rencontré aucun occupant malgré la période estivale favorable aux locations de courte durée, mais a, en revanche, constaté la présence de vêtements féminins dans le dressing et de papiers personnels (p. 7 et 8 du constat), contrairement à ce qui est affirmé dans le « compte rendu » dudit procès-verbal (p. 15) ; que Mme Y. produit, par ailleurs, l'attestation de son voisin par laquelle celui-ci indique ne pas avoir rencontré d'autres personnes qu'elle se rendre dans l'appartement dont il s'agit (pièce n°9) ;

Qu'enfin l'allégation, surabondante, formulée par M. X. selon laquelle Mme Y. disposerait d'un autre domicile qui constituerait sa résidence principale, rue de Z., n'est pas fondée, ce domicile étant celui de ses parents où elle a pu laisser des affaires personnelles et où elle a pu légitimement séjourner lorsqu'elle était malade ; que le gardien de cet immeuble confirme que dans ses questions, l'huissier a évoqué « Mme Y. » et non « Melle X. » non plus que « Melle Y S. », raison pour laquelle il lui a déclaré que Mme Y. habitait bien à cette adresse ( pièce n°8) ;

Considérant en conséquence, que le jugement, en ce qu'il a rejeté la demande de résiliation du bail, ainsi que les conséquences qui en étaient tirées par la société bailleresse sera confirmé ; que cette dernière sera donc déboutée de ses demandes de dommages-intérêts et tendant à la condamnation de Mme Y. à verser une indemnité d'occupation ;

Considérant par ailleurs, que la société bailleresse confirme que Mme Y. a apuré l'arriéré de loyers qu'elle avait été condamnée à lui verser par le premier juge, de sorte que l'ensemble des demandes de la société La clairvoyance sera rejeté ;

 

Sur les demandes de M. X. relatives à l'étendue de son cautionnement :

Considérant que celui-ci fait valoir que la stipulation de son engagement de caution pour une durée de vingt ans auprès d'un loueur professionnel doit être considérée comme abusive du fait du déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au sens de l'article L. 212-1 du code de la consommation ; qu'il en déduit que cette clause doit être réputée non écrite en application de l'article L 241-1 dudit code et que, par conséquent, il s'est valablement libéré de cet engagement par sa lettre recommandée avec accusé de réception du 24 mars 2018 ;

Considérant cependant que si, comme l'a relevé le premier juge par des motifs qui ne sont pas contestés, ces textes du code de la consommation trouvent également application à un acte de cautionnement lié à un contrat de bail, M. X. ne justifie pas d'un déséquilibre significatif au jour de la conclusion du contrat, se bornant à faire valoir qu'il est actuellement retraité sans d'ailleurs justifier de ses revenus ; qu'en outre, il prétend à tort que cet engagement l'obligerait à verser une somme de 633.600 euros en multipliant le montant du loyer sur dix années, ce qui est un calcul purement hypothétique sans lien avec la réalité de son engagement ;

Qu'ainsi, et comme l'a jugé le tribunal d'instance cette durée de vingt ans ne constitue pas une clause abusive, faute pour M. X. de justifier du déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties qu'il allègue ;

Considérant que la demande de M. X. tendant à l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a condamné solidairement avec Mme Y. à régler à la société bailleresse la somme de 32.839,18 euros sera rejetée et le jugement confirmé de ce chef ;

Qu'il sera par ailleurs observé que l'arriéré locatif a été entièrement réglé, comme en convient la bailleresse, de sorte que la demande de délai de payement est sans objet ;

Que sont également sans objet les demandes relatives au rejet de la condamnation à régler des dommages-intérêts à la bailleresse au titre de la sous-location irrégulière des locaux et du préjudice moral alors, de surcroît, que ces demandes ne sont pas dirigées contre M. X. ;

 

Sur les demandes de M. X. à l'encontre de Mme Y. :

Considérant que M. X. sollicite l'infirmation du jugement entrepris qui l'a débouté de sa demande de remboursement des sommes qu'il a versées à la société bailleresse « sur la période du 10 décembre 2012 jusqu'au jugement de première instance intervenu le 8 février 2018 », au motif que sa demande n'est ni fondée ni justifiée, aucun élément ne venant contredire que ces sommes constituaient une compensation des salaires dus ; qu'il demande à ce titre, principalement la somme de 55.440 euros, subsidiairement celle de 49.400 euros, plus subsidiairement celle de 26.992 euros ;

Qu'à l'appui de cette demande il fait valoir que le tribunal d'instance aurait excédé sa compétence en statuant sur la qualification de ces versements au regard de la compétence exclusive du conseil des prud'hommes pour apprécier les différends relatifs à un contrat de travail et aurait inversé la charge de la preuve ;

Considérant que Mme Y. invoque la prescription de ces demandes au visa de l'article 2224 du code civil faute pour celles-ci d'être détaillées, et confirme que les versements faits étaient bien des compléments de salaires comme elle en justifie ;

Considérant quant au moyen pris de la prescription quinquennale alléguée par Mme Y., qu'il résulte du jugement entrepris que la demande de M. X. a été formée à l'audience de plaidoiries du 14 décembre 2017 ; que les demandes relatives à des payements antérieurs au 14 décembre 2012 sont effectivement prescrites, mais non celles postérieures à cette date ;

Considérant qu'il apparaît de la pièce numéro 4 versée aux débats par M. X. qu'il a régulièrement effectué des payements de l'ordre de 2.500 euros, soit directement à Mme Y., soit à la bailleresse, du mois de février 2014 au mois de décembre 2015, deux de ces chèques ayant été tirés par M. X. sur le compte d'une société K., période qui correspond à celle au cours de laquelle Mme Y. a travaillé pour la société SSP ; que les échanges de messages entre Mme Y. et M. X. ne laissent guère de doute sur la nature de ces versements comme des compléments de salaire ;

Qu'en toute hypothèse, et comme l'a justement décidé le premier juge, M. X. étant demandeur sur ce point, il lui appartient de rapporter la preuve que ces versements étaient faits à titre de caution ou de prêt, ce qu'il ne démontre nullement, de sorte que c'est à bon droit et par des motifs pertinents que le premier juge, sans avoir renversé la charge de la preuve ni excédé ses compétences, a débouté M. X. de ses demandes principales et subsidiaires ;

Qu'enfin, le préjudice moral invoqué par M. X. n'est pas plus démontré que la faute qu'il impute à Mme Y., la solution retenue par la cour contredisant ses allégations sur ce point de sorte que cette demande sera également rejetée ;

Considérant qu'il en va différemment s'agissant des demandes de remboursement des sommes versées par M. X. à la société bailleresse en exécution du jugement entrepris qui ont été effectivement versées en qualité de caution ; que Mme Y., qui sollicite par ailleurs l'indemnisation du préjudice résultant du comportement fautif de M. X., ne peut utilement se prévaloir de ce même comportement pour ne pas respecter ses obligations à l'égard de la caution, sera donc condamnée à lui verser la somme de 17.100 euros, montant qui n'est pas contesté et est justifié par le décompte établi par la bailleresse (pièce n°24 de Mme Y.) ;

 

Sur les demandes de Mme Y. :

Considérant que Mme Y. sollicite la condamnation de M. X. à lui verser la somme de 25.000 euros en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait des manœuvres pour échapper à ses obligations de caution en faisant une dénonciation calomnieuse auprès de son bailleur, en la privant parallèlement de ressources en ne lui réglant pas son salaire, puis en faisant procéder à une saisie conservatoire de la somme versée au titre de la rupture de son contrat de travail, saisie conservatoire qui a fait obstacle à sa possibilité de régler immédiatement son arriéré locatif ;

Considérant que ce comportement empreint de déloyauté dans l'intention de nuire à Mme Y. dans l'unique objectif que son bail soit résilié et son expulsion prononcée afin que M. X. soit, par conséquent, déchargé du cautionnement auquel il s'était engagé a, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal d'instance, causé un préjudice autre que celui qui peut être réparé au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'en effet, outre que Mme Y. a elle-même été condamnée à verser à M. X. une somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile lorsqu'elle a, vainement, sollicité du juge de l'exécution la mainlevée de la saisie conservatoire sur la somme indemnisant les conditions de la rupture de son contrat de travail (pièce n°6), ces manœuvres ont incontestablement perturbé et affecté la vie de Mme Y. au-delà des frais irrépétibles qu'elle a dû exposer ;

Considérant que le jugement sera infirmé de ce chef et il sera fait droit à la demande de Mme Y. à hauteur de la somme de 10.000 euros ;

Considérant enfin que Mme Y. sollicite de la cour qu'elle dise et juge que le bailleur doit indemniser son préjudice de jouissance et ses préjudices matériels et moraux subis depuis le mois de mai 2017 jusqu'à ce que le logement soit remis en état ;

Considérant cependant que l'article 568 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable à la cause - les appels ayant été formés après le 1er septembre 2017-, ne permet à la cour d'évoquer les points non tranchés par le premier juge ayant ordonné une mesure d'instruction que dans les cas où elle infirme ou annule le jugement ; qu'en outre la cour n'est pas saisie des conséquences des désordres du logement de Mme Y. par les appels formés par la bailleresse et M. X. et, que, enfin, elle ne saurait être saisie par une demande de jugement formulée en des termes abstraits et non chiffrés ;

Que la cour ne s'estime donc pas saisie de cette demande, sur laquelle Mme Y. indique elle-même que le premier juge devait statuer à une audience prévue le 11 juin 2020 ;

 

Sur les mesures accessoires :

Considérant que les appelants qui succombent principalement en leurs appels seront condamnés aux dépens d'appel et déboutés de leurs demandes respectives fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ;

Que des considérations tenant à l'équité conduisent à condamner M. X. à verser à Mme Y. la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, aucune demande de ce chef n'étant formulée à l'encontre de la société La clairvoyance ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Statuant dans les limites de sa saisine :

- Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a rejeté la demande de dommages-intérêts formée par Mme Y. à l'encontre de M. X.,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- Condamne M. X. à verser à Mme Y. la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts,

- Condamne Mme Y. à verser à M. X. la somme de 17/100 euros en remboursement des sommes versées à la société La clairvoyance entre le 8 février 2018 et le 31 juillet 2019,

- Déclare prescrites les demandes de M. X. portant sur des sommes versées antérieurement au 14 décembre 2012,

- Constate que la dette locative de Mme Y. était à la date du 31 juillet 2019 entièrement réglée,

- Rejette le surplus des demandes plus amples ou contraires,

- Condamne M. X. à verser à Mme Y. la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne in solidum la société La clairvoyance et M. X. aux dépens d'appel.

Le greffier,                            Le président,