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TGI MONTAUBAN, 10 décembre 1992

Nature : Décision
Titre : TGI MONTAUBAN, 10 décembre 1992
Pays : France
Juridiction : Montauban (TGI)
Demande : 1403/91
Date : 10/12/1992
Nature de la décision : Rejet
Décision antérieure : TGI MONTAUBAN, 14 mai 1992, CA TOULOUSE (2e ch. 1re sect.), 10 mai 1994
Numéro de la décision : 877
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1029

TGI MONTAUBAN, 10 décembre 1992 : RG n° 1403/91 ; jugement n° 877

(sur appel CA Toulouse (2e ch.), 10 mai 1994 : RG n° 823/93 ; arrêt n° 541)

 

Extrait : « Il est prévu aux conditions générales de vente au 5° « nos devis ne comportant pas l'analyse de la composition chimique du sol et des eaux ... la Société IRRIVERT ne peut encourir aucune responsabilité directe ou indirecte en cas de corrosion due à l'un quelconque de ces facteurs ».

M. X., gérant du GAEC DE SAINTE MARGUERITE, n'est pas un professionnel au sens de la loi du 10 JANVIER 1978, en effet si le matériel acheté était destiné à l'exercice de sa profession d'agriculteur, il n'est pas établi qu'il ait eu une connaissance particulière dans le domaine du matériel d'irrigation.

Aux termes de l'article 2 du décret du 24 MARS 1978 ... « est interdite comme abusive au sens de l'alinéa 1er de l'article 35 de la loi susvisée la clause ayant pour objet ou pour effet de supprimer ou de réduire le droit à réparation du non professionnel ou consommateur en cas de manquement par le professionnel à l'une quelconque de ses obligations ». M. X. a signé le bon de commande le 8 MARS 1987 ; au niveau de l'espace réservé à la signature il est indiqué de façon visible « suivant conditions de vente stipulées au verso du présent feuillet dont l'acheteur déclare avoir pris connaissance et les accepter ». M. X. a eu entre ses mains avant de s’engager les conditions générales de la vente qu'il lui appartenait de lire le chapitre garanties étant parfaitement visible et d'une longueur n'en rendant pas la lecture ardue. Il est clairement stipulé que la société venderesse ne s'occupe pas de l'analyse de l'eau et en effet le devis ne concerne que la description du matériel, la superficie couverte, le débit, la durée d'une rotation complète ... La Société IRRIVERT n'effectuant pas cette analyse, elle ne peut avoir manqué à son obligation. Le défaut d'information allégué n'est pas établi. »

 

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTAUBAN

AUDIENCE CIVILE

JUGEMENT DU 10 DÉCEMBRE 1992

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 1403/91. Jugement n° 877. À l'audience du DIX DÉCEMBRE MIL NEUF CENT QUATRE VINGT DOUZE, du Tribunal de Grande Instance de MONTAUBAN, tenue au Palais de Justice de ladite ville, en matière civile, il a été publiquement donné lecture du jugement rendu par Madame HUMBERT, VICE-PRÉSIDENT au Tribunal de Grande Instance de MONTAUBAN, agissant en JUGE UNIQUE, en exécution des articles 801 et suivants du CODE DE PROCÉDURE CIVILE, dans la cause :

 

ENTRE :

- GAEC DE SAINTE MARGUERITE

dont le siège social est à [adresse] - DEMANDEUR ayant l'Association LEVI - BEAUTE - LEVI Jean-Lou - pour Avocats à MONTAUBAN, d'une part.

 

ET :

- SA IRRIVERT

dont le siège social est [adresse] ‑ DÉFENDERESSE ayant l'Association PLANTIE - DECHARME - pour Avocats Postulants à MONTAUBAN et la SCP LARRAT - GUEROT - SAINT GENIEST - pour Avocats Plaidants à TOULOUSE, d'autre part.

 

La cause inscrite au rôle sous le numéro 1403 de 1991, plaidée à l'audience du 26 NOVEMBRE 1992 où siégeait Madame HUMBERT, VICE-PRESIDENT, agissant en JUGE UNIQUE, sans opposition des Avocats, assistée de Madame LAVIALE, GREFFIER DIVISIONNAIRE.

Ouï Madame HUMBERT, en son rapport.

Ouï Maître LEVI, Avocat en ses conclusions pour le GAEC DE SAINTE MARGUERITE.

Ouï Maître PLANTIE et Maître LARRAT, Avocats en leurs conclusions pour la SA IRRIVERT.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] RAPPEL :

Ce Tribunal, par jugement du 14 MAI 1992 auquel la présente décision se réfère pour l'exposé des faits et des prétentions des parties, a débouté le GAEC DE SAINTE MARGUERITE de sa demande de complément d'expertise et lui a enjoint de conclure au fond.

 

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Le GAEC DE SAINTE MARGUERITE fait valoir que la tuyauterie du pivot d'arrosage est atteinte d'une corrosion importante de nature à compromettre à terme la solidité de l'ensemble,

- que les investigations complémentaires qu'il a fait effectuer démontrent que la capacité d'arrosage se trouve déjà affectée,

- que le matériel présente un vice caché le rendant impropre à son usage,

- que l'expert a uniquement incriminé la forte salinité de l'eau mais que la responsabilité contractuelle de la Sté IRRIVERT est engagée pour avoir manqué à son devoir de conseil ; qu'en effet compte tenu du coût élevé du matériel il lui appartenait d'attirer l'attention de sa clientèle sur la nécessité de faire procéder à une analyse d'eau préalablement à la vente compte tenu des risques de corrosion et de leurs conséquences au niveau de la solidité et de l'efficacité du matériel,

- que la société IRRIVERT ne peut se retrancher derrière les conditions générales de vente la dégageant de toute responsabilité en cas de corrosion dès lors qu'il n'est pas établi que le GAEC DE SAINTE MARGUERITE ait eu connaissance de cette clause au moment de la conclusion du contrat, qu'en tout état de cause elle lui serait inopposable, son gérant M. X. étant un non professionnel au sens de la loi du 10 JANVIER 1978 et qu'elle se heurterait aux dispositions de l'article 2 du décret du 24 MARS 1978.

* sollicite la résolution de la vente,

* la condamnation de la Sté IRRIVERT à lui rembourser la somme de 192.699,46 Francs HT et à lui payer les sommes de 5.000 Francs à titre de dommages et intérêts [minute page 3] et de 5.000 Francs en application de l'article 700 du NOUVEAU CODE DE PROCÉDURE CIVILE.

 

La Société IRRIVERT reprend ses précédentes écritures quant à l'existence d'un vice caché,

- réplique que le GAEC DE SAINTE MARGUERITE ne pouvait pas ignorer les conditions générales de vente qui ont été acceptées par son représentant légal aux termes du bon de commande et du devis,

- que le GAEC DE SAINTE MARGUERITE ne saurait être assimilé à un non professionnel au sens de la loi du 10 JANVIER 1978, le matériel ayant été commandé pour les besoins de l'exercice de sa profession,

- que l'article 2 du décret du 24 MARS 1978 considère comme abusive la clause « ayant pour objet ou pour effet de supprimer ou de réduire le droit à réparation du non professionnel ou consommateur en cas de manquement par le professionnel à l'une quelconque de ses obligations », que l'analyse chimique de l'eau n'entrait pas dans les obligations de la Société IRRIVERT et que la clause figurant aux conditions générales de vente ne répond pas à la définition de l'article 2 du décret susvisé,

- que le matériel a toujours fonctionné à l'exception des conséquences de la fausse manœuvre du GAEC.

* conclut au débouté des demandes présentées et au paiement des sommes de :

- 51.751,51 Francs avec intérêts au taux légal à compter du jour de la signification de ses précédentes écritures contenant une demande reconventionnelle.

- 30.000,00 Francs à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.

- 15.000,00 Francs sur le fondement de l'article 700 du NOUVEAU CODE DE PROCÉDURE CIVILE.

 

Le GAEC DE SAINTE MARGUERITE soutient que la Société IRRIVERT peut se prévaloir de la clause de non responsabilité stipulée dans les conditions générales de vente en cas de corrosion élu matériel par suite de la composition chimique de l'eau au [minute page 4] motif :

- que ces conditions figurent au verso du bon de commande qui n'est pas revêtu de la signature des parties et ne comporte aucune date, de telle sorte qu'il n'est pas établi que l'acquéreur en ait eu connaissance,

- que M. X. n'avait pas la qualité de professionnel au sens de la loi du 10 JANVIER 1978 n'étant pas un spécialiste en matière de matériel d'irrigation, matériel de haute technicité,

- qu'en exécution de son devoir de conseil, la Société IRRIVERT devait attirer l'attention de l'acquéreur sur la nécessité de faire procéder à des analyses d'eau, ce qu'elle n'a pas fait.

* maintient sa demande.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR QUOI LE TRIBUNAL :

SUR L'EXISTENCE D'UN VICE CACHÉ :

Le GAEC DE SAINTE MARGUERITE achète au cours de l'année 1987 à la Société IRRIVERT un pivot d'arrosage pour un prix de 192.699,46 Francs HT (facture du 24 JUIN 1987). Ce matériel fonctionne normalement en 1987 et 1988. A la fin de l'année 1989 et à la suite d'une fausse manœuvre le pivot ne s'arrête pas et se tord. M. X., Gérant du GAEC, effectue lui-même la réparation.

Il résulte du rapport d'expertise que l'effondrement du 10 MAI 1990 est la conséquence de la réparation défectueuse effectuée par M. X. et portant sur la travée n° 3 ; cette travée s'est en effet « effondrée par flambage de la poutre comprimée qu'est le tuyau supérieur » entraînant par traction le pliage des travées 4 et 5,

- que l'épaisseur du zinc déposé par galvanisation à chaud dans les tuyaux (71 à 88 microns - 144 et 209 microns - 65 à 99 microns) est bien supérieure à l'épaisseur minimale de 49 microns préconisée par la norme AFNOR.

Les opérations d'expertise n'ont pas mis en évidence l'existence au moment de la vente d'un vice caché.

Le GAEC DE SAINTE MARGUERITE se plaint d'une pluviométrie irrégulière.

[minute page 5] Au cours des opérations d'expertise qui ont duré un certain temps, M. X. n'a jamais parlé à l'expert de cette défectuosité, or il n'aurait pas manqué de le faire si elle avait existé ; il n'a déposé aucun dire à ce sujet.

L'expert conclut que le matériel est en état de fonctionner normalement, M. X. l’a d'ailleurs utilisé depuis le 24 JUIN 1990 et il fonctionne encore.

Le GAEC DE SAINTE MARGUERITE sera débouté de sa demande fondée sur l'article 1641 et suivants du CODE CIVIL.

 

SUR L'OBLIGATION DE CONSEIL :

L'expert a relevé l'existence d'une corrosion intérieure des tuyaux de nature à entraîner la diminution de l'épaisseur des tuyaux dans le temps due à une trop forte salinité de l'eau.

La teneur en chlorure doit être inférieure à 100 mg par litre et celle des sulfates à 150 mg/l, or elle est respectivement de 327 et 257 mg/l.

Il est prévu aux conditions générales de vente au 5° « nos devis ne comportant pas l'analyse de la composition chimique du sol et des eaux ... la Société IRRIVERT ne peut encourir aucune responsabilité directe ou indirecte en cas de corrosion due à l'un quelconque de ces facteurs ».

M. X., gérant du GAEC DE SAINTE MARGUERITE, n'est pas un professionnel au sens de la loi du 10 JANVIER 1978, en effet si le matériel acheté était destiné à l'exercice de sa profession d'agriculteur, il n'est pas établi qu'il ait eu une connaissance particulière dans le domaine du matériel d'irrigation.

Aux termes de l'article 2 du décret du 24 MARS 1978 ... « est interdite comme abusive au sens de l'alinéa 1er de l'article 35 de la loi susvisée la clause ayant pour objet ou pour effet de supprimer ou de réduire le droit à réparation du non professionnel ou consommateur en cas de manquement par le professionnel à l'une quelconque de ses obligations ».

M. X. a signé le bon de commande le 8 MARS 1987 ; au niveau de l'espace réservé à la signature il est indiqué de façon visible « suivant conditions de vente stipulées au verso du présent feuillet dont l'acheteur déclare avoir pris connaissance et les accepter ».

[minute page 6] M. X. a eu entre ses mains avant de s’engager les conditions générales de la vente qu'il lui appartenait de lire le chapitre garanties étant parfaitement visible et d'une longueur n'en rendant pas la lecture ardue.

Il est clairement stipulé que la société venderesse ne s'occupe pas de l'analyse de l'eau et en effet le devis ne concerne que la description du matériel, la superficie couverte, le débit, la durée d'une rotation complète ...

La Société IRRIVERT n'effectuant pas cette analyse, elle ne peut avoir manqué à son obligation.

Le défaut d'information allégué n'est pas établi.

Le GAEC DE SAINTE MARGUERITE sera en conséquence débouté de l'ensemble de ses demandes.

 

SUR LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE :

Le GAEC DE SAINTE MARGUERITE demeure débiteur à l'égard de la Société IRRIVERT de la somme de 51.751,51 Francs au paiement de laquelle il sera condamné avec intérêts à compter du 27 MARS 1992.

 

SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES :

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais par elles engagés et non compris dans les dépens.

Le retard dans le paiement est compensé par les intérêts.

La Société IRRIVERT ne prouve pas avoir subi de préjudice indépendant de ce retard, ni le caractère abusif de la procédure engagée ; elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LE TRIBUNAL, statuant en JUGE UNIQUE, publiquement, contradictoirement, en matière civile et en premier ressort.

Dit que le matériel vendu par la Société IRRIVERT n'est pas affecté d'un vice caché et que la preuve d'un manquement de [minute page 7] cette société à ses obligations contractuelles n'est pas rapportée.

Déboute le GAEC DE SAINTE MARGUERITE de l'ensemble de ses demandes.

Condamne le GAEC DE SAINTE MARGUERITE à payer à la Société IRRIVERT la somme de 51.751,51 Francs avec intérêts au taux légal à compter du 27 MARS 1992.

Déboute la Société IRRIVERT de ses autres chefs de demande.

Met les dépens à la charge du GAEC DE SAINTE MARGUERITE et dit que la SCP d'Avocats PLANTIE - DECHARME aura le droit de recouvrer directement ceux des dépens dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision en application de l'article 699 du NOUVEAU CODE DE PROCÉDURE CIVILE.