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CA BASSE-TERRE (1re ch. civ.), 28 janvier 2021

Nature : Décision
Titre : CA BASSE-TERRE (1re ch. civ.), 28 janvier 2021
Pays : France
Juridiction : Basse-Terre (CA), 1re ch.
Demande : 19/00379
Date : 28/01/2021
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 28/03/2019
Référence bibliographique : 6629 (prêt affecté, subrogation et clause de réserve), 5742 (effet, suppression d’une clause de subrogation), 6026 (indice, clause trompeuse), 6054 (indice, clause de garantie), 6060 (indice, clause portant une atteinte au droit de propriété)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8753

CA BASSE-TERRE (1re ch. civ.), 28 janvier 2021 : RG n° 19/00379 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Attendu cependant que selon l'article 1250-1° du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance 2016-131 du 10 février 2016, dispose que le créancier subrogeant doit recevoir son paiement d'une tierce personne ;

Qu'en l'espèce, n'apparaît pas être l'auteur du paiement le prêteur qui se borne à verser au vendeur les fonds empruntés par son client afin de financer l'acquisition d'un véhicule, ce client étant devenu, dès la conclusion du contrat de crédit, propriétaire des fonds ainsi libérés entre les mains du vendeur ;

Qu'il s'ensuit qu'apparaît donc inopérante la subrogation consentie par le vendeur au prêteur dans la réserve de propriété du véhicule, sur le fondement de l'article 1250 1° du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause ;

Que dès lors, le fait que l'intimé a signé la stipulation d'une clause de réserve de propriété portant les mentions plus haut rappelées et accepté la subrogation ne saurait, à raison du caractère inopérant de cette subrogation consentie par le vendeur, justifier la demande de restitution du véhicule ;

Que la clause prévoyant une telle subrogation laisse faussement croire à l'emprunteur, devenu propriétaire du bien dès le paiement du prix au vendeur, que la sûreté réelle a été valablement transmise, ce qui entrave l'exercice de son droit de propriété et a pour effet de créer un déséquilibre significatif à son détriment, au sens de l'article L. 212-1 du code de la consommation, dans sa version en vigueur du 1er juillet 2016 au 10 octobre 2016 ;

Qu'ainsi sette clause doit dès lors être réputée non écrite comme abusive de sorte que la SA SOMAFI-SOGUAFI ne saurait utilement s'en prévaloir au soutien de sa demande de restitution ».

 

COUR D’APPEL DE BASSE-TERRE

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 28 JANVIER 2021

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 19/00379. Arrêt n° 87. N° Portalis DBV7-V-B7D-DCKR. Décision déférée à la Cour : jugement au fond, origine tribunal d'instance de POINTE-A-PITRE, décision attaquée en date du 9 novembre 2018, enregistrée sous le R.G. n° 11-18-000934.

 

APPELANTE :

SA SOMAFI-SOGUAFI

Dossier n° 111201652771 [...], [...], Représentée par Maître Gérard P., (TOQUE 16) avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

 

INTIMÉ NON REPRÉSENTÉ :

Monsieur X.

[...], [...], signification selon procès-verbal prévu à l'article 659 du code de procédure civile

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l'article 799-3 du code de procédure civile, le conseiller de la mise en état, à la demande des parties, a autorisé les avocats à déposer leur dossier au greffe de la chambre civile avant le 7 décembre 2020.

Par avis du 7 décembre 2020, le président a informé les parties que l'affaire était mise en délibéré devant la chambre civile de la cour composée de : Madame Claudine FOURCADE, présidente de chambre, Madame Christine DEFOY, conseillère, Mme Joëlle SAUVAGE, conseillère, qui en ont délibéré.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la Cour le 28 janvier 2021.

GREFFIER : Lors du dépôt des dossiers : Mme Esther KLOCK, greffière.

ARRÊT : Par défaut, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant ét préalablement avisées. Signé par Madame Claudine FOURCADE, présidente de chambre et par Mme Esther KLOCK, greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Selon offre de contrat acceptée le 29 juillet 2016, la société SOMAFI-SOGUAFI a consenti à M. X. une offre de crédit accessoire à la vente d'un véhicule d'un montant de 14.714,24 euros au taux débiteur fixe de 5,90% (taux annuel effectif global de 7,36 %), remboursable par 60 mensualités de 292,21 euros hors assurance facultative.

Suite à des incidents de paiement, la société a, en date du 19 octobre 2017, adressé à l'emprunteur, une lettre recommandée de mise en demeure de régler les échéances échues et restées impayées. Par lettre recommandée du 15 décembre 2017, la société SOMAFI-SOGUAFI a adressé à l'emprunteur une lettre recommandée ayant pour objet la notification de la déchéance du terme valant mise en demeure de lui régler sous huit jours le montant total des sommes restant dues en principal, intérêts et indemnités soit : 14.173,30 euros selon décompte du 15 décembre 2017.

Par exploit d'huissier en date du 27 avril 2018, la société SOMAFI-SOGUAFI a fait assigner M. X. devant le tribunal d'instance de Pointe-à-Pitre aux fins de le voir condamner à lui restituer le véhicule objet du contrat et à lui payer les sommes suivantes :

- 14.173,30 euros ;

- 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Selon jugement rendu le 9 novembre 2018, le tribunal d'instance de Pointe-à-Pitre a :

- déclaré recevable l'action engagée par la société SOMAFI-SOGUAFI contre M. X. ;

- prononcé la déchéance pour la société SOMAFI-SOGUAFI de son droit aux intérêts contractuels ;

- condamné M. X. à verser à la société SOMAFI-SOGUAFI la somme de 12.376,56 euros en remboursement du prêt ;

- dit que cette somme ne produira pas d'intérêts et ne pourra pas faire l'objet d'un intérêt au taux légal majoré ;

- débouté la société SOMAFI-SOGUAFI de sa demande de restitution du véhicule objet du contrat de prêt ;

- débouté la société SOMAFI-SOGUAFI de sa demande sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné M. X. au paiement des dépens.

Par déclaration en date du 28 mars 2019, la société SOMAFI-SOGUAFI a interjeté appel de ce jugement.

Par acte d'huissier de justice délivré le 23 mai 2019, selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile, elle a signifié sa déclaration d'appel et ses conclusions à M. X. et l'a assigné à comparaître devant la cour.

M. X., intimé, n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 24 mars 2020.

 

PRÉTENTIONS ET MOYENS :

Les dernières conclusions déposées les 10 mai 2019 par l'appelante, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions, peuvent se résumer ainsi qu'il suit.

La société SOMAFI-SOGUAFI demande de :

- réformer la décision querellée en toutes ses dispositions ;

- condamner M. X. à lui payer la somme de quatorze mille cent soixante-treize euros et trente centimes (14.173,30 euros) ;

- ordonner à M. X. la restitution du véhicule RENAULT CLIO objet du contrat de crédit ;

- condamner M. X. à lui payer la somme de mille euros (1.000 euros) par l'application de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens distraits au profit de Maître P.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la demande en paiement au titre du prêt à la consommation :

Attendu qu'aux termes de l'alinéa premier de l'article 1134 ancien du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'en application de l'article L 312-39 du code de la consommation dans sa version applicable en la cause, en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés ;

Qu'en l'espèce, la société SOMAFI-SOGUAFI produit notamment l'offre de contrat de crédit signée le 29 juillet 2016, la consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) en date du 29 juillet 2016, la fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées en matière de crédit aux consommateurs, la fiche de dialogue (revenus et charges) et la lettre recommandée du 15 décembre 2017 ayant pour objet la notification de la déchéance du terme valant mise en demeure de lui régler sous huit jours le montant total des sommes restant dues ;

Que le prêteur verse également aux débats : la décision de recrutement de M. X. par le conseil général de la Guadeloupe, ses bulletins de paie d'avril et mai 2016, ses relevés de compte courant de juillet 2016, la photocopie de son passeport et son justificatif de domicile ;

Que d'une part, ces documents prouvent l'obligation dont le prêteur réclame l'exécution en ses principe et montant ;

Que d'autre part, il en résulte que le prêteur justifie avoir satisfait à ses obligations d'informations précontractuelles prévues par les articles L. 312-12 et suivants du code de la consommation dans leur version applicable en la cause ainsi qu'à son obligation de consultation du FICP prévue par l'article L. 312-16 du même code ;

Que le dernier décompte arrêté au 21 mars 2019 présente une dette globale de 14.173,30 euros comprenant la somme de 1.460,99 euros au titre du solde impayé sur les mensualités échues, le capital restant dû d'un montant de 11.770,66 euros et l'indemnité conventionnelle de 8% s'élevant à 941,65 euros ;

Qu'en conséquence, il conviendra de condamner M. X. à verser à la société SOMAFI-SOGUAFI la somme de 14.173,30 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2017 jusqu'au jour du règlement effectif ;

 

Sur la demande de restitution du véhicule :

Attendu que la société SOMAFI-SOGUAFI sollicite que soit ordonnée la restitution du véhicule à l'organisme prêteur en application de la clause de réserve de propriété prévue au contrat ;

Qu'en effet l'offre de crédit acceptée le 29 juillet 2016 comporte la stipulation d'une clause de réserve de propriété au profit du vendeur avec subrogation conventionnelle au profit du prêteur : «conformément aux dispositions du code civil, le prêteur qui a réglé le solde du prix de vente est subrogé dans tous les droits et actions du vendeur nés de la présente clause de réserve de propriété, et ce, jusqu'au remboursement complet de sa créance» ;

Attendu cependant que selon l'article 1250-1° du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance 2016-131 du 10 février 2016, dispose que le créancier subrogeant doit recevoir son paiement d'une tierce personne ;

Qu'en l'espèce, n'apparaît pas être l'auteur du paiement le prêteur qui se borne à verser au vendeur les fonds empruntés par son client afin de financer l'acquisition d'un véhicule, ce client étant devenu, dès la conclusion du contrat de crédit, propriétaire des fonds ainsi libérés entre les mains du vendeur ;

Qu'il s'ensuit qu'apparaît donc inopérante la subrogation consentie par le vendeur au prêteur dans la réserve de propriété du véhicule, sur le fondement de l'article 1250 1° du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause ;

Que dès lors, le fait que l'intimé a signé la stipulation d'une clause de réserve de propriété portant les mentions plus haut rappelées et accepté la subrogation ne saurait, à raison du caractère inopérant de cette subrogation consentie par le vendeur, justifier la demande de restitution du véhicule ;

Que la clause prévoyant une telle subrogation laisse faussement croire à l'emprunteur, devenu propriétaire du bien dès le paiement du prix au vendeur, que la sûreté réelle a été valablement transmise, ce qui entrave l'exercice de son droit de propriété et a pour effet de créer un déséquilibre significatif à son détriment, au sens de l'article L. 212-1 du code de la consommation, dans sa version en vigueur du 1er juillet 2016 au 10 octobre 2016 ;

Qu'ainsi sette clause doit dès lors être réputée non écrite comme abusive de sorte que la SA SOMAFI-SOGUAFI ne saurait utilement s'en prévaloir au soutien de sa demande de restitution ;

Qu'en conséquence, il y a lieu de débouter la société SOMAFI-SOGUAFI de sa demande de restitution du véhicule objet du contrat de prêt.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Attendu que l'intimé qui succombe sera condamné au paiement des dépens d'appel ;

Que l'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par défaut, par arrêt prononcé par mise à disposition au greffe ;

Infirme le jugement rendu le 9 novembre 2018 par le tribunal d'instance de Pointe-à-Pitre sauf en ce qu'il a débouté la société SOMAFI-SOGUAFI de sa demande de restitution du véhicule objet du contrat de prêt et condamné M. X. aux dépens de première instance ;

Et statuant à nouveau des chefs infirmés,

Condamne M. X. à verser à la société SOMAFI-SOGUAFI la somme de 14.173,30 augmentée des intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2017 jusqu'au jour du règlement effectif ;

Déboute la société SOMAFI-SOGUAFI de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. X. au paiement des dépens d'appel dont distraction au profit de Maître Gérard P. en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Et ont signé le présent arrêt.

la greffière,                            la présidente,