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CA PARIS (5e ch. sect. C), 10 octobre 1997

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (5e ch. sect. C), 10 octobre 1997
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), 5e ch. sect. C
Demande : 96/016360
Date : 10/10/1997
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Revue de jurisprudence de droit des affaires
Décision antérieure : T. COM. PARIS (2e ch. A), 18 juin 1996, CASS. CIV. 1re, 1er février 2000
Numéro de la décision : 156
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CERCLAB - DOCUMENT N° 1316

CA PARIS (5e ch. sect. C), 10 octobre 1997 : RG n° 96/016360 ; arrêt n° 156

(sur pourvoi Cass. Civ. 1re, 1er février 2000 : pourvoi n° 97-22.157 ; RJDA 2000/5, n° 609)

Publication : Juris-Data n° 024525

 

Extrait : « Considérant que comme le souligne utilement la Société MINOLTA FRANCE, Monsieur X. a acquis ces matériels dans un but purement professionnel en rapport direct avec son activité professionnelle ; Qu'en effet, il a apposé son cachet commercial libellé comme suit : « Alimentation - Journaux – Papeterie X. [adresse] » avec son numéro de siret, sur le premier comme sur le second bon de commande des photocopieurs litigieux en sollicitant la livraison de ceux-ci à cette même adresse commerciale ; Que cette activité correspond à la réalité puisque l'extrait K du Registre de Commerce mentionne pour activité « épicerie, crémerie, primeurs, dépôt de journaux, papeterie » ; Qu'il s'ensuit que l'article L. 121-22-4° du code de la consommation rend inapplicables à l'espèce les dispositions des articles L. 121-23 et L. 121-29 du même code qui prévoient la nullité de tels contrats pour infraction aux règles du démarchage à domicile ».                 

 

COUR D’APPEL DE PARIS

CINQUIÈME CHAMBRE SECTION C

ARRÊT DU 10 OCTOBRE 1997

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° Répertoire général : 96-016360. Arrêt n° 156. Recours sur décision rendue le 18 juin 1996 par le Tribunal de Commerce de Paris (2ème ch. A). Arrêt au fond contradictoire.

 

PARTIES EN CAUSE :

1° - La SA MINOLTA FRANCE

ayant son siège [adresse], représentée par son Président du Conseil d'Administration ou tous représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. APPELANTE. Représentée par la SCP E. & J. GOIRAND, avoué, Assistée, de Maître GEUS, avocat au barreau de BOBIGNY.

2° - Monsieur X.

né le […] à […], de nationalité tunisienne, commerçant, demeurant [adresse]. INTIMÉ. Représenté par la SCP AUTIER, avoué, Assisté de Maître LOUKIL, avocat. (A 431).

[minute page 2]

3° - La SA CRÉDIT UNIVERSEL BANQUE aux droits de la COMPAGNIE DU CRÉDIT UNIVERSEL

ayant son siège [adresse], représentée par son Président du Conseil d'Administration domicilié en cette qualité audit siège. INTIMÉE. Représentée par la SCP VERDUN & GASTOU, avoué, Assistée de Maître CONNAULT, avocat. (E 1323).

 

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

PRÉSIDENT: Madame DESGRANGE

CONSEILLERS: Madame CABAT, Monsieur BETCH

GREFFIER : Madame RIPOLL

DÉBATS : à l'audience publique du 2 septembre 1997, tenue en application de l'article 786 du NCPC, Madame CABAT, Magistrat chargé du rapport, a entendu les plaidoiries des avocats, ceux-ci ne s'y étant pas opposé. Elle en a rendu compte à la Cour lors du délibéré.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE, prononcé publiquement par Madame le Président DESGRANGE, qui a signé la minute avec Madame RIPOLL, Greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

La Cour statue sur l'appel formé par la SA MINOLTA FRANCE d'un jugement rendu le 18 juin 1996 par le Tribunal de Commerce de PARIS qui a prononcé la résiliation du contrat du 29 juin 1994 à compter de la signification du jugement, « à charge pour la Société MINOLTA FRANCE d'assumer les conséquences financières auprès de la Société Compagnie du CRÉDIT UNIVERSEL », qui a ordonné la « restitution du matériel correspondant au contrat du 11 janvier 1994, dans les conditions et termes dudit contrat et ce sans débours pour Monsieur X., cette restitution devant être [minute page 3] opérée » dans le mois de la signification du jugement sous peine d'astreinte de 100 francs par jour de retard, qui a ordonné l'exécution provisoire de sa décision et condamné la Société MINOLTA FRANCE à régler à Monsieur X. la somme de 8.000 francs au titre de l'application de l'article 700 du NCPC.

La Cour se réfère pour l'exposé des faits et de la procédure à la relation exacte qu'en ont fait les premiers juges.

Il suffit de rappeler que Monsieur X. qui exploite un commerce dans le XIIIème arrondissement de PARIS, a commandé à six mois d'intervalle deux photocopieurs à la Société MINOLTA FRANCE, le second plus performant, devant remplacer le premier.

Le tribunal a dit que Monsieur X. avait été victime des agissements dolosifs de la Société MINOLTA pour la souscription du second contrat.

La SA MINOLTA FRANCE, appelante, dénie ce dol, dénie avoir failli à ses obligations contractuelles ou précontractuelles, rappelle que l'instance a pour origine la mise en demeure de payer délivrée à Monsieur X., et que la saisine des premiers juges interdisait le prononcé de la résiliation des contrats et ne permettait que sa condamnation éventuelle au paiement de dommages-intérêts.

Subsidiairement, elle conclut à un partage de sa responsabilité avec la Société Compagnie du CRÉDIT UNIVERSEL.

Aussi, la Société MINOLTA FRANCE prie-t-elle la Cour, après infirmation du jugement déféré, de dire que Monsieur X. n'a pas été la victime d'un dol, de dire qu'il a été pleinement informé des conséquences financières de la résiliation anticipée du contrat du 11 janvier 1994, de dire valables les contrats de vente, de location et de maintenance signés le 29 juin 1994, de dire n'y avoir lieu à résolution ou à résiliation des contrats, de débouter Monsieur X. de ses demandes, à titre subsidiaire, en cas de reconnaissance d'un manquement à l'obligation précontractuelle d'information, de dire que le préjudice de Monsieur X. ne peut excéder la somme de 13.917,73 francs et qu'il doit être pris en charge par moitié par la Société Compagnie du CRÉDIT UNIVERSEL, et de condamner Monsieur X. au paiement d'une somme de 2.500 francs au titre de l'application de l'article 700 du NCPC.

[minute page 4] La Société Compagnie du CRÉDIT UNIVERSEL, seconde intimée, forme un appel incident qui tend à la condamnation de Monsieur X. à lui régler la somme de 48.272,32 francs au titre des loyers échus et impayés et de l'indemnité de résiliation due en exécution du contrat du 29 juin 1994, ainsi que la somme de 6.000 francs au titre de ses frais irrépétibles ; à titre subsidiaire, elle sollicite les mêmes paiements.

A ces fins, elle fait valoir que Monsieur X. a été informé des circonstances dans lesquelles intervenait la modification du matériel, et que le CRÉDIT UNIVERSEL n'a aucune responsabilité dans les négociations commerciales de la Société MINOLTA FRANCE avec Monsieur X.

Monsieur X., premier intimé, conclut également à l'infirmation du jugement, et sollicite à titre principal, la nullité des deux contrats pour non respect des dispositions des articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation, demande à la Cour d'ordonner à MINOLTA de reprendre le photocopieur EP 4250 et d'ordonner au CRÉDIT UNIVERSEL de lui restituer toutes les sommes perçues au titre des loyers des deux contrats, à titre subsidiaire, de confirmer le jugement, et par application des articles 1116 et 1110 du code civil, de dire que MINOLTA a commis des manœuvres dolosives sans lesquelles il n'aurait pas contracté, de dire que Monsieur X. a commis une erreur sur le prix sans laquelle il n'aurait pas contracté, en conséquence, de prononcer la nullité du contrat de location du 29 juin 1994, d'ordonner à MINOLTA de reprendre le photocopieur EP 4250 et de lui restituer le modèle EP 2130 ou un modèle équivalent sans aucun frais et avec les mêmes conditions que celles du contrat du 11 janvier 1994, de dire que MINOLTA devra s'exécuter dans le mois suivant la signification de l'arrêt sous peine d'astreinte définitive de 500 francs par jour de retard, de dire qu'il n'est redevable d'aucune somme à l'égard de la Société MINOLTA ou du CRÉDIT UNIVERSEL, de débouter ces sociétés de leurs demandes, et plus subsidiairement, de dire que MINOLTA a manqué à ses devoirs d'information et de conseil, de condamner les deux sociétés solidairement à lui régler la somme de 64.644,64 francs à titre de dommages-intérêts, et en tout état de cause, de condamner les mêmes sociétés dans les mêmes conditions, à lui régler les sommes de 20.000 francs et de 12.000 francs aux titres respectifs de dommages-intérêts pour préjudice moral et de ses frais irrépétibles.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 5] SUR CE, LA COUR,

1° - Sur l'application au litige des articles L 121-21 et suivants du code de la consommation :

Considérant que comme le souligne utilement la Société MINOLTA FRANCE, Monsieur X. a acquis ces matériels dans un but purement professionnel en rapport direct avec son activité professionnelle ;

Qu'en effet, il a apposé son cachet commercial libellé comme suit : « Alimentation - Journaux – Papeterie X. [adresse] » avec son numéro de Siret, sur le premier comme sur le second bon de commande des photocopieurs litigieux en sollicitant la livraison de ceux-ci à cette même adresse commerciale ;

Que cette activité correspond à la réalité puisque l'extrait K du Registre de Commerce mentionne pour activité « épicerie, crémerie, primeurs, dépôt de journaux, papeterie » ;

Qu'il s'ensuit que l'article L. 121-22-4° du code de la consommation rend inapplicables à l'espèce les dispositions des articles L. 121-23 et L. 121-29 du même code qui prévoient la nullité de tels contrats pour infraction aux règles du démarchage à domicile ;

Que le moyen de nullité de ce chef doit donc être rejeté ;

 

2° - Sur l'existence d'un dol :

Considérant que Monsieur X. a commandé à la Société MINOLTA FRANCE un premier photocopieur financé par le CRÉDIT UNIVERSEL auprès duquel il s'est engagé à régler un loyer mensuel HT de 321,71 francs durant soixante mois, le prix d'achat de ce matériel étant de 11.300 francs HT ;

Que sur le bon de commande du second photocopieur, était indiqué le prix HT de 19.540 francs, le paragraphe [minute page 6] intitulé « mode de règlement » portant les mentions « Location financière CRÉDIT UNIVERSEL sur cinq ans pour un montant trimestriel de 2.122,95 francs HT avec reprise sur encours de 13.917,73 francs TTC » ;

Considérant que Monsieur X. a apposé sa signature au bas de ce bon de commande ; qu'il a signé le même jour la facture intitulée « participation à indemnité de résiliation pour matériel désigné ci-dessous pour le montant de 13.917,73 francs TTC » ;

Considérant que le montant trimestriel de 2.122,94 francs HT intégrait le montant de 13.917,73 francs restant dus sur le précédent contrat ; que la simple lecture de ce bon de commande d'un appareil dont le prix était supérieur de 8.000 francs au précédent photocopieur et dont le loyer passait de 321,71 francs à 707,64 francs par mois, mettait en mesure Monsieur X. de vérifier que le doublement du prix de location s'expliquait par l'intégration de l'encours dû sur l'appareil repris par le fournisseur ;

Qu'il ne peut donc utilement soutenir avoir été victime d'un dol au moment de la souscription du second contrat, en croyant n'avoir à exposer aucun frais supplémentaire alors que l'écrit le renseignait de manière complète ;

Considérant qu'il est sans intérêt d'examiner la valeur probante de l'attestation que produit Monsieur X. aux fins de prouver le dol alors que si ce dernier a commis une erreur, celle-ci provient simplement d'une lecture erronée du bon de commande et de la facture explicites qu'il a signés le même jour ;

Considérant que d'ailleurs, l'attestation susvisée ne constitue pas même la preuve du dol reproché puisque ce document indique qu'aux dires du représentant de la Société MINOLTA FRANCE, les mensualités du second photocopieur devaient remplacer les mensualités du premier photocopieur, ce qui correspond exactement aux écrits signés le même jour ;

Que le moyen de nullité du second contrat doit donc être rejeté ;

Considérant que comme il a été constaté ci-dessus, l'erreur qu'a pu commettre Monsieur X. quant à l'absence de conséquence de la résiliation du premier contrat sur le montant des mensualités du second contrat, revêt un l'espèce un caractère inexcusable et ne peut donc justifier la nullité de ce dernier ; qu'en effet, il lui suffisait de [minute page 7] lire les écrits soumis à sa signature pour se convaincre du contraire ; que ce moyen doit donc être également rejeté ;

 

3° - Sur le manquement au devoir de conseil :

Considérant que Monsieur X. ne se plaint pas de l'inadéquation des photocopieurs aux besoins de son commerce de papeterie ;

Qu'il ne soutient pas davantage que ces appareils présentent des vices rédhibitoires ;

Qu'il déplore seulement avoir été incité à louer un appareil plus performant que le précédent après six mois d'utilisation du premier ; qu'il lui appartenait de refuser la nouvelle offre commerciale du représentant de la Société MINOLTA, s'il l'estimait trop onéreuse ; qu'à défaut de ce refus, il ne peut prétendre à la résiliation du contrat pour manquement de MINOLTA à son obligation de conseil ; qu'on ne peut en effet imputer à faute à un commerçant de proposer à un autre commerçant un contrat à des conditions clairement posées par écrit ;

Considérant qu'en outre, le 29 juin 1994, Monsieur X. a souscrit un contrat d'entretien du nouveau matériel, contrat suivi d'une mise en demeure de payer les prestations afférentes à ce troisième contrat ; qu'il s'ensuit que Monsieur X. est seul responsable de l'état actuel de son photocopieur ;

Que la résiliation du contrat de location du 29 juin 1994 ne peut donc être prononcée ;

 

4° - Sur les autres demandes :

Considérant que sont mal fondés les moyens de nullité et de résiliation avancés par Monsieur X. ; qu'il est donc inutile d'examiner la demande subsidiaire en garantie formée par la Société MINOLTA FRANCE à l'encontre de la Société CRÉDIT UNIVERSEL ;

Considérant que le rejet des demandes de Monsieur X. a pour conséquence la poursuite du contrat de location du 29 juin 1994 et le rejet de sa demande en dommages-intérêts ;

[minute page 8] Considérant que Monsieur X. a reçu de la Société du CRÉDIT UNIVERSEL des mises en demeure de payer restées vaines ; qu'il y a lieu d'accueillir les demandes en paiement formées par la société bailleresse en exécution du second contrat de location, demandes dont le montant ou le mode de calcul ne font l'objet en l'espèce d'aucune critique de Monsieur X. ;

Considérant que Monsieur X. qui succombe et qui sera condamné aux dépens, ne peut utilement prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 700 du NCPC ;

Considérant que l'équité ne commande pas pour autant de faire au profit des Sociétés MINOLTA FRANCE et CRÉDIT UNIVERSEL une application de ce texte ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Infirme en toutes ses dispositions la décision déférée,

Et, statuant de nouveau,

Déboute Monsieur X. de ses demandes de nullité et de résiliation des contrats litigieux,

Condamne Monsieur X. à régler à la Société CRÉDIT UNIVERSEL BANQUE la somme de 48.272,32 francs au titre de l'exécution du second contrat du 29 juin 1994,

Déboute les parties de leurs demandes incompatibles avec la motivation ci-dessus retenue, en ce comprises celles formées sur le fondement de l'article 700 du NCPC,

Condamne Monsieur X. aux dépens de première instance et d'appel, et admet pour ces derniers, la SCP VERDUN et GASTOU, et la SCP GOIRAND, titulaires d'un office d'avoué, au bénéfice de l'article 699 du NCPC.