CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA PARIS (pôle 4 ch. 9-A), 9 décembre 2021

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 4 ch. 9-A), 9 décembre 2021
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 4 ch. 9
Demande : 19/03162
Date : 9/12/2021
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 11/02/2019
Référence bibliographique : 5823 (crédit, application dans le temps), 5721 (L. 212-1, obligation de relever d’office), 5716 (crédit à la consommation, obligation de relever d’office), 6094 (taille des caractères)
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 9303

CA PARIS (pôle 4 ch. 9-A), 9 décembre 2021 : RG n° 19/03162 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Au regard de sa date de conclusion, le contrat litigieux est soumis aux dispositions des articles L. 311-1 et suivants du code de la consommation dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010. »

2/ « En application de l'article L. 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation, le juge peut relever d'office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application. Il écarte d'office, après avoir recueilli les observations des parties, l'application d'une clause dont le caractère abusif ressort des éléments du débat.

Ce texte confère au juge une simple possibilité de relever d'office toute violation des dispositions d'ordre public du code de la consommation tandis qu'il lui impose d'écarter d'office une clause abusive. En revanche, il ne pose aucune restriction à l'exercice des prérogatives ainsi conférées au juge pour autant que l'irrégularité résulte des faits litigieux dont l'allégation comme la preuve incombent aux parties.

Par ailleurs, si la notion de prescription s'attache à une action ou à une demande formulée par voie d'exception, il est admis qu'elle est sans effet sur l'invocation d'un moyen qui tend non pas à l'octroi d'un avantage, mais seulement à mettre en échec une prétention adverse.

C'est ainsi que défendant à une action en paiement du solde d'un crédit à la consommation, l'emprunteur peut opposer tout moyen tendant à faire rejeter tout ou partie des prétentions du créancier par application d'une disposition du code de la consommation prévoyant la déchéance du droit aux intérêts, sans se voir opposer la prescription pour autant qu'il n'entende pas en obtenir un autre avantage tel le remboursement d'intérêts indûment acquittés.

Si le contrat litigieux est antérieur à la mise en application de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, il faut néanmoins observer que les dispositions de droit interne précitées sont en cohérence avec la Directive n° 2008/48/CE du 23 avril 2008 concernant les crédits à la consommation qui consacre dans sa lecture par la Cour de justice de l'Union européenne le rôle du juge dans le respect des dispositions d'un ordre public économique européen.

Il s'induit que dans le rôle qui lui est conféré tant par la loi et le règlement internes que par le droit européen, le juge peut soulever d'office toute irrégularité heurtant une disposition d'ordre public et sanctionnée par la déchéance d'un droit qui fonde la demande d'une partie sans être enfermé dans quelque délai.

C'est donc à bon droit que le premier juge, en respectant le principe de contradiction, a examiné la conformité du contrat aux articles L. 311-8 à L. 311-13 anciens dans leur rédaction applicable au litige. »

3/ « Aux termes de l'article R. 311-6 du code de la consommation, le contrat de crédit doit être rédigé en caractères dont la hauteur ne peut être inférieure à celle du corps huit. Le corps huit correspond à « 3 mm en points Didot » et il est admis qu'on mesure le corps d'une lettre de la tête des lettres montantes, l, d, b, à la queue des lettres descendantes, g, p, q. Le blanc que l'on remarque d'une ligne à l'autre provient du talus existant entre les lettres qui ne montent ni ne descendent. Il suffit, pour s'assurer du respect de cette prescription réglementaire, de diviser la hauteur en millimètres d'un paragraphe (mesuré du haut des lettres montantes de la première ligne au bas des lettres descendantes de la dernière ligne) par le nombre de lignes qu'il contient. Le quotient ainsi obtenu doit être au moins égal à trois millimètres.

La vérification conduite sur plusieurs paragraphes du contrat produit montre que chaque ligne occupe moins de 3 mm.

La déchéance du droit aux intérêts a donc été prononcée à juste titre. En l'absence d'autre chef de contestation, le jugement est par conséquent confirmé en toutes ses dispositions. »

 

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 4 CHAMBRE 9-A

ARRÊT DU 9 DÉCEMBRE 2021

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 19/03162 (5 pages). N° Portalis 35L7-V-B7D-B7IXQ. Décision déférée à la Cour : Jugement du 6 septembre 2018 - Tribunal d'Instance de BOBIGNY – R.G. n° 11-18-000941.

 

APPELANTE :

La société SOGEFINANCEMENT

société par actions simplifiée, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès-qualités audit siège N° SIRET XXX, [...], [...], [...], représentée et assistée de Maître Sébastien M. G. de la SELARL C. & M.-G., avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

 

INTIMÉE :

Madame X.

née [date] à [ville], [adresse], [...], [...], DÉFAILLANTE

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 2 novembre 2021, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère, chargée du rapport

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Mme Patricia GRANDJEAN, Présidente de chambre, Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère, Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère.

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT : - DÉFAUT - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Mme Patricia GRANDJEAN, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Suivant acte sous seing privé du 28 mars 2002, Mme X. a contracté auprès de la société Sogefinancement, une ouverture de crédit utilisable par fractions et reconstituable d'un montant initial de 1.500 euros.

Par avenant en date du 11 juin 2014, les parties sont convenues d'un réaménagement de la somme due en 84 mensualités de 248,96 euros.

À la suite d'impayés, la société Sogefinancement s'est prévalu de la déchéance du terme le 14 décembre 2016.

Saisi le 26 avril 2018 par la société Sogefinancement d'une demande tendant principalement au paiement d'une somme de 9.869,30 euros, le tribunal d'instance de Bobigny par un jugement contradictoire rendu le 6 septembre 2018 auquel il convient se référer a rejeté l'ensemble des demandes de la société Sogefinancement.

Le tribunal, après avoir contrôlé la recevabilité de l'action en paiement, a principalement retenu au visa de l'article R. 311-6 du code de la consommation auquel renvoie l'article L. 311-13 du même code qu'une partie de l'offre préalable a été rédigée en caractère d'une hauteur inférieure au corps huit et plusieurs paragraphes comportent des lignes d'une hauteur inférieure à trois millimètres, ce qui entraîne une déchéance du droit aux intérêts pour la société appelante.

Il a également constaté au visa de l'article L. 311-33 du code de la consommation, que le préteur étant déchu de son droit aux intérêts, le solde s'avère créditeur au regard de l'historique du prêt et du décompte de l'huissier de justice produit en cours de délibéré.

[*]

Par une déclaration d'appel en date du 11 février 2019, la société Sogefinancement a relevé appel de la décision.

Aux termes de ses conclusions remises le 9 mai 2019, elle demande à la cour :

- d'infirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions,

- de condamner Mme X. à lui payer la somme de 11.074,37 euros outre intérêts au taux contractuel de 9,76 % l'an à compter du 13 juillet 2018 au titre de sa créance en remboursement du crédit,

- de condamner Mme X. à lui payer la somme de 1.000 au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'appelante soutient au visa de l'article L. 110-4 du code de commerce que le moyen soulevé par le juge de première instance pour la priver de son droit aux intérêts est irrecevable car prescrit.

En outre, il soutient que les dispositions de l'article R. 311-6 du code de la consommation sur les règles de rédaction de l'offre de crédit ont été respectées.

[*]

La déclaration d'appel a été signifiée à l'intimé en date du 19 mars 2019 conformément aux dispositions des articles 656 et 658 du code de procédure civile. Les conclusions de l'appelante ont été signifiées à l'intimée le 13 mai 2019, conformément aux dispositions des articles 656 et 658 du code de procédure civile. Régulièrement assignée, l'intimée n'a pas constitué avocat.

[*]

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l'appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 septembre 2021.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Il résulte du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

Au regard de sa date de conclusion, le contrat litigieux est soumis aux dispositions des articles L. 311-1 et suivants du code de la consommation dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010.

Vérifiée par le premier juge, la recevabilité de l'action en paiement du prêteur n'est pas contestée.

 

Sur la déchéance du droit aux intérêts :

En application de l'article L. 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation, le juge peut relever d'office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application. Il écarte d'office, après avoir recueilli les observations des parties, l'application d'une clause dont le caractère abusif ressort des éléments du débat.

Ce texte confère au juge une simple possibilité de relever d'office toute violation des dispositions d'ordre public du code de la consommation tandis qu'il lui impose d'écarter d'office une clause abusive. En revanche, il ne pose aucune restriction à l'exercice des prérogatives ainsi conférées au juge pour autant que l'irrégularité résulte des faits litigieux dont l'allégation comme la preuve incombent aux parties.

Par ailleurs, si la notion de prescription s'attache à une action ou à une demande formulée par voie d'exception, il est admis qu'elle est sans effet sur l'invocation d'un moyen qui tend non pas à l'octroi d'un avantage, mais seulement à mettre en échec une prétention adverse.

C'est ainsi que défendant à une action en paiement du solde d'un crédit à la consommation, l'emprunteur peut opposer tout moyen tendant à faire rejeter tout ou partie des prétentions du créancier par application d'une disposition du code de la consommation prévoyant la déchéance du droit aux intérêts, sans se voir opposer la prescription pour autant qu'il n'entende pas en obtenir un autre avantage tel le remboursement d'intérêts indûment acquittés.

Si le contrat litigieux est antérieur à la mise en application de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, il faut néanmoins observer que les dispositions de droit interne précitées sont en cohérence avec la Directive n° 2008/48/CE du 23 avril 2008 concernant les crédits à la consommation qui consacre dans sa lecture par la Cour de justice de l'Union européenne le rôle du juge dans le respect des dispositions d'un ordre public économique européen.

Il s'induit que dans le rôle qui lui est conféré tant par la loi et le règlement internes que par le droit européen, le juge peut soulever d'office toute irrégularité heurtant une disposition d'ordre public et sanctionnée par la déchéance d'un droit qui fonde la demande d'une partie sans être enfermé dans quelque délai.

C'est donc à bon droit que le premier juge, en respectant le principe de contradiction, a examiné la conformité du contrat aux articles L. 311-8 à L. 311-13 anciens dans leur rédaction applicable au litige.

Aucune irrecevabilité n'est donc opposable.

Pour prononcer la déchéance du droit du prêteur aux intérêts contractuels, le premier juge a retenu que la banque ne justifiait pas avoir respecté le corps huit dans une partie de l'offre préalable produite aux débats.

À hauteur d'appel, l'appelante fait valoir que la déchéance n'est pas encourue et que l'offre est conforme. Elle produit l'original du contrat.

Aux termes de l'article R. 311-6 du code de la consommation, le contrat de crédit doit être rédigé en caractères dont la hauteur ne peut être inférieure à celle du corps huit. Le corps huit correspond à « 3 mm en points Didot » et il est admis qu'on mesure le corps d'une lettre de la tête des lettres montantes, l, d, b, à la queue des lettres descendantes, g, p, q. Le blanc que l'on remarque d'une ligne à l'autre provient du talus existant entre les lettres qui ne montent ni ne descendent.

Il suffit, pour s'assurer du respect de cette prescription réglementaire, de diviser la hauteur en millimètres d'un paragraphe (mesuré du haut des lettres montantes de la première ligne au bas des lettres descendantes de la dernière ligne) par le nombre de lignes qu'il contient. Le quotient ainsi obtenu doit être au moins égal à trois millimètres.

La vérification conduite sur plusieurs paragraphes du contrat produit montre que chaque ligne occupe moins de 3 mm.

La déchéance du droit aux intérêts a donc été prononcée à juste titre. En l'absence d'autre chef de contestation, le jugement est par conséquent confirmé en toutes ses dispositions.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Statuant après débats en audience publique, par arrêt rendu par défaut mis à disposition au greffe,

- Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

- Condamne la société Sogefinancement aux dépens d'appel.

La greffière                           La présidente