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6111 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Modification du contenu du contrat - Modification unilatérale - Droit antérieur au décret du 18 mars 2009 - Conditions générales

Nature : Synthèse
Titre : 6111 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Modification du contenu du contrat - Modification unilatérale - Droit antérieur au décret du 18 mars 2009 - Conditions générales
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
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CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6111 (10 juillet 2020)

PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - PRÉSENTATION PAR CLAUSE

MODIFICATION DU CONTENU DU CONTRAT - CLAUSE DE MODIFICATION UNILATÉRALE

 DROIT ANTÉRIEUR AU DÉCRET DU 18 MARS 2009 - MODIFICATION DES CONDITIONS GÉNÉRALES

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2020)

 

Évolution des textes. * Décret du 24 mars 1978. L’art. 3 du décret du 24 mars 1978 (anc. R. 132-1 C. consom.) n’interdisait que les clauses autorisant les modifications des caractéristiques du bien à livrer ou du service à rendre et ne contenait aucune prohibition explicite des clauses de modification des conditions générales. Néanmoins, ces stipulations pouvaient être examinées dans le cadre traditionnel de l’ancien art. L. 132-1 [212-1] C. consom. (ou de l’art. 35 de la loi du 10 janvier 1978 à compter de l’arrêt de 1991), ce qui obligeait le consommateur, le non-professionnel ou l’association de consommateurs à établir l’existence d’un déséquilibre significatif (ou d’un avantage excessif, avant la loi du 1er février 1995).

V. cependant pour des décisions appliquant l’ancien art. R. 132-2 C. consom. aux clauses de modification des conditions générales : TGI Paris (1re ch. soc.), 5 avril 2005 : RG n° 04/02911 ; Cerclab n° 3182 ; Juris-Data n° 2005-266903 (accès internet) - TGI Nanterre (6e ch.), 9 février 2006 : RG n° 04/02838 ; Cerclab n° 3994 (accès internet) - TGI Paris (1re ch. sect. soc.), 21 février 2006 : RG n° 04/02910 et 04/08997 ; jugt n° 2 ; site CCA ; Cerclab n° 4024-accès internet), infirmé par CA Paris (25e ch. B), 13 février 2009 : RG n° 06/06059 ; Cerclab n° 3145 (arrêt estimant que la clause avait été modifiée ou supprimée avant le jugement) - Jur. Prox. Levallois-Perret, 19 février 2009 : RG n° 91-08-000120 ; jugt n° 26/09 ; site CCA ; Cerclab n° 1376 (transport ferroviaire ; modification des conditions du tarif grand voyageur de la SNCF).

* Annexe à l’art. L. 132-1 C. consom. (directive et droit antérieur). En revanche, l’annexe à l’ancien art. L. 132-1 C. consom., applicable jusqu’au 1re janvier 2009 et reprise de la directive du 5 avril 1993 où elle est toujours présente, a abordé cette question. Dans son point 1.j), l’annexe précisait en effet que peuvent être regardées comme abusives, si elles satisfont aux conditions posées au premier alinéa de l’art. L. 132-1 C. consom. et à condition, en cas de litige, que le demandeur apporte la preuve de ce caractère abusif, les clauses ayant pour objet ou pour effet d’autoriser le professionnel à modifier unilatéralement les termes du contrat sans raison valable et spécifiée dans le contrat (texte conforme à la Directive 93/13/CEE).

Le texte estime donc que les clauses de modification peuvent a priori être sources de déséquilibre, sauf si la modification s’appuie sur une raison « valable » connue dès la conclusion du contrat. Compte tenu de la généralité des termes employés, il peut concerner une modification des conditions générales autres que celles touchant aux caractéristiques du bien ou du service au sens strict qui relèvent du point 1.k (V. Cerclab n° 6109). Cependant, réduit à ce champ restreint, il est permis de s’interroger sur les hypothèses qui pourraient répondre aux deux conditions précitées : quel motif, connu dès la conclusion du contrat, pourrait autoriser la modification des conditions générales ? Le principal envisageable est celui de la mise en conformité avec des modifications législatives ou règlementaires. Toutefois, la loi applicable au contrat est celle en vigueur à la date de sa conclusion et une disposition nouvelle, même d’ordre public, n’est pas en elle-même suffisante pour s’appliquer immédiatement au contrat en cours, sauf disposition contraire de la loi. Dès lors, la prétendue mise en conformité peut dissimuler en réalité une modification des termes du contrat qui ne s’imposait nullement au consommateur. Même dans cette hypothèse, il semble donc que l’appréciation doive se faire au cas par cas : 1/ la modification législative peut être d’application immédiate au professionnel si elle concerne un marché auquel le contrat donne accès : dans ce cas l’adaptation du contrat peut effectivement s’avérer nécessaire) ; 2/ la modification peut consister dans la suppression et le remplacement de clauses jugées abusives (comportement plutôt loyal, par exemple après une condamnation à la suite de l’action d’une association de consommateurs. § N.B. Au-delà, il semble probable que les motifs invoqués par les professionnels sont plutôt d’ordre général : évolution concurrentielle (motif pouvant encourir le grief d’être trop vague), mise en harmonie des conditions de la clientèle pour éviter d’avoir à traiter des conditions différentes (il est douteux que ce motif soit spécifié au contrat).

L’annexe contenait aussi plusieurs tempéraments plus ou moins spécifiques dans ses points 2.b) (services financiers et contrats à durée indéterminée) et 2.c) disposant que le point 1.j) ne faisait pas obstacle à certaines clauses, formule qui n’excluait pas littéralement la reconnaissance de l’existence d’un déséquilibre significatif, mais se contentait de rendre inapplicable ce point 1.j), dont la portée était déjà, en tout état de cause très limitée, puisqu’elle ne dispensait pas le consommateur de rapporter la preuve d’un tel déséquilibre.

* Dispositions spéciales. Ce régime général n’excluait pas l’existence de dispositions spéciales, telles que, par exemple, pour les contrats de fourniture d’électricité ou de gaz naturel, l’ancien art. L. 121-90 C. consom. (créé par Loi n° 2006-1537 du 7 décembre 2006 ; sur la présentation du texte, V. ci-dessous ; pour le texte ultérieur, V. art. L. 224-10 C. consom.).

A. PRINCIPE : INTANGIBILITÉ DES CONDITIONS GÉNÉRALES

Présentation. À partir de leur acceptation lors de la conclusion du contrat, les conditions générales sont couvertes, sauf clauses illicites ou abusives, par la force obligatoire du contrat posée par l’ancien art. 1134 al. 1er C. civ. [1103 nouveau] et toute modification éventuelle doit être effectuée d’un commun accord (V. Cerclab n° 6103). Le consommateur est en principe libre de les accepter ou non, explicitement ou, même si la solution est discutée, tacitement si la conscience de cette acceptation est certaine. Les conséquences vont en revanche varier selon les contrats.

Pour un contrat instantané (ex. vente) ou à exécution échelonnée (ex. : contrat d’entreprise de construction d’une maison), le consommateur ou le non-professionnel peut refuser la modification et exiger l’exécution conformément aux conditions initiales.

Pour un contrat à durée indéterminée, le professionnel est en droit de faire évoluer le contenu des relations, mais le refus du consommateur peut lui permettre d’y mettre fin.

Ce sont en définitive les contrats à durée déterminée qui soulèvent le plus de difficultés. Pour les contrats d’une durée courte (ex. un an renouvelable), le respect des conditions initiales peut être justifié, le professionnel pouvant profiter du renouvellement pour imposer ses nouvelles conditions. Pour les contrats d’une durée longue, une modification motivée et permettant au consommateur de résilier le contrat est sans doute admissible.

N.B. Il est compréhensible que le professionnel puisse vouloir procéder à une application simultanée de ses nouvelles conditions à tous ses contrats, indépendamment de leur date anniversaire, mais cette prétention ne saurait être admise de façon générale.

Intangibilité dans les contrats traditionnels. V. pour la Commission des clauses abusives : Recomm. 94-04/B-2° : Cerclab n° 2162 (location saisonnières ; clauses abusives permettant au professionnel de modifier unilatéralement les conditions initiales du contrat). § V. aussi les recommandations citées Cerclab n° 6108, pouvant englober toutes les modifications (caractéristiques, prix, conditions générales).

Dans le même sens, V. par exemple : CA Paris (1re ch. B), 7 mai 1998 : RG n° 96/86626 ; arrêt n° 160 ; Cerclab n° 1103 ; Juris-Data n° 1998-023868 ; RJDA 8-9/98, n° 1058 ; D. Affaires 1998. 1851, obs. V.A.-R ; Lamyline (location saisonnière ; caractère abusif de la clause permettant au professionnel de modifier les conditions du séjour en cas de circonstances extérieures, non limitées à la force majeure, non compensée par la possibilité, limitée dans un laps de temps très bref, de résilier sa réservation, sans véritable dédommagement de son éventuel préjudice), confirmant TGI Paris (1re ch.), 8 octobre 1996 : RG n° 15827/95 ; Cerclab n° 426 ; Juris-Data n° 1996-049942 (clauses, non limitées à des cas de force majeure, autorisant en réalité le loueur à modifier unilatéralement l’objet même du contrat au détriment du locataire). § Le fait que les décisions de l’OPHLM s’imposent aux attributaires des logements ne vise que les règlements et mesures applicables aux parties communes des immeubles et ne peut concerner un contrat d’entretien des logements individuels ; impossibilité pour l’office d’imposer en cours de contrat un contrat d’entretien proposé pour les seules parties privatives sans un accord du locataire pour sa mise en application. CA Colmar (3e ch. civ. sect. B), 15 janvier 1998 : RG n° 95/05415 ; arrêt n° 3M9800059 ; Cerclab n° 1415 (accord pouvant résulter d’un engagement écrit ou d’une acceptation implicite, notamment lorsque le locataire a sollicité l’intervention de ce service et a bénéficié de ses prestations ; clause jugée non abusive dans le cadre de l’art. 4 de la loi du 6 juillet 1989), sur appel de TI Strasbourg 4 septembre 2005 : Dnd.

Intangibilité et internet. Les contrats conclus par Internet et les contrats de fourniture d’accès soulèvent un problème spécifique dès lors que le support permet des modifications discrètes et en théorie, quasiment permanentes des conditions générales. Il est donc particulièrement important que la version des conditions applicable au consommateur soit connue et, comme l’indique les textes, que celles-ci puissent être conservées sur un support durable.

* Commission des clauses abusives. La Commission des clauses abusives recommande l’élimination, dans les contrats de commerce électronique, des clauses laissant croire au consommateur que lui seraient opposables des modifications unilatérales des conditions générales intervenues postérieurement à la conclusion du contrat. Recomm. n° 07-02/1 : Cerclab n° 2204 (clauses abusives en ce qu’elles laissent croire au consommateur que le professionnel a le droit de modifier unilatéralement les conditions du contrat).

* Juges du fond. Sur l’articulation conditions générales imprimées et en ligne : est abusive la clause faisant prévaloir les conditions générales en ligne sur les conditions générales imprimées, qui ne repose sur aucun fondement et permet d’imposer de nouvelles conditions sans qu’elles aient été acceptées par le consommateur. TGI Paris (1re ch. soc.), 5 avril 2005 : RG n° 04/02911 ; Cerclab n° 3182 ; Juris-Data n° 2005-266903. § Comp. : TGI Paris (1re ch. sect. soc.), 21 février 2006 : RG n° 04/02910 et 04/08997 ; jugt n° 2 ; site CCA ; Cerclab n° 4024 (accès internet ; clause faisant prévaloir les conditions en ligne sur les conditions imprimées lorsqu’elles ont pour « conséquence d’aboutir à une amélioration du service pour l’usager », réserve non abordée par le jugement, qui pourrait correspondre à l’ancien art. R. 132-2 al. 2 C. consom., dans sa rédaction antérieur au décret du 18 mars 2009 ; jugement résumé ci-dessous).

Sur la nécessité d’une information du consommateur : est abusive, au sens de l’ancien art. R. 132-2 C. consom. et illicite au regard de l’ancien art. L. 121-84 du même code, la clause permettant au fournisseur de modifier unilatéralement les conditions générales du contrat et de rendre opposable à l’abonné des clauses et des documents sans qu’il en ait été valablement informé. TGI Paris (1re ch. sect. soc.), 21 février 2006 : RG n° 04/02910 et 04/08997 ; jugt n° 2 ; site CCA ; Cerclab n° 4024 (accès internet), infirmé par CA Paris (25e ch. B), 13 février 2009 : RG n° 06/06059 ; Cerclab n° 3145 (arrêt estimant que la clause avait été modifiée ou supprimée avant le jugement). § V. aussi ci-dessous C.

Sur la nécessité de l’acceptation du consommateur : est abusive, au regard de l’ancien art. R. 132-2 C. consom., la clause autorisant le fournisseur à modifier ses conditions générales, sous réserve d’en informer préalablement le consommateur, dès lors que de surcroît, il n’est pas prévu de délai de préavis ni d’acceptation expresse du consommateur. TGI Paris (1re ch. soc.), 5 avril 2005 : RG n° 04/02911 ; Cerclab n° 3182 ; Juris-Data n° 2005-266903 (accès internet). § Est abusive, contraire à l’ancien art. R. 132-2 C. consom. la clause permettant au fournisseur de modifier le contrat accepté par le consommateur, en y apportant des modifications portées à sa connaissance par une simple mise en ligne sur internet et sans que son consentement préalable ait été requis. TGI Nanterre (6e ch.), 9 février 2006 : RG n° 04/02838 ; Cerclab n° 3994. § Est abusive la clause autorisant le fournisseur à modifier le contrat accepté par le consommateur en y apportant des modifications portées à sa connaissance par une simple mise en ligne sur l’Internet et sans que son consentement préalable ait été requis, qui porte ainsi atteinte au principe d’intangibilité du contrat dans des conditions favorables au professionnel. TGI Nanterre (6e ch.), 3 mars 2006 : RG n° 04/03016 ; site CCA ; Cerclab n° 3181 ; Juris-Data n° 2006-308052 (fourniture d’accès internet ; clause obligeant le consommateur à consulter régulièrement le site du fournisseur, présumant l’acceptation du consommateur tout en lui laissant un droit de résiliation par lettre recommandée).

B. LIMITES : MODIFICATIONS AUTORISÉES ET RÉGIMES SPÉCIAUX

1. TEMPÉRAMENTS AU POINT 1.J DE L’ANNEXE

Contrats à durée indéterminée. Selon le point 2.b), alinéa 2, de l’annexe à l’ancien art. L. 132-1 C. consom., le point 1.j) ne fait pas obstacle à des clauses selon lesquelles le professionnel se réserve le droit de modifier unilatéralement les conditions d’un contrat de durée indéterminée pourvu que soit mis à sa charge le devoir d’en informer le consommateur avec un préavis raisonnable et que celui-ci soit libre de résilier le contrat.

Ce tempérament est d’application générale, le consommateur ou le non-professionnel ne pouvant disposer d’un quelconque droit au maintien indéfini du service proposé, de son prix ou de ses modalités contractuelles.

Les conditions exigées par le texte peuvent être considérées comme classiques : information du consommateur, délai de préavis pour accepter ou non la modification, droit de résilier librement, c'est-à-dire sans pénalités (V. ci-dessous C.).

Il convient cependant de rappeler que la mise en œuvre de ces modifications unilatérales reste soumise à l’exigence d’une obligation de bonne foi et ne doivent pas être exercées de façon abusive.

Pour une illustration : si le professionnel peut modifier les conditions d’application d’un programme ou même l’étendue de celui-ci, une telle modification, par définition unilatérale, ne saurait prendre effet au détriment du consommateur concerné en cours d’application du contrat ; est abusive la clause permettant à tout moment au professionnel de modifier unilatéralement le programme qui fait l’objet du contrat ou une partie de ses conditions générales. Jur. Prox. Levallois-Perret, 19 février 2009 : RG n° 91-08-000120 ; jugt n° 26/09 ; site CCA ; Cerclab n° 1376 (transport ferroviaire ; clause jugée contraire à l’ancien art. R. 132-2 C. consom. ; modification du tarif grand voyageur de la SNCF, le service « souplesse d’accès à bord » permettant gratuitement de prendre le TGV qui précède ou qui suit celui pour lequel le passager dispose d’un billet étant réservé à la souscription d’un billet au tarif « Pro » ; clause de modification prévoyant une application immédiate, acceptée tacitement par l’utilisation de la carte, sauf usage d’un droit de résiliation du contrat, après information de l’utilisateur dans un délai raisonnable, obligation dont le tribunal constate que la preuve de son respect n’est pas rapportée).

Contrats financiers.* Selon le point 2.b), alinéa 1, de l’annexe à l’ancien art. L. 132-1 C. consom., le point 1.j) ne fait pas obstacle à des clauses selon lesquelles le fournisseur de services financiers se réserve le droit de modifier le taux d’intérêt dû par le consommateur ou dû à celui-ci, ou le montant de toutes autres charges afférentes à des services financiers, sans aucun préavis en cas de raison valable, pourvu que soit mise à la charge du professionnel l’obligation d’en informer la ou les autres parties contractantes dans les meilleurs délais et que celles-ci soient libres de réaliser immédiatement le contrat.

N.B. Le visa du point 1.j) par cette disposition laisse un peu perplexe. Le point 2.b) alinéa 1 concerne le montant du prix dans les services financiers, qu’il s’agisse du prix d’un crédit (taux d’intérêt) ou du prix des services. Or, la modification du prix relève en principe plutôt du point 1.l) et il est difficile de voir, a priori, les hypothèses où une pure modification des conditions générales avec des répercussions sur le prix nécessiterait une application immédiate sans préavis (ce qui ne veut pas dire que ce soit totalement inenvisageable ; rappr. la suppression d’une clause d’arbitrage à cours connu, Cerclab n° 6640).

* Par ailleurs, selon le point 2.c) de l’annexe à l’ancien art. L. 132-1 C. consom., les points 1.g, 1.j et 1.l ne sont pas applicables aux : - transactions concernant les valeurs mobilières, instruments financiers et autres produits ou services dont le prix est lié aux fluctuations d'un cours ou d'un indice boursier ou d'un taux de marché financier que le professionnel ne contrôle pas ; - contrats d'achat ou de vente de devises, de chèques de voyage ou de mandats-poste internationaux libellés en devises.

N.B. Ici encore, s’agissant de la référence à un indice, le premier tiret du point 2.c) concerne le prix ou plus généralement une obligation de somme d’argent, sauf à considérer que la disposition vise à permettre un changement d’indice. Or, autoriser une telle modification ruine tout le dispositif, puisqu’il permettrait au professionnel de passer d’un indice à l’autre afin de conserver une référence qui lui est favorable, alors que la tolérance des clauses de référence à des indices extérieurs n’est acceptable que parce qu’ils sont connus et que leur variation échappe au professionnel.

Le second tiret du point 2.c) pourrait en revanche concerner plus directement les conditions générales, puisque le texte vise très clairement des contrats en général et non leurs seules dispositions relatives au prix. Toutefois, les contrats concernés sont instantanés et il semblerait très contestable d’autoriser le professionnel à modifier de façon générale le contenu du contrat après sa conclusion, même si les contrats visés sont d’une nature particulière.

2. MODIFICATIONS AUTORISÉES

Suppression d’une tolérance. En droit commun, il est admis avec constance qu’une simple tolérance ne donne aucun droit à celui qui en bénéficie d’en exiger le maintien. La solution peut notamment concerner soit l’octroi d’un avantage non prévu par le contrat, soit l’inapplication d’une clause de celui-ci. Si ce principe n’est pas susceptible d’être remis en cause, le droit de la consommation peut éventuellement estimer déséquilibrées les clauses qui autorisent la suppression de la tolérance, sans aucun préavis. § V. en ce sens pour la Commission des clauses abusives : la Commission recommande, dans tous les contrats de location, l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de permettre au bailleur de mettre fin à l’usage qui s’est instauré de déroger à une clause du bail, sans mise en demeure laissant au preneur un délai de mise en conformité. Recomm. n° 00-01/B-III-33° : Cerclab n° 2194.

Comp. pour les juges du fond des décisions plutôt en sens contraire : une facilité de caisse, simple tolérance, à la différence d'une autorisation de découvert, a un caractère nécessairement précaire, de sorte que la banque peut y mettre fin pour une raison qu'elle exposera dans la lettre de résiliation, sans qu'il soit possible de prévoir dans le contrat tous les motifs susceptibles de conduire à une telle décision, le client restant libre de contester en justice une décision de la banque qu'il estimerait injustifiée. TGI Paris (9e ch. 2e sect.), 13 septembre 2006 : RG n° 05/1493 ; Cerclab n° 3184 (clause non abusive ; clause plus critiquée en appel). § V. aussi : CA Nîmes (1re ch. civ. B), 17 septembre 2015 : RG n° 14/05231 ; Cerclab n° 5318 (application stricte d’une clause d’indexation d’une sous-location ; arrêt jugeant inopérant un moyen tiré du caractère abusif d’une clause de « tolérance » dont le contenu reste inconnu, déduite de l’absence de mise en œuvre de la clause par le bailleur), sur appel de TI Nîmes, 24 septembre 2014 : RG n° 11-12-001504 ; Dnd.

Modification d’un règlement extérieur au contrat. Dans certains cas, le contrat peut contenir une clause renvoyant à un document extérieur. L’intégration initiale de celui-ci suppose normalement qu’il ait été porté à la connaissance du consommateur (V. Cerclab n° 6089). Or, ce règlement peut lui aussi évoluer, d’autant plus qu’en général il vise à établir des règles communes à de multiples contractants.

* Règlement d’un établissement accueillant du public. Le problème se rencontre pour des établissements accueillant du public. Dès lors que ce règlement a un objet limité à l’imposition de règles concernant la sécurité, l’hygiène ou la vie en commun, son éventuelle modification est possible et elle se répercutera sur le contractant par le biais de la clause de renvoi figurant dans le contrat. Il convient cependant que la modification ne constitue pas un moyen détourné de revenir sur les obligations du contractant et qu’elle soit portée à la connaissance du consommateur (V. ci-dessous C.).

Comp. pour une décision tolérant une atteinte aux obligations du contrat, mais dans une hypothèse particulière associant modification législative et poursuite d’un objectif de sécurité : la clause du bail renvoyant par principe aux énonciations du règlement intérieur la définition par le bailleur de prescriptions que le locataire s’engage à respecter ne présente pas de caractère abusif dans la mesure où, étant limitée dans l’intérêt de la sécurité, de l’hygiène et de la bonne tenue de l’immeuble, elle n’a pas pour objet ou pour effet de créer au détriment du locataire un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat au sens de l’ancien art. L. 132-1 C. consom. dans sa rédaction applicable au litige. CA Paris (pôle 4ch. 4), 15 mai 2012 : RG n° 09/19495 ; arrêt n° 12/160 ; Cerclab n° 3857 ; Juris-Data : 2012-010489 (bail initial contenant une clause sur la détention des animaux familiers conforme à l’art. 10-I de la loi du 9 juillet 1970 dans sa rédaction initiale ; application par la cour de l’édition 2007 du règlement, notifiée par acte d’huissier au locataire, interdisant la détention de chiens de première catégorie, pour prononcer la résiliation du bail et l’expulsion du locataire), sur appel de TI Paris (20e arrdt), 13 juillet 2009 : RG n° 11-09-000175 ; Dnd. § Rejet de l’argument du locataire faisant valoir qu’un tel dispositif permet au bailleur de modifier unilatéralement le bail, en méconnaissance de la loi qui exige une dérogation contractuelle au principe conférant un caractère non écrit aux clauses interdisant la détention d’un animal familier, dès lors, selon la Cour, que par l’effet du renvoi au règlement intérieur, c’est la stipulation du bail qui tend, conformément à l’art. 10 précité, à interdire la détention d’un chien appartenant à la première catégorie mentionnée à l’art. L. 211-12 du code rural. Même arrêt.

* Règlement de service des eaux. N’est pas contraire à l’ancien art. L. 132-1 C. consom. et à ses annexes 1.i) et 1.j), la clause prévoyant que les modifications unilatérales du contrat-type seront, préalablement à leur mise en vigueur, communiquées à l’abonné et que ce dernier pourra alors exercer sa faculté de résiliation du contrat. TA Orléans (1re ch.), 20 décembre 2002 : req. n° 99-1674 ; Cerclab n° 3066 (clause prévoyant un délai de trois mois entre la communication et l’entrée en vigueur et excluant le paiement de toute indemnité, de part et d’autre ; jugement notant au préalable les contraintes d’adaptation et de continuité du service), sur appel CAA Nantes (4e ch.), 29 décembre 2005 : req. n° 03NT00250 ; Cerclab n° 2883 (disposition non discutée en appel). § N.B. S’agissant d’un contrat d’approvisionnement en eau, l’admission d’une faculté de résiliation est assez absurde, aucun consommateur ne pouvant se passer d’une telle fourniture, sauf circonstances particulières (ex. approvisionnement en eau d’une dépendance secondaire). La nature réglementaire des cahiers des charges et la nécessité du service semblent suffisantes à elles seules pour rendre la modification opposable et c’est sans doute plutôt sur le contenu de celle-ci que doit s’exercer le contrôle.

Textes spéciaux. Pour les contrats de fourniture d’électricité ou de gaz naturel, l’ancien art. L. 121-90 (créé par Loi n° 2006-1537 du 7 décembre 2006), dispose que « tout projet de modification par le fournisseur des conditions contractuelles est communiqué au consommateur par voie postale ou, à sa demande, par voie électronique, au moins un mois avant la date d’application envisagée. Cette communication est assortie d’une information précisant au consommateur qu’il peut résilier le contrat sans pénalité, dans un délai maximal de trois mois à compter de sa réception. Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux modifications contractuelles imposées par la loi ou le règlement. »

C. ENCADREMENT DES MODIFICATION RÉGULIÈRES

Information du consommateur. La Commission des clauses abusives recommande que lorsqu’il existe dans l’établissement un règlement intérieur élaboré ou approuvé par les consommateurs logeant dans celui-ci, ou leurs représentants, ses éventuelles modifications ultérieures soient portées à la connaissance de chaque consommateur. Recomm. n° 85-03/A-5° : Cerclab n° 2155 (hébergement de personnes âgées).

Il appartient au professionnel d’aviser spécialement son cocontractant des modifications apportées, soit par information individuelle adressée avant la date de renouvellement, soit par mention sur le site en ligne apparente et devant faire l’objet d’une confirmation de lecture lors de ce renouvellement, information qu’elle ne justifie pas avoir mise en œuvre. Jur. Prox. Levallois-Perret, 19 février 2009 : RG n° 91-08-000120 ; jugt n° 26/09 ; site CCA ; Cerclab n° 1376. § Sur la nécessité d’une information personnalisée : est abusive la clause d’un contrat de compte de dépôt bancaire, qui se borne à prévoir l’information du client par voie de circulaire de modifications substantielles apportées à la convention, sans que le client ait été prévenu à l’avance et ainsi mis en mesure, avant leur application, de les apprécier pour ensuite mettre pertinemment en œuvre, dans le délai fixé, son droit de les refuser. Cass. civ. 1re, 28 mai 2009 : pourvoi n° 08-15802 ; Bull. civ. I, n° 110 ; Cerclab n° 2842 (clause limitant de façon inappropriée les droits légaux du consommateur de dénoncer la convention ; N.B. l’arrêt vise assez curieusement le point 1.b de l’annexe), cassant sur ce point CA Paris (15e ch. sect. B), 3 avril 2008 : RG n° 06/00402 ; Cerclab n° 4180 (une lettre circulaire est un moyen fiable permettant d’informer la clientèle et la clause laisse un délai de réflexion de trois mois suffisant pour prendre connaissance de la modification et pour la refuser).

Acceptation du consommateur. Sur la nécessité de l’acceptation du consommateur : TGI Paris (1re ch. soc.), 5 avril 2005 : RG n° 04/02911 ; Cerclab n° 3182 ; Juris-Data n° 2005-266903 (accès internet ; clause abusive, contraire à l’ancien art. R. 132-2 C. consom., en ce qu’elle se contente d’une information sans prévoir de délai de préavis ni d’acceptation expresse du consommateur) - TGI Nanterre (6e ch.), 9 février 2006 : RG n° 04/02838 ; Cerclab n° 3994 (accès internet ; clause abusive, contraire à l’ancien art. R. 132-2 C. consom., permettant au fournisseur de modifier le contrat sans que son consentement préalable ait été requis) - TGI Nanterre (6e ch.), 3 mars 2006 : RG n° 04/03016 ; site CCA ; Cerclab n° 3181 ; Juris-Data n° 2006-308052 (accès internet).

Obligation de viser les modifications ? La modification des conditions générales soulève un problème particulier, qui n’est pour l’instant pas réglé de façon satisfaisante. Sous une apparence identique à la version initiale, la nouvelle version des conditions générales peut inclure de multiples modifications plus ou moins importantes. Il est déjà difficile en pratique de prendre connaissance des conditions initiales, il est encore plus complexe de comparer deux versions, pour tenter d’en déceler les différences, sachant que le changement d’un seul mot peut être essentiel (ex. « et » remplacé par un « ou ») et que la modification de la numérotation peut ajouter un obstacle supplémentaire, souvent inutile.

La question se pose donc de savoir si une information claire et complète du consommateur ne supposerait pas d’indiquer séparément les modifications effectuées et leurs conséquences. Ce document permettrait d’ailleurs de vérifier que l’information a été donnée de façon loyale, les réserves les plus expresses devant être faites sur des informations orales se contentant de mettre en avant les seuls prétendus avantages de la nouvelle version. Au surplus, une telle exigence pourrait dissuader les professionnels de multiplier des modifications inutiles

Droit de résiliation. Le caractère synallagmatique du contrat n'est de nature à priver la banque du droit de modifier les conditions de fonctionnement de l'instrument de paiement que si celles-ci s'effectuent selon des conditions abusives ; la modification adoptée par l'établissement bancaire peut donc prendre effet dans un délai raisonnable, en l'espèce un mois, dès lors que ce délai est suffisant pour que le porteur renonce sans pénalité - ce qui impliquerait normalement le remboursement prorata temporis de l'abonnement - à partir de la notification de la modification dont la date doit être certaine. TGI Paris (1re ch. 1re sect.), 2 septembre 1997 : RG n° 6285/96 ; Cerclab n° 3071 (conditions relatives à l’utilisation de distributeurs de billets).