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CA TOULOUSE (2e ch. 1re sect.), 10 mai 1994

Nature : Décision
Titre : CA TOULOUSE (2e ch. 1re sect.), 10 mai 1994
Pays : France
Juridiction : Toulouse (CA), 2e ch. sect. 1
Demande : 823/93
Date : 10/05/1994
Nature de la décision : Confirmation
Décision antérieure : TGI MONTAUBAN, 14 mai 1992, CASS. CIV. 1re, 10 juillet 1996, TGI MONTAUBAN, 10 décembre 1992
Numéro de la décision : 541
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 858

CA TOULOUSE (2e ch. 1re sect.), 10 mai 1994 : RG n° 823/93 ; arrêt n° 541

(sur pourvoi Cass. civ. 1re, 10 juillet 1996 : pourvoi n° 94-16.843)

 

Extrait : « Mais attendu que cette oxydation est due selon Mr. A. à une trop forte salinité de l'eau et qu'il était expressément prévu aux conditions générales de vente de la société IRRIVERT que celle-ci n'était pas tenue d'analyser la composition chimique du sol et des eaux et qu'elle ne pourrait encourir aucune responsabilité directe ou indirecte en cas de corrosion due à l'un quelconque de ces facteurs ; Que cette clause est opposable au GAEC de SAINTE-MARGUERITE puisqu'il a déclaré, immédiatement après avoir signé le bon de commande, qu'il avait pris connaissance des conditions générales de vente figurant au verso et qu'il les acceptait ; Que le GAEC de SAINTE-MARGUERITE, groupement d'agriculteurs non spécialisés dans les opérations d'irrigations, peut être considéré, dans le cas d'espèce, comme un simple consommateur mais qu'il n'est pour autant fondé à soutenir que la clause en litige est une clause abusive au sens de l'article 35 de la loi du 10 janvier 1978 car elle ne lui a pas été imposé par un abus de puissance économique de la société IRRIVERT et elle n'était pas de nature à conférer à cette dernière un avantage excessif ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

DEUXIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 10 MAI 1994

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 823/93. Arrêt n° 541.

Prononcé à l'audience publique du DIX MAI MIL NEUF CENT QUATRE VINGT QUATORZE, Par Monsieur LEBREUIL Conseiller faisant fonction de Président à ce désigné par Ordonnance de Monsieur le Premier Président en date du 18 avril 1994. Assisté de Monsieur BORIES Greffier,

LA COUR D'APPEL DE TOULOUSE, Deuxième Chambre a rendu l'arrêt contradictoire suivant, après que la cause ait été débattue en audience publique le 12 avril 1994, devant Monsieur LEBREUIL, Conseiller, faisant fonction de Président, lequel sans opposition des avocats des parties, conformément aux articles 786 et 910 du nouveau code de procédure civile, en a rendu compte à la Cour qui en a délibéré dans la composition suivante : Mr. LEBREUIL, Conseiller, faisant fonction de Président, Monsieur BENSOUSSAN et Monsieur MILHET, Conseillers, Assistés de Monsieur BORIES Greffier.

Les conseils des parties ayant été avisés de la date à laquelle l'arrêt serait rendu ;

 

DANS L'AFFAIRE OPPOSANT :

GAEC DE SAINTE-MARGUERITE

[adresse], APPELANTE, ayant pour avoué la SCP BOYER LESCAT et pour avocat Maître BARTHET du barreau de TOULOUSE.

C/

- Société IRRIVERT

[adresse]

- Maître Olivier FABRE

[adresse], pris es qualité d'administrateur au redressement judiciaire de la société IRRIVERT.

- Maître Luc MARION

[adresse], pris es qualité de représentant des créanciers au redressement judiciaire de la société IRRIVERT.

INTIMÉS, ayant pour avoué Maître DE LAMY et pour avocat la SCP LARRAT GUEROT ST-GENIEST du barreau de TOULOUSE.

Vu l'ordonnance de clôture du 14 mars 1994.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] Statuant sur l'appel, dont la régularité n'est pas contestée, interjeté par le GAEC de SAINTE-MARGUERITE de deux jugements en date des 14 mai et 10 décembre 1992 par lesquels le tribunal de grande instance de MONTAUBAN l'a débouté de toutes ses demandes à l'encontre de la société IRRIVERT et l'a condamnée à lui payer la somme de 51.751,51 Francs avec intérêts au taux légal à compter du 27 mars 1992 ;

Attendu que trois des travées du pivot d'arrosage acheté en 1987 par le GAEC de SAINT-MARGUERITE à la société IRRIVERT se sont effondrées au mois de mai 1990 et que l'acquéreur a fait assigner son cocontractant en résolution de la vente ;

Attendu que les premiers juges l'ont débouté de toutes ses demandes aux motifs d'une part que l'expert A., désigné en référé n'avait pas retenu l'existence d'un vice caché et que d'autre part la société IRRIVERT n'avait pas manqué à son obligation de conseil en n'avertissant pas le GAEC, au moment de la vente, que la trop forte salinité de l'eau risquait à terme d'endommager l'installation ;

Attendu que l'appelant fait grief au premier juge de s'être ainsi prononcé et de l'avoir condamné reconventionnellement à payer à la société IRRIVERT la somme de 51.751,51 Francs restant due sur le prix de l'installation alors pourtant que l'effondrement d'une partie de la rampe résultait d'un vice caché et que l'oxydation de la tuyauterie n'était pas due à la salinité de l'eau mais au fait que le matériel vendu n'était pas adapté à l'usage auquel il était destiné en fonction du milieu dans lequel il devait être implanté ; que de toute façon le vendeur avait manqué à son obligation de conseil en n'attirant pas l'attention de son client sur les dégâts que l'eau utilisée pourrait causer à l'installation ;

Attendu que, faisant de surcroît état des défectuosités de l'arrosage dont l'intensité varierait de 300 % d'un point à l'autre de la rampe, il conclut à la résolution de la vente, à la restitution du prix, au rejet des demandes d'IRRIVERT et à sa condamnation au paiement des sommes de 5.000 Francs à titre de dommages-intérêts et 5.000 Francs également au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Attendu que la société IRRIVERT, Mr. MARION, représentant des créanciers de cette société, et Mr. FABRE son administrateur judiciaire concluent au contraire à la confirmation du jugement dont appel en faisant essentiellement valoir que l'action en résolution de la vente pour vices cachés est irrecevable pour n'avoir pas été intentée à bref délai et qu'elle est de toute façon mal fondée ; que l'effondrement du pivot n'était que la conséquence d'une réparation inadéquate effectuée par l'utilisateur lui-même à la suite d'une fausse manœuvre dont il était seul responsable et que l'oxydation de la tuyauterie ne pouvait engager la responsabilité du vendeur puisque sa garantie avait été contractuellement exclue en cas de corrosion due à l'eau ;

[minute page 3] Attendu qu'elle réclame 30.000 Francs à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et 15.000 Francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR QUOI :

I) Attendu que l'action en résolution de la vente pour vices cachés a été introduite par assignation du 24 septembre 1991 alors que le vice allégué avait été analysé par l'expert A. dans son rapport déposé le 22 novembre 1990 ; qu'elle est donc irrecevable par application de l'article 1648 du code civil pour avoir été intentée vingt mois après la survenance des désordres qui affecteraient le pivot litigieux et près d'un an après que ces désordres aient été expertisée ;

Attendu qu'elle est surabondamment mal fondée dès qu'il résulte sans aucune ambiguïté du rapport d'expertise que l'effondrement du pivot n'était que la conséquence d'une réparation effectuée par l'appelant lui-même à la suite d'une fausse manœuvre, et que le matériel n'était atteint d'aucun vice de conception ou de fabrication ;

Attendu que le GAEC de SAINTE-MARGUERITE ne fournit aucun élément de nature à contredire l'avis de l'expert judiciaire, et que les difficultés rencontrées par d'autres exploitants avec des pivots du même type ne sauraient suffire à faire la preuve d'un vice caché ;

II) Attendu que s'agissant de l'oxydation, l'appelant fonde ses demandes sur le défaut de conformité et le manquement du vendeur à son obligation de conseil ;

Mais attendu que cette oxydation est due selon Mr. A. à une trop forte salinité de l'eau et qu'il était expressément prévu aux conditions générales de vente de la société IRRIVERT que celle-ci n'était pas tenue d'analyser la composition chimique du sol et des eaux et qu'elle ne pourrait encourir aucune responsabilité directe ou indirecte en cas de corrosion due à l'un quelconque de ces facteurs ;

Que cette clause est opposable au GAEC de SAINTE-MARGUERITE puisqu'il a déclaré, immédiatement après avoir signé le bon de commande, qu'il avait pris connaissance des conditions générales de vente figurant au verso et qu'il les acceptait ;

Que le GAEC de SAINTE-MARGUERITE, groupement d'agriculteurs non spécialisés dans les opérations d'irrigations, peut être considéré, dans le cas d'espèce, comme un simple [minute page 4] consommateur mais qu'il n'est pour autant fondé à soutenir que la clause en litige est une clause abusive au sens de l'article 35 de la loi du 10 janvier 1978 car elle ne lui a pas été imposé par un abus de puissance économique de la société IRRIVERT et elle n'était pas de nature à conférer à cette dernière un avantage excessif ;

Qu'il appartenait à l'appelant de prendre toutes les précautions indispensables pour le cas échéant se prémunir contre la salinité de l'eau, et qu'il ne peut être reproché à l'intimée d'avoir manqué à son devoir de conseil ; qu'il résulte au demeurant des conclusions du rapport d'expertise que l'installation est actuellement en état de fonctionner normalement et que la corrosion, dans l'immédiat, ne compromet pas la solidité de l'ensemble ;

III) Attendu qu'il est aussi soutenu par le GAEC de SAINTE-MARGUERITE que le pivot en litige délivrerait un arrosage défectueux ;

Mais attendu qu'aucune preuve sérieuse n'est apportée de cette défectuosité, ni surtout de son origine, et qu'il peut s'agir d'un défaut d'entretien ;

IV) Attendu qu'il convient par conséquent de confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions le montant des sommes restant dues par l'appelant n'étant pas discuté ;

Attendu que le droit d'agir ou de se défendre en justice ne peut donner lieu au paiement de dommages-intérêts que s'il est exercé dans l'intention exclusive de nuire à autrui, autrement dit s'il dégénère en abus de droit ;

Que tel n'est pas le cas en l'espèce et que la société IRRIVERT doit être déboutée de sa demande en paiement de la saune de 30.000 Francs à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Attendu que le GAEC de SAINTE-MARGUERITE, qui succombe en toutes ses prétentions doit être condamné aux dépens d'appel ainsi qu'à payer à la société IRRIVERT la somme de 5.000 Francs [N.B. minute originale : 50.000 Francs, comp. infra le dispositif] par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Reçoit l'appel jugé régulier ;

Le déclare mal fondé ;

[minute page 5] Confirme la décision déférée en toutes ses dispositions ;

Déclare la société IRRIVERT mal fondée en sa demande en paiement de la sonne de 30.000 Francs (trente mille francs) à titre de dommages-intérêts ; l'en déboute ;

Condamne le GAEC de SAINTE-MARGUERITE aux dépens d'appel et autorise Maître DE LAMY, avoué à recouvrer directement contre lui ceux des dépens dont il aurait fait l'avance sans avoir reçu provision suffisante ;

Le condamne en outre à payer à la société IRRIVERT la somme de 5.000 Francs (cinq milles francs) par application de l'article 700 modifié du nouveau code de procédure civile.

LE GREFFIER                        LE PRÉSIDENT

R. BORIES                             M. LEBREUIL