TI MONTCEAU LES MINES, 3 avril 2003
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 89
TI MONTCEAU LES MINES, 3 avril 2003 : RG n° 91/03
(sur appel CA Dijon (ch. civ. B), 16 décembre 2003 : RG n° 03/00841 ; arrêt n° 1085 B)
Extrait : « Attendu qu'en vertu des dispositions de l'article 472 du Nouveau Code de procédure civile, le juge en l'absence du défendeur ne fait droit à la demande au vu des seuls éléments exposés par la demanderesse, que s'il l'estime régulière recevable et bien fondée ; Attendu que les dispositions de l'article 125 du Nouveau Code de Procédure Civile prévoient que les fins de non recevoir doivent être soulevées d'office, lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public ; Attendu que le Code de la consommation a mis en place un système de contrats type assurant à l'emprunteur une information étendue sur les conditions et la portée de son engagement ; que ces règles assorties de sanction pénales ne peuvent être considérées comme ne protégeant que des intérêts purement privés dont la violation ne léserait que l'intéressé, puisque le droit pénal régit les règles entre l'individu et l'État ; Qu'en somme, ces dispositions relèvent non seulement d'un ordre public de protection au profit du consommateur, mais aussi d'un ordre public de direction ; Attendu que retenir par ailleurs que le Juge ne pourrait pas relever des moyens tirés de ces dispositions d'ordre public, même en l'absence de conclusions du défendeur qui généralement les ignorent, reviendrait à vider de sa substance ces dispositions protectrices du consommateur ; Qu'en conséquence, le Tribunal était parfaitement fondé à demander à la Banque du Groupe CASINO de s'expliquer sur le respect du formalisme légal lors de l'augmentation du montant du crédit consenti à Monsieur X. et la déchéance éventuelle de son droit à intérêts ».
TRIBUNAL D’INSTANCE DE MONTCEAU LES MINES
JUGEMENT DU 3 AVRIL 2003
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 91/03
DEMANDERESSE :
SA BANQUE DU GROUPE CASINO
dont le siège est [adresse], Comparante par maître BROSAUD, Avocat au Barreau de Chalon-Sur-Saône
DÉFENDEUR :
Monsieur X.
demeurant [adresse]. Non comparant.
COMPOSITION DU TRIBUNAL : Lors des débats et du délibéré :
JUGE : Catherine PERTUISOT
GREFFIER : Marie-Pierre MAGNAC
DÉBATS : 6 février 2003
JUGEMENT : 3 avril 2003
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE :
Suivant offre préalable acceptée le 20 juillet 1994, la Banque du Groupe CASINO a consenti à Monsieur X. une ouverture de crédit d'un montant de 13.000 francs, remboursable par échéances mensuelles de francs, incluant les intérêts au taux conventionnel de 15,72 % l'an.
Par acte d'huissier en date du 20 juin 2002, la Banque du Groupe CASINO a fait délivrer assignation à Monsieur X. afin d'obtenir sa condamnation à lui payer, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
- la somme de 4.693,43 euros pour solde de l'ouverture de crédit, outre intérêts au taux de 15,72 % sur la somme de 3.945,61 euros à compter du 20 janvier 2002 et jusqu'à parfait paiement,
- la somme de 762,25 euros en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
La capitalisation des intérêts est également sollicitée.
Par jugement avant-dire droit en date du 14 novembre 2002, le Tribunal a ordonné la réouverture des débats, a invité les parties à présenter leurs observations sur l'application des dispositions des articles L. 311-9 et L. 311-33 du code de la consommation en raison du dépassement de l'ouverture de crédit initial.
A l'audience du 6 février 2003, sur renvoi à sa demande, la Banque du Groupe CASINO a conclu au maintien de ses prétentions initiales, en sollicitant une condamnation en deniers ou quittances, aux motifs que le défendeur était absent à la première audience et qu'il n'appartient pas au juge de soulever d'office les éventuelles méconnaissances des exigences des dispositions du Code de la consommation. Elle a soutenu qu'au surplus, compte tenu des termes du contrat qui prévoit un montant de base de découvert mais aussi un montant limite de 140.000 francs, il n'y a pas eu d'augmentation de crédit pouvant s'analyser comme l'octroi d'un nouveau crédit.
[minute page 3] Bien que régulièrement assigné à mairie, Monsieur X. n'a comparu et ne s'est pas fait représenter à l'audience du 12 septembre 2002, ni davantage à celle du 6 février 2003.
Le présent jugement étant susceptible d'appel, il sera réputé contradictoire en application des dispositions de l'article 473 du Nouveau Code de Procédure Civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
DISCUSSION :
Attendu qu'en vertu des dispositions de l'article 472 du Nouveau Code de procédure civile, le juge en l'absence du défendeur ne fait droit à la demande au vu des seuls éléments exposés par la demanderesse, que s'il l'estime régulière recevable et bien fondée ;
Attendu que les dispositions de l'article 125 du Nouveau Code de Procédure Civile prévoient que les fins de non recevoir doivent être soulevées d'office, lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public ;
Attendu que le Code de la consommation a mis en place un système de contrats type assurant à l'emprunteur une information étendue sur les conditions et la portée de son engagement ; que ces règles assorties de sanction pénales ne peuvent être considérées comme ne protégeant que des intérêts purement privés dont la violation ne léserait que l'intéressé, puisque le droit pénal régit les règles entre l'individu et l'État ; Qu'en somme, ces dispositions relèvent non seulement d'un ordre public de protection au profit du consommateur, mais aussi d'un ordre public de direction ;
Attendu que retenir par ailleurs que le Juge ne pourrait pas relever des moyens tirés de ces dispositions d'ordre public, même en l'absence de conclusions du défendeur qui généralement les ignorent, reviendrait à vider de sa substance ces dispositions protectrices du consommateur ;
Qu'en conséquence, le Tribunal était parfaitement fondé à demander à la Banque du Groupe CASINO de s'expliquer sur le respect du formalisme légal lors [minute page 4] de l'augmentation du montant du crédit consenti à Monsieur X. et la déchéance éventuelle de son droit à intérêts ;
Attendu que pour justifier du montant de sa créance, produit :
- l'offre préalable d'ouverture de crédit acceptée le 20 juillet 1994,
- l'historique du compte faisant apparaître une augmentation de découvert au mois de février 2000,
- le décompte de créance ;
Attendu que selon l'article L. 311-9 du code de la consommation, dans le cas d'une ouverture de crédit utilisable par fraction, l'offre préalable n'est obligatoire que pour le contrat initial ; que cette exception au formalisme, qui est d'interprétation stricte, ne vise que la reconduction du crédit au fur et à mesure des remboursements dans les limites fixées à l'origine, et non l'augmentation du montant du crédit qui s'analyse comme l'octroi d'un nouveau crédit ;
Qu'en outre, la durée du crédit est d'un an renouvelable ; que trois mois avant chaque échéance, il appartient au prêteur d'aviser l'emprunteur des conditions de reconduction du contrat ; que cette information est destinée à attirer l'attention de l'emprunteur sur la possibilité qui lui est offerte chaque année de ne pas renouveler l'ouverture de crédit afin de ne limiter son endettement ;
Attendu que l'offre initiale avait été clairement acceptée pour une somme de 13.000 francs par Monsieur X. par l'indication des sommes de 7.000 et 6.000 francs par écriture informatique à deux emplacements distincts laissés vierges sur un document pré-imprimé ; que l'indication d'un montant limite de découvert pouvant être consenti par le prêteur est sans influence sur cette circonstance ; qu'en conséquence, la Banque du Groupe CASINO ne justifie pas, en l'espèce, avoir conclu avec Monsieur X. une nouvelle convention conforme aux dispositions de l'article L. 311-9 du Code de la consommation ;
Qu'il y a lieu de faire application de la sanction prévue à l'article L. 311-33 du même code en prononçant la déchéance du droit aux intérêts à compter du mois de février 2000 ;
[minute page 5] Qu'il y a lieu de rappeler qu'aux termes de l'article L. 311-32 dudit code aucune indemnité, ni aucun coût, autres que ceux mentionnés aux articles L. 311-29 à L. 311-31 ne peuvent être mis à la charge de l'emprunteur dans le cas de remboursement par anticipation ou de défaillance prévus par ces articles ;
Attendu enfin que l'indemnité de résiliation à laquelle le créancier peut prétendre en application de l'article L. 311-30 du Code de Consommation a valeur de clause pénale et doit être réduite à 0 € conformément à l'article 1152 du Code Civil compte tenu des circonstances ;
Qu'en conséquence, il convient de condamner Monsieur X. à payer, en deniers ou quittances, à la Banque du Groupe CASINO la somme représentant le capital utilisé, outre les intérêts jusqu'au mois de février 2000 et diminué des règlements reçus, soit 2.911,61 €, cette somme portant normalement intérêts au taux légal à compter du 1er février 2002 ;
Attendu qu'il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de la demanderesse l'intégralité de ses frais irrépétibles ; qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Attendu qu'il y a lieu d'ordonner la capitalisation des intérêts ;
Attendu que les éléments de l'espèce ne commandent pas que l'exécution provisoire soit ordonnée ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le tribunal statuant par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,
Prononce la déchéance du droit aux intérêts de la Banque du Groupe CASINO à compter du mois de FÉVRIER 2000,
[minute page 6] Condamne Monsieur X. à payer en deniers ou quittances à la Banque du Groupe CASINO la somme de 2.911,61 euros, cette somme portant normalement intérêts au taux légal à compter du 1 FÉVRIER 2002 et jusqu'à parfait règlement,
Ordonne la capitalisation des intérêts,
Déboute la Banque du Groupe CASINO de sa demande présentée sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision,
Condamne Monsieur X. aux dépens de l'instance.
Ainsi prononcé à l'audience publique du TRIBUNAL D'INSTANCE DE MONTCEAU LES MINES, le 3 AVRIL DEUX MIL TROIS.
- 5719 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Office du juge - Relevé d’office - Principe - Faculté - Jurisprudence antérieure - Crédit à la consommation
- 5722 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Office du juge - Relevé d’office - Principe - Obligation - Jurisprudence antérieure à la loi du 17 mars 2014
- 6631 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 2 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Obligation de faire une offre
- 6635 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 6 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Notion d’augmentation du crédit