CA COLMAR (2e ch. civ. A), 30 novembre 2006
CERCLAB - DOCUMENT N° 1394
CA COLMAR (2e ch. civ. A), 30 novembre 2006 : RG n° 02/05462 ; arrêt n° 1051/06
(sur pourvoi Cass. civ. 1re, 22 janvier 2009 : pourvoi n° 07-12134 ; arrêt n° 37)
Extrait : « Attendu que Madame X. soutient que la clause de taux variable figurant au prêt est abusive et doit dès lors être considérée comme non écrite par application de l'article L. 132-1 du Code de la consommation et de la liste annexée à ce texte.
Attendu que contrairement à l'analyse du premier juge, l'action tendant à établir le caractère abusif de la clause litigieuse n'est soumise à aucun délai de prescription de sorte qu'il ne pouvait décider que l'action de Madame X. était prescrite.
Attendu que la clause de variabilité ne présente aucun caractère abusif au regard des dispositions invoquées par l'appelante puisque l'article 14.1 du contrat de prêt prévoit l'obligation pour la CCM DU SELTZBACH d'informer l'emprunteur « de toute variation de taux ainsi que du montant des nouvelles échéances tenant compte du nouveau taux » ; que si la CCM DU SELTZBACH ne peut invoquer le bénéfice de l'article L. 131-1 2c du Code de la consommation, il n'en reste pas moins qu'elle n'a aucune maîtrise des taux, son activité à but non lucratif étant soumise au « statut de coopérative », de sorte que « le prêteur révise, en hausse ou en baisse, les conditions débitrices des prêts accordés à ses sociétaires en les fixant à des taux qui lui permettent de remplir son objet social » ; que le caractère abusif de la clause n'étant pas établi, le moyen tendant à voir constater le caractère non écrit de la stipulation d'intérêt, doit être rejeté. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE COLMAR
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE SECTION A
ARRÊT DU 30 NOVEMBRE 2006
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Numéro d’inscription au répertoire général : 2 A 02/05462. MINUTE n° 1051/06. Décision déférée à la Cour : jugement du 5 novembre 2002 du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de STRASBOURG.
APPELANTE et demanderesse :
Madame X.
demeurant [adresse], représentée par Maîtres D'AMBRA, BOULON & LITOU-WOLFF, avocats à COLMAR
INTIMÉE et défenderesse :
La CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL (CCM) DU SELTZBACH
prise en la personne de son représentant légal ayant son siège social [adresse], représentée par Maîtres WETZEL & FRICK, avocats à COLMAR
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 4 octobre 2006, en audience publique, devant la Cour composée de : Michel WERL, Président de Chambre, Christine MITTELBERGER, Conseiller Martine CONTE, Conseiller, qui en ont délibéré.
Greffier ad hoc, lors des débats : Christine WEIGEL
ARRÊT : - Contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile. - [minute page 2] signé par Michel WERL, Président et Nathalie NEFF, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Ouï Christine MITTELBERGER, Conseiller en son rapport,
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Madame X., en sa qualité de gérante de la Sàrl EURO HOME CONSEIL, a obtenu de la CCM DU SELTZBACH un prêt professionnel de 180.000 Francs (27.440,82 €) destiné à financer l'acquisition d'un véhicule utilitaire pour lequel elle s'est portée caution. Ultérieurement, par acte notarié du 27 septembre 1990, elle s'est vue consentir une ouverture de crédit en compte courant pour laquelle elle s'est constituée caution hypothécaire. Enfin, la Société a obtenu un prêt de consolidation de 250.000 Francs (38.112,25 €) pour le remboursement duquel Madame X. s'est aussi portée caution.
Madame X., à titre personnel et avec Monsieur Y., a souscrit auprès de la CCM DU SELTZBACH un prêt immobilier d'un montant de 570.000 Francs (86.895,94 €) pour l'acquisition d'un immeuble d'habitation à [Ville G.], ce prêt étant assorti d'une garantie hypothécaire de premier rang inscrite sur l'immeuble.
Le 16 août 1993, la Sàrl EURO CONSEIL a été placée en liquidation judiciaire.
Par ordonnance de référé du 21 octobre 1993, Madame X. a été condamnée solidairement avec Monsieur Y. au paiement des provisions suivantes :
- 176.771 Francs (26.948,37 €) avec les intérêts au taux de 10,40 % à compter du 17 août 1993 au titre du prêt de consolidation,
- 133.605,02 Francs (20.367,95 €) avec les intérêts au taux de 11,40 % à compter du 17 août 1993 au titre du prêt destiné à financer l'acquisition du véhicule utilitaire.
Par acte du 14 décembre 2000, Madame X. a vendu l'immeuble de [Ville G.], son prix de vente étant consigné chez le notaire Maître A.
[minute page 3] Le 6 mars 2001 la CCM DU SELTZBACH a fait procéder à une saisie-attribution des sommes dues par Maître A. à Madame X. pour obtenir le paiement des sommes restant à lui revenir au titre de l'ordonnance de référé. Cette saisie-attribution a donné lieu à des contestations devant le Juge de l'exécution.
Le 20 juin 2001, Madame X. a assigné la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DU SELTZBACH devant le Tribunal de grande instance de STRASBOURG pour faire constater l'extinction de ses dettes et en conséquence dire qu'il n'y avait pas lieu de la colloquer dans le cadre de la distribution du prix de vente de son immeuble pour les motifs suivants :
- le prêt de 180.000 Francs est soldé par l'indemnité de l'assurance,
- le prêt de 250.000 Francs présente des difficultés pour les intérêts (TEG, absence d'information annuelle de la caution, intérêts au taux légal pour une durée maximale de cinq ans),
- le prêt immobilier fait suite à une offre préalable irrégulière quant à la variation du taux d'intérêt et le caractère abusif de celui-ci,
- la créance liée aux intérêts de l'ouverture de crédit est éteinte d'une part pour n'avoir pas été déclarée au passif de la liquidation judiciaire de la Sàrl EHC et d'autre part parce que la déchéance du droit à intérêt est encourue.
Subsidiairement, Madame X. a fait valoir la responsabilité de la Caisse qui lui a accordé un prêt immobilier dont le remboursement mensuel était supérieur aux revenus imposables du couple et pour avoir accordé un concours abusif à la Sàrl EURO HOME qui allait de mal en pis malgré l'ouverture de nouveaux comptes.
Par jugement du 5 novembre 2002, la juridiction saisie a débouté Madame X. de ses conclusions concernant l'extinction de dettes, de la mainlevée et de la radiation de l'hypothèque et de la colocation de la CCM DU SELTZBACH dans le cadre de la distribution du prix de vente de l'immeuble de [Ville G.]. II a par ailleurs débouté Madame X. de sa demande en dommages et intérêts et reconnu à la CCM DU SELTZBACH sa qualité de créancier hypothécaire et saisissante de Madame X. Ce jugement n'a pas été assorti de l'exécution provisoire.
Pour se déterminer ainsi, le premier juge a retenu que :
1. Sur le prêt de 180.000 Francs :
que l'assurance a uniquement remboursé le véhicule et non le prêt de sorte que la Caisse est fondée à en réclamer le paiement ;
[minute page 4]
2. Sur le prêt de 250.000 Francs :
que le principe de la créance a été expressément reconnu dans le cadre de la procédure de référé, Madame X. s'étant même offert de poursuivre le remboursement du prêt ;
que la prescription quinquennale des intérêts ne saurait être retenue, la Caisse cherchant uniquement à exécuter une décision de justice et non à récupérer des intérêts ;
que la variation de mensualités n'est pas établie.
3. Sur le prêt immobilier
que la demande formée au titre de la déchéance du droit aux intérêts sur ce prêt n'est pas prescrite, la prescription décennale n'ayant pu commencer à courir qu'à compter du jour où Madame X. a eu connaissance de l'irrégularité de l'offre et du caractère abusif de la clause de taux variable ;
que l'action en contestation de la validité de l'offre de prêt est quant à elle prescrite, Madame X. ayant pu s'apercevoir de l'absence de notice présentant les conditions et modalités de variation du taux dès l'acceptation de l'offre intervenue le 2 mai 1990 ;
que la contestation relative au caractère abusif de la clause de taux variable est pareillement prescrite quoique Madame X. en a eu connaissance dès le 2 mai 1990.
4. Sur l'ouverture de crédit :
que les intérêts dus n'ayant donné lieu à aucune déclaration de créance dans la procédure collective concernent la Sàrl EHC., ceux courus après l'ouverture de la procédure sont éteints ;
que ceux courus antérieurement sont dus, nonobstant l'absence d'information, annuelle de la caution s'agissant d'une caution réelle et personnelle.
5. Sur la responsabilité de la Caisse :
que cette action n'est pas prescrite, la Caisse invoquant à tort les dispositions de l'article 2270-1 du Code civil ;
[minute page 5] qu'il résulte des pièces produites par la Caisse que lors de la demande de l'octroi du prêt immobilier, il a été justifié par le couple X.-Y. de ressources mensuelles de 31.440 Francs (4.793 €), documents qui n'ont fait l'objet d'aucune contestation en écritures par Madame X., de sorte qu'il n'est pas établi que le concours accordé par la Caisse dépassait les facultés de remboursement de l'emprunteuse ;
que s'agissant de la responsabilité de la Caisse pour l'octroi d'un soutien abusif à la Sàrl EHC pour les dettes de laquelle Madame X. s'est portée caution, la jurisprudence n'autorise pas le gérant de la Société à se prévaloir d'un tel grief.
Le 27 novembre 2002, Madame X. a relevé appel de ce jugement.
Par conclusions récapitulatives du 27 janvier 2006, elle demande à la Cour de :
Déclarer son appel recevable, en conséquence d'infirmer le jugement entrepris et,
Statuant à nouveau :
Constater l'extinction des dettes de Madame X. envers la CCM DU SELTZBACH,
En particulier :
Dire qu'aucune somme n'est due à la CCM DU SELTZBACH au titre du prêt immobilier d'un montant initial de 570.000 Francs,
Ordonner la mainlevée et la radiation de l'hypothèque grevant la maison d'habitation sise [adresse] à [Ville G.], cadastrée Section 3 n° XX, Section n° YY et Section n° 3 ZZ, inscrite en garantie du prêt précité,
Constater que Madame X. n'est redevable d'aucune somme à la CCM DU SELTZBACH au titre de l'ouverture de crédit constaté par l'acte notarié portant le numéro 2XXX du Répertoire de Maître A., alors notaire à HOCHFELDEN,
Ordonner la mainlevée et la radiation de l'hypothèque grevant l'immeuble de [Ville G.] précité en garantie de cette ouverture de crédit,
Infirmer l'ordonnance de référé du 21 octobre 1993,
[minute page 6] Dire que Madame X. n'est tenue d'aucune somme envers le CCM DU SELTZBACH au titre des prêts d'un montant initial de 180.000 Francs et 250.000 Francsréférencés respectivement 133 XX 52 et 133 YY 51,
Dire n'y avoir lieu à colloquer la CCM DU SELTZBACH dans le cadre de la distribution du prix de vente de l'immeuble de [Ville G.],
Déclarer irrecevables et mal fondées les demandes de la CCM DU SELTZBACH,
Les, rejeter,
Très subsidiairement,
Condamner la CCM DUSELTZBACH à payer à Madame X., à titre de dommages et intérêts la somme de 1.461.734,40 Francs, soit 222.839,97 € ou toute autre somme que déterminera la Cour,
Ordonner la compensation des dettes réciproques des parties,
En tout état de cause :
Condamner la CCM DU SELTZBACH à payer à Madame X. une indemnité d'un montant de 4.700 € par application de l'article 700 du NCPC,
Condamner la CCM DU SELTZBACH aux entiers fais et dépens de première instance de d'appel.
Elle soutient pour l'essentiel :
1) Sur le prêt de 180.000 Francs pour le financement du véhicule utilitaire, que ce prêt a été intégralement remboursé, la CCM DU SELTZBACH ayant perçu des ACM une indemnité compensant la perte du véhicule et des accessoires, le montant total versé à ce titre ayant permis le remboursement intégral du prêt ;
que subsidiairement, en l'absence de l'information annuelle prescrite par l'article L. 313-32 du Code monétaire et financier et l'article 2016 alinéa 2 du Code civil, les intérêts ne sont pas dus ;
2) Sur le prêt d'un montant initial de 250.000 Francs :
que le TEG annuel de 12,284 % aurait dû intégrer les frais que la Caisse a prélevés sur le compte de la Société EURO HOME CONSEIL au titre de l'information annuelle prétendument adressée aux cautions au titre de ce prêt ;
[minute page 7] que la fausseté du TEG est sanctionnée par la nullité de la stipulation d'intérêts ;
qu'aucune prescription ne peut lui être opposée, la nullité étant invoquée à l'occasion d'une exécution forcée menée contre elle par la banque ;
que la Caisse ne justifie pas avoir satisfait à son obligation d'information annuelle alors que cette information est due jusqu'à l'extinction de la dette de sorte que la Caisse est, déchue de tous les accessoires de la dette et en particulier des intérêts
qu'elle est fondée à se prévaloir de la déchéance des intérêts non seulement pour la période précédant l'ordonnance de référé mais encore pour la période postérieure à celle-ci ;
3) Sur le prêt immobilier d'un montant initial de 570.000 Francs :
que ce prêt a été intégralement remboursé au titre du capital ;
qu'elle conteste devoir les intérêts y afférents d'une part parce que l'offre préalable est irrégulière pour comporter des indications lacunaires et contradictoire et n'était accompagnée d'aucune notice concernant l'assurance, d'autre part parce que la clause de taux variable est abusive n'ayant jamais reçu d'information sur les fluctuations du taux et le contrat de prêt ne l'autorisant pas à un remboursement par anticipation sans préavis en cas de désaccord avec les hausses de taux imposées par le prêteur et enfin parce que le contrat de prêt ne donne aucune indication quant au taux effectif global et qu'au surplus elle n'a jamais été informée des nombreuses variations du TEG ;
que subsidiairement la Caisse ayant fait varier les échéances de façon abusive a engagé sa responsabilité et lui doit réparation de son préjudice ;
qu'aucune prescription ne peut s'appliquer à sa demande tendant à voir constater le caractère non écrit d'une clause abusive et ce tant par application de l'article L. 132-1 du Code de la consommation que des articles L. 313-2 et 23 du même code ;
que subsidiairement, la prescription décennale ne peut davantage lui être appliquée s'agissant d'une demande tendant à voir prononcer la déchéance des intérêts qui est une sanction ;
qu'à la supposer toutefois applicable, elle n'aurait pu commencer à courir avant la date de la première variation de la mensualité ;
[minute page 8] que ni elle, ni son co-emprunteur n'ont accepté le rééchelonnement de leurs mensualités ;
4) Sur l'ouverture de crédit en compte courant consentie à la Sàrl EHC :
que la Caisse n'a versé aux débats aucun arrêté de compte de nature à justifier de son solde débiteur à la date du jugement d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de sorte que la demande de la Caisse fondée sur ce compte devra être rejetée ;
que subsidiairement, la créance de la Caisse à son encontre est éteinte dans la mesure où elle n'a jamais été destinataire de l'information annuelle en sa qualité de caution personnelle ;
que les versements qu'elle a effectués au titre de la dette cautionnée n'ont pas été imputés correctement de sorte qu'il appartiendra à la Cour de corriger leur imputation ;
que très subsidiairement, la responsabilité de la Caisse se trouve engagée pour lui avoir octroyé des concours financiers sans rapport avec ses possibilités effectives de remboursement et avec celles de la Sàrl EHC ;
que son action en responsabilité contre la Caisse n'est pas prescrite, le délai n'ayant commencé à courir qu'à compter de la manifestation du dommage.
Par mémoire du 27 janvier 2006, la Caisse conclut au rejet de l'appel, à la confirmation du jugement, au débouté de Madame X. de l'intégralité de ses fins et conclusions et à sa condamnation au paiement d'un montant de 1.000 € au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.
Elle fait valoir en substance :
1. Sur le prêt de 180.000 Francs correspondant à l'achat d'un véhicule :
que contrairement à ce qui est affirmé par Madame X., ce prêt n'a pas été soldé, l'indemnité d'assurance versée par les ACM n'ayant couvert que le prix du véhicule ;
que si les ACM lui ont versé une somme supérieure au coût de la voiture, celle-ci était destinée au remboursement des accessoires du véhicule sur lesquels ne portait pas le gage de sorte que les fonds ont été virés sur le compte de la Société alors qu'elle était déjà en liquidation judiciaire ;
[minute page 9] 2. Sur le prêt d'un montant de 250.000 Francs :
que dans le cadre de la procédure en référé, Madame X. a reconnu le principe de la créance ainsi que de son engagement de caution et s'est abstenue de contester tant le montant réclamé que- le taux appliqué ;
qu'il est inexact de soutenir que la TEG indiqué dans l'acte de prêt est inexact de sorte qu'il encourt la nullité ;
qu'en tout état de cause, l'action en nullité se prescrit par cinq ans qui commence à courir à compter de la souscription du prêt ;
qu'elle a satisfait à l'information annuelle de la caution ;
3) Sur l'ouverture de crédit en compte courant :
que Madame X. n'ayant pas la qualité de caution hypothécaire, l'obligation annuelle d'information ne s'imposait pas de sorte que la déchéance des intérêts ne saurait jouer
que si Madame X. a effectué certains versements sur le compte courant de la Société, il n'en reste pas moins que ceux-ci ne permettent pas de la considérer comme libérée de son engagement ;
4) Sur le prêt immobilier :
qu'il n'existe aucune contradiction dans l'offre de prêt quant à son remboursement et son taux d'intérêt qui a été stipulé variable ;
qu'en tout état de cause la demande quant à la clause de variabilité se heurte à la prescription décennale qui vaut pour l'emprunteur agissant tant par voie d'action que l'exception ;
que dès l'offre préalable, Madame X. a été en mesure de connaître les modalités de variation du taux d'intérêt et la manière dont elle pouvait s'y opposer, le cas échéant
que la clause de variabilité du taux d'intérêt ne revêt aucun caractère abusif au regard des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation ;
que les échéances du prêt n'ont connu aucune variation anarchique ;
[minute page 10] que chaque modification du taux d'intérêt adonné lieu à l'établissement d'un nouveau tableau d'amortissement accompagné de prélèvements modificatifs qui n'ont jamais été contestés lors de l'envoi des extraits bancaires faisant état de ces échéances ;
que la variation des échéances citées par Madame X. sont dues aux divers incidents de paiement ;
que c'est à juste titre que le premier juge a retenu que sa responsabilité ne pouvait être engagée que ce soit pour l'octroi des crédits à la Sàrl EHC, Madame X. les ayant sollicités en sa qualité de gérante de la Société, ou au titre du prêt immobilier à Madame X. et à Monsieur Y. au regard, des revenus qu'ils lui avaient déclarés.
Par ordonnance du Conseiller de la mise en état du 11 août 2006, il a été donné acte à Madame X. de ce qu'elle renonce à la demande tendant à l'infirmation de l'ordonnance de référé du 21 octobre 1993. Il a en outre été ordonné la clôture de la procédure.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE, LA COUR :
Vu la procédure et les pièces versées aux débats.
Attendu que l'appel, interjeté dans les délais légaux et selon les formes prescrites, est régulier et recevable.
1) Sur le contrat de prêt professionnel de 180.000 F. :
Attendu que ce prêt a été contracté par la Sàrl EU RO HOME CONSEIL pour l'acquisition d'un véhicule utilitaire et a donné lieu à l'inscription d'un gage ;
que ce prêt a été cautionné par Madame X. à hauteur du principal, des intérêts, des frais et accessoires.
Attendu que contrairement à ce qui est soutenu par Madame X., les ACM n'ont pas versé directement à la CCM DU SELTZBACH une indemnité de 130.031,56 Francs à titre d'indemnité comprenant la perte du véhicule, mais celle de 105.713,63 Francs soit 103.000 Francs sous la qualification de « dommages » et 2.713,63 Francs sous celle de « accessoires et dépannages » et ce par un virement du 17 février 1994 sur le compte de la Sàrl EURO HOME SERVICES selon extrait versé aux débats ;
[minute page 11] que la CCM DU SELTZBACH ne prouve par aucun moyen notamment par une attestation du liquidateur, n'avoir pu appréhender la somme versée au titre des accessoires du véhicule au motif que ces derniers n'étaient pas gagés, pas plus que celle de 6.982,75 Francs représentant le remboursement du téléphone de voiture le 31 août 1993 ;
qu'elle admet néanmoins que les ACM lui ont versé au total une somme de 121.713,63 Francs soit 18.555,12 € ;
que Madame X. ne peut voir augmenter cette somme du virement de 1.335,18 Francs viré sur le compte de la Sàrl EURO HOME SERVICES sous le libellé « ACM AUTOMOBILE AA 2325973 », cette mention n'établissant pas que le virement litigieux se rapportait au sinistre en question.
Attendu que force est de constater que n'est pas rapportée la preuve du versement à la CCM DU SELTZBACH de la somme de 130.031,56 Francs, comme allégué par l'appelante, et qui aurait permis de remboursement intégral du prêt ;
que l'attestation non datée de Monsieur B. établie sur un papier à en tête de la CCM ne permet pas davantage et conclure à l'extinction de la dette résultant du prêt cautionné, celle-ci ne faisant état que du remboursement du véhicule et non du prêt.
Attendu que la CCM DU SELTZBACH ne justifie pas avoir satisfait à son obligation d'informer annuellement la caution de l'évolution du montant de la créance garantie de sorte que c'est à bon droit que Madame X. lui oppose la déchéance du droit aux intérêts ;
qu'ainsi, il doit être admis que Madame X. reste redevable du montant en principal de 19.310,10 Francs soit 2.943,81 €.
2) Sur le prêt professionnel de consolidation de 250.000 Francs du 11 juillet 1991 :
Attendu que tout d'abord, le premier juge ne pouvait rejeter les contestations de Madame X. quant au montant mis en compte par la CCM DU SELTZBACH au titre du solde de ce prêt qu'elle a cautionné et le taux applicable à celui-ci au seul motif de l'absence de contestations élevées dans le cadre de la procédure de référé et l'offre qui avait été faite par elle de poursuivre le remboursement du prêt tel qu'initialement prévu ;
qu'en effet, cette absence de contestation ne saurait produire les effets d'un aveu judiciaire qui ne peut porter que sur des faits et non sur des points de droit qu'il appartient au juge de trancher ;
[minute page 12] qu'au surplus, une ordonnance de référé n'a pas autorité de chose jugée au principal.
Attendu que la CCM DU SELTZBACH a obtenu par ordonnance de référé du 21 octobre 1993 la condamnation de Madame X. à lui payer, à titre de provision, la somme de 133.605,02 Francs avec les intérêts au taux de 11,40 % à compter du 17 août 1993, alors que le contrat de prêt stipulait un taux annuel de 12,284 %.
Attendu que Madame X. critique le TEG contractuel pour ne pas avoir intégré l'ensemble des frais et plus spécialement ceux liés à l'information annuelle des cautions, la fausseté du TEG étant, dans ce cas, sanctionnée par la nullité de la stipulation d'intérêt.
Attendu que le moyen ainsi invoqué est dénué de toute pertinence au regard de l'article L. 313-1 du Code de la consommation qui énonce en son alinéa 2 que « les charges liées aux garanties dont les crédits sont éventuellement assortis » ne sont pas prises en compte pour la détermination du taux effectif global.
Attendu que Madame X. oppose par ailleurs à la CCM DU SELTZBACH la déchéance de son droit aux intérêts contractuels pour ne pas l'avoir informée annuellement de la situation du compte.
Attendu que sur ce point, la CCM DU SELTZBACH prétend, tout en admettant ne pas être en mesure d'en rapporter la preuve, avoir informé annuellement les cautions ce que conteste la partie appelante ;
que compte tenu de sa carence, la Cour ne peut que faire droit aux prétentions de Madame X. en prononçant la déchéance de la CCM quant aux intérêts contractuels ;
que le décompte du capital restant dû par la caution, soit le montant de 20.092,35 €, n'étant pas expressément contesté, il y a lieu de le retenir.
3) Sur le prêt immobilier :
Attendu que Madame X. conteste être tenue au paiement des intérêts résultant de ce prêt en invoquant plusieurs fondements dont il convient d'analyser successivement le bien fondé.
[minute page 13]
a) l'irrégularité de l'offre préalable pour défaut d'indication du TEG et des conditions et modalités de variation du taux d'intérêt.
Attendu que contrairement à ce qui est soutenu par Madame X. l'offre de prêt est régulière ;
qu'en effet le taux d'intérêt étant stipulé variable, la CCM ne pouvait procéder à une évaluation du coût total du prêt sous la forme d'un TEG ;
qu'à cet effet, l'article 14.1 sous la rubrique « Conditions spécifiques selon la nature des prêts », précise expressément les modalités de fixation du taux d'intérêt avec l'indication que « l'emprunteur sera informé de toute variation de taux ainsi que du montant des nouvelles échéances tenant compte du taux » et que « le règlement par prélèvement de la première échéance modifiée, non suivi de réserve écrite de la part de l'emprunteur vaut acceptation du nouveau taux ».
Attendu que la CCM n'était pas tenue d'établir une nouvelle offre préalable lors de chaque fluctuation du taux d'intérêt comme avancé par Madame X. ;
que toutefois le grief qui lui est opposé par l'appelante quant à l'absence de l'« information écrite portant sur le nouveau taux applicable est fondé, cette obligation résultant du contrat de prêt lui-même et la CCM ne saurait se contenter de l'absence de contestation émise par Madame X. après réception de son extrait de compte mentionnant le prélèvement de l'échéance modifiée, pour échapper aux conséquences de son manquement qui est sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts.
Attendu que la demande de Madame X. ne tend pas à obtenir la nullité du prêt mais uniquement la déchéance de la CCM DU SELTZBACH de ses droits à intérêts sur le fondement de l'article L. 312-33 du Code de la consommation, celle-ci est soumise à la prescription décennale de l'article L. 110-4 du Code de commerce et ce peu important que la prescription soit soulevée par voie d'action ou d'exception et à l'occasion d'une procédure d'exécution forcée de l'immeuble ;
que c'est à bon droit que le premier juge a relevé que Madame X. est forclose en sa demande, le délai de prescription ayant commencé à courir le 2 mai 1990, date de l'acceptation de l'offre, le premier acte interruptif de la prescription étant constitué par l'assignation dont le dépôt a saisi le tribunal le 20 juin 2001 ;
[minute page 14] qu'en effet, l'appelante était en mesure de s'assurer de l'absence de toute notice présentant les conditions et modalités des variations du taux d'intérêt dès l'acceptation de l'offre de sorte qu'elle ne peut prétendre que la prescription décennale aurait commencé à courir à la date de chaque modification irrégulière du taux « donc au plus tôt en octobre 1990, époque de la première variation, et plus probablement en avril 1993, époque de la première variation à la hausse ».
b) Sur le caractère abusif de la clause de taux variable.
Attendu que Madame X. soutient que la clause de taux variable figurant au prêt est abusive et doit dès lors être considérée comme non écrite par application de l'article L. 132-1 du Code de la consommation et de la liste annexée à ce texte.
Attendu que contrairement à l'analyse du premier juge, l'action tendant à établir le caractère abusif de la clause litigieuse n'est soumise à aucun délai de prescription de sorte qu'il ne pouvait décider que l'action de Madame X. était prescrite.
Attendu que la clause de variabilité ne présente aucun caractère abusif au regard des dispositions invoquées par l'appelante puisque l'article 14.1 du contrat de prêt prévoit l'obligation pour la CCM DU SELTZBACH d'informer l'emprunteur « de toute variation de taux ainsi que du montant des nouvelles échéances tenant compte du nouveau taux » ;
que si la CCM DU SELTZBACH ne peut invoquer le bénéfice de l'article L. 131-1 2c du Code de la consommation, il n'en reste pas moins qu'elle n'a aucune maîtrise des taux, son activité à but non lucratif étant soumise au « statut de coopérative », de sorte que « le prêteur révise, en hausse ou en baisse, les conditions débitrices des prêts accordés à ses sociétaires en les fixant à des taux qui lui permettent de remplir son objet social » ;
que le caractère abusif de la clause n'étant pas établi, le moyen tendant à voir constater le caractère non écrit de la stipulation d'intérêt, doit être rejeté.
Attendu qu'il convient de faire droit aux conclusions subsidiaires de Madame X. en ce qu'elle accepte le taux d'intérêt de 4,80 % revendiqué par la Caisse et qu'elle lui applique depuis juin 1999.
[minute page 15]
4) Sur l'ouverture de crédit en compte courant consentie à la Sàrl EURO HOME CONSEIL :
Attendu que par acte du 27 septembre 1990, Madame X. s'est portée caution personnelle avec affectation hypothécaire au profit de la Sàrl EURO HOME CONSEIL qui a bénéficié d'une convention d'ouverture de crédit en compte courant pour un montant de 200.000 Francs ;
que la CCM DU SELTZBACH fait valoir une créance en capital de 193.438,33 Francs soit 29.489,48 €, outre les intérêts échus au 31 décembre 1999, non imputés, qui s'élèvent au montant de 92.508,85 € soit 14.102,88 €.
Attendu que contrairement à ce qui est avancé par l'appelante, la CCM DU SELTZBACH a déclaré sa créance au liquidateur de la Sàrl EURO HOME CONSEIL le 1er septembre 1993 pour un montant de 435.040,13 Francs en principal et intérêt, déclaration de créance qui n'avait donné lieu à aucune contestation ;
que le compte n'ayant pas été clôturé par le liquidateur, celui-ci a continué à enregistrer des opérations en débit et crédit ce qui a permis d'arrêter un solde en capital à 193.438,33 Francs montant non discuté par Madame X., les intérêts contractuels en sus ;
que c'est à tort que le premier juge a décidé que les intérêts courus après le 1er septembre 1993 sont éteints pour n'avoir fait -l'objet d'aucune déclaration
qu'en effet, s'agissant d'un compte courant, les intérêts étaient inclus dans le solde global déclaré au liquidateur qui n'a pas procédé à la clôture du compte.
Attendu que subsidiairement, Madame X. oppose à la CCM DU SELTZBACH la déchéance du droit aux intérêts pour n'avoir pas satisfait à son obligation de l'information annuelle de la caution telle que prescrite par l'article 48 de la loi du 1er mars 1984 et par l'article 2016 alinéa 2 du Code civil.
Attendu que si Madame X. s'est portée caution personnelle et hypothécaire pour un montant en principal de 200.000 F, majoré des intérêts, frais et accessoires y relatifs, il a été stipulé à l'acte du 27 septembre 1990 en page 5 sous l'intitulé « 5. Information » que « la caution entend suivre personnellement la situation de la partie débitrice et dispense la CMDP de tout avis de prorogation ou de non paiement » et que la CMDP ne sera pas tenue de l'informer «des événements qui pourraient affecter la situation financière ou juridique de la partie débitrice ... » ;
[minute page 16] qu'ainsi, en souscrivant à cette clause, l'appelante n'est pas fondée à opposer à l'intimée le moyen tiré du défaut d'information annuel de la caution alors qu'elle y avait expressément renoncé, cette renonciation s'expliquant par le fait qu'elle était la gérante de la Sàrl EURO HOME CONSEIL ;
que l'extinction de la dette de l'appelante au tire de l'ouverture de crédit n'étant pas établie, la mainlevée de l'hypothèque qui la garantissait ne peut être prononcée.
5) Sur la responsabilité de la CCM DU SELTZBACH :
Attendu que le prêt immobilier a été accordé à Madame X. au regard des informations qu'elle avait fournies à la Caisse ;
que si elle émet à présent des réserves quant à la sincérité des documents produits par la Caisse, plus spécialement la déclaration de ses ressources personnelles et de celles de son co-emprunteur, force est de constater avec le premier juge que pour autant elle s'est abstenue de recourir à la procédure spécifique de contestation en écriture ;
que dans, ces conditions, on ne peut admettre pour établi que le concours accordé par la CCM DU SELTZBACH ait dépassé ses capacités de remboursement.
Attendu que s'agissant de la recherche par Madame X. de la responsabilité de la même Caisse pour l'octroi d'un soutien abusif à la Sàrl EURO HOME CONSEIL pour les dettes de laquelle elle s'est portée caution, la Cour ne peut qu'approuver le premier juge en ce qu'il a rappelé que le gérant d'une société ne peut se prévaloir d'un tel grief ;
que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en dommages et intérêts.
Attendu qu'il résulte des développements qui précèdent que les dettes contractées par Madame X. envers la CCM DU SELTZBACH ne sont pas éteintes.
Attendu que succombant à son recours, Madame X. supportera les dépens de l'appel ;
que cependant, les circonstances de l'espèce ne commandent pas la mise en œuvre des dispositions de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile au profit de la CCM DU SELTZBACH.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 17] PAR CES MOTIFS :
La Cour,
DIT l'appel régulier et recevable en la forme,
Au fond,
CONFIRME le jugement du Tribunal de grande instance de STRASBOURG du 5 novembre 2002,
CONDAMNE Madame X. aux dépens de l'appel,
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile au profit de la CCM DU SELTZBACH.
Le Greffier Le Président
- 5705 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Recevabilité - Délai pour agir - Prescription
- 5706 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Recevabilité - Délai pour agir - Forclusion - Clauses abusives
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- 6110 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Modification du contenu du contrat - Modification unilatérale - Droit antérieur au décret du 18 mars 2009 - Prix
- 6638 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit immobilier - Présentation générale