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CA COLMAR (1re ch. civ. sect. A), 7 février 2006

Nature : Décision
Titre : CA COLMAR (1re ch. civ. sect. A), 7 février 2006
Pays : France
Juridiction : Colmar (CA), 1re ch. civ. sect. A
Demande : 04/00769
Date : 7/02/2006
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Juris Data
Date de la demande : 4/02/2004
Décision antérieure : TGI COLMAR (ch. com.), 22 janvier 2004
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CERCLAB - DOCUMENT N° 1402

CA COLMAR (1re ch. civ. sect. A), 7 février 2006 : RG n° 04/00769

Publication : Juris-Data n° 296353

 

Extrait : « Attendu qu'il résulte de l'article L. 121-21 du code de la consommation que le champ d'application des dispositions protectrices de ce code sur le démarchage à domicile est limité aux seules personnes physiques ; que la société PMB, personne morale, ne peut s'en prévaloir même si elle est une petite entreprise, contrôlée par les membres d'une même famille ; qu'en tout état de cause, il existe un rapport direct entre les cartes de menu litigieuses, nécessaires à l'information de la cliente, et l'activité de restauration de l'intimée ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE COLMAR

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE - SECTION A

ARRÊT DU 7 FÉVRIER 2006

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A 04/00769. Décision déférée à la Cour : 22 janvier 2004 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE COLMAR.

 

APPELANTE :

SA INTER ÉDITION

[adresse], Représentée par Maître Martine RICHARD-FRICK, avocat à la Cour, Plaidant : Maître MINET, avocat à STRASBOURG

 

INTIMÉE :

SARL PMB EXPLOITANT LE SALON DE THE A.

[adresse], Représentée par la SCP G. et T. CAHN - D.S. BERGMANN, avocats à la Cour

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 910 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 3 janvier 2006, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. HOFFBECK, Président de Chambre, et M. ALLARD, Conseiller, chargés du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : M. HOFFBECK, Président de Chambre, M. CUENOT. Conseiller, M. ALLARD, Conseiller, qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme MUNCH, Greffier

ARRÊT : - Contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile. - signé par M. Michel HOFFBECK, président et Mme Christiane MUNCH, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] Suivant bon de commande n° XX du 29 août 2001, Mme X., agissant pour le compte de la société PMB qui exploite un salon de thé à [ville], sous l'enseigne « A. », a passé commande à la société INTER ÉDITION de 4.000 cartes de menus pour un prix de 66.000 Francs HT.

Selon assignation délivrée le 31 mai 2002, la société INTER ÉDITION a attrait la société PMB devant le Tribunal de grande instance de Colmar pour obtenir le paiement de sa commande.

La société PMB s'est opposée à cette demande en faisant valoir que la société INTER ÉDITION avait failli à son obligation de conseil, qu'elle ne pouvait poursuivre le paiement d'un travail inexécuté et qu'elle avait méconnu les dispositions relatives au démarchage à domicile.

L'ASSOCIATION DE PRÉVENTION ET DE CONSEIL CONTRE LE DÉMARCHAGE COMMERCIAL ABUSIF est intervenue volontairement à l'instance en appuyant la demande d'annulation du bon de commande.

Par jugement du 22 janvier 2004, le Tribunal de grande instance de Colmar a :

- annulé la commande passée par la société PMB,

- débouté la société INTER ÉDITION de sa demande,

- condamné la société INTER ÉDITION à payer à la société PMB une somme de 500 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- condamné la société INTER ÉDITION aux dépens,

- déclaré recevable mais non fondée l'intervention volontaire de l'A.P.C.C.D.C.A.,

- laissé les dépens de l'intervention à la charge de la partie intervenante.

Les premiers juges ont principalement retenu :

- que le contrat conclu ayant un rapport direct avec l'activité professionnelle de la société PMB, celle-ci ne pouvait pas bénéficier des dispositions légales sur le démarchage à domicile ;

- qu'en laissant la défenderesse commander une quantité particulièrement importante de menus, manifestement disproportionnée à ses besoins, la société INTER ÉDITION avait délibérément manqué à son obligation de conseil.

Par déclaration reçue le 4 février 2004, la société INTER ÉDITION a interjeté appel de cette décision en intimant la société PMB.

Suivant conclusions récapitulatives remises au greffe 25 août 2005, la société INTER ÉDITION demande à la Cour de :

- déclarer son appel recevable et fondé ;

- infirmer le jugement entrepris ;

- condamner la société PMB à lui payer la somme de 12.033,72 € avec les intérêts au taux légal à compter du 24 octobre 2001 ;

- à titre subsidiaire, condamner la société PMB à lui payer, à titre de dommages et [minute page 3] intérêts, la somme de 5.869,29 €, avec intérêts au taux légal à compter du jour de la décision ;

- condamner la société PMB à lui payer une indemnité de 1.500 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

- condamner la société PMB aux dépens de première instance et d'appel ;

- débouter la société PMB de sa demande reconventionnelle.

Au soutien de son appel, la société INTER ÉDITION fait valoir en substance :

- que la société PMB qui a annulé le contrat, est responsable de son inexécution ;

- que le dépliant commandé a un lien direct avec l'activité professionnelle de l'intimée ;

- que l'appelante n'avait pas à conseiller sa cliente quant à la quantité à commander, dès lors que cette dernière était parfaitement en mesure d'apprécier ses besoins ;

- qu'elle a subi un préjudice commercial du fait de l'inexécution du contrat.

Selon conclusions déposées le 17 juin 2005, la société PMB rétorque :

- que les règles sur le démarchage à domicile ont vocation à s'appliquer dès lors que la commande n'avait pas de rapport direct avec son activité professionnelle ;

- que la société INTER ÉDITION s'est rendue coupable d'un « manquement flagrant et dolosif au niveau de l'obligation de conseil » justifiant l'annulation du contrat sur le fondement des vices du consentement ;

- que la société INTER ÉDITION ne peut obtenir le paiement d'une commande qu'elle n'a pas exécutée ;

- que la société INTER ÉDITION ne justifie pas de ses marges.

En conséquence, elle prie la Cour de :

- rejeter l'appel ;

- subsidiairement, condamner la société INTER ÉDITION à payer un montant de 13.000 € à titre de dommages et intérêts en raison de la faute commise dans le cadre de l'obligation de conseil ;

- ordonner en tant que de besoin la compensation ;

- condamner la société INTER ÉDITION aux dépens ainsi qu'au versement d'une somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 14 octobre 2005.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR :

[minute page 4] Vu les pièces et les écrits des parties auxquels il est renvoyé pour l'exposé du détail de leur argumentation ;

Attendu que l'appel a été interjeté suivant les formes légales, dans le mois du prononcé du jugement entrepris ; qu'il est régulier en la forme et recevable ;

Attendu qu'il résulte de l'article L. 121-21 du code de la consommation que le champ d'application des dispositions protectrices de ce code sur le démarchage à domicile est limité aux seules personnes physiques ; que la société PMB, personne morale, ne peut s'en prévaloir même si elle est une petite entreprise, contrôlée par les membres d'une même famille ; qu'en tout état de cause, il existe un rapport direct entre les cartes de menu litigieuses, nécessaires à l'information de la cliente, et l'activité de restauration de l'intimée ;

Attendu que l'appelante, qui connaissait mieux que quiconque les besoins de l'établissement en cartes de menu, est mal venue à reprocher à la société INTER ÉDITION de n'avoir pas attiré son attention sur le nombre excessif de cartes commandées ; qu'aucun silence dolosif, qui justifierait l'annulation du contrat, ne peut être reproché à l'appelante ; qu'en conséquence, le jugement entrepris doit être infirmé et la demande reconventionnelle en dommages et intérêts formulée par la société PMB doit corrélativement être rejetée ;

Attendu que n'ayant pas exécuté les obligations qui lui incombaient, la société INTER ÉDITION ne peut réclamer le paiement du prix convenu ;

Mais attendu que l'inexécution de la convention étant imputable à la cliente qui a, dès le 31 août 2001, « résilié» une commande qui était ferme, la société INTER ÉDITION est fondée à poursuivre la réparation du préjudice que lui cause la faute de sa cocontractante ; que ce préjudice correspond au gain dont elle a été privée du fait de l'inexécution de la commande ; que la marge perdue peut, en l'état des éléments d'appréciation soumis à la Cour, être évaluée à 1.500 € ;

Attendu que la société PMB supportera les dépens ; qu'il sera alloué à l'appelante une somme de 1.000 en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile au profit de l'appelante ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Déclare la société INTER ÉDITION recevable en son appel ;

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

[minute page 5] Statuant à nouveau,

Condamne la société PMB à payer à la société INTER ÉDITION une somme de mille cinq cents euros (1.500 €) à titre de dommages et intérêts, outre intérêts au taux légal à compter de ce jour ;

Déboute la société PMB de sa demande de dommages et intérêts ;

Condamne la société PMB à payer à la société INTER ÉDITION une somme de mille euros (1.000 €) sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile;

Condamne la société PMB aux dépens de première instance et d'appel.