CA GRENOBLE (ch. com.), 14 octobre 2021
CERCLAB - DOCUMENT N° 9168
CA GRENOBLE (ch. com.), 14 octobre 2021 : RG n° 20/01515
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Le tribunal de commerce a constaté que le contrat de location et le contrat de téléphonie fixe sont interdépendants. Cependant, il résulte de ces deux contrats qu'ils ont porté sur des objets différents :
- le contrat de location a concerné la fourniture de divers matériels, pour la mise en place d'une plateforme sécurisée, pour une durée de 63 mois, au prix mensuel de 164 euros HT. Le matériel a été cédée à la société financière, laquelle a, le 12 juin 2018, informé l'intimée de ce financement, avec l'envoi de l'échéancier correspondant au contrat de location conclu avec la société SCT ;
- le contrat de service de téléphonie fixe a prévu la prise en charge de deux lignes par la société SCT, pour 81 euros HT par mois, outre des frais de mise en service de 250 euros HT, sans remise de matériel. Ce contrat n'a été signé que par la société SCT et l'intimée, et son coût n'a pas été intégré dans les loyers que l'intimée devait régler à la société Bnp Paribas. Les mensualités de 81 euros HT ainsi que les frais d'installation des lignes ont été facturés directement par la société SCT. Il ne s'agit ainsi que d'un contrat de service, et non de location d'un matériel.
Aucun élément ne permet de constater que les prestations différentes prévues par ces deux contrats supposaient nécessairement que l'exécution de l'un soit subordonnée à celle de l'autre. De ce fait, il n'existe pas d'interdépendance contrairement à l'appréciation portée par le tribunal de commerce, alors que la demande de la société SCT ne porte que sur la résiliation du contrat de service de téléphonie fixe et est liée aux conséquences financières de la résiliation de ce seul contrat. En outre, si une résiliation des deux contrats devait intervenir, cela aurait supposé la mise en cause de la société financière, ce qui n'a pas été le cas. »
2/ « Concernant les conditions générales, il a été prévu précisément les modalités d'exécution de chacune des obligations respectives des parties, dans une typographie lisible. Les divers paragraphes sont séparés et indiqués en corps gras. Deux pages particulières sont dédiées au contrat de téléphonie fixe, rédigées selon les mêmes caractères d'imprimerie. L'intimée a apposé sa signature sur la deuxième page concernant les conditions applicables au contrat de téléphonie fixe. Elle ne peut ainsi soutenir que ces conditions ne lui ont pas été communiquées, alors que seule la résiliation du contrat de téléphonie fixe est en litige. Ces conditions générales concernant la téléphonie fixe lui sont ainsi opposables.
S'agissant du caractère non écrit de ces conditions, au motif qu'elles créeraient un déséquilibre significatif au préjudice de l'intimée, notamment concernant la limitation de la responsabilité de l'appelante, elle exerce, concernant le contrat de services de lignes de téléphonies fixe et d'accès au web, une activité de courtier, utilisant les infrastructures développées et fournies par des tiers (article 8.1 des conditions générales) et sur lesquelles elle n'a ainsi aucune maîtrise. De ce fait, l'appelante a limité sa garantie, précisant dans le même article ne pouvoir garantir que son service soit totalement ininterrompu et sans incident. Elle s'est seulement engagée à prendre toutes mesures raisonnables, conformes à l'état de la technique, pour remédier le plus rapidement possible à toute défaillance pouvant lui être imputable.
Le caractère équilibré ou non de conditions de vente s'apprécie au regard de l'ensemble du contrat. En la cause, en raison de la nature du service de téléphonie et d'accès au web et de la particularité de son rôle liée à son activité de courtage, l'appelante a pu inclure dans ses conditions générales de vente une limitation de sa garantie concernant seulement les éléments qu'elle pouvait maîtriser, sans être responsable des défaillances imputables à ses fournisseurs, ne se trouvant ainsi liée que par une obligation de moyens.
En conséquence, les clauses litigieuses du contrat d'adhésion de téléphonie fixe ne peuvent être réputées non écrites, et sont opposables à l'intimée, laquelle a reconnu avoir pris connaissance et accepter les conditions générales et particulières, ainsi que mentionnées dans les contrats, établis en plusieurs exemplaires de différentes couleurs dont un destiné à l'intimée, qui en a également reçu une copie par l'intermédiaire de l'organisme financier lors de la mise en place du contrat concernant le paiement des loyers. »
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU 14 OCTOBRE 2021
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 20/01515. N° Portalis DBVM-V-B7E-KNMY. Appel d'une décision (N° RG 2019J00063) rendue par le Tribunal de Commerce de ROMANS-SUR-ISÈRE en date du 19 février 2020 suivant déclaration d'appel du 28 avril 2020.
APPELANTE :
Société SOCIÉTÉ COMMERCIALE DE TELECOMMUNICATION SCT
SAS exerçant sous la marque CLOUD ECO, au capital de 7.500.000 €, immatriculée au R.C.S. de BOBIGNY sous le numéro XXX, prise en la personne de son représentant légal, Président, domicilié en cette qualité audit siège [...], [...], représentée par Maître Florence N. de la SELARL FTN, avocat au barreau de GRENOBLE, substitué par Maître FRANCE, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMÉE :
SARL CHAUDRONNERIE TUYAUTERIE R.
Société à responsabilité limitée, au capital de 10.000,00 euros, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de ROMANS, sous le numéro YYY, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège, [...], [...], représentée par Maître Valérie L. de l'AARPI CAP CONSEIL, avocat au barreau de VALENCE
COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ : Mme Marie-Pierre FIGUET, Présidente de Chambre, Mme Marie Pascale BLANCHARD, Conseillère, M. Lionel BRUNO, Conseiller
DÉBATS : A l'audience publique du 2 septembre 2021, M. Lionel BRUNO, Conseiller,qui a fait rapport assisté de Alice RICHET, Greffière, a entendu les avocats en leurs conclusions, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile. Il en a été rendu compte à la Cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu ce jour.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Faits et procédure :
Le 1er mars 2018, la société Chaudronnerie Tuyauterie R. (ci-après la société R.) a souscrit auprès de la Société Commerciale de Télécommunication SCT (ci-après la société SCT) un contrat d'installation/accès web et de téléphonie fixe et mobile.
Après résiliation de ce contrat par la société R. le 10 juillet 2018, la société SCT a sollicité le paiement de la somme de 10.967,99 euros HT au titre de l'indemnité de résiliation du service de téléphonie fixe.
N'ayant pas obtenu le règlement de la facture de téléphonie fixe du mois de juillet 2018 ni des frais de résiliation, la société SCT a mis en demeure, par courrier du 30 janvier 2019, la société R., d'avoir à lui régler la somme de 13.420,79 euros. Par le même courrier, la demanderesse a proposé un règlement amiable à hauteur de 6.000 euros TTC avant d'engager une procédure contentieuse. La société R. n'ayant pas réglé ces sommes à la société SCT, cette dernière a saisi le tribunal de commerce de Romans sur Isère.
Par jugement du 19 février 2020, le tribunal de commerce a :
- constaté la résiliation du contrat de services et celui de location en date du 13 juillet 2018 ;
- débouté la société Chaudronnerie Tuyauterie R. (sic) de sa demande en paiement au titre de ses indemnités de résiliation du service fixe à hauteur de 13.173,59 euros TTC ;
- a condamné la société Chaudronnerie Tuyauterie R. à payer à La société SCT la somme de 247,20 euros TTC au titre de sa facture de juillet 2018 ;
- dit qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire ;
- rejeté toutes autres demandes ;
- condamné la société Chaudronnerie Tuyauterie R. aux dépens.
La société SCT a interjeté appel de cette décision le 28 avril 2020.
L'instruction de cette procédure a été clôturée le 24 juin 2021.
Prétentions et moyens de la société SCT :
Selon ses conclusions remises le 16 octobre 2020, elle demande, au visa de l'article 1103 du code civil :
- de réformer le jugement déféré en ce qu'il a constaté la résiliation du contrat de services et celui de location en date du 13 juillet 2018, débouté la concluante de sa demande en paiement au titre de ses indemnités de résiliation du service fixe à hauteur de 13.173,59 euros, condamné la société Chaudronnerie Tuyauterie R. à lui payer la somme de 247,20 euros au titre de sa facture de juillet 2018, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- statuant à nouveau, de déclarer bien fondée les demandes de la concluante ;
- de constater la résiliation du contrat de téléphonie aux torts exclusifs de la société Chaudronnerie Tuyauterie R. ;
- de condamner cette société au paiement de la somme de 13.173,59 euros TTC au titre de ses indemnités de résiliation du service fixe ;
- de confirmer le jugement pour le surplus ;
- de condamner la société Chaudronnerie Tuyauterie R. au paiement de la somme de 3.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, outre dépens.
Elle expose :
- qu'elle est un courtier en fourniture de services et de matériels téléphoniques, son activité consistant notamment à acheter d'importants volumes de temps de télécommunication aux différents opérateurs de télécommunications en vue de les revendre à sa clientèle, exclusivement composée de professionnels et de commerçants ; qu'elle propose des services d'installation/accès web, de téléphonie fixe ainsi que de téléphonie mobile ;
- que l'intimée a conclu le 1er mars 2018 un contrat ayant pour objet un service d'installation/accès web ainsi que de téléphonie fixe et mobile, pour les besoins de son activité professionnelle ; que le 10 juillet 2018, elle a résilié ce contrat, ce dont la concluante a pris acte le 13 juillet 2018, sollicitant le paiement de 10.967,99 euros HT au titre de l'indemnité de résiliation du service de téléphonie fixe ;
- que si l'intimée soutient qu'il appartient à la concluante de mettre en cause la société BNP Paribas en raison d'une prétendue indivisibilité des contrats souscrits pour que ses demandes soient recevables, cette société n'est que le financier du contrat de location de matériel souscrit comme l'indique l'intimée elle-même ; que les contrats souscrits sont indépendants les uns des autres, de sorte que la concluante n'a aucune demande à formuler à l'encontre de la société financière et ne dispose d'aucune créance à faire valoir à son encontre, puisque les demandes portées contre l'intimée concernent uniquement le règlement des factures et les frais de résiliation relatifs au contrat de téléphonie fixe, pour lequel la société BNP Paribas n'est pas le financier ;
- que l'intimée ne peut prétendre que les conditions générales et particulières de vente sont illisibles et inopposables pour tenter de se soustraire à ses obligations, puisque ces conditions sont parfaitement lisibles à l''il nu et ne souffrent d'aucune pâleur d'impression ; que chaque service dispose de conditions propres expressément indiquées en haut de chaque page ;
- que si l'intimée soutient que la clause prévoyant une obligation de moyen pour la fourniture du service internet en illimité avec un débit de 2mbits crée un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties au sens de l'article 1171 du code civil et qu'ainsi la concluante est tenue à une obligation de résultat, il résulte de l'article 8.1 des conditions générales que le fournisseur n'est soumis qu'à une obligation de moyens pour l'exécution de ses services et mettra en œuvre tous les moyens appropriés dont il dispose ou dont il pourra disposer dans la limite de ses moyens financiers et au regard de l'économie du contrat, aux fins de parer aux dysfonctionnements ; que la concluante étant un courtier, elle ne peut ainsi garantir que son service soit totalement ininterrompu, sans incident, et qu'il offre un niveau de sécurité sans failles, comme prévu à l'article 8, puisque sa prestation implique le recours à des structures et infrastructures techniques propriétés de tiers, sur lesquelles ont été acquis des droits d'utilisations et de passage, et dont la gestion et l'administration ne peuvent l'engager, son obligation se limitant à prendre toutes les mesures raisonnables, conforme à l'état de la technique, au jour de la survenance de l'incident, pour remédier le plus rapidement possible à toute défaillance pouvant lui être imputable ; qu'il serait illogique qu'un simple courtier soit tenu par une obligation de résultat, dans la mesure ou dans la pratique, il reste dans une situation où il offre des services pour lesquels il fait lui-même appel en amont à des tiers vis-à-vis desquels il ne peut maîtriser l'ensemble des risques ou des aléas ; qu'en tout état de cause, l'article D. 98-4 du code des postes et des communications électroniques ne met à la charge de l'opérateur qu'une obligation de moyen ;
- qu'en l'espèce, la concluante a tout mis en œuvre pour apporter une solution pérenne dans les meilleurs délais aux difficultés techniques évoquées par l'intimée dans son courrier du 3 juillet 2018 ; que pour la connexion internet, la concluante a déployé tout ce qui était prévu au contrat et a fourni, à titre exceptionnel et commercial, une IP publique, alors que le contrat ne le prévoyait pas ;
- que si l'intimée soutient que la concluante se fonderait sur deux cas différents pour solliciter le règlement des frais de résiliation, demandant ainsi que soit réputée non écrite la clause 13.3.2 des conditions particulières fixes, chaque article sur lequel se fonde la concluante vise un service différent ; que l'article 13.3.1 des conditions particulières sur lequel se fonde la concluante pour réclamer la somme de 2.200 euros HT concerne la fourniture de matériel dans la mesure où il dispose que dans le cadre d'une offre assortie à la fourniture de matériel, toute résiliation du client avant la date du 1er rendez-vous technique rendra exigible immédiatement et de plein droit le versement par le client au fournisseur d'une somme de 2.200 euros HT par site ; que l'article 13.3.2 des conditions particulières sur lequel se fonde la concluante pour réclamer la somme de 8.767,99 euros HT concerne le service de téléphonie fixe dans la mesure où il dispose qu'en cas de dénonciation du service par le client après la date du 1er rendez-vous technique, au cours de la période initiale d'engagement, en cas de demande de portabilité sortante, dans le cas où le client ne respecterait pas les délais de préavis, en cas de baisse de consommation du client, en cas de résiliation du contrat de service par le fournisseur à la suite d'un manquement grave du client, le client sera redevable immédiatement au fournisseur d'une somme correspondant soit au minimum de la facturation telle que défini à l'article 9.4 de ces conditions, multipliées par le nombre de mois restant à échoir jusqu'au terme du contrat, soit, si ce montant devait être supérieur au minimum de facturation susvisé, au montant moyen des facturations émises antérieurement à la notification de la résiliation multipliée par le nombre de mois restant à échoir; qu'ainsi, les frais de service de téléphonie fixe ont été calculés sur la moyenne de facturation et les frais de location sur une indemnité forfaitaire ; qu'il s'agit de deux cas et services différents ;
- que l'intimée a violé ses obligation contractuelles en ne réglant pas sa facture, puisqu'elle s'était engagée sur des services pour une période de 63 mois ; qu'en souscrivant le contrat, elle a reconnu avoir pris connaissance et accepté les conditions générales et particulières du contrat ; qu'elle était parfaitement éclairée sur son contenu et donc tenue d'en respecter les termes conformément aux dispositions de l'article 1103 du code civil ;
- qu'elle n'a cependant pas réglé ses communications téléphoniques passées pour un montant total de 247,20 euros TTC conformément à l'article 5, des conditions financières, prévoyant que les sommes facturées sont dues par le client à la date d'établissement de la facture et payables par prélèvement SEPA, dans un délai maximum de quinze jours suivant la date de facturation ;
- qu'elle est redevable de l'indemnité pour résiliation anticipée des contrats qui sont indépendants les uns des autres, puisque le client n'est pas tenu de souscrire à l'ensemble des prestations, qui donnent lieu à des tarifications distinctes ; que chacun des contrats particuliers prévoient des conditions générales distinctes, y compris pour celles relatives à la résiliation du service concerné ;
- que concernant les services de téléphonie fixe, l'article 9 des conditions particulières de ce contrat a stipulé qu'il prend effet dès son acceptation et sa signature par les parties pour une durée minimale initiale de soixante trois mois ; que les lignes ont bien été reprises à compter du 23 mai 2018 de sorte que l'intimée a bénéficié d'un service comme l'attestent les relevés d'appels des mois de mai à juillet 2018 ; que la concluante a mis en œuvre toutes les dispositions nécessaires pour répondre aux griefs émis par l'intimée ; que le constat d'huissier du 20 juillet 2018 est postérieur aux demandes de résiliation de l'intimée des 3 et 10 juillet 2018 ainsi qu'à la prise en compte de la demande de résiliation du 13 juillet 2018, de sorte qu'il est inopérant puisque les services étaient déjà résiliés ; que l'intimée a résilié de façon anticipée ce contrat de son propre chef, de sorte que cette résiliation doit être prononcée à ses torts exclusifs ;
- que l'intimée est redevable de l'indemnité de résiliation pour chaque service conformément aux dispositions contractuelles ; qu'ainsi, pour le service de téléphonie fixe, la concluante est fondée à réclamer l'indemnité contractuelle de résiliation, s'élevant à la somme de 10.977,49 euros HT, soit 13.173,59 euros TTC en application des articles 13.3.1, 13.3.2 et 13.3.4 des conditions particulières du service fixe (148,61 euros HT au titre de la moyenne de facture X 59 mois restant à échoir + 2.200 euros HT) ;
- que la clause de résiliation doit être qualifiée de clause de dédit, et non de clause pénale, puisqu'elle ne vise pas à sanctionner l'inexécution d'une obligation contractuelle, mais à permettre de renoncer au contrat alors qu'il est formé, moyennant le paiement d'une somme d'argent dont le calcul est prévu à l'avance ; qu'en l'espèce, l'indemnité rémunère le fournisseur qui a mobilisé sa force de production au profit du bénéficiaire et compense le manque à gagner du fait de l'absence de perception des abonnements et des consommations jusqu'au terme du contrat ; que cette indemnité n'est pas ainsi susceptible de modération en application de l'article 1152 du code civil ;
- que le tribunal de commerce a rejeté à juste titre la demande de l'intimée visant le paiement de 15.000 euros au titre de dommages et intérêts suite à une prétendue retenue abusive de ses RIO, faute pour elle d'en justifier ; que l'intimée ne démontre en aucun cas l'existence du préjudice qu'elle chiffre à sa convenance sur aucun élément probant ; qu'en outre, la concluante a adressé le RIO par courrier simple du 27 juillet 2018.
Prétentions et moyens de la société Chaudronnerie Tuyauterie R. :
Selon ses conclusions remises le 2 octobre 2020, elle demande, au visa des articles 1110, 1118 et 1119, 1171, 1186, 1170, 1226 et suivants du code civil :
- de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société SCT de sa demande de condamnation au paiement de la somme de 13.173,59 euros ;
- de recevoir son appel incident ;
- ainsi, d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de condamnation de la société SCT à lui payer la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
- de l'infirmer en ce qu'il a condamné la concluante au paiement de la somme de 247,20 euros au titre de la facture de juillet 2018 ;
- de dire que le contrat signé le 1er mars 2018 avec la société SCT et la société BNP Paribas Lease Group constitue un tout indivisible ;
- de prendre acte qu'un seul contrat de service de téléphonie fixe a été conclu auprès de la société SCT ;
- de prendre acte comme l'a conclu la société SCT que chaque service constitue un contrat indépendant et est soumis à ses propres conditions particulières ;
- de dire que les conditions particulières de téléphonie fixe n'ont pas été communiquées à la concluante et que la charge de la preuve de la communication et de l'opposabilité de ces conditions particulières pèse sur la société SCT qui est défaillante ; de dire que les conditions particulières de téléphonie fixe n'ont pas été signées par la concluante et qu'elles ne lui sont pas opposables ;
- subsidiairement, si la cour estime que ces conditions particulières de téléphonie fixe sont opposables, de dire qu'elles constituent un contrat d'adhésion ; de juger qu'elles sont non écrites en ce qu'elles créent un déséquilibre significatif ;
- de prendre acte que la concluante a demandé la résolution du contrat de location financière et qu'en raison de l'indivisibilité du contrat de location financière et du contrat de service de téléphonie fixe, la résolution d'un des contrats entraîne de facto la caducité du contrat conclu avec la société SCT ;
- dans tous les cas, de prononcer la résiliation du contrat de service de téléphonie fixe aux torts de la société SCT ;
- de dire que l'obligation à laquelle est tenue la société SCT est une obligation de résultat ; de juger que l'appelante n'a pas rempli son obligation de livrer une installation conforme ;
- de prononcer ainsi la résolution du contrat conclu le 1er mars 2018 aux torts exclusifs de la société SCT à la date du 10 juillet 2018 ;
- de débouter en conséquence la société SCT de sa demande de condamnation au paiement de la somme de 13.173,59 euros, augmentée des intérêts au taux légal ;
- subsidiairement, de débouter la société SCT de sa demande indemnitaire fondée sur une application cumulative des articles 13-3-1 et 13-3-2 des conditions particulières de service ;
- de dire que l'appelante ne justifie pas sa demande chiffrée ;
- de dire que l'article 13-3-2 des conditions particulières de service n'a pas vocation à s'appliquer lorsque la résiliation est en lien avec un manquement de la société SCT à ses obligations ;
- subsidiairement, de dire que ces clauses constituent une clause pénale, et non une clause de dédit ;
- si la cour devait estimer que le contrat n'a pas été résilié aux torts de la société SCT, de limiter le montant de l'indemnité à la somme de l'euro symbolique ;
- reconventionnellement, de condamner la société SCT à payer à la concluante la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison de l'absence de communication des numéros RIO de ses propres lignes en dépit de la lettre de mise en demeure du 25 juillet 2018 ; de prendre acte que ces lignes ont été restituées uniquement par courrier du 29 août 2018 ; de dire que cette interruption de services liée à la rétention abusive de la CLOUD ECO et que les manquements dans ses obligations contractuelles sont à l'origine d'un préjudice subi par la concluante ;
- de débouter la société SCT de toutes fins et conclusions contraires ;
- de condamner la société SCT à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens, y compris ceux de première instance.
Elle soutient :
- que le représentant commercial de l'appelante lui a fait signer le 1er mars 2018 un seul et même contrat, après avoir proposé le financement du matériel par la société BNP Paribas ; que le contrat a ainsi été signé entre les trois sociétés, avec la location d'un matériel de téléphonie comportant un modem routeur et un firewall, la mise en place d'une plateforme sécurisée intégrant des services de voix et data, d'un switch, d'un point wifi, d'un software avec raccordement, paramétrage, programmation et formation, pour une durée de 63 mois moyennant le versement mensuel d'un loyer de 164 euros HT à payer à la société BNP Paribas et de 81 euros HT au titre de la prestation de service à payer mensuellement à l'appelante outre les consommations de téléphonie fixe ;
- que la signature de ce contrat tripartite signifiait que l'appelante se faisait payer par la société BNP Paribas le prix du matériel et consentait à la concluante un contrat de prestation de services, la somme de 211,47 euros devant être réglée mensuellement à la société BNP Paribas qui restituait à la société SCT le prix de la prestation de services ;
- que dès l'installation le 30 avril 2018, la concluante a rencontré de multiples problèmes ce qui l'a amenée à adresser un courrier recommandé le 3 juillet 2018 à la société SCT dans lequel elle indiquait notamment des problèmes liés à l'installation du modem et du routeur, l'empêchant d'effectuer des sauvegardes de ses dossiers, de télécharger des plans, de se connecter sur «R. Commun», de recevoir des mails alors que ses prestataires de maintenance ne pouvaient plus se connecter à distance pour une prise en charge, de l'absence de débits ne permettant pas de travailler correctement ; qu'elle a ainsi demandé la résiliation de ce contrat d'adhésion sans aucun frais ; que le 6 juillet 2018, l'appelante a reconnu les dysfonctionnements, indiquant que son service technique n'a cessé de relancer ses fournisseurs pour corriger le souci technique, tout en déniant sa responsabilité, rappelant n'être tenue que d'une obligation de moyen et ne proposant aucune solution technique corrective ; que la concluante a signalé un nouveau problème lié à l'installation du modem et du routeur, avec une impossibilité de se connecter au wifi en raison d'un défaut de paramètre des techniciens de la société SCT ; qu'elle lui a demandé de prendre acte de la résiliation du contrat du fait de l'incapacité pour l'appelante de remplir ses engagements contractuels ; que le 13 juillet 2018, la société SCT, sans proposer des solutions correctives, a pris acte de la résiliation du contrat et a sollicité le paiement de l'indemnité de résiliation anticipée d'un montant de 10.967,99 euros HT, demandant à la concluante de faire toutes les démarches nécessaires auprès de l'opérateur de son choix pour la reprise des lignes et des abonnements ; que le 16 juillet 2018, l'appelante a tenté de revenir sur les termes de son courrier du 13 juillet 2018 en rappelant qu'elle avait rempli ses obligations contractuelles, que le dossier était en cours de traitement auprès du SAV, reconnaissant les problèmes techniques mais essayant de reporter la responsabilité des dysfonctionnements sur un prétendu défaut de câblage interne ce qui n'avait jamais été évoqué jusqu'alors ; que la concluante a fait intervenir un huissier de justice le 20 juillet 2018, qui a constaté que la ligne téléphonique était coupée et que les débits étaient en dessous des 2 mbits annoncés ; qu'elle a contesté le principe de l'indemnité de résiliation du fait que la cause de la résiliation était imputable à la société SCT et a demandé la restitution des numéros RIO des lignes fixes et fax afin qu'elle puisse reprendre une activité normale ;
- que le contrat de services est caduc en raison de l'indivisibilité des contrats au sens de l'article 1186 du code civil, puisqu'il y a eu un contrat global comprenant à la fois un contrat de location et un contrat de prestation de services, adossé à un contrat de financement avec le partenaire financier de la société SCT signé par le fournisseur et la concluante ; que contrairement à ce que soutient l'appelante, elle n'a pas proposé plusieurs services, mais un seul service de téléphonie fixe ; que l'appelante a vendu à la société BNP Paribas le matériel de téléphonie et d'autres matériels qui ont été installés chez la concluante ; que suite à la résiliation du contrat conclu avec l'appelante, la concluante a usé de cette faculté à l'égard de la société BNP Paribas qui n'a pas contesté cette décision ; qu'ainsi, lorsque l'exécution de plusieurs contrats est nécessaire à la réalisation d'une même opération et que l'un d'eux disparaît, sont caducs les contrats dont l'exécution est rendue impossible par cette disparition et ceux pour lesquels l'exécution du contrat disparu était une condition déterminante du consentement d'une partie, ce qui est le cas de l'opération globale proposée par l'appelante ; qu'en conséquence, la résolution du contrat de financement le 5 octobre 2018 a entraîné la caducité du contrat de service conclu avec la société SCT ;
- que si l'appelante ne conteste pas l'interdépendance du contrat de service et du contrat de financement, mais conclut à l'indépendance des contrats de services, en indiquant que chaque contrat est soumis à ses conditions particulières, seul un contrat de téléphonie fixe a été signé par la concluante ; que s'il est fait droit à la thèse de la société SCT, il ne peut qu'être constaté que seules les conditions particulières d'accès Internet ont été signées par la concluante, alors que l'appelante se prévaut des stipulations des conditions particulières de téléphonie fixe qui n'ont pas été signées et donc acceptées par la concluante ;
- que le contrat de prestation de services doit être résolu aux torts de l'appelante, en raison de ses fautes rencontrées dès l'installation du matériel ; que si l'appelante invoque ses conditions générales et conclut être tenue à une obligation de moyens qui l'exonérerait de toute responsabilité, les conditions particulières de téléphonie fixe sont inopposables à la concluante, étant rédigées dans des caractères illisibles, n'étant pas paraphées par la concluante sur chaque page, sans mention de la part du signataire qu'il reconnaît en avoir pris connaissance et les avoir acceptées ; que la concluante n'a ainsi jamais reçu les conditions particulières de téléphonie fixe ; que le seul fait que sous la signature du contrat de service la concluante ait apposé sa signature sous une clause de style qui ne peut lue qu'avec l'aide d'une loupe n'est pas la preuve à la fois de la communication des conditions particulières de service de téléphonie fixe et de leur acceptation, d'autant que l'appelante soutient que chaque contrat de service est indépendant l'un de l'autre et est soumis à des conditions particulières spécifiques ;
- subsidiairement, que les clauses litigieuses du contrat d'adhésion de téléphonie fixe doivent être réputées non écrites, car créant, selon l'article 1171 du code civil, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, tant en ce qui concerne la clause exonératoire de responsabilité que celle qui détermine le montant de l'indemnité à la charge du client dans le cas de rupture avant terme du contrat ; qu'ainsi, si la société SCT s'est obligée à fournir un service illimité avec un débit de 2mbits constant permettant un accès wifi et des communications téléphoniques et fax, ce qui constitue une obligation de résultat, elle se prévaut néanmoins d'une clause stipulée dans ses conditions générales qui vise à limiter sa responsabilité à une obligation de moyens ; qu'elle ne peut pas s'exonérer de son obligation essentielle en excluant sa responsabilité dans l'hypothèse où les tiers qu'elle choisit sont défaillants, tout en ne permettant pas au client d'être déchargé de son obligation de payer la contrepartie prévue dans le contrat de prestation de services ;
- que concernant l'application de la clause prévoyant le paiement d'une indemnité contractuelle, si l'appelante se fonde sur l'article 13.3.1 des conditions particulières de téléphonie fixe prévoyant le versement par le client d'une somme de 2.200 euros HT par site, et sur l'article 13.3.2 prévoyant le paiement d'une somme correspondant soit au minimum de la facturation telle que défini à l'article 9.4 multipliée par le nombre de mois restant à échoir jusqu'au terme du contrat, soit si ce montant devait être supérieure au minimum de facturation susvisé, au montant moyen des facturations émises antérieurement à la notification de la résiliation multipliée par le nombre de mois restant à échoir, il s'agit de deux cas de figure différents ; que le second de ses articles doit être réputé non écrit car créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, concernant des conséquences indemnitaires s'appliquant dans le cas de dénonciation du service par le client quelque soit la cause de cette dénonciation, y compris l'hypothèse où la dénonciation est en lien avec un manquement de la société SCT ;
- que l'appelante était tenue par une obligation de résultat concernant les services proposés, et s'était engagée à ce que l'installation fonctionne et à être réactive dans le cas de situation de blocage ; que selon le nouvel article 1119 du code civil, en cas de discordance entre des conditions générales et des conditions particulières, les secondes l'emportent sur les premières ; qu'ainsi, le débit de connexion internet prévu n'a pas été atteint de façon récurrente ; qu'il était ainsi impossible de faire une sauvegarde de dossiers, de télécharger des plans, de recevoir des mails, avec une coupure des lignes téléphoniques ; que l'appelante ne rapporte pas la preuve de l'exécution de ses obligations, ce qu'elle a reconnu dans son courrier du 6 juillet 2018, tout en tentant de se réfugier sur ses prestataires et ses conditions générales ; que l'absence de réactivité dans des délais raisonnables des fournisseurs choisis par la société SCT relève de sa propre responsabilité, puisque l'objet même de ce type de contrat est qu'une solution corrective soit apportée dans les heures ou la journée ; que si l'appelante a tenté de reporter la faute sur la concluante en lui reprochant un défaut sur le câblage interne de ses installations téléphoniques, elle avait cependant, sur les conseils de l'appelante, installé un câblage neuf afin de s'assurer que le problème de débit ne provenait pas de sa propre installation ;
- que si l'appelante produit le détail des appels pour démontrer avoir rempli ses obligations, elle avait proposé une offre globale qui comprenait non seulement la téléphonie mais également l'accès Internet ainsi que la possibilité de sauvegarder des dossiers, de recevoir des mails et de se connecter sur son propre réseau interne ; que la téléphonie n'est donc qu'un produit parmi le bouquet qui était proposé ; qu'en outre, aucun service n'a été disponible à de nombreuses reprises, ce que ne démontre pas le détail de ces appels ; que l'appelante ne prouve pas ainsi avoir exécuté ses obligations ;
- à titre infiniment subsidiaire, que l'appelante se fonde à la fois sur les articles 13.3.1 et 13.3.2 de ses conditions particulières pour solliciter le paiement d'une indemnité de résiliation anticipée, alors qu'il ne peut y avoir d'application cumulative des indemnités prévues dans deux hypothèses très différentes ; que l'article 9.4 auquel renvoie l'article 13.3.2 stipule que le minimum de facturation mensuelle sera appliqué au client de « 140 euros HT par TO et 230 euros par T2», ce qui est incompréhensible et qui ne permet pas de comprendre le fait que la société SCT ait retenu la somme de 148,61 euros.
- que dans tous les cas, la clause prévue à l'article 13.3.2 est une clause pénale et non de dédit, alors que le contrat a été résilié non pour simple convenance, mais pour manquement de l'appelante à ses obligations ; que cette indemnité représente une contrepartie manifestement excessive, puisque l'appelante a perçu de la société BNP Paribas la contrepartie résultant de la vente du matériel et ne subit donc aucun préjudice du fait de la résiliation anticipée du contrat ;
- reconventionnellement, que la concluante a subi un préjudice du fait de la défaillance de la société SCT, puisque celle-ci a retenu abusivement les numéros RIO de ses lignes fixes jusqu'au 20 août 2018 ; que la concluante a ainsi supporté des frais et des délais inutiles de rétablissement des lignes.
* * *
Il convient en application de l'article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions susvisées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Motifs :
1) Concernant l'interdépendance des contrats conclus et leur résiliation :
Le tribunal de commerce a constaté que le contrat de location et le contrat de téléphonie fixe sont interdépendants. Cependant, il résulte de ces deux contrats qu'ils ont porté sur des objets différents :
- le contrat de location a concerné la fourniture de divers matériels, pour la mise en place d'une plateforme sécurisée, pour une durée de 63 mois, au prix mensuel de 164 euros HT. Le matériel a été cédée à la société financière, laquelle a, le 12 juin 2018, informé l'intimée de ce financement, avec l'envoi de l'échéancier correspondant au contrat de location conclu avec la société SCT ;
- le contrat de service de téléphonie fixe a prévu la prise en charge de deux lignes par la société SCT, pour 81 euros HT par mois, outre des frais de mise en service de 250 euros HT, sans remise de matériel. Ce contrat n'a été signé que par la société SCT et l'intimée, et son coût n'a pas été intégré dans les loyers que l'intimée devait régler à la société Bnp Paribas. Les mensualités de 81 euros HT ainsi que les frais d'installation des lignes ont été facturés directement par la société SCT. Il ne s'agit ainsi que d'un contrat de service, et non de location d'un matériel.
Aucun élément ne permet de constater que les prestations différentes prévues par ces deux contrats supposaient nécessairement que l'exécution de l'un soit subordonnée à celle de l'autre. De ce fait, il n'existe pas d'interdépendance contrairement à l'appréciation portée par le tribunal de commerce, alors que la demande de la société SCT ne porte que sur la résiliation du contrat de service de téléphonie fixe et est liée aux conséquences financières de la résiliation de ce seul contrat. En outre, si une résiliation des deux contrats devait intervenir, cela aurait supposé la mise en cause de la société financière, ce qui n'a pas été le cas.
Dans sa lettre de résiliation du 3 juillet 2018, l'intimée ne s'est pas plainte de dysfonctionnements concernant l'utilisation des deux lignes téléphoniques, objet du contrat de service, mais de problème de connexion informatiques suite à l'installation du modem et du routeur et d'une absence de débits. Elle a demandé « la résiliation de ce contrat d'adhésion sans aucun frais ». Dans son courrier du 10 juillet 2018, elle s'est toujours plainte uniquement de problèmes de connexion informatique, et non de problèmes liés à la téléphonie. Ce n'est que dans un courrier ne comportant pas de date, mais postérieur, que la société R. a sollicité la production des numéros RIO de ses lignes fixes, mettant ainsi fin au contrat de téléphonie fixe.
Le tribunal de commerce a ainsi pu prononcer la résiliation des deux contrats à la date du 13 juillet 2018, puisqu'il résulte de ce dernier courrier que l'intimée a bien entendu arrêter l'exécution des deux contrats distincts qu'elle avait conclus.
2) Concernant l'opposabilité des conditions générales à la société R. et leur validité :
Les deux contrats sont d'une rédaction simple s'agissant de leurs conditions particulières, lesquelles ont fait l'objet de deux actes différents, tous deux signés par l'intimée.
Concernant les conditions générales, il a été prévu précisément les modalités d'exécution de chacune des obligations respectives des parties, dans une typographie lisible. Les divers paragraphes sont séparés et indiqués en corps gras. Deux pages particulières sont dédiées au contrat de téléphonie fixe, rédigées selon les mêmes caractères d'imprimerie. L'intimée a apposé sa signature sur la deuxième page concernant les conditions applicables au contrat de téléphonie fixe. Elle ne peut ainsi soutenir que ces conditions ne lui ont pas été communiquées, alors que seule la résiliation du contrat de téléphonie fixe est en litige. Ces conditions générales concernant la téléphonie fixe lui sont ainsi opposables.
S'agissant du caractère non écrit de ces conditions, au motif qu'elles créeraient un déséquilibre significatif au préjudice de l'intimée, notamment concernant la limitation de la responsabilité de l'appelante, elle exerce, concernant le contrat de services de lignes de téléphonies fixe et d'accès au web, une activité de courtier, utilisant les infrastructures développées et fournies par des tiers (article 8.1 des conditions générales) et sur lesquelles elle n'a ainsi aucune maîtrise. De ce fait, l'appelante a limité sa garantie, précisant dans le même article ne pouvoir garantir que son service soit totalement ininterrompu et sans incident. Elle s'est seulement engagée à prendre toutes mesures raisonnables, conformes à l'état de la technique, pour remédier le plus rapidement possible à toute défaillance pouvant lui être imputable.
Le caractère équilibré ou non de conditions de vente s'apprécie au regard de l'ensemble du contrat. En la cause, en raison de la nature du service de téléphonie et d'accès au web et de la particularité de son rôle liée à son activité de courtage, l'appelante a pu inclure dans ses conditions générales de vente une limitation de sa garantie concernant seulement les éléments qu'elle pouvait maîtriser, sans être responsable des défaillances imputables à ses fournisseurs, ne se trouvant ainsi liée que par une obligation de moyens.
En conséquence, les clauses litigieuses du contrat d'adhésion de téléphonie fixe ne peuvent être réputées non écrites, et sont opposables à l'intimée, laquelle a reconnu avoir pris connaissance et accepter les conditions générales et particulières, ainsi que mentionnées dans les contrats, établis en plusieurs exemplaires de différentes couleurs dont un destiné à l'intimée, qui en a également reçu une copie par l'intermédiaire de l'organisme financier lors de la mise en place du contrat concernant le paiement des loyers.
3) Concernant les désordres, la résiliation du contrat de téléphonie et ses conséquences, le paiement de la facture du 31 juillet 2018 :
Dans ses réclamations adressées à la société SCT, l'intimée s'est plainte de problèmes de connexion informatiques suite à l'installation du modem et du routeur par l'appelante et d'une absence de débits et de l'absence de Wifi, et non d'un problème lié à l'utilisation des deux lignes téléphoniques ni à un accès au web. Ainsi, dans son premier courrier du 3 juillet 2018, elle précise que c'est l'installation du matériel, avec la même adresse IP que son serveur, qui l'empêchait de faire des sauvegardes, de télécharger des plans, de se connecter sur un espace commun et de recevoir des mails, avec une limitation des débits de données. Il ne s'agit ainsi ni d'un problème de téléphonie, aucun désordre n'ayant jamais été signalé, ni d'accès au web, puisqu'il n'est pas invoqué un problème de connexion avec le réseau internet. Les problèmes invoqués concernent la maintenance du matériel fourni par la société SCT, acheté par la société Bnp Paribas et loué à l'intimée,
L'objet de la demande en paiement de l'appelante ne porte que sur l'indemnité liée à la résiliation anticipée du contrat de téléphonie mobile, puisqu'en tout état de cause, la société SCT ne pouvait demander aucune indemnité au titre du contrat de location de matériel, ce matériel ayant été acquis par la société financière, avec règlement effectué par celle-ci au profit de l'appelante. Au titre du contrat de location du matériel, l'intimée ne devait effectuer aucun paiement au profit de la société SCT, mais régler directement les loyers auprès de son bailleur.
Il n'est pas contesté que l'appelante a mis en activité les lignes téléphoniques avec accès au web à compter du 23 mai 2018, et il est établi que ces lignes ont fonctionné selon le relevé des appels produits par la société SCT. Si le constat d'huissier dressé le 20 juillet 2018 indique qu'il n'est plus possible d'utiliser les lignes téléphoniques, c'est en raison de la résiliation du contrat intervenue à l'initiative de l'intimée le 13 juillet précédent. Il n'est pas justifié par l'intimée de l'impossibilité d'utiliser les deux lignes objets du contrat, ni d'accéder au web.
Il s'ensuit que le contrat de téléphonie fixe a été résilié de façon anticipée par l'appelante et sans motif valable, alors qu'il n'est pas contesté qu'il avait été souscrit pour une durée de 63 mois à compter du 1er mars 2018 (article 8 des conditions générales concernant ce contrat particulièrement, distinctes du contrat concernant la location du matériel, conclue pour une durée équivalente).
L'article 13 des conditions générales de téléphonie fixe (deuxième partie) a prévu deux obligations incombant à l'intimée :
- Si le contrat de téléphonie a été souscrit en même temps qu'un contrat de location de matériel, toute résiliation effectuée par le client avant la date du premier rendez-vous technique rend exigible une indemnité de 2.200 euros par site. Cette clause ne peut recevoir application en l'espèce, puisque la résiliation est intervenue après l'installation du matériel. L'appelante est mal fondée à en demander le paiement.
- Si le contrat est dénoncé après l'installation : soit le paiement d'une indemnité correspondant au minimum de facturation tel que défini à l'article 9.4, multiplié par le nombre de mois restant à échoir jusqu'au terme du contrat, soit, si ce montant devait être supérieur à ce minimum de facturation, le paiement d'une indemnité égale au montant moyen des facturations calculé sur les trois derniers mois de consommation habituelle avant résiliation, multiplié par le nombre de mois restant à échoir jusqu'au terme du contrat.
Cette indemnité s'analyse en une clause de dédit et non en une clause pénale, ne visant pas à contraindre le client à poursuivre le contrat sous peine de paiement d'une somme forfaitaire, mais tendant à assurer au créancier l'indemnisation du préjudice subi du fait d'une résiliation avant le terme contractuellement prévu, au sens des articles 1212 et 1231-5 du code civil. En l'espèce, la somme pouvant être calculée au titre de cette clause n'est pas manifestement excessive, correspondant à la perte du gain espéré par l'appelante si le contrat avait été conduit jusqu'à son terme. Il n'existe pas ainsi d'application cumulative de plusieurs clauses différentes prévues par l'article 13 des conditions générales.
En l'espèce, le contrat de téléphonie fixe a prévu un montant forfaitaire de 81 euros HT, l'offre concernant un forfait illimité vers les fixes et mobiles, y compris à l'international, en dehors des numéros spéciaux, et l'appelante a calculé le montant de l'indemnité de résiliation non au regard de l'article 9.4 (lequel prévoit différents coûts selon diverses options non souscrites), mais au regard de la moyenne des trois dernières factures.
Cette moyenne est de 134,41 euros HT (factures du 31 mai, 30 juin et 31 juillet 2018, sauf à ne pas retenir pour cette dernière le coût de « services ponctuels et divers » pour 100 euros HT qui n'est pas justifié). En conséquence, l'intimée est redevable d'une indemnité de résiliation anticipée de 7.930,19 euros HT.
Le jugement déféré sera ainsi infirmé en ce qu'il a débouté l'appelante (et par erreur matérielle la société Chaudronnerie Tuyauterie R.) de sa demande en paiement de 13.173,59 euros TTC.
Il sera également infirmé en ce qu'il a fait droit à la demande de paiement de 247,20 euros TTC au titre de la facture du 31 juillet 2018, puisqu'il a été dit plus haut que la somme de 100 euros au titre de services ponctuels et frais divers n'est pas justifiée. L'intimée ne peut être redevable, au titre de cette facture, que de 106 euros HT (soit le coût de l'abonnement téléphonique de 81 euros HT et des consommations hors forfait pour 25 euros HT).
4) Concernant la demande reconventionnelle de la société R. et les demandes accessoires :
Dans son courrier non daté, mais postérieur au 20 juillet 2018 puisqu'elle se réfère au constat dressé par huissier, l'intimée a demandé la communication des codes RIO correspondant aux deux lignes prises en charge par l'appelante, afin de pouvoir se tourner vers un autre opérateur. La société SCT lui a indiqué, par courrier du 20 août 2018, que son service client lui a communiqué par courrier simple du 27 juillet 2018 ces codes, et elle les a mentionnés dans cette lettre, produite par l'intimée. Il en résulte que l'intimée a pu disposer des codes d'accès, au plus tard le 20 août 2018. Si elle invoque un préjudice de 15.000 euros résultant de l'absence de communication des codes avant le 29 août 2018, elle ne produit cependant aucune pièce concernant ce préjudice. Cette demande ne pouvait qu'être rejetée par le tribunal, qui dans les motifs de son jugement, a indiqué qu'elle n'était pas justifiée.
La cour précisera que cette demande est rejetée, le tribunal n'ayant pas mentionné cette précision dans le dispositif de sa décision.
La société R., succombant en l'ensemble de ses prétentions, sera condamnée à payer à la société SCT la somme complémentaire de 3.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens exposés en cause d'appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Vu les articles 1103, 1212 et 1231-5 du code civil ;
Infirme le jugement déféré en ce qu'il a :
- débouté la société Chaudronnerie Tuyauterie R. de sa demande en paiement au titre de ses indemnités de résiliation du service fixe à hauteur de 13.173,59 euros TTC ;
- condamné la société Chaudronnerie Tuyauterie R. à payer à la Société Commerciale de Télécommunication SCT la somme de 247,20 euros au titre de la facture de juillet 2018 ;
Confirme le jugement déféré en ses autres dispositions ;
Y ajoutant :
Constate la résiliation du contrat de téléphonie aux torts de la société Chaudronnerie Tuyauterie R. ;
Condamne la société Chaudronnerie Tuyauterie R. à payer à la Société Commerciale de Télécommunication SCT la somme de 7.930,19 euros HT, soit 9.516,23 euros TTC au titre de l'indemnité de résiliation anticipée ;
Condamne la société Chaudronnerie Tuyauterie R. à payer à la Société Commerciale de Télécommunication SCT la somme de 106 euros HT, soit 127,20 euros TTC, au titre de la facture du 31 juillet 2018 ;
Déboute la société Chaudronnerie Tuyauterie R. de sa demande de dommages et intérêts ;
Condamne la société Chaudronnerie Tuyauterie R. à payer à la Société Commerciale de Télécommunication SCT la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société Chaudronnerie Tuyauterie R. aux dépens exposés en cause d'appel ;
SIGNE par Mme Marie-Pierre FIGUET, Présidente et par Mme RICHET, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente
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