CA RENNES (3e ch. com.), 18 janvier 2022
CERCLAB - DOCUMENT N° 9361
CA RENNES (3e ch. com.), 18 janvier 2022 : RG n° 19/05460 ; arrêt n° 43
Publication : Jurica
Extrait : « Pour contester tout manquement à ses obligations, la société Masselin Communication se prévaut des stipulations figurant à l'article 7 du contrat d'acheminement, selon lesquelles « le prestataire, dans le cadre de l'obligation de moyens à laquelle il est soumis, est responsable de ses prestations ».
Ces stipulations doivent encore être rapprochées : - d'abord de celles figurant à l'article 4 du même contrat, selon lesquelles « il est expressément spécifié que les obligations du prestataire dans la fourniture des services sont des obligations de moyens » ou encore le prestataire, qui « ne garantit [pas] que son système fonctionne sans aucune discontinuité », s'engage seulement « à apporter tous les soins et efforts raisonnables dans la fourniture des services » comme à fournir « ses meilleurs efforts pour remédier à [toute] défaillance conformément aux pratiques en vigueur dans l'industrie des télécommunications » ;
- et de celles figurant à l'article 11 dudit contrat, selon lesquelles, « par une obligation de moyens, Masselin Communication s'engage à assurer : * pour les appels fixes empruntant le réseau Masselin Communication, un taux d'échec dû à ce réseau ne dépassant pas 2 % mesuré sur 24 heures en moyenne annuelle nationale, * pour les appels entrant dans ce réseau, un taux d'efficacité minimal de 65'%, mesuré sur 24 heures en moyenne nationale, sur une période de trois mois glissants ».
A cet égard, c'est à tort que la société PFSB demande à la cour de juger ces clauses non écrites au motif qu'elles constitueraient des « clauses abusives » au sens des articles L. 132-1 et R. 132-1 du code de la consommation qui qualifient ainsi les clauses ayant pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, notamment en supprimant ou en réduisant le droit à réparation du préjudice subi par le cocontractant en cas de manquement à l'une quelconque de ses obligations.
En effet, les clauses précédemment énoncées, qui figurent aux articles 4, 7 et 11 du contrat d'acheminement, ne prévoient aucune limitation du droit à réparation des préjudices susceptibles d'être subis par la société PFSB, se bornant à définir la nature de l'obligation contractée par la prestataire, et, par suite, à fixer le seuil de déclenchement de sa responsabilité contractuelle.
En cela, ces clauses ne créent aucun déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, lesquels ne sont d'ailleurs en rien comparables puisque : - la prestataire s'engage à mettre en œuvre tous les moyens raisonnables à sa disposition pour parvenir à la meilleure efficacité possible de l'installation téléphonique, et ce, dans un contexte où elle ne peut pas en maîtriser tous les paramètres, s'agissant en effet d'une installation complexe impliquant plusieurs intervenants, dont le fournisseur d'accès internet Orange, - la cliente s'engage quant à elle à s'acquitter du prix convenu, obligation qui, assurément, s'avère plus aisée à exécuter.
De même, c'est encore à tort que la société PFSB affirme que ces clauses sont contraires à un principe, prétendument validé par la jurisprudence, selon lequel, en matière de prestation de service de télécommunications, le prestataire serait toujours tenu à une obligation de résultat.
Au contraire, la cour observe que les quelques précédents cités par la société PFSB concernent des fournisseurs d'accès (Orange ou AOL) qui, du fait même de l'objet du contrat qui consiste à fournir au client un accès à l'internet, ne peuvent pas prétendre s'exonérer de cette obligation, sauf force majeure, ce qui explique que soit réputée non écrite toute clause qui aurait pour effet de vider cette obligation de sa substance.
Tel n'est pas le cas du contrat d'acheminement souscrit par la société PFSB auprès de la société Masselin Communication, lequel, comme précédemment rappelé, relève d'un système complexe faisant interagir d'autres opérateurs, notamment le fournisseur d'accès sur lequel le prestataire n'a pas de prise, ce qui explique qu'il ait pu convenir avec sa cliente, au demeurant non tenue d'y adhérer, d'un certain nombre d'échecs admissibles dans les communications à émettre ou à recevoir par son intermédiaire.
Ainsi, le prestataire n'est tenu que d'une obligation de moyens consistant à mettre en œuvre toutes les mesures raisonnables propres à limiter autant que possible le nombre de ces échecs.
De ce point de vue, les clauses contestées ne sont ni abusives ni illicites. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
TROISIÈME CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU 18 JANVIER 2022
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 19/05460. Arrêt n° 43. N° Portalis DBVL-V-B7D-QA4I.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,
Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,
Assesseur : Monsieur Dominique GARET, Conseiller, rapporteur
GREFFIER : Mme Julie ROUET, lors des débats, et Mme Frédérique HABARE, lors du prononcé,
DÉBATS : A l'audience publique du 30 novembre 2021
ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement le 18 Janvier 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
APPELANTE :
Société POMPES FUNEBRES DES COMMUNES ASSOCIEES DE LA REGION DE SAINT BRIEUC
immatriculée au RCS de Saint-Brieuc sous le numéro XXX prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège [...], [...], Représentée par Maître Benjamin E. de la SCP M.-L.-S.-E.-C., Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-NAZAIRE
INTIMÉES :
SAS MASSELIN COMMUNICATION AXIANS CONNECT
inscrite au RCS de Caen sous le N° YYY, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité au siège [...], [...], Représentée par Maître Hervé D. de la SELARL KOVALEX, Plaidant, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC, Représentée par Maître Éric D. de la SCP G., D. & L., Postulant, avocat au barreau de RENNES
SAS AXIANS L'ETE
immatriculée au RCS de SAINT-BRIEUC sous le n° ZZZ prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés au siège [...], [...], Représentée par Maître Hervé D. de la SELARL KOVALEX, Plaidant, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC, Représentée par Maître Éric D. de la SCP G., D. & L., Postulant, avocat au barreau de RENNES
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
Suivant acte du 15 janvier 2015, la société Pompes Funèbres des communes associées de la région de Saint Brieuc (ci-après la société PFSB) souscrivait un contrat d'acheminement de ses appels téléphoniques, et ce, auprès de la société Masselin Communication exerçant sous l'enseigne « Axians ».
Suivant acte du même jour, la société PFSB souscrivait également, pour une durée de trois ans, un contrat de maintenance de son installation téléphonique, et ce, auprès de la société Axians L'Eté.
Quelques semaines après la mise en place de l'installation, la société PFSB en dénonçait les dysfonctionnements multiples et répétés : fréquentes impossibilités d'émettre comme de recevoir des communications, coupures impromptues, mauvaise qualité de la communication, tous dysfonctionnements qui allaient conduire les services techniques d'Axians à intervenir pour y remédier, toutefois sans jamais donner complète satisfaction à la société PFSB.
A l'issue de nombreux échanges pré-contentieux entre les parties, la société PFSB mettait en demeure les sociétés Masselin Communication et Axians L'Eté de prendre position sur une résiliation amiable des deux contrats et sur l'allocation d'une indemnisation restant à déterminer pour réparer les préjudices dont la société PFSB persistait à se prévaloir du fait des dysfonctionnements de l'installation téléphonique.
En l'absence de règlement amiable, la société PFSB faisait assigner les sociétés Masselin Communication et Axians L'Eté devant le juge des référés du tribunal de commerce de Saint Brieux aux fins d'obtenir la résiliation judiciaire des deux contrats aux torts des défenderesses ainsi que l'allocation d'une provision à valoir sur l'indemnisation de son préjudice, et, subsidiairement, la mise en œuvre d'une mesure d'expertise judiciaire aux fins d'identifier la nature et l'origine des dysfonctionnements ainsi que de déterminer les responsabilités encourues.
Par ordonnance du 7 mars 2016, le juge des référés déboutait la société PFSB de ses demandes principales mais, satisfaisant à sa demande subsidiaire, ordonnait l'expertise sollicitée.
L'expert désigné déposait son rapport définitif le 28 juin 2017.
Fort de ce rapport, la société PFSB faisait alors assigner ses deux cocontractantes devant le tribunal de commerce de Saint Brieuc, réclamant de nouveau la résiliation judiciaire des deux contrats aux torts des défenderesses et la condamnation de celles-ci à l'indemniser des différents préjudices qu'elle disait avoir subis par suite des dysfonctionnements de son installation téléphonique et de l'incapacité des deux prestataires à y remédier.
Par jugement du 8 juillet 2019, le tribunal :
- déboutait la société PFSB de sa demande tendant à voir réputées non écrites les dispositions figurant aux articles 6 des conditions générales de vente d'Axians, 7 du contrat d'acheminement et 5 du contrat de maintenance ;
- déboutait la société PFSB de sa demande de résiliation du contrat de maintenance ;
- déboutait la société PFSB de sa demande de dommages-intérêts ;
- condamnait la société PFSB à payer à chacune des défenderesses une somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- déboutait les parties du surplus de leurs demandes ;
- condamnait la société PFSB aux entiers dépens de l'instance.
Par déclaration reçue au greffe de la cour le 8 août 2019, la société PFSB interjetait appel de cette décision.
L'appelante notifiait ses dernières conclusions le 20 avril 2020, les intimées les leurs le 28 janvier 2020.
La clôture intervenait par ordonnance du 28 octobre 2021.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
La société PFSB demande à la cour de :
Vu les articles 1184 et 1147 anciens du code civil,
Vu l'article L. 132-1 du code de la consommation,
Vu le rapport d'expertise,
- réformer le jugement dont appel ;
À titre principal :
- déclarer l'article 6 des conditions générales de vente d'Axians, l'article 7 du contrat d'acheminement des appels et l'article 5 du contrat de maintenance réputés non écrits ;
- ordonner la résiliation du contrat de maintenance liant la société PFSB à la société Axians L'Eté, en précisant que cette résiliation sera effective pour l'avenir à l'issue d'un délai de quinzaine suivant la signification de l'ordonnance à intervenir ;
- condamner in solidum les sociétés Axians L'Eté et Masselin Communication à payer à la société PFSB la somme de 81.237,43 euros à titre de dommages intérêts en réparation des préjudices subis ;
- condamner in solidum les sociétés Axians L'Eté et Masselin Communication à restituer à la société PFSB, à titre de dommage-intérêts, la somme de 38.8438,53 euros, somme versée dans le cadre de l'exécution des contrats ;
À titre subsidiaire,
- condamner in solidum les sociétés Axians L'Eté et Masselin Communication à payer à la société PFSB la somme de 52.560 euros au titre de la perte de chance ;
En tout état de cause,
- condamner in solidum les sociétés Axians L'Eté et Masselin Communication à payer à la société PFSB la somme de 3.000 euros au titre du préjudice d'image ;
- condamner in solidum les sociétés Axians L'Eté et Masselin Communication à payer à la société PFSB la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner in solidum les sociétés Axians L'Eté et Masselin Communication aux dépens de l'instance, lesquels comprendront le coût de l'expertise judiciaire.
[*]
Au contraire, les sociétés Masselin Communication et Axians L'Eté demandent à la cour de :
Vu les articles 1134 et 1147 anciens du code civil,
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;
En conséquence,
- débouter la société PFSB de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
- condamner la société PFSB à payer aux sociétés Axians L'Eté et Masselin Communication la somme de 3.000 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;
- condamner la société PFSB aux entiers dépens.
Il est renvoyé à la lecture des conclusions précitées pour un plus ample exposé des demandes et moyens développés par les parties.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la réalité et la consistance des dysfonctionnements :
A l'issue des opérations, l'expert judiciaire a conclu ce qui suit :
- les sociétés Masselin Communication et Axians L'Eté ont fourni à la société PFSB une solution globale de téléphonie comprenant les équipements, les installations et les paramétrages ;
- dès le mois de mars 2015, des difficultés sont apparues dans le nouveau système de téléphonie, lesquelles ont été en partie corrigées au fil du temps par les deux sociétés ;
- à la date des opérations d'expertise, « la stabilité globale du système de téléphonie semble à peu près atteinte au niveau des réseaux IP », « mais il persiste encore des difficultés autour des système de téléphones sans fils de type DECT et de certains postes VOIP fixes », l'expert estimant finalement que « si le réseau semble avoir atteint un niveau acceptable de fonctionnement depuis quelques mois, des dysfonctionnements apparaissent encore à ce jour. »
Pour autant, et quand bien même l'expert conclut à la persistance de dysfonctionnements en dépit des actions correctives mises en œuvre par les deux sociétés prestataires, celles-ci ont produit, dans le cadre des opérations d'expertise un « rapport de supervision », qui est d'ailleurs annexé au rapport et dont l'expert n'a pas contesté les données, dont il résulte que depuis la mise en place de cette supervision le 9 juillet 2015, le trafic du lien de la société PFSB a connu un « fonctionnement nominal à 99,98 % du temps, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7), aucune « saturation » n'ayant été constatée, ni dans l'accès internet, ni « côté voix ».
Il résulte de ce qui précède que si l'installation téléphonique mise en place par les deux sociétés du groupe Axians a connu un certain nombre de dysfonctionnements, pour autant d'une part celles-ci sont intervenues à de nombreuses reprises pour y remédier, d'autre part les dysfonctionnements constatés, a fortiori les dysfonctionnements résiduels, sont toujours demeurés très limités et minoritaires, tant au regard de la durée réelle d'utilisation de l'installation que du nombre de communications effectivement passées.
D'ailleurs, l'expert confirme finalement que l'installation mise en place est « opérationnelle », que « le réseau ne présente pas d'erreur de conception », qu'il est « cohérent et correctement dimensionné », enfin que la solution comprend un « VLAN dédié » (c'est-à-dire un réseau local virtuel adapté) et que « la qualité de service est possible sur tout le réseau internet ».
Dès lors, ne sont pas représentatives de la réalité comme de la consistance des dysfonctionnements dénoncés les quelques attestations de clients ou partenaires professionnels de la société PFSB qui se sont plaints de la difficulté qu'ils avaient rencontrée, nécessairement ponctuellement, pour la contacter par téléphone.
Il en est de même des procès-verbaux d'huissier de justice établis pour constater, toujours ponctuellement, des dysfonctionnements affectant l'installation téléphonique de la société PFSB.
Sur les manquements contractuels reprochés aux deux prestataires :
Pour contester tout manquement à ses obligations, la société Masselin Communication se prévaut des stipulations figurant à l'article 7 du contrat d'acheminement, selon lesquelles « le prestataire, dans le cadre de l'obligation de moyens à laquelle il est soumis, est responsable de ses prestations ».
Ces stipulations doivent encore être rapprochées :
- d'abord de celles figurant à l'article 4 du même contrat, selon lesquelles « il est expressément spécifié que les obligations du prestataire dans la fourniture des services sont des obligations de moyens » ou encore le prestataire, qui « ne garantit [pas] que son système fonctionne sans aucune discontinuité », s'engage seulement « à apporter tous les soins et efforts raisonnables dans la fourniture des services » comme à fournir « ses meilleurs efforts pour remédier à [toute] défaillance conformément aux pratiques en vigueur dans l'industrie des télécommunications » ;
- et de celles figurant à l'article 11 dudit contrat, selon lesquelles, « par une obligation de moyens, Masselin Communication s'engage à assurer :
* pour les appels fixes empruntant le réseau Masselin Communication, un taux d'échec dû à ce réseau ne dépassant pas 2 % mesuré sur 24 heures en moyenne annuelle nationale,
* pour les appels entrant dans ce réseau, un taux d'efficacité minimal de 65'%, mesuré sur 24 heures en moyenne nationale, sur une période de trois mois glissants ».
A cet égard, c'est à tort que la société PFSB demande à la cour de juger ces clauses non écrites au motif qu'elles constitueraient des « clauses abusives » au sens des articles L. 132-1 et R. 132-1 du code de la consommation qui qualifient ainsi les clauses ayant pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, notamment en supprimant ou en réduisant le droit à réparation du préjudice subi par le cocontractant en cas de manquement à l'une quelconque de ses obligations.
En effet, les clauses précédemment énoncées, qui figurent aux articles 4, 7 et 11 du contrat d'acheminement, ne prévoient aucune limitation du droit à réparation des préjudices susceptibles d'être subis par la société PFSB, se bornant à définir la nature de l'obligation contractée par la prestataire, et, par suite, à fixer le seuil de déclenchement de sa responsabilité contractuelle.
En cela, ces clauses ne créent aucun déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, lesquels ne sont d'ailleurs en rien comparables puisque :
- la prestataire s'engage à mettre en œuvre tous les moyens raisonnables à sa disposition pour parvenir à la meilleure efficacité possible de l'installation téléphonique, et ce, dans un contexte où elle ne peut pas en maîtriser tous les paramètres, s'agissant en effet d'une installation complexe impliquant plusieurs intervenants, dont le fournisseur d'accès internet Orange,
- la cliente s'engage quant à elle à s'acquitter du prix convenu, obligation qui, assurément, s'avère plus aisée à exécuter.
De même, c'est encore à tort que la société PFSB affirme que ces clauses sont contraires à un principe, prétendument validé par la jurisprudence, selon lequel, en matière de prestation de service de télécommunications, le prestataire serait toujours tenu à une obligation de résultat.
Au contraire, la cour observe que les quelques précédents cités par la société PFSB concernent des fournisseurs d'accès (Orange ou AOL) qui, du fait même de l'objet du contrat qui consiste à fournir au client un accès à l'internet, ne peuvent pas prétendre s'exonérer de cette obligation, sauf force majeure, ce qui explique que soit réputée non écrite toute clause qui aurait pour effet de vider cette obligation de sa substance.
Tel n'est pas le cas du contrat d'acheminement souscrit par la société PFSB auprès de la société Masselin Communication, lequel, comme précédemment rappelé, relève d'un système complexe faisant interagir d'autres opérateurs, notamment le fournisseur d'accès sur lequel le prestataire n'a pas de prise, ce qui explique qu'il ait pu convenir avec sa cliente, au demeurant non tenue d'y adhérer, d'un certain nombre d'échecs admissibles dans les communications à émettre ou à recevoir par son intermédiaire.
Ainsi, le prestataire n'est tenu que d'une obligation de moyens consistant à mettre en œuvre toutes les mesures raisonnables propres à limiter autant que possible le nombre de ces échecs.
De ce point de vue, les clauses contestées ne sont ni abusives ni illicites.
Quant au contrat de maintenance souscrit par la société PFSB auprès de la société Axians L'Eté, il ne comprend aucune qualification de l'obligation incombant à la prestataire de service, mais seulement une clause, insérée à l'article 5 du contrat, prévoyant que « la responsabilité d'Axians L'Eté ne pourra être engagée en cas de perte d'exploitation consécutive à un fonctionnement défectueux de l'installation ».
Il ne s'agit donc là que d'une clause limitant les préjudices susceptibles d'indemnisation.
Encore faudrait-il, pour que la cour ait à en apprécier la licéité, qu'il soit établi que la prestataire a manqué à ses obligations de maintenance et que sa responsabilité est engagée.
Or, il n'est pas démontré que la société Axians L'Eté ait manqué à ses obligations, celle-ci étant au contraire intervenue à de nombreuses reprises pour remédier aux dysfonctionnements qui lui étaient signalés, l'expert judiciaire n'ayant d'ailleurs pas remis en cause la qualité de ces interventions.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la société PFSB de sa demande tendant à voir réputer non écrites l'ensemble des clauses précitées.
Quant aux manquements reprochés aux deux prestataires, ils seront écartés, étant encore rappelé :
- que la société Masselin Communication ne s'est jamais engagée à un fonctionnement parfait et permanent de l'installation, s'étant seulement engagée à mettre en œuvre tous les moyens raisonnables propres à limiter autant que possible le risque d'échec des communications acheminées par son intermédiaire, tant à l'émission qu'à la réception, alors par ailleurs que ces échecs n'ont jamais atteint, et de très loin, les seuils prévus à l'article 11 du contrat, dont seul le dépassement aurait pu justifier la mise en cause de la responsabilité de la prestataire ; d'ailleurs, si l'expert judiciaire confirme que des dysfonctionnements persistent, pour autant il reconnaît aussi que le réseau a atteint un « niveau acceptable de fonctionnement » ;
- que la société Axians L'Eté a également respecté ses propres obligations de maintenance puisqu'étant toujours intervenue, dans les conditions prévues au contrat et sans aucune limitation du nombre de ses concours, pour remédier aux difficultés qui lui étaient signalées.
En conséquence et en l'absence de manquements contractuels imputables aux deux prestataires, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la société PFSB :
- d'une part de sa demande tendant à la résiliation du contrat de maintenance aux torts de la société Axians L'Eté,
- d'autre part de sa demande tendant à voir condamner in solidum les sociétés Masselin Communication et Axians L'Eté à l'indemniser des préjudices allégués par elle.
Enfin, la société PFSB sera déboutée de sa demande tendant au remboursement, à titre de dommages-intérêts, des frais qu'elle a exposés pour acquérir le matériel nécessaire à l'installation litigieuse, de même que des sommes versées par elle dans le cadre de l'exécution des deux contrats litigieux, étant encore rappelé :
- qu'il ne résulte pas des éléments du dossier, notamment du rapport d'expertise, que le matériel vendu à la société PFSB présente lui-même des dysfonctionnements ou qu'il soit inadapté ;
- qu'il n'est pas non plus établi que les sociétés Masselin Communication et Axians L'Eté aient manqué à leurs obligations contractuelles, de sorte qu'elles étaient fondées à percevoir les rémunérations convenues avec leur cliente.
Partie perdante, la société PFSB sera condamnée à payer à chacune des sociétés intimées une somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel, ces condamnations devant s'ajouter à celles déjà prononcées par le tribunal au titre des frais irrépétibles exposés en première instance, lesquelles seront confirmées dans leur principe comme dans leur montant.
Enfin, la société PFSB supportera les entiers dépens de première instance et d'appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
La cour :
- confirme le jugement en toutes ses dispositions ;
- y ajoutant :
* déboute la société Pompes Funèbres des communes associées de la région de Saint Brieuc du surplus de ses demandes ;
* condamne la société Pompes Funèbres des communes associées de la région de Saint Brieuc à payer à la société Masselin Communication une somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
* condamne la société Pompes Funèbres des communes associées de la région de Saint Brieuc à payer à la société Axians L'Eté une somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
* condamne la société Pompes Funèbres des communes associées de la région de Saint Brieuc aux entiers dépens de la procédure d'appel.
Le greffier Le président
- 5945 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Activité administrative - Téléphonie et télécopie
- 6097 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Contenu initial du contrat - Détermination des obligations - Obligations non monétaires - Allègement des obligations du professionnel
- 6114 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Responsabilité du professionnel - Clauses limitatives et exonératoires - Droit postérieur au décret du 18 mars 2009 (R. 212-1-6° C. consom.)
- 6272 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Internet - Fourniture d’accès (5) - Obligations du fournisseur
- 6443 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Téléphonie - Téléphonie fixe