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CA RENNES (2e ch.), 17 septembre 2021

Nature : Décision
Titre : CA RENNES (2e ch.), 17 septembre 2021
Pays : France
Juridiction : Rennes (CA), 2e ch.
Demande : 18/02709
Décision : 21-477
Date : 17/09/2021
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 20/04/2018
Numéro de la décision : 477
Référence bibliographique : 6626 (crédit à la consommation, remboursement anticipé à l’initiative de l’emprunteur), 6629 (crédit affecté, réserve de propriété), 6054 (indice, garantie, option entre un gage et une clause de réserve de propriété), 5705 et 5725 (prescription de l’action), 5721 (obligation de relever d’office)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9130

CA RENNES (2e ch.), 17 septembre 2021 : RG n° 18/02709 ; arrêt n° 477 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Au soutien de sa demande de déchéance du droit du prêteur aux intérêts, les époux X. font valoir que la clause de remboursement anticipée serait abusive en ce qu'elle impose à l'emprunteur le respect d'un préavis de deux mois et que, le contrat de prêt ayant été volontairement soumis par les parties au code de la consommation, elle serait même illicite et rendrait l'offre irrégulière.

La société Consumer soutient à tort que cette prétention serait irrecevable comme prescrite, alors que la déchéance du droit du prêteur aux intérêts, opposée à ce dernier exerçant une action en paiement des sommes dues au titre du prêt, constitue un moyen de défense sur lequel la prescription est sans effet.

Il est par ailleurs exact que la clause d'un contrat de prêt conclu entre une banque et un consommateur subordonnant sa faculté de remboursement anticipé contractuellement reconnue au respect d'un préavis de deux mois est abusive au sens de l'article L. 132-1 devenu L. 212-1 du code de la consommation, en ce qu'elle a pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat dès lors qu'elle restreint, de manière excessive au regard de la durée du préavis ainsi imposé, le droit de l'emprunteur de jouir de cette faculté sans justifications technique ou économique claires pour le prêteur.

Cependant, les époux X. soutiennent à tort que les parties auraient volontairement soumis leurs relations contractuelles aux dispositions du code de la consommation, alors qu'ainsi que le souligne la société Consumer, les conditions générales de l'offre stipulent expressément que « les articles L. 311-1 à L. 311-37 du code de la consommation ne s'appliquent pas aux opérations à caractère professionnel, à celles dont le montant est supérieur à celui fixé par l'article D. 311-1 du code de la consommation (21.500 euros : décret 2001-96 du 2 février 2001) ainsi qu'à celles d'une durée égale ou inférieure à 3 mois ». À cet égard, il résulte en effet des articles L. 311-3 § 2° et D. 311-1 du code de la consommation, dans sa rédaction issue du décret du 2 février 2001, que les prêts d'un montant supérieur à 21.500 euros sont exclus du champ d'application de la réglementation des crédits à la consommation.

Dès lors, la clause n'est pas illicite et la déchéance du droit du prêteur aux intérêts pour irrégularité de l'offre n'est pas encourue.

Cette clause abusive est en effet seulement réputée non écrite conformément à l'article L. 132-1 devenu L. 212-1 du code de la consommation, ce qui est inopérant dans le présent litige qui lui est étranger. »

2/ « Les conditions générales du prêt comportent une clause VI de « garanties gage/réserve de propriété en cas de financement d'un véhicule », aux termes de laquelle « l'acheteur reconnaît que la vente du véhicule faite à son profit est assortie d'une clause de réserve de propriété convenue dès avant la livraison », que « l'emprunteur affecte le véhicule acheté en gage au profit du prêteur avec, à son gré, inscription à la préfecture compétente », et que « la publicité du gage par le prêteur emporte renonciation à la clause de réserve de propriété ».

Dans leurs ultimes conclusions d'appel, les époux X. ne concluent pas expressément sur le caractère abusif de cette clause, mais ils ont limité leur appel en excluant la disposition du jugement attaqué ayant débouté la société Consumer de sa demande de restitution du camping-car, ce dont il résulte qu'ils doivent être regardés comme s'appropriant sur ce point les motifs de cette décision, conformément à l'article 954 dernier alinéa du code de procédure civile.

À cet égard, le jugement attaqué énonce qu'il résulte des dispositions L. 132-1 et R. 132-2 § 6° du code de la consommation dans leur rédaction applicable à la cause que la clause qui prévoit la renonciation du prêteur au bénéfice de la réserve de propriété et la faculté d'y substituer unilatéralement un gage portant sur le même bien est présumée abusive, et que, laissant l'emprunteur dans l'ignorance de l'évolution de sa situation juridique, elle est de nature à entraver l'exercice de son droit de propriété et a donc pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif au sens des textes précités. Il ajoute qu'il s'évince en l'espèce de la clause VI du contrat de prêt que le prêteur bénéficie à la fois d'une clause de réserve de propriété et d'un droit de gage, et qu'il a la faculté de renoncer unilatéralement à la réserve de propriété en publiant le gage, de sorte que celle-ci est présumée abusive et que, le prêteur ne renversant pas cette présomption, elle doit être réputée non écrite et, partant, la demande de restitution du camping-car rejetée.

Au soutien de son appel incident, la société Consumer se borne à prétendre que la contestation de la clause relative à son droit de gage serait prescrite, et ne serait en tout état de cause pas fondée dès lors que les époux X. ont expressément reconnu, en signant l'offre, avoir reçu un exemplaire et pris connaissance des conditions générales du contrat de prêt comportant une convention de gage opposable aux emprunteurs en application de l'article 2333 du code civil.

La contestation, en raison de son caractère abusif, d'une clause dont le professionnel demande judiciairement l'application constitue cependant, comme lorsque le juge le relève d'office, ce qu'il est tenu de faire en application de l'article 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation, un moyen de défense sur lequel la prescription est sans effet.

Pour le surplus et comme l'ont relevé les premiers juges, il est en effet de principe que, si aucune disposition légale n'interdit au prêteur de bénéficier successivement d'une réserve de propriété puis d'un gage sur le bien financé, le passage d'une sûreté à l'autre ne peut toutefois intervenir à l'insu de l'emprunteur, et que, dès lors, la clause qui prévoit la renonciation du prêteur au bénéfice de la réserve de propriété et la faculté d'y substituer unilatéralement un gage portant sur le même bien est, sauf preuve contraire, présumée abusive par l'article R. 132-2 § 6°, du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la cause.

De surcroît, elle laisse l'emprunteur, s'il n'est pas tenu informé d'une telle renonciation, dans l'ignorance de l'évolution de sa situation juridique, ce qui est de nature à entraver l'exercice de son droit de propriété et a donc pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif au sens de l'article L. 132-1 devenu L. 212-1 du code de la consommation.

Or, comme l'ont relevé les premiers juges, la clause VI des conditions générales du prêt reconnaît à la fois au prêteur des droits sur le bien financé en vertu d'une réserve de propriété ainsi qu'en vertu d'un gage, avec faculté unilatérale et discrétionnaire de procéder à l'inscription de ce gage en préfecture et de renoncer ainsi à la réserve de propriété.

En outre, la société Consumer ne démontre pas que l'exercice de cette faculté de modification unilatérale des droits et obligations des parties sur la propriété du véhicule réservée au prêteur, présumée abusive par l'article R. 132-2 § 6, ne le serait pas, ni que cette faculté n'a pas été exercée à l'insu des époux X.

Il convient donc de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a débouté la société Consumer de sa demande de restitution du camping-car. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE RENNES

DEUXIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 17 SEPTEMBRE 2021

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 18/02709. Arrêt n° 477. N° Portalis DBVL-V-B7C- OZFG.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre, rédacteur,

Assesseur : Madame Marie-Odile GELOT-BARBIER, Conseillère,

Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,

GREFFIER : Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats, et Monsieur Régis ZIEGLER, lors du prononcé,

DÉBATS : A l'audience publique du 1er juin 2021

ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement le 17 septembre 2021 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

 

APPELANTS :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], [adresse], [...]

Madame Y. née X.

née [date] à [ville], [adresse], [...]

Représentée par Maître Hélène L.-B. de la SELARL LBP AVOCAT, avocat au barreau de RENNES

 

INTIMÉE :

La SA CA CONSUMER FINANCE

dont le siège social est [adresse], [...], [...], Représentée par Maître Erwan L. de la SCP L. & C., avocat au barreau de RENNES

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Selon offre préalable acceptée le 30 septembre 2007, la société Sofinco, exerçant sous la dénomination commerciale « Viaxel », a consenti aux époux X. un prêt de 58.500 euros affecté à l'achat d'un camping-car, au taux de 6,5 % l'an et remboursable en 144 mensualités de 650,57 euros, prestations d'assurances comprises.

Se prévalant d'une clause de garantie des conditions générales de l'offre, le prêteur a procédé le 26 mai 2008 à une inscription de gage en préfecture sur le véhicule financé.

Prétendant que les échéances de remboursement n'ont plus été honorées à compter d'octobre 2013, la société CA Consumer Finance (la société Consumer), se trouvant aux droits de la société Sofinco en vertu d'un traité de fusion du 15 février 2010, s'est, par lettre recommandée avec accusé de réception du 1er septembre 2014, prévalue de la déchéance du terme et, par acte du 27 mars 2015, a fait assigner les emprunteurs en paiement des sommes dues au titre du prêt et en restitution sous astreinte du véhicule gagé.

Les époux X. ont sollicité la déchéance du droit du prêteur aux intérêts et l'inopposabilité du gage en raison du caractère abusif et illicite des clauses de remboursement anticipé et d'affectation du véhicule en gage, ont contesté l'exactitude du taux effectif global (TEG) de 6,988 % mentionné dans l'offre et se sont portés demandeurs reconventionnels en paiement de dommages-intérêts pour manquement du prêteur à ses obligations d'information et de mise en garde.

Par jugement du 12 mars 2018, les premiers juges ont :

- condamné solidairement les époux X. à payer à la société Consumer la somme de 45.163,05 euros, avec intérêts au taux de 6,5 % à compter du 1er septembre 2014,

- débouté la société Consumer de sa demande de restitution du camping-car immatriculé XXX,

- débouté les époux X. de leur demande en paiement de dommages-intérêts,

- condamné in solidum les époux X. à payer à la société Consumer la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum les époux X. aux dépens,

- ordonné l'exécution provisoire.

Les époux X. ont relevé appel de cette décision le 20 avril 2018, pour demander à la cour de la réformer et de :

- à titre principal, constater que l'opération de crédit affecté à l'achat du camping-car portait sur un financement à hauteur de 47.500 euros, et non de 58.500 euros,

- en conséquence, dire que la créance de la société Consumer ne saurait excéder la somme de 9.820,42 euros,

- subsidiairement, déclarer l'exception de nullité de la clause de remboursement anticipé recevable,

- déclarer la clause de remboursement anticipée abusive,

- prononcer la déchéance du droit aux intérêts,

- en conséquence, dire que la créance de la société Consumer ne saurait excéder la somme de 9 820,42 euros,

- à titre infiniment subsidiaire, déclarer l'exception de contestation de la stipulation d'intérêts recevable,

- ordonner la substitution du taux d'intérêt légal au taux d'intérêt conventionnel,

- en conséquence, dire que la créance de la société Consumer ne saurait excéder la somme de 15 085,32 euros,

- en toutes hypothèses, dire que la société Consumer a manqué à son obligation d'information et, subsidiairement, à son devoir de mise en garde,

- condamner en conséquence la société Consumer au paiement d'une somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts,

- ordonner la compensation des sommes dont les parties seraient débitrices l'une de l'autre,

- débouter la société  Consumer de ses demandes, y compris celle formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Consumer au paiement d'une indemnité de 3.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

[*]

La société Consumer conclut quant à elle à la confirmation de la décision attaquée, sauf en ce qu'elle a refusé d'ordonner la restitution du camping-car.

Elle demande néanmoins à la cour de :

- déclarer irrecevables comme prescrites les contestations de la régularité de l'offre de crédit et de la stipulation d'intérêts,

- déclarer irrecevable comme prescrite la demande en paiement de dommages- intérêts pour manquement à ses obligations d'information et de mise en garde,

- déclarer irrecevables, comme ajoutant aux premières conclusions d'appel, les demandes présentées à titre principal par les époux X. dans leurs dernières conclusions,

- débouter les époux X. de leurs demandes,

- condamner solidairement les époux X. au paiement de la somme de 45.163,05 euros, avec intérêts au taux de « 5,37 % » à compter du 1er septembre 2014,

- ordonner la restitution du camping-car, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à venir,

- en tous cas, condamner les époux X. au paiement d'une indemnité de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

[*]

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées pour les époux X. le 20 mai 2020 et pour la société Consumer le 2 septembre 2020, l'ordonnance de clôture ayant été rendue le 8 avril 2021.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DES MOTIFS :

Sur la déchéance du droit du prêteur aux intérêts :

Au soutien de sa demande de déchéance du droit du prêteur aux intérêts, les époux X. font valoir que la clause de remboursement anticipée serait abusive en ce qu'elle impose à l'emprunteur le respect d'un préavis de deux mois et que, le contrat de prêt ayant été volontairement soumis par les parties au code de la consommation, elle serait même illicite et rendrait l'offre irrégulière.

La société Consumer soutient à tort que cette prétention serait irrecevable comme prescrite, alors que la déchéance du droit du prêteur aux intérêts, opposée à ce dernier exerçant une action en paiement des sommes dues au titre du prêt, constitue un moyen de défense sur lequel la prescription est sans effet.

Il est par ailleurs exact que la clause d'un contrat de prêt conclu entre une banque et un consommateur subordonnant sa faculté de remboursement anticipé contractuellement reconnue au respect d'un préavis de deux mois est abusive au sens de l'article L. 132-1 devenu L. 212-1 du code de la consommation, en ce qu'elle a pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat dès lors qu'elle restreint, de manière excessive au regard de la durée du préavis ainsi imposé, le droit de l'emprunteur de jouir de cette faculté sans justifications technique ou économique claires pour le prêteur.

Cependant, les époux X. soutiennent à tort que les parties auraient volontairement soumis leurs relations contractuelles aux dispositions du code de la consommation, alors qu'ainsi que le souligne la société Consumer, les conditions générales de l'offre stipulent expressément que « les articles L. 311-1 à L. 311-37 du code de la consommation ne s'appliquent pas aux opérations à caractère professionnel, à celles dont le montant est supérieur à celui fixé par l'article D. 311-1 du code de la consommation (21.500 euros : décret 2001-96 du 2 février 2001) ainsi qu'à celles d'une durée égale ou inférieure à 3 mois ».

À cet égard, il résulte en effet des articles L. 311-3 § 2° et D. 311-1 du code de la consommation, dans sa rédaction issue du décret du 2 février 2001, que les prêts d'un montant supérieur à 21.500 euros sont exclus du champ d'application de la réglementation des crédits à la consommation.

Dès lors, la clause n'est pas illicite et la déchéance du droit du prêteur aux intérêts pour irrégularité de l'offre n'est pas encourue.

Cette clause abusive est en effet seulement réputée non écrite conformément à l'article L. 132-1 devenu L. 212-1 du code de la consommation, ce qui est inopérant dans le présent litige qui lui est étranger.

Par ailleurs, sans préciser si cette sanction est sollicitée en conséquence d'une annulation de la stipulation d'intérêts ou d'une déchéance partielle du droit du prêteur aux intérêts, les époux X. sollicitent la substitution du taux d'intérêt légal au taux d'intérêt conventionnel pour inexactitude du TEG.

Il sera toutefois observé que la déchéance du droit du prêteur aux intérêts à proportion du préjudice subi prévue par l'ordonnance du 17 juillet 2019 constitue à présent la seule sanction applicable à l'inexactitude du TEG mentionné dans un contrat de prêt, fût-il conclu antérieurement à l'entrée en vigueur de ce texte.

En application de l'article L. 110-4 du code de commerce, cette action en déchéance du droit du prêteur aux intérêts se prescrit par dix ans, ramenés à cinq ans par la loi du 17 juin 2008, commençant à courir à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître l'inexactitude du TEG lui révélant le dommage en résultant, c'est à dire à compter de la date de l'offre lorsque cette inexactitude était décelable à la simple lecture de l'acte.

En l'occurrence, il apparaît à la lecture de l'offre que le TEG annuel de 6,998 % a été calculé sur la base de frais de dossiers de 877,50 euros, d'un coût du crédit de 27 600,48 euros et des frais de l'assurance décès-invalidité de 7 581,60 euros.

Ainsi que l'ont à juste titre relevé les premiers juges, la circonstance que ce TEG ne prenait pas en compte les frais de l'assurance emprunteur n'était donc pas décelable à la simple lecture de l'offre qui suggérait l'inverse, de sorte que la prescription n'est pas encourue.

En revanche, la société Consumer fait valoir avec raison que ces frais de l'assurance emprunteur n'avaient pas à entrer dans l'assiette de calcul du TEG, dès lors que celle-ci était expressément stipulée comme facultative et que, partant, elle ne constituait pas une condition de l'octroi du crédit.

Il n'y a donc pas davantage matière à déchéance du droit du prêteur aux intérêts pour ce motif.

 

Sur la créance du prêteur :

La société Consumer soutient que les époux X. resteraient lui devoir, au moment de la déchéance du terme du 1er septembre 2014 :

- 6.353,27 euros (4.505,32 + 1 847,95) au titre des échéances échues impayées,

- 579,15 euros au titre des cotisations d'assurance impayées,

- 35.065,01 euros au titre du capital restant dû,

- 3.165,62 euros au titre de l'indemnité contractuelle de défaillance égale à 8 % du capital dû de 339.570,33 euros (35.065,01 + 4.505,32 de part en capital des échéances échues impayées),

soit, au total, une somme de 45.163,05 euros, avec intérêts au taux « de 5,370 % l'an » à compter du 1er septembre 2014.

Devant la cour, les époux X. soutiennent que le financement qu'il sollicitaient n'étaient en réalité que de 47.500 euros, soit le prix d'acquisition du camping-car de 52.500 euros diminué d'un acompte de 5/000 euros, et qu'ils ont réglé jusqu'en septembre 2013 une somme totale de 37.679,58 euros, outre les cotisations d'assurance, de sorte qu'ils ne resteraient plus devoir qu'une somme de 9.820,42 euros.

La société Consumer prétend que les contestations des emprunteurs, formulées dans le dernier état de leurs écritures d'appel postérieurement l'expiration du délai de l'article 908 du code de procédure civile, seraient irrecevables en application de l'article 910-4 du même code.

Il résulte à cet égard de ce texte que les appelants doivent, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, présenter l'ensemble de leurs prétentions sur le fond dès leurs conclusions remises dans les trois mois de leur déclaration d'appel conformément à l'article 908.

Cependant, ces contestations, portant sur le montant de la créance revendiquée par l'intimée, ne constitue pas des prétentions, mais des moyens de défense opposées à la partie adverse, agissant en paiement à leur encontre, de sorte que, quand bien même elles auraient été reprise inopportunément et en violation de l'article 954 du code de procédure civile dans le dispositif des conclusions d'appel, elles ne sont pas irrecevables.

Il résulte par ailleurs de la facture d'achat de camping-car produite par les emprunteurs eux-mêmes :

- que le prix du véhicule était de 52.471,10 euros TTC,

- que leur précédent camping-car a été repris par le vendeur moyennant le prix de 35.500 euros,

- qu'ils restaient donc devoir au vendeur la somme de 16.971,10 euros,

mais qu'il devaient aussi régler à « Viaxel » (dénomination commerciale de la société Sofinco aux droits de laquelle se trouve la société Consumer) une somme de 41.528,90 euros due au titre du remboursement anticipé du prêt contracté en vue de financer leur précédent camping-car.

Il s'en évince que l'opération financée, portant à la fois sur l'achat d'un nouveau camping-car, reprise déduite, ainsi que sur le rachat d'un crédit antérieur, était donc bien de 58.500 euros (16.971,10 + 41.528,90).

D'autre part, contrairement à ce que prétendent les époux X., le tableau d'amortissement établi par le prêteur ne comporte aucune « erreur flagrante » relativement aux modalités d'amortissement du prêt après le paiement de la première mensualité de remboursement, le capital restant dû demeurant toujours de 58.500 euros puisque, du fait du différé de remboursement de deux mois, les premières mensualités ne couvraient que le paiement des intérêts, et que la somme de 62.122,84 euros dont font état les appelants ne correspond pas au capital restant dû après règlement de la première échéance mais au montant à payer, indemnité comprise, en cas de remboursement anticipé à cette date.

Enfin, si le bon de commande du camping-car en date du 29 septembre 2007 fixait le prix du camping car à 52.500 euros et prévoyait le versement au vendeur d'un acompte de 5.000 euros par chèque, la circonstance que le prix n'ait finalement été que de 52.471,10 euros est en faveur des consommateurs, qui ne peuvent donc s'en plaindre et ne démontrent par ailleurs pas avoir effectivement remis au vendeur un chèque d'acompte encaissé de 5.000 euros, la production de leurs relevés de compte ne remontant pas avant juin 2008.

S'agissant des règlements effectués, l'historique des mouvements du compte et l'examen des relevés de compte des époux X. révèlent en effet que les prélèvements opérés par la société Consumer variaient de façon fantaisiste et inexplicable, et que le prêteur a même facturé en supplément l'assurance complémentaire accident et assistance de 12 euros par mois durant une dizaine de mois, alors qu'elle était, selon les énonciations de l'offre, nécessairement incluse dans le montant de l'échéance « avec prestations » de 650,57 euros.

Toutefois, il doit être observé qu'en définitive, la société Consumer réclame le paiement de la totalité des dix échéances de novembre 2013 à août 2014 à concurrence de 5.979,20 euros (597,92 x 10), ainsi que celle d'octobre 2013 à hauteur de 374,07 euros outre la cotisation d'assurances de 52,65 euros, tandis que les époux X. justifient par la production de leurs relevés de compte avoir réglé jusqu'en septembre 2013 une somme totale de 40.943,88 euros assurances comprise, soit 40 335,34 euros au titre de la totalité des 62 mensualités échues de juin 2008 à juin 2013 (650,57 x 62) et 608,54 euros au titre de l'échéance d'octobre 2013.

Il en résulte que la contestation ne porte que sur le reliquat impayé de l'échéance d'octobre 2013 assurances incluses, de 426,72 euros (374,07 + 52,65) selon la société Consumer et de 42,03 euros (650,57 - 608,54) selon les époux X.

Il est possible, comme le prétend le prêteur, que des incidents de paiement antérieurement régularisés aient donné lieu à perception d'intérêts de retard, voire d'indemnités sur impayées, mais la société Consumer n'en justifie pas suffisamment, de sorte que sa demande en paiement de la mensualité d'octobre 2013 ne sera admise qu'à hauteur de 42,03 euros cotisation d'assurances incluses, et non de 426,72 euros.

Les époux X. seront donc solidairement condamnés au paiement de la somme de 44.778,36 euros (45.163,05 - 426,72 + 42,03), avec intérêts au taux contractuel à compter de la déchéance du terme du 1er septembre 2014 sur le principal, hors indemnité de défaillance, de 41.612,74 euros.

À cet égard, il sera observé que la société Consumer réclame des intérêts de retard au taux de 5,37 % et que la cour, tenue par l'objet du litige tel qu'il a été déterminé par les parties, ne pourra qu'y faire droit.

 

Sur la responsabilité du prêteur :

Les époux X. soutiennent que la société Consumer aurait manqué à son obligation d'informations précontractuelles en leur proposant le rachat du crédit antérieur, alors que le montant racheté de 41.528,90 euros n'est ni expliqué, ni justifié, qu'en toute hypothèse la poursuite de l'exécution du contrat de prêt contracté en vue de financer leur premier camping-car leur aurait permis d'éviter de supporter la charge d'une indemnité de remboursement anticipé et que, de surcroît, le prêteur aurait dû les alerter sur le défaut de prise en compte de leur acompte dans la détermination du montant du crédit.

La société Consumer fait cependant à juste titre observer que cette demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts pour un manquement à son obligation d'information est irrecevable car prescrite.

En effet, il résulte de l'article L. 110-4 du code de commerce que l'action de l'emprunteur en responsabilité du prêteur se prescrit par dix ans, ramenés à cinq ans par la loi du 17 juin 2008, commençant à courir à compter du jour de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime.

Or, en l'occurrence, le dommage résultant de ce prétendu manquement à l'obligation d'information du prêteur est survenu dès la conclusion du contrat de prêt concrétisé par l'acceptation de l'offre en date du 30 septembre 2007, et les époux X. ne caractérisent aucune circonstance particulières de nature à établir que ce dommage, procédant des modalités du montage de l'opération et visible à la simple lecture de la facturation du vendeur et du contrat de prêt du 30 septembre 2007, ne leur aurait été révélé que postérieurement.

Sur ce fondement, la demande en paiement de la somme de 10.000 euros et en compensation, qui, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, n'est pas un moyen de défense mais a été présentée comme une prétention reconventionnelle par conclusions du 15 février 2016, est donc irrecevable, le jugement attaqué étant réformé en ce sens.

Il est par ailleurs exact que la banque dispensatrice de crédit est tenue, à l'égard d'emprunteurs non avertis, d'un devoir de mise en garde sur le risque né d'un prêt excessif au regard de leurs capacités de remboursement.

C'est ici à tort que la société Consumer oppose à la demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts fondée sur ce manquement du prêteur à son devoir de mise en garde une fin de non-recevoir tirée de la prescription.

Il est en effet de principe qu'e matière de manquement au devoir de mise en garde, le délai de prescription de l'article L. 114-1 du code de commerce ne commence à courir qu'à compter des incidents de paiement caractérisant l'apparition du dommage résultant de l'octroi d'un crédit excessif.

Or, ces incidents sont en l'occurrence survenus à partir d'octobre 2013 et la déchéance du terme a été prononcée le 1er septembre 2014, de sorte que la demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts, formée par conclusions du 15 février 2016, est recevable.

En revanche, la société Consumer fait valoir avec raison que le crédit consenti n'était pas excessif, les revenus déclarés des époux X., de 1.600 euros par mois pour le mari et de 955 euros par mois pour la femme, ayant été vérifiés par la remise de leur avis d'impôt sur le revenu de l'année 2006 et des bulletins de salaire de septembre 2007, faisant effectivement apparaître pour M. X., sur la période de juin à septembre 2007, une augmentation de revenus par rapport à 2006 à un niveau proche de celui déclaré, et pour Mme X., sur la période de janvier à septembre 2007, des revenus légèrement supérieurs à ceux déclarés.

Les mensualités du prêt étant de 650,57 euros, assurances comprises, il en résultait donc, ainsi que l'ont exactement calculé les premiers juges, un taux d'endettement de l'ordre de 25 % qui n'était pas excessif, celui-ci ne pouvant en effet être déterminé en prenant en compte la charge de remboursement du prêt antérieur racheté par le nouveau concours, ni le loyer de 500 euros par mois qui n'est pas assimilable à un encours de crédit.

Au surplus, même en tenant compte de cette charge de loyer, il subsistait pour les époux X., après règlement de ce loyer et de l'échéance du prêt litigieux, un reste à vivre de 1.404 euros, ce dont il résulte que ce prêt était adapté à leurs capacités de remboursement.

La demande en paiement de dommages-intérêts fondée sur ce manquement au devoir de mise en garde a donc été à juste titre rejetée par le jugement attaqué.

 

Sur la restitution du camping-car :

Les conditions générales du prêt comportent une clause VI de « garanties gage/réserve de propriété en cas de financement d'un véhicule », aux termes de laquelle « l'acheteur reconnaît que la vente du véhicule faite à son profit est assortie d'une clause de réserve de propriété convenue dès avant la livraison », que « l'emprunteur affecte le véhicule acheté en gage au profit du prêteur avec, à son gré, inscription à la préfecture compétente », et que « la publicité du gage par le prêteur emporte renonciation à la clause de réserve de propriété ».

Dans leurs ultimes conclusions d'appel, les époux X. ne concluent pas expressément sur le caractère abusif de cette clause, mais ils ont limité leur appel en excluant la disposition du jugement attaqué ayant débouté la société Consumer de sa demande de restitution du camping-car, ce dont il résulte qu'ils doivent être regardés comme s'appropriant sur ce point les motifs de cette décision, conformément à l'article 954 dernier alinéa du code de procédure civile.

À cet égard, le jugement attaqué énonce qu'il résulte des dispositions L. 132-1 et R. 132-2 § 6° du code de la consommation dans leur rédaction applicable à la cause que la clause qui prévoit la renonciation du prêteur au bénéfice de la réserve de propriété et la faculté d'y substituer unilatéralement un gage portant sur le même bien est présumée abusive, et que, laissant l'emprunteur dans l'ignorance de l'évolution de sa situation juridique, elle est de nature à entraver l'exercice de son droit de propriété et a donc pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif au sens des textes précités.

Il ajoute qu'il s'évince en l'espèce de la clause VI du contrat de prêt que le prêteur bénéficie à la fois d'une clause de réserve de propriété et d'un droit de gage, et qu'il a la faculté de renoncer unilatéralement à la réserve de propriété en publiant le gage, de sorte que celle-ci est présumée abusive et que, le prêteur ne renversant pas cette présomption, elle doit être réputée non écrite et, partant, la demande de restitution du camping-car rejetée.

Au soutien de son appel incident, la société Consumer se borne à prétendre que la contestation de la clause relative à son droit de gage serait prescrite, et ne serait en tout état de cause pas fondée dès lors que les époux X. ont expressément reconnu, en signant l'offre, avoir reçu un exemplaire et pris connaissance des conditions générales du contrat de prêt comportant une convention de gage opposable aux emprunteurs en application de l'article 2333 du code civil.

La contestation, en raison de son caractère abusif, d'une clause dont le professionnel demande judiciairement l'application constitue cependant, comme lorsque le juge le relève d'office, ce qu'il est tenu de faire en application de l'article 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation, un moyen de défense sur lequel la prescription est sans effet.

Pour le surplus et comme l'ont relevé les premiers juges, il est en effet de principe que, si aucune disposition légale n'interdit au prêteur de bénéficier successivement d'une réserve de propriété puis d'un gage sur le bien financé, le passage d'une sûreté à l'autre ne peut toutefois intervenir à l'insu de l'emprunteur, et que, dès lors, la clause qui prévoit la renonciation du prêteur au bénéfice de la réserve de propriété et la faculté d'y substituer unilatéralement un gage portant sur le même bien est, sauf preuve contraire, présumée abusive par l'article R. 132-2 § 6°, du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la cause.

De surcroît, elle laisse l'emprunteur, s'il n'est pas tenu informé d'une telle renonciation, dans l'ignorance de l'évolution de sa situation juridique, ce qui est de nature à entraver l'exercice de son droit de propriété et a donc pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif au sens de l'article L. 132-1 devenu L. 212-1 du code de la consommation.

Or, comme l'ont relevé les premiers juges, la clause VI des conditions générales du prêt reconnaît à la fois au prêteur des droits sur le bien financé en vertu d'une réserve de propriété ainsi qu'en vertu d'un gage, avec faculté unilatérale et discrétionnaire de procéder à l'inscription de ce gage en préfecture et de renoncer ainsi à la réserve de propriété.

En outre, la société Consumer ne démontre pas que l'exercice de cette faculté de modification unilatérale des droits et obligations des parties sur la propriété du véhicule réservée au prêteur, présumée abusive par l'article R. 132-2 § 6, ne le serait pas, ni que cette faculté n'a pas été exercée à l'insu des époux X.

Il convient donc de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a débouté la société Consumer de sa demande de restitution du camping-car.

 

Sur les frais irrépétibles :

Il serait enfin inéquitable de laisser à la charge de la société Consumer l'intégralité des frais exposés par elle à l'occasion de l'instance d'appel et non compris dans les dépens, en sorte qu'il lui sera alloué une somme de 1.300 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Infirme le jugement rendu le 12 mars 2018 par le tribunal de grande instance de Rennes en ce qu'il a déclaré la demande de déchéance du droit du prêteur aux intérêts pour illicéité de la clause de remboursement anticipé irrecevable, déclaré la demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts pour manquement du prêteur à son obligation d'information recevable, et condamné les époux X. au paiement de la somme de 45.163,05 euros avec intérêts au taux de 6,5 % ;

Déclare la demande de déchéance du droit du prêteur aux intérêts pour illicéité de la clause de remboursement anticipé recevable, mais non fondée, et la rejette ;

Condamne solidairement les époux X. à payer à la société CA Consumer Finance la somme de 44.778,36 euros, avec intérêts au taux de 5,37 % sur le principal de 41.612,74 euros à compter du 1er septembre 2014 ;

Déclare la demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts pour manquement du prêteur à son obligation d'information irrecevable ;

Confirme le jugement attaqué en ses autres dispositions ;

Condamne les époux X. à payer à une somme de 1.300 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne les époux X. aux dépens d'appel ;

Accorde le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Rejette toutes autres demandes contraires ou plus amples.

LE GREFFIER                                LE PRÉSIDENT