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CASS. COM., 8 avril 2021

Nature : Décision
Titre : CASS. COM., 8 avril 2021
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. commerciale
Demande : 19-17997
Décision : 21-332
Date : 8/04/2021
Nature de la décision : Cassation avec renvoi
Mode de publication : Legifrance
Décision antérieure : CA VERSAILLES (16e ch.), 21 mars 2019
Numéro de la décision : 332
Référence bibliographique : 5705 (imprescriptibilité de l’action), 5730 (appel, demande nouvelle), 5828 (confirmation), 5734 (clause réputée non écrite)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9055

CASS. COM., 8 avril 2021 : pourvoi n° 19-17997 ; arrêt n° 332 

Publication : Legifrance

 

Extraits : 1/ « Vu l'article 1338 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 : 10. Il résulte de ce texte que la confirmation d'un acte nul exige à la fois la connaissance du vice l'affectant et l'intention de le réparer. […] 13. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser la connaissance par la commune, lors du remboursement anticipé des contrats de prêt de 2006, 2010 et 2011, des vices qu'elle invoquait comme affectant ces contrats et son intention de les réparer, la cour d'appel a privé sa décision de base légale. »

2/ « 19. Les sociétés Dexia, Sfil et Caffil soutiennent que ce moyen est irrecevable car contradictoire avec le quatrième moyen, pris en sa deuxième branche, ces deux griefs soutenant, d'un côté, que la demande tendant à ce que soit réputée non écrite une clause abusive poursuit les mêmes fins que la demande d'annulation de ce contrat et, de l'autre, qu'une telle demande ne s'analyse pas en une demande de nullité.

20. Cependant, il n'est pas contradictoire de soutenir qu'une demande tendant à ce qu'une clause soit réputée non écrite tend aux mêmes fins qu'une demande d'annulation du contrat contenant cette clause, tout en faisant valoir que ces demandes ne sont pas soumises au même régime de prescription. 21. Le moyen est donc recevable. »

3/ « Vu l'article 565 du code de procédure civile : 22. Aux termes de ce texte, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.

23. Pour déclarer irrecevable la « demande tendant à la nullité de la clause de remboursement anticipé », l'arrêt relève que la commune soutient que cette clause serait abusive et devrait être réputée non écrite en application des articles L. 132-1 et L. 212-1 du code de la consommation, puis retient que cette demande se distingue de la demande d'annulation des contrats de prêt litigieux, formulée dès la première instance et maintenue en cause d'appel, laquelle tend à l'anéantissement desdits contrats dans leur intégralité, en ce qu'elle ne vise qu'à l'anéantissement d'une seule clause du contrat, de sorte que cette demande est nouvelle en cause d'appel.

24. En statuant ainsi, alors que la demande d'annulation des contrats de prêt et la demande tendant à ce que soit réputée non écrite la clause stipulant le paiement d'une indemnité de remboursement anticipé tendaient aux mêmes fins, à savoir permettre à la commune d'échapper, à tout le moins pour l'avenir s'agissant de la seconde, au paiement des intérêts du prêt, la cour d'appel a violé le texte susvisé. »

4/ « Vu l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction abrogée par la loi n° 2016-301 du 14 mars 2016, et les articles 1304 et 2224 du code civil, le premier dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 : 27. La demande tendant à voir une clause abusive réputée non écrite, qui ne s'analyse pas en une demande d'annulation, n'est pas soumise à la prescription.

28. Pour déclarer irrecevable la « demande tendant à la nullité de la clause de remboursement anticipé », l'arrêt retient qu'une action ayant pour objet de faire déclarer non écrite une clause en raison de son caractère abusif est soumise au délai de prescription de cinq ans qui court à compter de la date du contrat de prêt, soit en l'espèce 2012, cependant que la commune n'a introduit sa demande « en nullité » de l'indemnité de remboursement anticipé fondée sur le caractère prétendument abusif de la clause que le 22 novembre 2018, de sorte que cette action, introduite au-delà du délai de cinq ans, est prescrite. 29. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 8 AVRIL 2021

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : E 19-17.997. Arrêt n° 332 F-D.

DEMANDEUR à la cassation : Commune de Palaiseau

DÉFENDEUR à la cassation : Société Dexia crédit local - Société de financement local (Sfil) - Société Caisse française de financement local (Caffil)

Président : Mme Mouillard (président). Avocat(s) : SAS Cabinet Colin - Stoclet, SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Lesourd.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

La commune de Palaiseau, représentée par son maire en exercice, domicilié en cette qualité, [...], a formé le pourvoi n° E 19-17.997 contre l'arrêt rendu le 21 mars 2019 par la cour d'appel de Versailles (16e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Dexia crédit local, société anonyme, dont le siège est [...], 2°/ à la Société de financement local (Sfil), société anonyme, dont le siège est [...], 3°/ à la société Caisse française de financement local (Caffil), société anonyme à directoire et conseil de surveillance, dont le siège est [...], défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les six moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Blanc, conseiller référendaire, les observations de la SCP Cabinet Colin - Stoclet, avocat de la commune de Palaiseau, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société Dexia crédit local, de la SCP Lesourd, avocat des sociétés Sfil et Caisse française de financement local (Caffil), après débats en l'audience publique du 16 février 2021 où étaient présents Mme Mouillard, président, M. Blanc, conseiller référendaire rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

 

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Faits et procédure :

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 21 mars 2019) et les productions, en 2006, la société Dexia crédit local (la société Dexia), agissant pour elle-même et sa filiale, la société Dexia Municipal Agency, a consenti à la commune de Palaiseau (la commune) un prêt d'un montant de 6.545.686,87 euros et d'une durée de vingt ans, destiné, à hauteur de 1.500.000 euros, à financer des investissements et, pour le surplus, à refinancer des prêts antérieurs.

2. Le contrat stipulait que, pendant une première phase de quinze ans, si le cours de change de l'euro en francs suisses était supérieur ou égal au cours pivot de 1,43 francs suisses pour un euro, le taux d'intérêt serait égal à 3,61 % par an et que, dans le cas contraire, ce taux serait égal à la somme de 3,61 % et de 50 % du rapport entre le cours pivot de 1,43 francs suisses et le cours de change de l'euro en francs suisses.

3. En 2010, 2011 et 2012, la société Dexia, agissant encore pour elle-même et la société Dexia Municipal Agency, a consenti trois prêts à la commune, chacun de ces prêts étant destiné à refinancer le précédent, les contrats stipulant que pour une période courant respectivement du 1er décembre 2010, du 1er décembre 2011 ou du 1er décembre 2012 jusqu'au 1er décembre 2022, les intérêts seraient calculés selon les modalités stipulées au contrat de prêt conclu en 2006, à la différence près que le cours pivot serait désormais fixé à 1,429 francs suisses pour un euro.

4. Faisant valoir que l'appréciation du franc suisse par rapport à l'euro avait entraîné une forte augmentation du taux d'intérêt des prêts, la commune de Palaiseau a assigné la société Dexia, ainsi que la société Dexia Municipal Agency, devenue la société Caisse française de financement local (la société Caffil), et la Société de financement local, devenue la société Sfil, laquelle avait été chargée en 2013 de la gestion et du recouvrement des prêts inscrits au bilan de la société Caffil, en annulation des stipulations du taux d'intérêt conventionnel des contrats de prêt, subsidiairement en annulation des contrats de prêt et, encore plus subsidiairement, en indemnisation. Devant la cour d'appel, la commune de Palaiseau a demandé, en outre, que les clauses des contrats stipulant une indemnité de remboursement anticipé soient réputées non écrites.

 

Examen des moyens :

Sur les deuxième, troisième, cinquième et sixième moyens, ci-après annexés :

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

 

Mais sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Enoncé du moyen :

6. La commune fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables ses demandes d'annulation des contrats de prêt de 2006, 2010 et 2011 pour défaut d'intérêt à agir, alors « que la confirmation d'actes nuls exige à la fois la connaissance du vice les affectant et l'intention non équivoque de le réparer ; qu'en l'espèce, la commune de Palaiseau a fait valoir qu'elle avait souscrit les contrats de prêts de 2010, 2011 et 2012 dans l'unique but de sécuriser la prochaine échéance de remboursement du précédent emprunt sans avoir renoncé à agir en nullité ; qu'en se bornant à retenir que, lors de la renégociation des prêts en 2010, 2011 et 2012, la commune n'ignorait pas le vif débat au sujet de l'endettement des collectivités locales, la cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs impropres à caractériser la volonté non équivoque de la commune de Palaiseau de réparer le vice affectant les contrats litigieux, a violé l'article 1338 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »

 

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Réponse de la Cour :

Recevabilité du moyen :

7. Les sociétés Sfil et Caffil contestent la recevabilité du moyen, en raison de sa nouveauté.

8. Cependant, dans ses conclusions d'appel, la commune de Palaiseau soutenait que c'était à tort que les premiers juges avaient déclaré irrecevables ses demandes au titre des prêts de 2006, 2010 et 2011 au motif que la conclusion des contrats de 2010, 2011 et 2012 caractérisait sa volonté non équivoque de renoncer à agir en nullité contre la société Dexia au titre des trois premiers contrats.

9. Le moyen est donc recevable.

 

Bien-fondé du moyen :

VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée)                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l'article 1338 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 :

 

CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause)                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

10. Il résulte de ce texte que la confirmation d'un acte nul exige à la fois la connaissance du vice l'affectant et l'intention de le réparer.

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

11. Pour déclarer irrecevables les demandes d'annulation des contrats de prêt de 2006, 2010 et 2011, après avoir relevé que la commune soutenait que ces contrats avaient un caractère spéculatif, que les délibérations du conseil municipal autorisant leur conclusion n'avaient pas valablement opéré délégation de compétence, que son consentement avait été vicié lors de leur conclusion et que la banque avait méconnu les dispositions relatives à la mention du taux effectif global et au taux d'usure, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que ces contrats ont fait l'objet d'un remboursement anticipé, de sorte que la commune les a volontairement exécutés et qu'ils se sont éteints par paiement.

12. L'arrêt retient en outre que, dès l'automne 2008, plusieurs élus locaux avaient dénoncé publiquement la présence dans leur dette de prêts structurés consentis majoritairement par la société Dexia, qu'ils qualifiaient de toxiques, que, le 7 décembre 2009, une charte de bonne conduite a été adoptée sous l'égide des pouvoirs publics, entérinant l'engagement des établissements bancaires de ne commercialiser que des produits correspondant à la typologie définie par la charte en fonction des risques présentés par les indices sous-jacents et la structure des prêts, que cette charte a été suivie de la publication d'une circulaire du 25 juin 2010 exposant notamment, à titre de contexte, le risque financier parfois disproportionné que couraient les collectivités locales qui avaient souscrit des prêts structurés et détaillant les obligations des établissements financiers et la possibilité d'agir en justice afin d'obtenir réparation en cas d'inexécution de ces obligations, que de très nombreux articles relatifs au débat sur les emprunts dits « toxiques » ont été publiés dans la presse généraliste ou consacrée aux collectivités locales, entre octobre 2009 et mai 2010, et qu'en juillet 2011, a été rendu public le rapport thématique de la Cour des comptes sur la gestion de la dette publique locale, ce dont il déduit, d'abord, que, lors de la renégociation des prêts en 2010, 2011 et 2012, la commune n'ignorait pas le vif débat au sujet de l'endettement des collectivités locales et était en mesure d'apprécier les risques encourus du fait de la conclusion des précédents prêts, ainsi que de rechercher les éventuels manquements de la société Dexia et, ensuite, que c'est en toute connaissance de cause que la commune a mis un terme aux contrats de prêt de 2006, 2010 et 2011 en souscrivant les contrats de 2010, 2011 et 2012, la conclusion de ces trois derniers contrats caractérisant donc la volonté non équivoque de la commune de renoncer à agir en annulation des trois premiers.

 

CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION                                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

13. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser la connaissance par la commune, lors du remboursement anticipé des contrats de prêt de 2006, 2010 et 2011, des vices qu'elle invoquait comme affectant ces contrats et son intention de les réparer, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

 

Sur le premier moyen, pris en sa cinquième branche :

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Enoncé du moyen :

14. La commune fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables ses demandes d'annulation des contrats de prêt de 2006, 2010 et 2011 pour défaut d'intérêt à agir, alors « que la méconnaissance des dispositions d'ordre public relatives à la compétence de l'autorité signataire d'un contrat de droit privé conclu au nom d'une commune est sanctionnée par la nullité absolue, laquelle ne peut être couverte par la confirmation du contrat ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevable la demande de nullité des contrats de prêt de 2006, 2010 et 2011 tirée du défaut de pouvoir du maire de conclure ces actes, faute d'avoir reçu une délégation de compétence suffisamment précise et limitée du conseil municipal, que la conclusion des contrats de prêt de 2010, 2011 et 2012 caractérisait la volonté non équivoque de la commune de renoncer à agir en nullité à l'encontre de la société Dexia au titre des contrats de prêt de 2006, 2010 et 2011, quand la méconnaissance des dispositions d'ordre public de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales était sanctionnée par la nullité absolue, laquelle ne pouvait être couverte par la confirmation, la cour d'appel a violé les articles 1108 et 1338 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable au litige. »

 

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Réponse de la Cour :

VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée)                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l'article 1108 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, et l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales :

 

CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause)                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

15. La méconnaissance des dispositions d'ordre public relatives à la compétence de l'autorité signataire d'un contrat de droit privé conclu au nom d'une commune est sanctionnée par la nullité absolue, laquelle ne peut être couverte par la confirmation du contrat.

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

16. Pour déclarer irrecevables les demandes d'annulation des contrats de prêt de 2006, 2010 et 2011, l'arrêt retient que la commune a mis un terme à ces contrats dans des conditions caractérisant sa volonté non équivoque de renoncer à demander leur annulation.

 

CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION                                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

17. En statuant ainsi, alors que la commune se prévalait notamment du défaut de compétence du maire pour souscrire les prêts litigieux et invoquait ainsi une nullité absolue, insusceptible de confirmation, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

 

Sur le quatrième moyen, pris en sa première branche :

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Enoncé du moyen :

18. La commune fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa « demande tendant à la nullité de la clause de remboursement anticipé », alors « que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent ; que la demande tendant à ce que soit réputée non écrite une clause abusive, présentée en appel, a pour objet l'anéantissement partiel du contrat de sorte qu'elle tend aux mêmes fins que la demande d'annulation de ce contrat ; qu'en déclarant irrecevable la demande de la commune de Palaiseau tendant à ce que soit réputée non écrite comme abusive la clause de remboursement anticipé aux motifs que celle-ci se distinguait de la demande en nullité des contrats de prêt litigieux, formulée dès la première instance et maintenue en cause d'appel, la cour d'appel, a violé l'article 565 du code de procédure civile. »

 

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Réponse de la Cour :

Recevabilité du moyen :

19. Les sociétés Dexia, Sfil et Caffil soutiennent que ce moyen est irrecevable car contradictoire avec le quatrième moyen, pris en sa deuxième branche, ces deux griefs soutenant, d'un côté, que la demande tendant à ce que soit réputée non écrite une clause abusive poursuit les mêmes fins que la demande d'annulation de ce contrat et, de l'autre, qu'une telle demande ne s'analyse pas en une demande de nullité.

20. Cependant, il n'est pas contradictoire de soutenir qu'une demande tendant à ce qu'une clause soit réputée non écrite tend aux mêmes fins qu'une demande d'annulation du contrat contenant cette clause, tout en faisant valoir que ces demandes ne sont pas soumises au même régime de prescription.

21. Le moyen est donc recevable.

 

Bien-fondé du moyen :

VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée)                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l'article 565 du code de procédure civile :

 

CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause)                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

22. Aux termes de ce texte, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

23. Pour déclarer irrecevable la « demande tendant à la nullité de la clause de remboursement anticipé », l'arrêt relève que la commune soutient que cette clause serait abusive et devrait être réputée non écrite en application des articles L. 132-1 et L. 212-1 du code de la consommation, puis retient que cette demande se distingue de la demande d'annulation des contrats de prêt litigieux, formulée dès la première instance et maintenue en cause d'appel, laquelle tend à l'anéantissement desdits contrats dans leur intégralité, en ce qu'elle ne vise qu'à l'anéantissement d'une seule clause du contrat, de sorte que cette demande est nouvelle en cause d'appel.

 

CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION                                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

24. En statuant ainsi, alors que la demande d'annulation des contrats de prêt et la demande tendant à ce que soit réputée non écrite la clause stipulant le paiement d'une indemnité de remboursement anticipé tendaient aux mêmes fins, à savoir permettre à la commune d'échapper, à tout le moins pour l'avenir s'agissant de la seconde, au paiement des intérêts du prêt, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

 

Et sur le quatrième moyen, pris en sa deuxième branche :

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Enoncé du moyen :

25. La commune fait le même grief à l'arrêt, alors « que la demande tendant à voir réputer non écrite une clause abusive d'un contrat ne s'analyse pas en une demande de nullité, de sorte qu'elle n'est pas soumise à la prescription quinquennale ; qu'en retenant que la commune n'avait introduit la demande en nullité de la clause de remboursement anticipé fondée sur le caractère prétendument abusif de la clause que le 22 novembre 2018 et qu'une action ayant pour objet de faire déclarer non écrite une clause en raison de son caractère abusif est soumise au délai de prescription de cinq ans qui court à compter de la date du contrat de prêt, en l'espèce 2012 et l'action introduite au-delà du délai de cinq ans était prescrite, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 2224 du code civil, ensemble l'article 1304 du même code, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. »

 

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Réponse de la Cour :

Recevabilité du moyen :

26. En dépit des contestations soulevées par les sociétés Dexia, Sfil et Caffil, ce moyen est recevable pour les motifs précédemment énoncés à propos de la recevabilité du quatrième moyen, pris en sa première branche.

 

Bien-fondé du moyen :

VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée)                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction abrogée par la loi n° 2016-301 du 14 mars 2016, et les articles 1304 et 2224 du code civil, le premier dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 :

 

CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause)                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

27. La demande tendant à voir une clause abusive réputée non écrite, qui ne s'analyse pas en une demande d'annulation, n'est pas soumise à la prescription.

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

28. Pour déclarer irrecevable la « demande tendant à la nullité de la clause de remboursement anticipé », l'arrêt retient qu'une action ayant pour objet de faire déclarer non écrite une clause en raison de son caractère abusif est soumise au délai de prescription de cinq ans qui court à compter de la date du contrat de prêt, soit en l'espèce 2012, cependant que la commune n'a introduit sa demande « en nullité » de l'indemnité de remboursement anticipé fondée sur le caractère prétendument abusif de la clause que le 22 novembre 2018, de sorte que cette action, introduite au-delà du délai de cinq ans, est prescrite.

 

CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION                                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

29. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement, il déclare irrecevables les demandes d'annulation des contrats de prêt de 2006, 2010 et 2011 pour défaut d'intérêt à agir de la commune, en ce qu'il déclare la commune de Palaiseau irrecevable en sa demande tendant à la nullité de la clause de remboursement anticipé et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 21 mars 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne les sociétés Dexia crédit local, Sfil et Caisse française de financement local aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par les sociétés Dexia crédit local, Sfil et Caisse française de financement local et les condamne à payer à la commune de Palaiseau la somme globale de 3.000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit avril deux mille vingt et un.

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyens produits par la SCP Cabinet Colin - Stoclet, avocat aux Conseils, pour la commune de Palaiseau.

 

PREMIER MOYEN DE CASSATION

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevables les demandes de nullité des contrats de prêt de 2006, 2010 et 2011 pour défaut d'intérêt à agir de la commune ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS PROPRES QUE la ville a accepté de refinancer le prêt 2006 par le prêt 2010, le prêt 2010 par le prêt 2011, le prêt 2011 par le prêt 2012, chacun des contrats de Prêt comportant des clauses très claires mentionnant expressément que leur objet était le refinancement du contrat de prêt le précédant et donc précisément de mettre un terme au contrat précédent, le nouveau contrat constituant alors la loi à laquelle les parties ont choisi de se soumettre, et comme tel, devant être exécuté de bonne foi par les contractants comme en dispose l'article 1134 du code civil ; qu'il résulte des termes mêmes des contrats de prêt litigieux, faisant mention expresse du « remboursement » des sommes prêtées, que les parties ont eu l'intention d'instaurer un nouveau contrat se substituant au précédent ; que l'opération de refinancement d'un prêt existant par un prêt nouveau comportent en effet deux opérations juridiques simultanées et indissociables : le remboursement anticipé du prêt « refinancé » et le versement des fonds correspondant au montant du nouveau prêt dit de « refinancement », les deux flux se compensant l'un avec l'autre, de sorte que les contrats de prêt 2006, 2010 et 2011 se sont éteints par paiement ; que, faute d'intérêt à agir de l'appelante, le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré les demandes de par la Ville à l'encontre des contrats de prêt 2006, 2010 et 2011 irrecevables ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'en l'espèce, l'article 1 du contrat de prêt de 2010 indique expressément qu'il a pour objet de « refinancer en date du 01/12/2010 à hauteur de 5.692.460,97 EUR le(s) contrat(s) de prêt ci-dessous », lequel est le contrat de prêt de 2006 et précise que « par la souscription du présent contrat les sommes refinancées sont réputées remboursées au prêteur à la date du refinancement de sorte qu'à cette date le montant du(des) contrat(s) visé(s) dans le tableau ci-dessus est réduit à due concurrence du capital refinancé » ; qu'enfin, la section « Montant, durée et objet du contrat de prêt » du contrat de prêt de 2012, indique également qu'il a pour objet de « refinancer, en date du 01/12/2012, le capital restant dû du contrat de prêt référencé ci-dessous », lequel est le contrat de prêt de 2011 et précise que, « en signant le présent contrat, l'emprunteur accepte et reconnaît que le refinancement emporte le remboursement anticipé du contrat de prêt refinancé à hauteur du capital refinancé » ; qu'il résulte de ces stipulations que la commune a exécuté volontairement les contrats de prêt de 2006, 2010 et 2011 ; qu'en outre, il y a lieu de rappeler que, dès l'automne 2008, plusieurs élus locaux ont dénoncé publiquement la présence dans leur dette de prêts structurés consentis majoritairement par la société Dexia qu'ils qualifiaient de toxiques ; que par la suite, a été adoptée le 7 décembre 2009, sous l'égide des pouvoirs publics, une charte de bonne conduite entre les établissements publics bancaires et les collectivités locales prévoyant notamment une classification des emprunts toxiques et entérinant l'engagement des établissements bancaires de ne commercialiser que des produits correspondant à la typologie définie par la charte en fonction des risques présentés par les indices sous-jacents et structurées des prêts ; que cette charte a été suivie de la publication de la circulaire des ministères de l'économie et du budget du 25 juin 2010, relative aux produits financiers offerts aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics ; que ce document comporte notamment un chapitre liminaire de « contexte », exposant le risque financier, parfois « disproportionné », que courent les collectivités locales qui ont souscrit des prêts structurés ; qu'il détaille les obligations des établissements financiers et la possibilité d'agir en justice afin d'obtenir réparation en cas d'inexécution de ces obligations, rappelant une décision de justice précédemment rendue en ce sens, et précise quels sont les produits structurés déconseillées aux collectivités locales ; que la pièce no 8 des défenderesses énumère également les très nombreux articles de presse relatifs au débat sur les emprunts dits « toxiques », publiés dans la presse généraliste ou consacrée aux collectivités locales ; qu'une grande partie de ces articles a été publiée entre les mois d'octobre 2009 et de mai 2010 ; qu'enfin, en juillet 2011 a été rendu public le rapport thématique de la Cour des comptes sur la gestion de la dette publique locale ; qu'ainsi, lors de la renégociation des prêts en 2010, 2011 et 2012, la commune n'ignorait pas le vif débat au sujet de l'endettement des collectivités locales et était en mesure d'apprécier les risques encourus du fait de la conclusion des précédents prêts, ainsi que de rechercher les éventuels manquements de la société Dexia ; que c'est donc en toute connaissance de cause que la commune a mis un terme (i) au contrat de prêt de 2006 en souscrivant le contrat de prêt de 2010, (ii) au contrat de prêt de 2010 en souscrivant le contrat de prêt de 2011 et (iii) au contrat de prêt de 2011 en souscrivant le contrat de prêt de 2012 ; qu'ainsi, la conclusion des contrats de prêt de 2010, 2011 et 2012 caractérise la volonté non équivoque de la commune de renoncer à agir en nullité à l'encontre de la société Dexia au titre des contrats de prêt de 2006, 2010 et 2011 ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

1°) ALORS QU'à défaut de stipulation en ce sens, l'accord par lequel les parties décident de mettre un terme au contrat de prêt les liant n'interdit pas à l'emprunteur de solliciter la nullité dudit contrat ; qu'en effet, un tel accord ne vaut pas renonciation à toute action en nullité en raison des vices affectant la formation du contrat ; qu'en affirmant, pour déclarer irrecevables, faute d'intérêt à agir, les demandes de la commune de Palaiseau au titre des contrats de prêt de 2006, 2010 et 2011, que chacun des contrats de prêt comporte des clauses très claires mentionnant expressément que son objet était le refinancement du contrat de prêt le précédant et donc précisément de mettre un terme au contrat précédent, le nouveau contrat constituant alors la loi à laquelle les parties ont choisi de se soumettre, et comme tel, devant être exécuté de bonne foi par les contractants, la cour d'appel, qui n'a pas relevé de stipulation contractuelle relative à une renonciation de la commune à invoquer la nullité des prêts refinancés, a violé les articles 1108 et 1134 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble les articles 31 et 122 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE l'exécution d'un contrat de prêt par l'emprunteur, qui a pour effet d'éteindre son obligation de paiement, ne le prive pas de son intérêt à solliciter en justice la nullité de ce contrat ; qu'il conserve un intérêt à être replacé dans la situation antérieure au contrat annulé par le jeu des restitutions réciproques ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevables, faute d'intérêt à agir, les demandes de nullité de la commune de Palaiseau au titre des contrats de prêt de 2006, 2010 et 2011, que ces contrats s'étaient « éteints par paiement », la cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs impropres à écarter l'intérêt à agir de la commune de Palaiseau, a violé l'article 31 du code de procédure civile, ensemble l'article 122 du même code ;

3°) ALORS QUE la confirmation d'actes nuls exige à la fois la connaissance du vice les affectant et l'intention non équivoque de le réparer ; qu'en l'espèce, la commune de Palaiseau a fait valoir qu'elle avait souscrit les contrats de prêts de 2010, 2011 et 2012 dans l'unique but de sécuriser la prochaine échéance de remboursement du précédent emprunt sans avoir renoncé à agir en nullité ; qu'en se bornant à retenir que, lors de la renégociation des prêts en 2010, 2011 et 2012, la commune n'ignorait pas le vif débat au sujet de l'endettement des collectivités locales, la cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs impropres à caractériser la volonté non équivoque de la commune de Palaiseau de réparer le vice affectant les contrats litigieux, a violé l'article 1338 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

4°) ALORS QUE la confirmation tacite d'actes nuls suppose une exécution volontaire de l'obligation donc non contrainte et intervenue après l'époque à laquelle l'obligation pouvait être valablement confirmée ou ratifiée, c'est-à-dire après la cessation du vice affectant la validité de l'acte ; qu'en retenant que la commune de Palaiseau avait exécuté volontairement les contrats de prêt de 2006, 2010 et 2011, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions, p. 15), si la conclusion des contrats de prêt de 2010, 2011 et 2012 ne résultait pas d'une situation de contrainte économique liée au montant disproportionné des indemnités de remboursement anticipé par rapport aux ressources limitées de la commune, rendant économiquement impossible de se dégager des emprunts refinancés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1338 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

5°) ALORS QUE la méconnaissance des dispositions d'ordre public relatives à la compétence de l'autorité signataire d'un contrat de droit privé conclu au nom d'une commune est sanctionnée par la nullité absolue, laquelle ne peut être couverte par la confirmation du contrat ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevable la demande de nullité des contrats de prêt de 2006, 2010 et 2011 tirée du défaut de pouvoir du maire de conclure ces actes, faute d'avoir reçu une délégation de compétence suffisamment précise et limitée du conseil municipal, que la conclusion des contrats de prêt de 2010, 2011 et 2012 caractérisait la volonté non équivoque de la commune de renoncer à agir en nullité à l'encontre de la société Dexia au titre des contrats de prêt de 2006, 2010 et 2011, quand la méconnaissance des dispositions d'ordre public de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales était sanctionnée par la nullité absolue, laquelle ne pouvait être couverte par la confirmation, la cour d'appel a violé les articles 1108 et 1338 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable au litige.

 

DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la commune de Palaiseau de sa demande de nullité du contrat de prêt du 10 septembre 2012 tirée du défaut de pouvoir du maire de signer ce contrat pour le compte de la commune de Palaiseau ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS PROPRES Mme Y., maire de la ville à l'époque de la conclusion du contrat de prêt 2012, a reçu du conseil municipal, par délibération no 2012-13 du 5 juillet 2012, délégation de compétence à l'effet de procéder à la réalisation de l'emprunt ; que la délibération précise que l'emprunt doit se faire « dans la limite des sommes inscrites chaque année au budget » et précise que le « contrat de prêt pourra comporter une ou plusieurs caractéristiques ci-après », lesquelles sont définies ; qu'ainsi, concernant le montant de l'emprunt, il est clairement mentionné qu'il est destiné au « financement des investissements prévus par le budget et aux opérations financières utiles à la gestion des emprunts, y compris les opérations de couvertures des risques de taux de change » ; qu'il a donc été prévu que le montant du prêt ne saurait excéder les limites fixées et ne saurait être en-deçà du budget et des opérations financières utiles ; que, s'agissant du taux effectif global et du type d'amortissement, ainsi que de la possibilité de procéder à un différé, il a été précisé que le TEG devait être « compatible avec les dispositions légales et réglementaires applicables en cette matière » et la possibilité d'un « différé d'amortissement » a été prévue ; que s'agissant de la durée de l'emprunt, le maire s'est vu octroyer la « possibilité d'allonger la durée du prêt » et cette faculté de rallonger ou de raccourcir la durée lui a également été donnée dans le cadre de réaménagement et/ou de renégociation de la dette ; que les conditions de taux sont également mentionnées, les délibérations précisant que le maire a la « faculté de passer du taux variable au taux fixe ou du taux fixe au taux variable » ainsi que celle de « modifier une ou plusieurs fois l'index relatif au(x) calcul(s) du ou des taux d'intérêt » « la faculté de procéder à des tirage échelonnés dans le temps, à des remboursements anticipés et/ou consolidation » a expressément été prévue ; que le prêt litigieux de 2012, qui n'avait pas, ainsi qu'il l'a été dit ci-dessus, de caractère spéculatif n'était donc pas illicite et le moyen tiré de l'incompétence du signataire des contrats de prêt est mal fondé ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il a été jugé que le contrat de prêt conclu en 2012 ne présente pas de caractère spéculatif ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

ALORS QU'il ressort de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales que les délibérations du conseil municipal autorisant le maire à conclure des emprunts doivent être limitées et suffisamment précises pour valablement opérer délégation de compétence ; que le caractère limité et suffisamment précis de la délibération doit s'apprécier au regard de l'opération réalisée ; que la méconnaissance des dispositions d'ordre public relative à la compétence de l'autorité signataire d'un contrat de droit privé conclu au nom d'une commune est sanctionnée par la nullité absolue ; qu'en statuant par les motifs précités, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions, p. 23, para. 6 à 8), si la délibération du conseil municipal de la commune de Palaiseau du 5 juillet 2012 avait précisé les index pouvant être retenus comme référence de taux d'intérêt ou la possibilité de recourir à des opérations particulières, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable au litige.

 

TROISIÈME MOYEN DE CASSATION

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la commune de Palaiseau de ses demandes tendant à ce qu'il soit prononcé la nullité des taux d'intérêts stipulés aux contrats de prêt litigieux et la substitution du taux de l'usure en vigueur au jour de leur signature et qu'il soit prononcé l'imputation de plein droit des perceptions antérieures excessives sur les intérêts normaux alors échus et subsidiairement sur le capital ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS PROPRES QUE la réglementation sur l'usure figure au Chapitre III du Titre I du Livre III du code de la consommation relatif à l'endettement ; que ce Chapitre III institue des dispositions communes aux Chapitres I et II, relatifs respectivement au crédit à la consommation et au crédit immobilier ; que le champ d'application du Chapitre III est donc limité par celui des Chapitres I et II, des dispositions communes ne pouvant à l'évidence concerner des prêts précisément exclus du champ d'application des Chapitres I et II ; que cependant, les dispositions légales en vigueur à la date de signature des contrats de prêt excluent précisément les prêts dont le montant total est supérieur à 75.000 euros du champ d'application du Chapitre II relatif au crédit à la consommation et les prêts consentis à des personnes morales de droit public du champ d'application du Chapitre II relatif au crédit immobilier ; qu'en outre, les textes excluent la personne physique agissant pour ses besoins professionnels ou la personne morale se livrant à une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou professionnelle non commerciale de leur champ d'application et protègent les personnes physiques qui ont conclu des prêts non destinés à leur activité professionnelle et les personnes morales qui ne se livrent pas à une activité économique ou professionnelle ; que toutefois, les collectivités territoriales, lorsqu'elles souscrivent un prêt destiné à financer leurs investissements dans l'intérêt collectif de leurs administrés, sont bien des personnes morales se livrant à une activité professionnelle non commerciale, en dépit de la Charte Gissler qui concerne l'hypothèse où la collectivité conclut des instruments financiers à terme et dont les termes ne peuvent être étendus aux opérations de crédit ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'article L. 313-5 du code monétaire et financier, dans sa version applicable aux contrats de prêt litigieux, reprend les dispositions de l'article L. 313-3 du code de la consommation précité ; qu'il résulte du dernier alinéa de ces articles que leurs dispositions ne sont pas applicables aux prêts accordés à une personne physique agissant pour ses besoins professionnels ou à une personne morale se livrant à une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou professionnelle non commerciale ; qu'elles sont ainsi destinées à protéger les personnes physiques qui ont conclu des prêts à des fins étrangères à leur activité professionnelle et des personnes morales qui ne se livrent pas à une activité économique ou professionnelle ; que cependant, en l'espèce, les contrats de prêt de 2010, 2011 et 2012 ont été conclus par la commune dans l'exercice d'une politique de gestion de la dette publique pour les besoins collectifs de ses administrés ; qu'à cet égard, ces prêts ont été conclus pour les besoins de l'activité professionnelle de l'emprunteur et il ne peut être considéré qu'ils entrent dans le champ d'application de l'article L. 313-3 du code de la consommation susvisé ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

1°) ALORS QUE les dispositions des articles L. 313-3 et L. 313-4 du code de la consommation (ancien) relatives à l'usure sont applicables aux personnes morales de droit public ne se livrant pas à une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou professionnelle non commerciale ; que tel est le cas d'une commune qui, en souscrivant un prêt destiné à financer ses investissements dans l'intérêt collectif des administrés, ne se livre pas à une activité professionnelle, mais à une activité d'intérêt général ; qu'en retenant que les collectivités territoriales qui souscrivent un tel prêt se livrent à une activité professionnelle non commerciale et sont donc exclues des dispositions relatives à l'usure, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

2°) ALORS QUE les dispositions des articles L. 313-3 et L. 313-4 du code de la consommation (ancien) relatives à l'usure sont applicables à tout prêt conventionnel, quel que soit son montant, accordé à une personne physique n'agissant pas pour ses besoins professionnels ou à une personne morale ne se livrant pas à une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou professionnelle non commerciale ; que, dès lors, les règles relatives à l'usure ne sont pas limitées aux prêts visés par les Chapitres I et II du Titre I du Livre III de la Partie législative du code de la consommation (ancien) ; qu'en décidant le contraire pour retenir que le champ d'application du Chapitre III est limité par celui des Chapitres I et II, des dispositions communes ne pouvant à l'évidence concerner des prêts exclus du champ d'application des Chapitres I et II, et débouter la commune de Palaiseau, personne morale de droit public ayant conclu des emprunts supérieurs à 75.000 euros, de ses demandes, la cour d'appel a encore violé les articles L. 313-3 et L. 313-4 du code de la consommation (ancien).

 

QUATRIÈME MOYEN DE CASSATION

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable la commune de Palaiseau en sa demande tendant à la nullité de la clause de remboursement anticipé ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS QUE la ville soutient que la clause de remboursement anticipé (IRA) serait abusive et devrait être réputée non écrite en application des articles L. 132-1 et L. 212-1 du code de la consommation ; que cette demande se distingue de la demande en nullité des contrats de prêt litigieux, formulée dès la première instance et maintenue en cause d'appel, qui tend à l'anéantissement desdits contrats dans leur intégralité, en ce qu'elle ne vise qu'à l'anéantissement d'une seule clause du contrat ; que cependant, la ville n'a introduit la demande en nullité de l'IRA fondée sur le caractère prétendument abusif de la clause que le 22 novembre 2018 et non seulement cette demande est nouvelle en cause d'appel et partant irrecevable en application de l'article 564 du code de procédure civile, mais encore, une action ayant pour objet de faire déclarer non écrite une clause en raison de son caractère abusif est soumise au délai de prescription de cinq ans qui court à compter de la date du contrat de prêt, en l'espèce 2012 et l'action introduite au-delà du délai de cinq ans est prescrite ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

1°) ALORS QUE les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent ; que la demande tendant à ce que soit réputée non écrite une clause abusive, présentée en appel, a pour objet l'anéantissement partiel du contrat de sorte qu'elle tend aux mêmes fins que la demande d'annulation de ce contrat ; qu'en déclarant irrecevable la demande de la commune de Palaiseau tendant à ce que soit réputée non écrite comme abusive la clause de remboursement anticipé aux motifs que celle-ci se distinguait de la demande en nullité des contrats de prêt litigieux, formulée dès la première instance et maintenue en cause d'appel, la cour d'appel, a violé l'article 565 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE la demande tendant à voir réputer non écrite une clause abusive d'un contrat ne s'analyse pas en une demande de nullité, de sorte qu'elle n'est pas soumise à la prescription quinquennale ; qu'en retenant que la commune n'avait introduit la demande en nullité de la clause de remboursement anticipé fondée sur le caractère prétendument abusif de la clause que le 22 novembre 2018 et qu'une action ayant pour objet de faire déclarer non écrite une clause en raison de son caractère abusif est soumise au délai de prescription de cinq ans qui court à compter de la date du contrat de prêt, en l'espèce 2012 et l'action introduite au-delà du délai de cinq ans était prescrite, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 2224 du code civil, ensemble l'article 1304 du même code, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

3°) ALORS QUE, en tout état de cause, si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, bien qu'ayant une cause distincte, tendent aux mêmes fins, de sorte que la seconde est virtuellement comprise dans la première ; qu'en l'espèce, l'action en nullité intentée par la commune de Palaiseau par l'assignation du 20 juillet 2014 et l'action tendant à voir réputer non écrite comme abusive la clause de remboursement anticipé des contrats litigieux, soulevée en appel, tendant au même but, à savoir l'anéantissement partielle ou totale des contrats querellés, l'interruption de la prescription résultant de l'assignation précitée délivrée en 2014 s'étendait à l'action tendant à voir réputer non écrite comme abusive la clause de remboursement anticipé ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevable comme prescrite la demande de la commune de Palaiseau tendant à voir réputer non écrite la clause de remboursement anticipé, que cette demande était soumise à un délai de prescription de cinq ans qui courrait à compter de la date du contrat de prêt, en l'espèce 2012 et que la demande n'ayant était introduite que le 22 novembre 2018, au-delà du délai de cinq ans, elle était prescrite, tandis que cette action était virtuellement comprise dans l'action en nullité des contrats litigieux exercée en 2014, qui tendait aux mêmes fins, de sorte qu'elle n'était pas prescrite, la cour d'appel a violé l'article 2241 du code civil.

 

CINQUIÈME MOYEN DE CASSATION

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Il EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la commune de Palaiseau de sa demande tendant à la condamnation solidaire de la société Dexia, de la SFIL et de la CAFFIL, pour manquement au devoir de mise en garde de l'établissement de crédit, à payer, en réparation du préjudice occasionné à la collectivité toutes causes confondues, le montant de la soulte pour résiliation anticipée des contrats litigieux dont le montant peut être évalué à hauteur de la valorisation du contrat du 10 septembre 2012, et le surcoût créé par le caractère spéculatif des intérêts de 2007 à 2028, soit 10 000 000 euros ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS PROPRES QUE le caractère averti d'une commune ne se présume pas ; qu'il convient en conséquence, de procéder à une analyse in concreto, au jour de la conclusion du contrat ; qu'en l'espèce, la commune de Palaiseau compte 30.000 habitants ; que la ville a signé avec Dexia Crédit Local une vingtaine de contrats de prêt, dont plusieurs sont encore en vigueur et inscrits au bilan de CAFFIL à ce jour, pour un encours qui s'élevait, en septembre 2016, à près de 11 millions d'euros ; que la gestion de la dette de la ville est assurée principalement par trois personnes : le maire de la Ville (L. B., maire de la ville entre 2001 et 2012, ancien ministre de la ville, député depuis 1997 et membre de différentes commissions permanentes de l'Assemblée Nationale), un élu en charge des finances (C. D. lors de la mise en place des prêts contestés dans le cadre du présent litige, remplacé par A. V. depuis 2014) et le directeur financier de la ville (K. S. entre 2003 et 2009, ce dernier ayant été remplacé par O. F. depuis 2010) ; que temporairement, entre 2012 et 2014, la fonction du maire de la ville a été assurée par G. Y., L. B. ayant démissionné de son poste afin d'occuper celui de ministre de la ville, preuve de ses compétences en matière de gestion locale ; qu'en outre, l'équipe municipale de la ville est assistée, par le cabinet d'experts financiers, Finance Active qui s'affiche comme un spécialiste de la « gestion active de la dette » des collectivités locales de toutes tailles ; que c'est l'un des principaux conseils aux collectivités et il dispose d'une expérience reconnue en la matière ; que Finance Active est intervenu dans la mise en place des refinancements effectués par la ville à compter de 2010 et l'a assistée pour chacun des prêts contestés ; que la ville gère un budget important ; que dès 2000, la section d'investissements du budget de la ville affichait un budget d'environ 13 millions d'euros ; qu'en 2016, son budget annuel était de plus de 57 millions d'euros, dont près de 44 millions d'euros alloués à la section fonctionnement et près de 14 millions d'euros à la section investissement ; qu'il n'est pas contestable que la ville assurait une gestion active de sa dette et renégociait régulièrement ses emprunts auprès des différents établissements bancaires auxquels elle avait recours notamment, outre la société Dexia, le crédit agricole, la caisse d'épargne, le crédit mutuel ou encore la société générale ; qu'au surplus, la ville n'a pas jugé nécessaire d'avoir recours au service spécialisé de la préfecture destiné à conseiller les communes dans le cadre de la passation d'un contrat de prêt ; qu'il se déduit de l'ensemble de ces éléments le caractère averti de la ville lors de la souscription de l'emprunt contesté en 2012 ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'appréciation du caractère averti ou non averti de l'emprunteur s'effectue in concreto ; que la société Dexia fait valoir dans ses conclusions, sans être contestée sur ce point par la commune, que cette dernière a signé près d'une vingtaine de contrats de prêt avec elle ainsi que de nombreux contrats à taux variable ou structurés auprès d'établissements bancaires concurrents, dont le crédit agricole, la caisse d'épargne, le crédit mutuel ou encore la société générale depuis le début des années 2000 ; qu'il est par ailleurs établi que le contrat de prêt de 2012 avait pour objet de refinancer un contrat de prêt de 2011 comprenant la même formule d'intérêts ; qu'en outre, il ressort du graphique figurant en page 6 des conclusions des défenderesses que l'encours de la dette de la commune s'élevait à 37 millions d'euros en 2011 et à 35 millions d'euros en 2012 ; qu'il ressort de ces éléments que la commune menait une politique de gestion active de sa dette depuis plusieurs années lorsqu'elle a conclu le contrat de prêt de 2012 ; qu'au surplus, la commune reconnaît qu'elle était assistée à cette époque d'un directeur financier ainsi que du cabinet Finance active spécialisé dans la gestion de la dette des collectivités locales ; que le mail adressé par le cabinet Finance active à la commune le 21 juillet 2010 témoigne de l'importance de sa mission ; qu'il y a lieu également de souligner les termes clairs et précis de la décision du maire d'autoriser la conclusion du contrat de prêt de 2012 ; que, quand bien même la société Dexia aurait-elle communiqué une trame de rédaction à la commune, il n'en demeure pas moins que la présentation et la formulation de cette décision laissent supposer que son rédacteur disposait de compétences en matière financière ; qu'enfin, l'arrêté du 16 décembre 1983 relatif aux conditions d'attribution de l'indemnité de conseil allouée aux comptables non centralisateurs des services déconcentrés du Trésor chargés des fonctions de receveur des communes et établissements publics locaux, stipule que « outre les prestations de caractère obligatoire qui résultent de leur fonction de comptable principal des communes et de leurs établissements publics prévu aux articles 14 et 16 de la loi no 82-213 du 2 mars 1982, les comptables non centralisateurs du Trésor, exerçant les fonctions de receveur municipal ou de receveur d'un établissement public local sont autorisés à fournir aux collectivités territoriales et aux établissements publics concernés des prestations de conseil et d'assistance en matière budgétaire, économique, financière et comptable, notamment dans les domaines relatifs à (…) la gestion financière, l'analyse budgétaire, financière et de la trésorerie » ; que la commune n'a pas jugé nécessaire de mettre en oeuvre la possibilité offerte par cet arrêté de solliciter des conseils dans le cadre de la passation du contrat de prêt de 2012 ; qu'il résulte de l'ensemble des éléments qui précèdent que la commune présentait, lors de la conclusion du contrat de prêt de 2012, les qualités ou les compétences lui permettant d'appréhender la portée exacte de son engagement ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

ALORS QUE le caractère non averti de l'emprunteur, personne morale, s'apprécie en la personne de son représentant légal ; qu'en statuant par les motifs précités, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions, p. 33, para. 5 et 6), si Mme Y., maire de la commune de Palaiseau lors de la souscription du prêt de 2012, titulaire d'un BEP et d'un bac G3 en technique commerciale, ancienne surveillante d'externat dans un collège du Val-d'Oise avant d'être élue locale, disposait d'expérience ou de compétence en matière d'emprunts structurés, la cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs impropres à exclure le caractère non averti de la commune, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige.

 

SIXIÈME MOYEN DE CASSATION

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la commune de Palaiseau de sa demande tendant à la condamnation solidaire de la société Dexia, de la SFIL et de la CAFFIL, pour manquement au devoir d'information en tant qu'établissement dispensateur de crédit, à payer, en réparation du préjudice occasionné à la collectivité toutes causes confondues, le montant de la soulte pour résiliation anticipée des contrats litigieux dont le montant peut être évalué à hauteur de la valorisation du contrat du 10 septembre 2012, et le surcoût créé par le caractère spéculatif des intérêts de 2007 à 2028, soit 10.000.000 euros ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS PROPRES QU'elle avait pour seule obligation, comme tout dispensateur de crédit, d'informer complètement la commune sur les caractéristiques des prêts, afin d'éclairer sa décision ; qu'à cet égard, la société Dexia établit avoir remis à la commune des documents précis comportant les formules de calcul des intérêts, qui, pour être complexes, n'en étaient pas moins compréhensibles pour un emprunteur averti ; que l'intitulé des prêts litigieux est sans importance, s'agissant d'interlocuteurs qualifiés qui étaient en mesure de constater le mode de calcul des intérêts à taux variable selon les périodes de remboursement et d'en saisir le sens et la portée à l'aide des autres documents remis, notamment, des propositions détaillées de refinancement des prêts en cours, des graphiques présentant l'historique des indices des taux d'intérêts connus à l'époque de conclusion des contrats, des tests de sensibilité ; que par ailleurs, si comme tout organisme bancaire, la société Dexia avait nécessairement un intérêt financier à la souscription d'un contrat de prêt, elle n'avait pas pour obligation de faire connaître le montant de sa marge ; qu'il n'en résultait pas davantage une obligation de conseil renforcée ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE s'agissant de l'obligation d'information, il ressort des pièces versées aux débats que préalablement à la conclusion de chacun des contrats litigieux, la société Dexia a adressé à la commune des documents de présentation qui détaillaient précisément le mode de calcul des intérêts selon les périodes de remboursement ; que ces documents comprenaient (i) des graphiques de l'évolution du cours de l'euro en francs suisses faisant apparaître la chute du cours en septembre 2011, (ii) des tests de sensibilité simulant la variation du taux d'intérêt à payer notamment dans l'hypothèse où l'indice serait inférieur au cours pivot et (iii) pour les contrats de prêt de 2010, 2011 et 2012, un paragraphe intitulé « inconvénients/risques associés » indiquant : « - incertitude et volatilité sur les taux de change, - rôle de valeur refuge du franc suisse en temps de crise (appréciation de celui-ci face à l'euro), - taux d'intérêt non plafonné » ; qu'il ne peut être reproché à la société Dexia de ne pas avoir, dans le document de présentation de 2006, fourni un graphique de l'évolution du cours de l'euro en francs suisses sur les quinze années précédentes, dès lors qu'à cette date l'euro n'existait que depuis sept ans ; qu'il ne peut davantage être reproché à la société Dexia d'avoir, dans ce même document, fourni un test de sensibilité incomplet dès lors que la valeur la plus basse de ce test est bien inférieure au niveau jamais constaté historiques ; qu'ainsi, il n'est pas contestable à la lecture des documents de présentation des contrats de prêt litigieux ainsi que des clauses desdits contrats, que le caractère variable et illimité du taux d'intérêt pendant les premières phases n'a pas été caché à la commune, peu importe à cet égard la formule utilisée dans le document de présentation du 13 septembre 2006 « vous passez d'une stratégie variable à une stratégie fixe sécurisante » de même que l'intitulé du contrat de prêt 2006 « DUAL EUR CHF FIXE FLEXI » ; que le mode de calcul du taux d'intérêt, bien que complexe, n'a pas été davantage caché à la commune ; que celle-ci a ainsi été précisément informée, lors de la conclusion de chacun des contrats, de ce que le taux d'intérêt, pendant les premières phases de remboursement, dépendrait du cours de change en franc suisse ; que la commune a reçu tous les éléments d'information lui permettant de prendre la mesure exacte de la portée de son engagement ; que la qualité, l'exhaustivité et la pertinence de ces éléments d'information ne peuvent être appréciées a posteriori, à l'aune d'une évolution dont il n'est pas établi qu'elle pouvait être anticipée par la société Dexia ; qu'en outre, le contrat de prêt de 2012 étant toujours en cours, la commune n'a pas, à ce jour, été conduite à exposer des frais au titre d'une indemnité de remboursement anticipé pour ce contrat, ni même pour aucun des autres prêts litigieux ; qu'ainsi, la commune n'apporte pas la preuve qui lui incombe de ce que le risque de s'acquitter d'indemnités de remboursement anticipé excessives se serait réalisé et au demeurant, elle ne justifie pas du quantum du préjudice de perte de chance qu'elle allège ; que la commune n'établit pas davantage qu'elle aurait été en mesure de conclure des emprunts à des conditions plus favorables auprès d'autres établissements de crédit, notamment auprès de ceux avec lesquelles elle était d'ores et déjà en relation commerciale ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

ALORS QUE la banque dispensatrice de crédit est tenue à une obligation d'information à l'égard de tout emprunteur sur les caractéristiques du prêt qu'elle lui propose de souscrire, afin d'éclairer sa décision ; que cette obligation d'information s'étend à l'existence et au montant de la clause de remboursement anticipé, susceptible de contraindre l'emprunteur à demeurer dans un prêt ruineux ; que le manquement à cette obligation, et le préjudice en résultant, s'apprécient indépendamment de la mise en œuvre effective de la clause ; qu'en retenant, pour débouter la commune de Palaiseau de sa demande de dommages-intérêts, que la commune n'avait pas été conduite à exposer des frais au titre d'une indemnité de remboursement anticipé et qu'elle ne rapportait pas la preuve que le risque de s'acquitter d'indemnités de remboursement anticipé excessives se serait réalisé, la cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs impropres à exclure un manquement de la société Dexia à son obligation d'information, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.