CA PARIS (pôle 5 ch. 10), 7 décembre 2020
CERCLAB - DOCUMENT N° 8698
CA PARIS (pôle 5 ch. 10), 7 décembre 2020 : RG n° 19/12215
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « M. Y. demande à bénéficier des dispositions protectrices du code de la consommation, mais au regard du procès-verbal de réception comportant le tampon du restaurant Le M., il est indéniable que le système de vidéo-surveillance était destiné à la sécurité du restaurant qu'il exploitait. Il ne peut donc se prévaloir des dispositions du code précité dès lors que le contrat de location a été clairement souscrit pour les besoins de son activité professionnelle. »
2/ « Ces dispositions qui s'inscrivent dans le chapitre des pratiques restrictives de concurrence et concernant des contrats de distribution ne s'appliquent pas au contrat de location financière et imposent en outre la réunion de trois critères : le partenariat commercial, une pratique de soumission et un déséquilibre significatif. En l'espèce, le contrat de location financière souscrit par M. Y. ne répond à aucun des critères exigés.
La société Locam n'est pas le partenaire commercial de M. Y., au sens de l'article précité, mais un bailleur qui finance le matériel choisi par le client, destiné à permettre l'activité professionnelle de celui-ci, moyennant en contrepartie le versement de loyers sur une durée déterminée. Les parties n'entretiennent aucunement des relations commerciales paritaires et suivies en vue de développer des projets communs.
Le cadre contractuel liant les parties définit les droits et obligations des parties et en particulier, les obligations relatives au financement du matériel par le bailleur et les modalités de remboursement par le locataire. Ces dispositions ne contiennent pas de manœuvres de soumission de la société Locam qui par ailleurs n'était pas l'interlocuteur de M. Y.
La clause de résiliation et les pénalités prévues au contrat ne constituent pas davantage un déséquilibre significatif mais répondent a contrario à l'économie générale de l'opération. En l'espèce, le non-paiement des loyers échus par M. Y. a déclenché la résiliation du contrat et ses conséquences. Il s'en déduit que la demande de réputer non écrite la clause n° 12 du contrat n'est pas recevable. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 5 CHAMBRE 10
ARRÊT DU 7 DÉCEMBRE 2020
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 19/12215 (9 pages). N° Portalis 35L7-V-B7D-CAEN5. Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 mai 2019 - Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2019000197.
APPELANTE :
Madame X.
Domiciliée [...], [...], née le [date] à [ville], Représentée par Maître Amandine L. de l'AARPI F. AVOCATS, avocat au barreau de PARIS (bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2019/XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
INTIMÉS :
Monsieur Y.
Domicilié [...], [...], né le [date] à [ville], N° SIRET : YYY, Représenté par Maître Samira C. de la SELARL SAMIRA C.-G. AVOCAT, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : C1500 (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro YYY du 18/09/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
SAS LOCAM LOCATION AUTOMOBILES MATÉRIELS
Ayant son siège social [adresses], [...], N° SIRET : XXX, Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Guillaume M. de la SELARL ABM DROIT ET CONSEIL AVOCATS E.B. & M., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC430
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 26 octobre 2020, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur Edouard LOOS, Conseiller, Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère, Monsieur Stanislas de CHERGÉ, Conseiller, qui en ont délibéré. Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Sylvie CASTERMANS dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffière, lors des débats : Mme Cyrielle BURBAN
ARRÊT : - contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par M. Edouard LOOS, Président et par Mme Cyrielle BURBAN, Greffière à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
La société Locam est une société par actions simplifiée spécialisée dans le crédit-bail.
Par acte sous seing privé du 25 avril 2014, M. Y. a mandaté la société Viatelease (étrangère à la cause) afin de conclure avec tout établissement financier un contrat de financement pour un matériel de vidéosurveillance Hexatis. Celui-ci a été réceptionné sans réserve le 29 avril 2014.
Le contrat, d'une durée de 63 mois avec un loyer de 250 euros HT, a été cédé le 2 mai 2014 par la société Viatelease à la société Locam.
M. Y. a cessé de régler à la société Locam le montant du loyer à compter de l'échéance du 20 mai 2015. Les époux Y. se sont séparés le 25 juin 2015. M. Y. a procédé à la radiation de son inscription au registre du commerce et des sociétés le 8 juillet 2015. Le divorce de M. Y. et de Mme X. a été prononcé devant le tribunal de grande instance d'Épinal le 15 juin 2018.
Mme X., épouse Y., a repris l'exploitation du restaurant et procédé à l'inscription de son activité au registre du commerce et des sociétés le 25 août 2015. Le 12 mars 2016, le fonds de commerce du restaurant a été cédé à la société Namm.
Les loyers demeurant impayés, la société Locam a adressé une lettre en date de 25 mai 2016 l'invitant à régulariser le contrat sous peine de résiliation.
Par acte d'huissier du 5 septembre 2016, la société Locam a assigné M. Y. devant le tribunal de commerce de Paris.
Par acte extrajudiciaire du 4 janvier 2018, M. Y. a assigné en intervention forcée Mme X. devant le tribunal de commerce de Paris.
Par jugement rendu le 13 mai 2019, le tribunal de commerce de Paris a :
- joint les causes numéro RG 2016053480 et RG 2018002614 sous le seul et même numéro RG J2019000197 ;
- débouté M. Y. de sa demande d'inopposabilité à son égard du contrat avec la Sas Locam -Location Automobiles Matériels ;
- débouté M. Y. de sa demande d'inopposabilité à son égard des conditions générales de vente du contrat avec la Sas Locam - Location Automobiles Matériels ;
- débouté M. Y. de sa demande portant sur un déséquilibre du contrat avec la Sas Locam -Location Automobiles Matériels ;
- débouté M. Y. de sa demande de surseoir à statuer ;
- débouté M. Y. de sa demande de dommages intérêts à hauteur de 19.000 euros ;
- condamné M. Y. à payer à la Sas Locam - Location Automobiles Matériels la somme de 3.600 euros TTC au titre des loyers échus avec intérêts égal au taux appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage, ce à compter de la date d'échéance de la mise en demeure soit le 26 mai 2016 ;
- condamné M. Y. à verser à la Sas Locam - Location Automobiles Matériels la somme de 10.070 euros à titre d'indemnité de résiliation et de pénalité avec intérêts égal au taux appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage, ce à compter de la date d'échéance de la mise en demeure soit le 26 mai 2016 ;
- ordonné la capitalisation des intérêts précités sur les loyers échus, l'indemnité de résiliation et la pénalité ;
- condamné Mme X. à verser à la Sas Locam - Location Automobiles Matériels pour le compte de M. Y. la somme de 12.070 euros avec intérêts égal au taux appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage, ce à compter de la date d'échéance de la mise en demeure soit le 26 mai 2016, et ordonné la capitalisation des intérêts précités sur les montants ainsi dus ;
- débouté la Sas Locam - Location Automobiles Matériels de sa demande de dommages et intérêts en réparation de son préjudice au titre de la perte du matériel ;
- condamné M. Y. et Mme X. au titre de l'article 700 du code de procédure civile à payer respectivement à la Sas Locam - Location Automobiles Matériels la somme de 1.000 euros ;
- débouté les parties de leurs demandes autres plus amples ou contraires ;
- ordonné l'exécution provisoire sans constitution de garantie ;
- condamné à parts égales M. Y. et Mme X. aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 133,20 euros dont 21,99 euros de TVA.
Par déclaration du 14 juin 2019, Mme X. a interjeté appel de ce jugement.
Par conclusions signifiées le 22 janvier 2020, Mme X. demande à la cour de :
Vu les articles 1134 ancien et suivants, 1104 nouveau et suivants, 1271 et suivants anciens devenus 1329 et suivants, 1413 et suivants, 1483 et suivants du code civil
- déclarer l'appel formé par Mme X. à l'encontre du jugement rendu le 13 mai 2019 par le tribunal de commerce de Paris recevable et bien-fondé ;
- infirmer rendu le 13 mai 2019 par le tribunal de commerce de Paris en toutes ses dispositions et statuant à nouveau ;
A titre principal,
- dire et juger M. Y. mal fondé en toutes ses demandes à l'encontre de Mme X. ;
en conséquence,
- débouter M. Y. de l'ensemble de ses demandes à son encontre ;
A titre subsidiaire,
- dire et juger mal fondée la société Locam de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, à l'encontre de M. Y. ;
en conséquence, débouter la société Locam ou toute autre partie de toutes ses demandes, fins et conclusions formulées à l'encontre de Mme X.
- condamner M. Y. ou toute autre partie succombante, à verser à Mme X. une somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, moyennant renonciation à percevoir le montant de l'aide juridictionnelle le cas échéant, ainsi qu'aux entiers dépens, qui pourront être recouvrés par Maître Amandine L., avocat au Barreau de Paris, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
[*]
Par conclusions signifiées le 29 octobre 2019, M. Y. demande à la cour de :
- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. Y. de toutes ses demandes formulées à l'encontre de la société Locam ;
A titre principal,
- dire que M. Y. peut se prévaloir des dispositions code de la consommation en sa qualité de non professionnel ;
- à défaut, dire l'article 442-6 du code de commerce applicable en l'espèce ;
- constater le caractère déséquilibre l'article 12 du contrat litigieux ;
En tout état de cause,
- réputer non écrite la clause n° 12 du contrat litigieux ;
A titre subsidiaire,
- qualifier de clause litigieuse de clause pénale eu égard à sa finalité de contrainte à l'exécution ;
- constater que la société Locam n'apporte la preuve d'aucun préjudice imputable à l'inexécution du contrat par M. Y. ;
Par conséquence,
- constater le caractère excessif de la clause pénale ;
- exonérer totalement M. Y. de la clause pénale ;
A titre infiniment subsidiaire,
- confirmer le jugement en ce qu'il a accueillie l'intervention en garantie de Mme X. et condamner solidairement cette dernière aux condamnation prononcée à l'encontre de M. Y. ;
- constater que M. Y. n'exploitait plus le fonds à partir du mois de juillet 2015 ;
- constater que seule Mme X. exploitait le fonds à parti du mois de juillet 2015 ;
- dire que seule Mme X. sera redevable des loyers antérieurs à la date de résiliation du contrat litigieux ;
- condamner Mme X. à relever et garantir M. Y. de toute condamnation qui pourrait être prononcée contre lui en principal, intérêt et tout type de frais ;
En tout état de cause,
- débouter la société Locam de toutes ses demandes envers M. Y. ;
- confirmer que la société Locam devra récupérer le matériel entre les mains de la société Naam ;
- condamner la société Locam à payer la somme de 4.000 euros à Maître C. au titre de l'article 700 du code de procédure civile moyennant renonciation à percevoir le montant de l'aide juridictionnelle ;
- condamner Mme X. à payer la somme de 1.500 euros à Maître C. au titre de l'article 700 du code de procédure civile moyennant renonciation à percevoir le montant de l'aide juridictionnelle ;
- condamner la société Locam aux entiers dépens.
Par conclusions signifiées le 4 décembre 2019, la société Locam demande à la cour de :
Vu les articles 1134 et suivants du code civil, les dispositions du code de la consommation, les articles L. 440-1 et L. 442-6 du code de commerce
- dire et juger la société Locam recevable et bien fondée en toutes ses demandes ;
- au contraire, dire et juger M. Y. et Mme X. mal fondés en toutes leurs demandes ;
En conséquence,
- les en débouter ;
- confirmer le jugement déféré, et y ajoutant ;
- condamner M. Y. et Mme X. à payer à la société Locam la somme de 4.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner M. Y. et Mme X. aux entiers dépens de la présente instance.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE,
Sur l'effet relatif du contrat et la novation :
Mme X. fait valoir, sur le fondement des articles 1119 ancien (1203 nouveau) et 1271 ancien (1329 et suivants nouveaux), que le contrat de location lui est inopposable au motif, qu'elle n'est pas partie au contrat et que la reprise de l'exploitation ne vaut pas novation du contrat de location à son égard, la société Locam n'ayant pas donné son accord pour le transfert du contrat de location. Elle ajoute, au visa des articles 1413, 1414, 1415 et 1418 du code civil, qu'étant mariés sous le régime de la communauté légale, elle ne saurait être tenue solidairement des dettes contractées par M. Y. dans le cadre de son activité professionnelle.
M. Y. répond qu'étant mariés sous le régime de la communauté légale, ils sont conjointement tenus des dettes. Au surplus, il soutient, au visa de l'article 1409 du code civil, que Mme X. reste redevable solidairement de la dette afférant au contrat de location au motif que celle-ci est née pendant la vie commune.
La société Locam fait valoir que le contrat de location a été souscrit par M. Y. seul en sa qualité d'exploitant du restaurant Le M. et qu'elle n'a jamais marqué son accord à un transfert du contrat, que ce soit à Mme X. ou à la société Namm, acquéreur du fonds de commerce in fine.
Ceci étant exposé,
Il est établi que le contrat de location a été souscrit par M. Y., en sa qualité d'exploitant du restaurant Le M., le 25 avril 2014 puis cédé le 2 mai 2014 par la société Viatelease à la société Locam et que la société Locam n'a jamais donné son accord à un transfert du contrat au profit d'un cessionnaire quelconque, dès lors, Mme X. étant tiers au contrat, est fondée à solliciter la réformation du jugement en ce qu'elle a été condamnée à payer à la société Locam la somme de 12.070 € en garantie des condamnations prononcées à l'encontre de M. Y.
Sur la qualité de non professionnel :
M. Y. fait valoir qu'il a agi en qualité de non professionnel, que le bien est en dehors de sa sphère de compétence professionnelle, et bénéficie de la protection des dispositions du code de la consommation. Au surplus, il soutient, au visa des articles L. 111-1 du code de la consommation et 1316-4 du code civil, que les conditions générales de vente lui sont inopposables au motif, qu'elles sont écrites en caractères illisibles et qu'il n'en a pas pris connaissance avant la conclusion du contrat.
La société Locam réplique, au visa de l'article préliminaire et de L. 121-16-1 du code de la consommation, que M. Y. ne peut se prévaloir des dispositions du code précité au motif qu'il a agi en tant que professionnel en souscrivant le contrat à des fins entrant dans le cadre de son activité commerciale.
Ceci étant exposé,
Il convient à titre liminaire d'écarter toutes les demandes de Mme X. reposant sur le contrat de location comme étant irrecevables, puisque le contrat de location ne lui est pas opposable en sa qualité de tiers.
M. Y. demande à bénéficier des dispositions protectrices du code de la consommation, mais au regard du procès-verbal de réception comportant le tampon du restaurant Le M., il est indéniable que le système de vidéo-surveillance était destiné à la sécurité du restaurant qu'il exploitait. Il ne peut donc se prévaloir des dispositions du code précité dès lors que le contrat de location a été clairement souscrit pour les besoins de son activité professionnelle.
Sur le déséquilibre significatif des conditions générales de vente :
M. Y. fait valoir, sur le fondement de l'article L. 132-1 du code de la consommation, que l'article 12 du contrat litigieux, lequel constitue un contrat d'adhésion, est une clause abusive en ce qu'elle crée un déséquilibre significatif entre les parties en mettant à sa charge des conséquences excessives en cas de résiliation, sans prévoir de réciprocité en cas de résiliation.
A titre subsidiaire, M. Y. soutient au visa de l'article 442-6 du code de commerce, que l'article 12 du contrat crée un déséquilibre significatif en raison d'une absence manifeste de réciprocité entre les parties au détriment de M. Y.
La société Locam réplique que l'article L. 442-6 du code de commerce n'est pas applicable au motif que ses trois conditions cumulatives, soit l'existence d'un partenariat commercial, d'une man'uvre de soumission ou de tentative de soumission et de déséquilibre significatif, font défaut.
Ceci étant exposé,
Les dispositions du code de la consommation n'étant pas applicables à M. Y. en l'espèce, il n'y a pas lieu de répondre aux moyens s'y rattachant.
Aux termes de l'article L. 442-6 du code de commerce :
I - Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers :
[…]
1° d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondent à aucun service commercial manifestement disproportionné
2° De soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ;
Ces dispositions qui s'inscrivent dans le chapitre des pratiques restrictives de concurrence et concernant des contrats de distribution ne s'appliquent pas au contrat de location financière et imposent en outre la réunion de trois critères : le partenariat commercial, une pratique de soumission et un déséquilibre significatif. En l'espèce, le contrat de location financière souscrit par M. Y. ne répond à aucun des critères exigés.
La société Locam n'est pas le partenaire commercial de M. Y., au sens de l'article précité, mais un bailleur qui finance le matériel choisi par le client, destiné à permettre l'activité professionnelle de celui-ci, moyennant en contrepartie le versement de loyers sur une durée déterminée. Les parties n'entretiennent aucunement des relations commerciales paritaires et suivies en vue de développer des projets communs.
Le cadre contractuel liant les parties définit les droits et obligations des parties et en particulier, les obligations relatives au financement du matériel par le bailleur et les modalités de remboursement par le locataire. Ces dispositions ne contiennent pas de manœuvres de soumission de la société Locam qui par ailleurs n'était pas l'interlocuteur de M. Y.
La clause de résiliation et les pénalités prévues au contrat ne constituent pas davantage un déséquilibre significatif mais répondent a contrario à l'économie générale de l'opération. En l'espèce, le non-paiement des loyers échus par M. Y. a déclenché la résiliation du contrat et ses conséquences. Il s'en déduit que la demande de réputer non écrite la clause n° 12 du contrat n'est pas recevable.
Sur la clause pénale :
M. Y. fait valoir, que l'article 12 du contrat litigieux constitue une clause pénale manifestement excessive eu égard à l'économie du contrat et à la situation professionnelle et personnelle de M. Y. Il ajoute que la société Locam ne justifie d'aucun préjudice et sollicite de ramener le montant du paiement à de plus juste proportion. Il ajoute que seule Mme X. est débitrice des loyers échus au motif qu'elle a repris l'exploitation du fonds à compter du mois d'août 2015.
La société Locam réplique qu'il n'appartient au juge que de modérer la clause pénale et non de la faire disparaître. Au surplus, elle ajoute que réduire l'indemnité reviendrait à lui faire supporter une perte financière infondée, celle-ci n'ayant commis aucune faute.
Ceci étant exposé,
Le contrat de location a été résilié le 26 mai 2016. A cette date, il restait 38 loyers à échoir, le montant des loyers étant de 250 euros, l'indemnité de résiliation s'élève à 9.500 euros ht.
Les sommes réclamées au titre de l'article 12-3 du contrat, correspondent à une clause pénale puisqu'elles tendent à sanctionner l'inexécution du contrat et peuvent dans ces conditions être réduites conformément aux dispositions de l'article 1152 ancien du code civil.
Il y a lieu de rappeler qu'en l'espèce la société Locam a acquis le matériel objet du contrat de location auprès de la société Viatelease, au mois de mai 2014, pour un montant de 15.682,20 euros ttc.
M. Y. devait régler 63 loyers de 300 euros soit un total de 15 750 euros ht, la marge brute de la société Locam étant de 3.217,80 euros, or à la date de résiliation du contrat le 26 mai 2016 M. Y. n'avait réglé que 10 loyers.
Dans ces conditions, l'indemnité due au titre la clause ne constitue pas un enrichissement injuste mais indemnise la perte subie par la société Locam, qui n'a commis aucune faute. Par conséquent, c'est à bon droit que le tribunal a jugé que la majoration de 6 % appliqués aux loyers à courir n'était pas excessive.
Il convient de confirmer le montant de la condamnation à la somme de 10.070 euros au titre de l'indemnité de résiliation majorée de la pénalité et des intérêts à courir.
Sur la restitution du matériel :
M. Y. fait valoir, au visa de l'article L. 131-1 du code civil d'exécution, qu'il lui est impossible de restituer le matériel, en ce qu'il se trouve dans le restaurant et fonds de commerce cédés à la société Namm. Il ajoute, au visa de l'article 16 du contrat, que la désinstallation incombe à la société Locam.
La société Locam n'a pas conclu sur ce moyen.
Ceci étant exposé,
Ainsi que l'a jugé le tribunal, il résulte des dispositions de l'article 16 du contrat, que la désinstallation du matériel incombe à la société Locam, laquelle n'a pas justifié d'un empêchement pour récupérer le matériel. Il convient donc de confirmer le rejet de la demande de ce chef.
Sur l'appel en garantie formé par M. Y. contre Mme X. :
Il résulte des développements précédents que le contrat de location a été résilié le 26 mai 2016, que M. Y. justifie de sa radiation au registre du commerce en juillet 2015 ; que Mme X. a repris l'exploitation du restaurant le M. et a été immatriculée au RCS en août 2015, que le fonds a été cédé le 12 mars 2016. Dans ce contexte, M. Y. est donc en droit d'agir en garantie à l'encontre de Mme X.
Ainsi que l'a jugé le tribunal, celle-ci est redevable des loyers échus et postérieurs à la date du 25 août 2015. Les époux ayant divorcé postérieurement, la dette afférant au contrat de location, pour le compte du fonds de commerce est née pendant la vie commune. Par conséquent, Mme X. reste redevable solidairement de cette dette.
En conséquence, Mme X. sera redevable de 8 loyers impayés et de la moitié l'indemnité de résiliation majorée, soit la somme de (2.000 + 10.700 /2) = 7.350 euros.
Ainsi, Mme X. sera condamnée à garantir la condamnation de M. Y. à hauteur des montants précités avec intérêts égal au taux appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage, à compter de la date d'échéance de la mise en demeure soit le 26 mai 2016, et ordonné la capitalisation des intérêts précités sur les montants dus.
M. Y. et Mme X., parties perdantes, au sens de l'article 696 du code de procédure civile, seront tenus de supporter par moitié chacun la charge des entiers dépens
Il paraît équitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles exposés en appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour,
INFIRME le jugement déféré en ce qu'il condamne Mme X. à payer à la société Locam la somme de 12.070 euros en garantie des condamnations prononcées à l'encontre de M. Y. ;
Statuant à nouveau,
DÉCLARE irrecevables les prétentions de Mme X. se rattachant au contrat de location financière.
CONDAMNE Mme X. à garantir M. Y. à hauteur de la somme de 7.350 euros avec intérêts égal au taux appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage, à compter de la date d'échéance de la mise en demeure soit le 26.05.2016, et ordonne la capitalisation des intérêts précités sur les montants ainsi dus ;
CONFIRME le jugement pour le surplus ;
REJETTE les autres demandes ;
CONDAMNE M. Y. et Mme X. au partage par moitié des entiers dépens.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT
C. BURBAN E. LOOS
- 5889 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Contrats conclus hors établissement ou à distance (après la loi du 17 mars 2014 - art. L. 221-3 C. consom.)
- 5953 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Protection de l’entreprise - Alarmes et surveillance : présentation générale
- 6169 - Code de commerce (L. 442-6-I-2° C. com. ancien) - Domaine de la protection - Victime : partenaire commercial
- 6183 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Indices - Déséquilibre injustifié - Nature et économie du contrat
- 6212 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Présentation par contrat - Locations financières sans option d’achat