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CA AIX-EN-PROVENCE (ch. 3-3), 20 janvier 2022

Nature : Décision
Titre : CA AIX-EN-PROVENCE (ch. 3-3), 20 janvier 2022
Pays : France
Juridiction : Aix-en-Provence (CA), ch. 3 - 3
Demande : 19/11388
Décision : 2022/26
Date : 20/01/2022
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 12/07/2019
Numéro de la décision : 26
Référence bibliographique : 6017 (définition de l’objet principale, calcul des intérêts), 5835 (absence de clause), 6619 (TEG), 5730 (procédure, appel, demande nouvelle), 5735 (effets, refus de la nullité)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9368

CA AIX-EN-PROVENCE (ch. 3-3), 20 janvier 2022 : RG n° 19/11388 ; arrêt n° 2022/26

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « La demande tendant à voir réputer non écrite la clause d'un contrat en raison de son caractère abusif ne s'analyse pas en une demande de nullité et n'est pas soumise à la prescription quinquennale. Le juge national étant tenu de rechercher même d'office le caractère abusif d'une clause contenue dans un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, cette demande ne constitue pas non plus une demande nouvelle prohibée aux termes des articles 564 et 565 du code de procédure civile. L'action est recevable et le jugement infirmé sur ce point. »

2/ « L'article L. 132-1 du code de la consommation dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016, dispose que dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Pour apprécier le caractère abusif des clauses litigieuses, qui portent sur la définition de l'objet principal du contrat, à savoir le calcul des intérêts et du taux effectif global, il est nécessaire d'apprécier ses effets sur le coût du crédit.

La clause, expressément stipulée dans les conditions générales signées par les emprunteurs contrairement à ce que soutient la banque, prévoyant le calcul des intérêts conventionnels sur la base d'une année de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours, n'instaure qu'un rapport d'équivalence en ce que les intérêts du prêt qui doivent, comme le taux effectif global, être calculés sur la base de l'année civile, laquelle est définie comme comportant 365 ou, pour les années bissextiles, 366 jours, 52 semaines ou 12 mois normalisés, un mois normalisé comptant 30,41666 jours (soit 365/12), que l'année soit bissextile ou non. En effet, s'agissant d'un prêt remboursable mensuellement, le calcul des intérêts effectué sur le rapport 30,41666/365, 30/360 ou 1/12 aboutit à un résultat équivalent, chaque période étant considérée, conformément à cette règle, comme égale.

En revanche, s'agissant d'échéances intercalaires, inférieures à un mois, le calcul des intérêts ne peut plus être effectué au regard de la fraction d'année ou du mois normalisé, mais bien en considération du nombre de jours pendant lesquels les fonds ont été mis à la disposition de l'emprunteur.

Il appartient donc à l'emprunteur, dans l'hypothèse d'un calcul différent des intérêts, de démontrer que l'inexactitude du taux entraine, à son détriment, un écart supérieur à une décimale (Civ. 1ère 11 mars 2020, n° 19-10.875).

En l'espèce, il résulte du rapport établi par l'expert amiable des appelants, que la banque a procédé à deux déblocages partiels du prêt les 17 et 20 septembre 2007 et cet expert amiable a établi, sans être démenti par le rapport Prim'act produit par l'intimée, que les intérêts calculés sur le nombre de jours exacts de mise à disposition des fonds s'élevaient à 196,13 euros au lieu des 198,86 euros facturés par la banque, soit une différence de 2,73 euros. Le surplus des calculs effectués sur le nombre de jours exacts dans l'année et le mois ne peut en revanche être retenu, s'agissant d'échéances mensuelles équivalentes à 1/12° d'année ou un mois normalisé de 30,41666 jours. Cette somme de 2,73 euros ne conduit pas à une différence de plus d'une décimale dans le taux convenu entre les parties et a fortiori dans le taux effectif global mentionné dans l'offre de prêt et ne caractérise pas un déséquilibre significatif entre les parties.

Par ailleurs, s'agissant de la dernière échéance, ce même expert amiable montre, sans être démenti par le rapport Prim'act, que les intérêts de la dernière échéance n'ont pas été calculés conformément au taux fixé par écrit entre les parties mais à un taux supérieur qu'il a estimé à 6,41 %. Toutefois, cette facturation supplémentaire d'intérêts ne relève nullement de l'application de la clause dite 360 ou de son caractère abusif, mais constitue une inexécution des stipulations du prêt.

Les appelants considèrent également que la clause stipulant que les intérêts de la période de préfinancement ne sont pas pris en compte dans le calcul du TEG, a un caractère abusif en ce qu'elle conduit à un TEG nécessairement erroné et que la banque ne peut comme elle l'a fait, allonger pour le calcul du TEG la durée de l'amortissement à concurrence de la durée du préfinancement, le TEG devant être calculé sur la base de la seule durée de l'amortissement du prêt. Elle ajoute que son expert amiable a ainsi déterminé que le véritable TEG du prêt s'élève à 6,02 % au lieu des 4,87 % annoncés dans l'offre.

Mais, contrairement à ce que les appelants soutiennent, les intérêts de la phase de préfinancement doivent être intégrés dans le calcul du TEG pour la totalité de la durée de cette phase, seuls éléments connus lors de l'émission de l'offre, et le calcul opéré par leur expert amiable sur la seule base de la durée d'amortissement du prêt ne peut donc être retenu. L'intimée a produit en défense un rapport Prim'act simulant la prise en compte de la durée de la phase de préfinancement dans le calcul du TEG duquel il ne résulte aucune majoration du TEG. En l'absence de preuve rapportée par les appelants de ce que l'absence de prise en compte de la phase de préfinancement dans le calcul du TEG a eu une incidence, sur le taux effectif global, de plus d'une décimale en la défaveur de l'emprunteur, cette clause n'induit aucun déséquilibre significatif entre les parties et le moyen est rejeté.

Les appelants font enfin valoir que c'est à tort que le coût de l'assurance perte d'emploi souscrite par Mme Y. n'a pas été incluse dans le calcul du TEG alors qu'elle a été exigée par la banque.

Cependant, ni les conditions générales, ni les conditions particulières du prêt, ne font de l'assurance perte d'emploi une condition d'octroi du prêt. En effet, si à l'article 2 des conditions générales intitulé « formation du contrat de prêt » il est stipulé que le prêt ne sera définitif que lorsque les emprunteurs auront justifié de leur admission dans une assurance décès-invalidité, il n'existe aucune disposition similaire pour l'assurance perte d'emploi. La stipulation contractuelle qui exclut l'assurance perte d'emploi du calcul du TEG ne crée aucun déséquilibre significatif entre les parties et ne revêt par conséquent aucun caractère abusif. »

 

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

CHAMBRE 3-3

ARRÊT DU 20 JANVIER 2022

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° RG 19/11388. Arrêt n° 2022/26. N° Portalis DBVB-V-B7D-BETGD. ARRÊT AU FOND. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 30 avril 2019 enregistré (e) au répertoire général sous le R.G. n° 17/13788.

 

APPELANTS :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], demeurant [adresse], représenté par Maître François C., avocat au barreau de TARASCON, assisté de Me Jérémie B., avocat au barreau de DOUAI

Madame Y.

née le [date] à [ville], demeurant [adresse], représentée par Maître François C., avocat au barreau de TARASCON, assistée de Me Jérémie B., avocat au barreau de DOUAI

 

INTIMÉE :

SA CAISSE D'ÉPARGNE CEPAC

prise en la personne de son représentant légal, dont le siège social est sis [adresse], représentée par Maître [...] de la SELARL [...] ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Maître Charlotte M., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 novembre 2021, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Valérie GERARD, Président de chambre, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Valérie GERARD, Première Présidente de chambre, Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Présidente de chambre, Madame Françoise PETEL, Conseillère.

Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 janvier 2022.

ARRÊT : Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 janvier 2022, Signé par Madame Valérie GERARD, Première Présidente de chambre et Madame Laure METGE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Selon offre de prêt émise le 14 août 2007, acceptée le 1er septembre 2007, la SA Caisse d'épargne CEPAC (la CEPAC) a consenti à M. X. et Mme Y. un prêt immobilier destiné à financer l'acquisition d'un terrain et la construction de leur résidence principale, d'un montant de 227.517 euros remboursable en 360 échéances mensuelles, au taux d'intérêt fixe de 4,20 %, le taux effectif global étant fixé à 4,87 % et le taux de période à 0,41 %.

Par acte du 23 octobre 2017, M. X. et Mme Y. ont fait assigner la Caisse d'épargne CEPAC en nullité de la stipulation conventionnelle d'intérêts, application du taux légal et remboursement des intérêts en trop perçus par la banque.

Par jugement du 30 avril 2019, le tribunal judiciaire de Marseille a :

- déclaré irrecevable l'action en nullité de la stipulation d'intérêt conventionnel introduite par M. X. et par Mme Y.,

- déclaré irrecevable l'action en déchéance du droit aux intérêts conventionnels introduite par M. X. et par Mme Y.,

- déclaré irrecevable l'action en responsabilité introduite par M. X. et par Mme Y.,

- déclaré irrecevable l'action tendant à faire déclarer non écrite la clause 360 en ce qu'elle serait abusive introduite par M. X. et par Mme Y.,

- condamné in solidum M. X. et Mme Y. à verser à la Caisse d'épargne CEPAC la somme de 5.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamné in solidum M. X. et Mme Y. à verser à la Caisse d'épargne CEPAC la somme de 5.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- rejeté toute autre demande,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du jugement,

- condamné in solidum M. X. et Mme Y. aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

M. X. et Mme Y. ont interjeté appel par déclaration du 12 juillet 2019.

[*]

Par conclusions du 15 octobre 2021, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, M. X. et Mme Y. demandent à la cour de :

- déclarer l'appel recevable ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il :

- déclare irrecevable l'action en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels introduite par M. X. et par Mme Y.,

- déclare irrecevable l'action en déchéance du droit aux intérêts conventionnels introduite par M. X. et par Mme Y.,

- déclare irrecevable l'action en responsabilité introduite par M. X. et par Mme Y.,

- déclare irrecevable l'action tendant à faire déclarer non écrite la clause 360 en ce qu'elle serait abusive par M. X. et par Mme Y.,

- condamne in solidum M. X. et par Mme Y. à verser à la Caisse d'épargne CEPAC la somme de 5.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamne in solidum M. X. et par Mme Y. à verser à la Caisse d'épargne CEPAC la somme de 5.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejette toute autre demande,

- condamne in solidum M. X. et par Mme Y. aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

statuant à nouveau,

- dire et juger que les demandes de M. X. et Mme Y. sont recevables et bien fondées ;

- constater que les intérêts périodiques du prêt n° 13XX90 ont été calculés sur la base d'une année bancaire de 360 jours, soit sur une base autre que l'année civile ;

- dire et juger que le taux effectif global du prêt n° 13XX90 mentionné dans l'offre de prêt en date du 14 août 2007 émise par la Caisse d'épargne CEPAC est erroné ;

- ordonner la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel depuis la souscription du contrat initial souscrit par M. X. et Mme Y. ;

- enjoindre à la Caisse d'épargne CEPAC d'établir de nouveaux tableaux d'amortissement tenant compte de la substitution du taux légal au taux conventionnel, depuis la date de souscription du prêt, des éventuels avenants, les échéances restant à courir sur le prêt jusqu'à son terme devant porter intérêts au taux légal année par année, le cas échéant semestre par semestre ;

- condamner la Caisse d'épargne CEPAC à restituer à M. X. et Mme Y. le trop-perçu correspondant à l'écart entre les intérêts au taux conventionnel du prêt n°13XX90 et les intérêts au taux légal au titre du prêt n°13XX90 ; avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation ;

- dire et juger que lesdites sommes devront être actualisées au regard des tableaux d'amortissement qui seront établis par la Caisse d'épargne CEPAC, au taux légal année par année, le cas échéant semestre par semestre, depuis la date de souscription du contrat ;

subsidiairement, si par impossible la substitution des intérêts légaux aux intérêts conventionnels devait être écartée,

Vu l'article L. 312-33 du code de la consommation, désormais codifié à l'article L. 341-34 du même code ;

- prononcer la déchéance totale du droit aux intérêts conventionnels du prêt 13XX90 souscrit auprès de la Caisse d'épargne CEPAC par M. X. et Mme Y. ;

en tout état de cause,

- condamner la Caisse d'épargne CEPAC à payer à M. X. et Mme Y. la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de loyauté contractuelle ;

- condamner la Caisse d'épargne CEPAC à payer à M. X. et Mme Y. la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeter toutes demandes et prétentions contraires de la Caisse d'épargne CEPAC ;

- condamner la Caisse d'épargne CEPAC aux entiers dépens de l'instance.

[*]

Par conclusions du 30 septembre 2021, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, la Caisse d'épargne CEPAC demande à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 30 avril 2019 par le tribunal de grande instance de Marseille

en conséquence

à titre principal

Vu les articles 1304, 2224 du code civil et 122 du code de procédure civile

- dire et juger que M. X. et Mme Y. sont prescrits en leurs demandes fondées sur un taux effectif global prétendument erroné depuis le 18 juin 2013,

- déclarer M. X. et Mme Y. irrecevables en leurs demandes et action prescrite en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels et en leur action en déchéance du droit aux intérêts à l'encontre de la Caisse d'épargne,

- dire et juger que la clause 30/360 n'est pas imprescriptible et que les demandes relatives à cette dernière sont prescrites depuis le 19 juin 2013,

- les débouter en conséquence de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

à titre subsidiaire

Vu l'article 9 du code de procédure civile et 1315 ancien du code civil

Vu l'article L.313-1 du code de la consommation

Vu l'annexe de l'article R.313-1 du code de la consommation

- constater que M. X. et Mme Y. ne rapportent pas la preuve de la fausseté des taux effectifs globaux à plus d'une décimale mentionnée dans le prêt accordé,

- dire et juger que les intérêts conventionnels ont été calculés conformément à l'offre de prêt sur une année civile,

- dire et juger que le TEG mentionné dans l'offre de prêt a été calculé conformément aux dispositions de l'article L. 313-1 du code de la consommation et à l'annexe de l'article R. 313-1 du code de la consommation,

- débouter les appelants de leur demande d'intégration des frais de la période de préfinancement et des frais d'assurance perte d'emploi dans l'assiette de calcul du TEG,

- débouter M. X. et Mme Y. de l'ensemble de leurs demandes et action en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels et en déchéance du droit aux intérêts à l'encontre de la Caisse d'épargne,

- condamner conjointement et solidairement (sic) M. X. et Mme Y. au paiement de la somme de 5.000 euros pour procédure abusive en application des dispositions de l'article 1240 du code civil,

- les condamner sous la même solidarité au paiement de la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de Maître Gilles M. ;

à titre infiniment subsidiaire

Vu l'article L. 312-33 du code de la consommation

- prononcer la déchéance partielle du droit aux intérêts de la banque à hauteur du seul préjudice démontré par M. X. et Mme Y., soit la somme de 2,83 euros,

- débouter en tout état de cause les appelants de leur demande de dommages et intérêts pour manquement au devoir de loyauté et au devoir d'information.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Sur la recevabilité :

Les consorts X.-Y. soutiennent que leur action n'est pas prescrite, puisque l'action qui tend à faire échec à une clause abusive n'est pas soumise à la prescription, que la déloyauté de la banque lui interdit de se prévaloir de la prescription, et qu'à supposer même que la prescription soit encourue, elle n'est pas acquise en raison de l'application du principe d'effectivité et du principe d'égalité des armes qui interdit à la banque d'opposer la prescription s'agissant des irrégularités affectant la validité d'un prêt en cours d'exécution.

La CEPAC réplique que la prescription est acquise, même s'agissant de la demande fondée sur le caractère abusif de la clause 360, dès lors que les appelants pouvaient dès l'acceptation de l'offre, vérifier l'exactitude du calcul des intérêts conventionnels par une analyse du tableau d'amortissement et que l'offre mentionne précisément les éléments pris en compte dans le calcul du TEG. Elle ajoute que la demande fondée sur le caractère abusif de la clause tendant à exclure le coût du préfinancement de la liquidation du crédit et du calcul du TEG est nouvelle en cause d'appel.

[*]

La demande tendant à voir réputer non écrite la clause d'un contrat en raison de son caractère abusif ne s'analyse pas en une demande de nullité et n'est pas soumise à la prescription quinquennale.

Le juge national étant tenu de rechercher même d'office le caractère abusif d'une clause contenue dans un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, cette demande ne constitue pas non plus une demande nouvelle prohibée aux termes des articles 564 et 565 du code de procédure civile.

L'action est recevable et le jugement infirmé sur ce point.

 

Sur le caractère abusif des clauses de calcul des intérêts et de calcul du TEG :

L'article L. 132-1 du code de la consommation dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016, dispose que dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Pour apprécier le caractère abusif des clauses litigieuses, qui portent sur la définition de l'objet principal du contrat, à savoir le calcul des intérêts et du taux effectif global, il est nécessaire d'apprécier ses effets sur le coût du crédit.

La clause, expressément stipulée dans les conditions générales signées par les emprunteurs contrairement à ce que soutient la banque, prévoyant le calcul des intérêts conventionnels sur la base d'une année de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours, n'instaure qu'un rapport d'équivalence en ce que les intérêts du prêt qui doivent, comme le taux effectif global, être calculés sur la base de l'année civile, laquelle est définie comme comportant 365 ou, pour les années bissextiles, 366 jours, 52 semaines ou 12 mois normalisés, un mois normalisé comptant 30,41666 jours (soit 365/12), que l'année soit bissextile ou non.

En effet, s'agissant d'un prêt remboursable mensuellement, le calcul des intérêts effectué sur le rapport 30,41666/365, 30/360 ou 1/12 aboutit à un résultat équivalent, chaque période étant considérée, conformément à cette règle, comme égale.

En revanche, s'agissant d'échéances intercalaires, inférieures à un mois, le calcul des intérêts ne peut plus être effectué au regard de la fraction d'année ou du mois normalisé, mais bien en considération du nombre de jours pendant lesquels les fonds ont été mis à la disposition de l'emprunteur.

Il appartient donc à l'emprunteur, dans l'hypothèse d'un calcul différent des intérêts, de démontrer que l'inexactitude du taux entraine, à son détriment, un écart supérieur à une décimale (Civ. 1ère 11 mars 2020, n° 19-10.875).

En l'espèce, il résulte du rapport établi par l'expert amiable des appelants, que la banque a procédé à deux déblocages partiels du prêt les 17 et 20 septembre 2007 et cet expert amiable a établi, sans être démenti par le rapport Prim'act produit par l'intimée, que les intérêts calculés sur le nombre de jours exacts de mise à disposition des fonds s'élevaient à 196,13 euros au lieu des 198,86 euros facturés par la banque, soit une différence de 2,73 euros. Le surplus des calculs effectués sur le nombre de jours exacts dans l'année et le mois ne peut en revanche être retenu, s'agissant d'échéances mensuelles équivalentes à 1/12° d'année ou un mois normalisé de 30,41666 jours.

Cette somme de 2,73 euros ne conduit pas à une différence de plus d'une décimale dans le taux convenu entre les parties et a fortiori dans le taux effectif global mentionné dans l'offre de prêt et ne caractérise pas un déséquilibre significatif entre les parties.

Par ailleurs, s'agissant de la dernière échéance, ce même expert amiable montre, sans être démenti par le rapport Prim'act, que les intérêts de la dernière échéance n'ont pas été calculés conformément au taux fixé par écrit entre les parties mais à un taux supérieur qu'il a estimé à 6,41 %. Toutefois, cette facturation supplémentaire d'intérêts ne relève nullement de l'application de la clause dite 360 ou de son caractère abusif, mais constitue une inexécution des stipulations du prêt.

Les appelants considèrent également que la clause stipulant que les intérêts de la période de préfinancement ne sont pas pris en compte dans le calcul du TEG, a un caractère abusif en ce qu'elle conduit à un TEG nécessairement erroné et que la banque ne peut comme elle l'a fait, allonger pour le calcul du TEG la durée de l'amortissement à concurrence de la durée du préfinancement, le TEG devant être calculé sur la base de la seule durée de l'amortissement du prêt. Elle ajoute que son expert amiable a ainsi déterminé que le véritable TEG du prêt s'élève à 6,02 % au lieu des 4,87 % annoncés dans l'offre.

Mais, contrairement à ce que les appelants soutiennent, les intérêts de la phase de préfinancement doivent être intégrés dans le calcul du TEG pour la totalité de la durée de cette phase, seuls éléments connus lors de l'émission de l'offre, et le calcul opéré par leur expert amiable sur la seule base de la durée d'amortissement du prêt ne peut donc être retenu.

L'intimée a produit en défense un rapport Prim'act simulant la prise en compte de la durée de la phase de préfinancement dans le calcul du TEG duquel il ne résulte aucune majoration du TEG.

En l'absence de preuve rapportée par les appelants de ce que l'absence de prise en compte de la phase de préfinancement dans le calcul du TEG a eu une incidence, sur le taux effectif global, de plus d'une décimale en la défaveur de l'emprunteur, cette clause n'induit aucun déséquilibre significatif entre les parties et le moyen est rejeté.

Les appelants font enfin valoir que c'est à tort que le coût de l'assurance perte d'emploi souscrite par Mme Y. n'a pas été incluse dans le calcul du TEG alors qu'elle a été exigée par la banque.

Cependant, ni les conditions générales, ni les conditions particulières du prêt, ne font de l'assurance perte d'emploi une condition d'octroi du prêt. En effet, si à l'article 2 des conditions générales intitulé « formation du contrat de prêt » il est stipulé que le prêt ne sera définitif que lorsque les emprunteurs auront justifié de leur admission dans une assurance décès-invalidité, il n'existe aucune disposition similaire pour l'assurance perte d'emploi.

La stipulation contractuelle qui exclut l'assurance perte d'emploi du calcul du TEG ne crée aucun déséquilibre significatif entre les parties et ne revêt par conséquent aucun caractère abusif.

 

Sur les demandes de dommages et intérêts :

Aucun des griefs soutenus par les appelants quant au caractère abusif des clauses du contrat de prêt n'ayant été retenu, il n'y a pas lieu de faire droit à leur demande de dommages et intérêts pour manquement à la loyauté contractuelle.

L'exercice d'une action en justice ne peut dégénérer en abus que dans les cas d'intention de nuire ou de mauvaise foi.

Le fait que de multiples actions aient été entreprises à l'encontre de l'intimée par des emprunteurs, ne saurait constituer une faute imputable aux appelants, dont l'intention de nuire ou la mauvaise foi ne peut pas non plus résulter de la seule production d'un rapport. De surcroît, la Caisse d'épargne ne produit aucune pièce pour justifier d'un quelconque préjudice causé par une faute constitutive d'un abus commise par les appelants à son égard.

La Caisse d'épargne est déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et le jugement est également infirmé de ce chef.

Les contestations des appelants relatives au montant de leur condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile sont inopérantes, étant observé que la juridiction de première instance a statué dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire et que M. X. et Mme Y. ont été déboutés de leurs demandes quant au caractère abusif des clauses du contrat de prêt.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Infirme le jugement du tribunal judiciaire de Marseille en ce qu'il a déclaré irrecevables les actions de M. X. et Mme Y. et en ce qu'il les a condamnés au paiement de la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Déclare recevable l'action de M. X. et Mme Morgane K.,

Déboute M. X. et Mme Y. de toutes leurs demandes,

Déboute la SA Caisse d'épargne et de prévoyance CEPAC de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Confirme le jugement déféré sur le surplus des dispositions soumises à la cour,

Condamne M. X. et Mme Y. aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. X. et Mme Y. à payer à la SA Caisse d'épargne et de prévoyance CEPAC la somme de trois mille euros.

LE GREFFIER                                            LE PRÉSIDENT