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CA COLMAR (3e ch. civ. sect. B), 15 janvier 1998

Nature : Décision
Titre : CA COLMAR (3e ch. civ. sect. B), 15 janvier 1998
Pays : France
Juridiction : Colmar (CA), 3 ch. civ. sect. B
Demande : 95/05415
Décision : 3M9800059
Date : 15/01/1998
Nature de la décision : Infirmation
Date de la demande : 26/10/1995
Numéro de la décision : 59
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CERCLAB - DOCUMENT N° 1415

CA COLMAR (3e ch. civ. sect. B), 15 janvier 1998 : RG n° 3 B 9505415 ; arrêt n° 3M9800059

 

Extrait : « Attendu que, quels que soient les avantages du système « Préventissimo » et le degré de satisfaction de l'ensemble des 3.700 locataires, l'OPHLM CUS HABITAT ne pouvait pas l'imposer unilatéralement en cours d'exécution de bail, - qu'en effet, la clause selon laquelle les décisions de l'Office s'imposent aux attributaires des logements ne vise que les règlements et mesures applicables aux parties communes des immeubles ; Attendu que l'examen de la liste détaillée des interventions assurées par le service « Préventissimo » démontre qu'il ne s'agit que de l'entretien des logements individuels, de sorte que l'OPHLM est mal fondé à assimiler ce service à un contrat d'entretien d'ascenseur ou de chaudière qui sont précisément des parties communes ; […] ; Attendu que le contrat d'entretien proposé par l'OPHLM pour les seules parties privatives ne constitue certes pas une clause abusive réputée non écrite par l'article 4 de la Loi du 6 juillet 1989, mais nécessite un accord du locataire pour sa mise en application, - qu'en effet, s'il n'est pas contestable que l'entretien et les menues réparations incombent à l'attributaire du logement, celui-ci reste libre de choisir les moyens adaptés à l'exécution de ses obligations ; Attendu que le choix du service « Préventissimo » peut résulter soit d'un engagement écrit, soit d'une acceptation implicite, notamment lorsque le locataire a sollicité l'intervention de ce service et a bénéficié de ses prestations ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE COLMAR

TROISIÈME CHAMBRE CIVILE SECTION B

ARRÊT DU 15 JANVIER 1998

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 3 B 9505415. Arrêt n° 3M9800059.

 

APPELANT :

L'OPHLM CUS HABITAT

[adresse], représentée par Maître WYBRECHT, Avocat

 

INTIMÉS :

1) Madame X.

[adresse]

2) Madame Y.

[adresse]

3) Madame Z.

[adresse]

4) Monsieur W.

[adresse]

5) Monsieur V.

[adresse]

6) Monsieur U.

[adresse]

représentés par Maîtres G. WEBER et Associés, Avocats

 

COMPOSITION DE LA COUR : M. LEIBER, Président. M. CUENOT et Mme SCHIRER, Conseillers.

ARRÊT CONTRADICTOIRE.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Mesdames X., Y., Z. et Messieurs W., V. et U., locataires de logements appartenant à l'OPHLM de la COMMUNAUTE URBAINE de STRASBOURG, ainsi que l'Association des Résidents de l'Esplanade, ont par acte du 28 octobre 1993 engagé une procédure judiciaire pour contester la mise en oeuvre à partir du 1er juillet 1992 du concept « PREVENTISSIMO » imposé unilatéralement par l'OPHLM et pour obtenir le remboursement des sommes forfaitaires indûment mises à leur charge.

Par jugement du 4 septembre 1995, le Tribunal d'Instance de STRASBOURG a déclaré irrecevable l'action de l'Association des Résidents de l'Esplanade, mais a fait droit à la demande des six locataires pris individuellement et a condamné l'OPHLM à rembourser la somme de 58,50 Francs par mois,

- depuis le 1er juillet 1992 pour Madame Y. et Monsieur U.,

- depuis le 1er juillet 1993 pour Madame X., Madame Z., Monsieur W. et Monsieur V.,

outre les intérêts légaux, les dépens et un montant de 1.500,00 Francs en application de l'article 700 NCPC.

Par déclaration enregistrée au Greffe de la Cour le 26 octobre 1995, l'OPHLM CUS HABITAT a interjeté appel de ce jugement.

L'appelant expose que le concept « PREVENTISSIMO » mis en place à partir du 1er juillet 1992 et actuellement appliqué dans 3.710 logements, par l'intermédiaire de la Société CGEE, adjudicataire du marché public, a pour but d'assurer aux locataires deux prestations, à savoir une visite annuelle avec action préventive concernant l'électricité, la robinetterie, le sanitaire, la serrurerie, etc. et d'autre part la possibilité pour chacun des locataires de solliciter gratuitement toute intervention et réparation urgente autant de fois que nécessaire,

- que le coût de ce système, après négociations avec les organisations représentatives des locataires, est réparti à 70 % pour le locataire (soit 58,50 Francs par mois) et à 30 % pour l'OPHLM,

- qu'il entraîne par ailleurs des économies sur d'autres charges locatives et que la grande majorité des locataires s'en trouvent satisfaits.

L'OPHLM soutient qu'un accord collectif ou individuel n'était pas nécessaire, alors que d'une part toutes les décisions de l'Office s'imposent contractuellement aux attributaires des logements et que d'autre part, il ne s'agit pas d'une estimation unilatérale et forfaitaire de frais de réparations, mais de charges récupérables conformément à l'article 23 de la Loi du 06 juillet 1989 et au décret n° 87713 du 26 août 1987, même si les services sont assurés dans le cadre d'un contrat d'entreprise,

- que le service « Préventissimo » est un contrat d'entretien et de maintenance assimilable aux contrats de même type concernant les ascenseurs ou les chaudières.

Il souligne en outre que les consorts X., W., V. et U. ont fait appel aux services proposés dans le contrat « Préventissimo », en réglant uniquement leur quote-part et non les frais réels de réparation, et qu'ils ont ainsi accepté ce contrat,

- qu'enfin Monsieur U. est irrecevable à agir alors qu'il occupe un logement dont le contrat de location a été souscrit par son employeur (EDF) qui paie le loyer et les charges.

Il conclut à l'infirmation du jugement, au rejet de toutes les conclusions des demandeurs et à leur condamnation aux entiers dépens et au paiement d'une somme de 5.000,00 Francs en application de l'article 700 NCPC.

Les intimés répliquent qu'en l'absence d'accord préalable, collectif ou individuel, l'OPHLM ne pouvait pas leur imposer une obligation nouvelle (redevance de 58,50 Francs par mois) venant se substituer à leur obligation d'entretien dont ils assument la responsabilité,

- qu'en outre, le Premier Juge a justement considéré que ce type de contrat, établi sur une base forfaitaire quel que soit le nombre d'interventions effectuées dans chacun des appartements et indépendamment du soin que les locataires peuvent porter à leur entretien, se heurtant aux dispositions d'ordre public de l'article 4 (f) de la Loi du 06 juillet 1989.

Ils concluent au rejet de l'appel, à la confirmation du jugement et à la condamnation de l'OPHLM aux entiers dépens et au paiement d'une somme de 5.000,00 Francs au titre de l'article 700 NCPC.

 

Vu l'ordonnance de clôture du 3 mars 1997,

Vu le dossier de la procédure et les documents annexes versés aux débats.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que la recevabilité de l'appel n'est pas contestée en la forme ;

Attendu que, quels que soient les avantages du système « Préventissimo » et le degré de satisfaction de l'ensemble des 3.700 locataires, l'OPHLM CUS HABITAT ne pouvait pas l'imposer unilatéralement en cours d'exécution de bail,

- qu'en effet, la clause selon laquelle les décisions de l'Office s'imposent aux attributaires des logements ne vise que les règlements et mesures applicables aux parties communes des immeubles ;

Attendu que l'examen de la liste détaillée des interventions assurées par le service « Préventissimo » démontre qu'il ne s'agit que de l'entretien des logements individuels, de sorte que l'OPHLM est mal fondé à assimiler ce service à un contrat d'entretien d'ascenseur ou de chaudière qui sont précisément des parties communes ;

Attendu que cette distinction entre les parties à usage privatif et les parties communes résulte également de l'article 23 de la Loi du 6 juillet 1989 qui inclut dans les charges récupérables les « dépenses d'entretien courant et menues réparations sur les éléments d'usage commun de la chose louée » ;

Attendu que le contrat d'entretien proposé par l'OPHLM pour les seules parties privatives ne constitue certes pas une clause abusive réputée non écrite par l'article 4 de la Loi du 6 juillet 1989, mais nécessite un accord du locataire pour sa mise en application,

- qu'en effet, s'il n'est pas contestable que l'entretien et les menues réparations incombent à l'attributaire du logement, celui-ci reste libre de choisir les moyens adaptés à l'exécution de ses obligations ;

Attendu que le choix du service « Préventissimo » peut résulter soit d'un engagement écrit, soit d'une acceptation implicite, notamment lorsque le locataire a sollicité l'intervention de ce service et a bénéficié de ses prestations,

- que tel est le cas pour Madame X., Monsieur W., Monsieur V. et Monsieur U., qui doivent donc être déclarés mal fondés en leurs demandes ;

Attendu que par contre, Madame Y. et Madame Z. ont toujours refusé le système « Préventissimo » qui ne saurait leur être imposé sans leur accord, sous quelque forme que ce soit,

- que le jugement sera donc confirmé à leur égard ;

Attendu que les six locataires ayant été représentés par le même avocat, aussi bien en première instance qu'en appel, et les dépens ne pouvant dès lors pas être taxés distinctement selon qu'ils aient obtenu ou non satisfaction, il convient de partager l'ensemble des dépens par moitié entre l'OPHLM d'une part et les six locataires d'autre part ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 NCPC au profit de l'une ou l'autre partie.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, après en avoir délibéré :

DÉCLARE l'appel recevable en la forme ;

Au fond,

INFIRME partiellement le jugement rendu le 04 septembre 1995 par le Tribunal d'Instance de STRASBOURG et statuant à nouveau :

DÉBOUTE Madame X., Monsieur W., Monsieur V. et Monsieur U. de leurs fins et conclusions ;

CONFIRME le jugement en tant qu'il a fait droit aux demandes de Madame Y. et de Madame Z. ;

PARTAGE les dépens de première instance et d'appel par moitié entre l'OPHLM CUS HABITAT d'une part et les six demandeurs d'autre part ;

REJETTE toutes les demandes d'indemnités au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.