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CA NANCY (1e ch. civ.), 1er octobre 2007

Nature : Décision
Titre : CA NANCY (1e ch. civ.), 1er octobre 2007
Pays : France
Juridiction : Nancy (CA), 1re ch. civ.
Demande : 05/00450
Décision : 2124/07
Date : 1/10/2007
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Juris Data
Date de la demande : 11/02/2005
Décision antérieure : TGI EPINAL (2e sect. civ.), 2 décembre 2004
Numéro de la décision : 2124
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CERCLAB - DOCUMENT N° 1484

CA NANCY (1e ch. civ.), 1er octobre 2007 : RG n° 05/00450 ; arrêt n° 2124/07

Publication : Juris-Data n° 350311

 

Extrait : « Il résulte de la combinaison de ces clauses, que sous réserve de l'exercice par le client, dans les sept jours suivant la commande, de la faculté de renonciation imposée par la législation sur le démarchage à domicile, l'acte du 23 juillet 2002 constate un engagement ferme de monsieur X., alors que l'entreprise a différé la formation du contrat à son début d'exécution par l'ouverture du chantier.

Dans sa recommandation n° 80-03 du 24 juin 1980, la Commission des clauses abusives a préconisé l'élimination, dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs de toute clause ayant pour objet ou pour effet de prévoir lors de la signature du contrat un engagement immédiat et définitif du non-professionnel ou consommateur et un engagement éventuel du professionnel. La cour fait sienne la motivation de cette recommandation en retenant qu'un contrat est valablement conclu et engage les deux parties lorsqu'elles ont donné leur accord, et que le professionnel ne peut s'octroyer un délai de réflexion que si, en contrepartie, est laissé au consommateur le même délai pendant lequel il pourra se rétracter.

En outre, en son 1. c), l'annexe au Code de la consommation, qui énumère les clauses pouvant être regardées comme abusives au sens de l'article L 132-1 de ce même Code, vise le cas des clauses ayant pour objet ou pour effet de prévoir un engagement ferme du consommateur, alors que l'exécution des prestations du professionnel est assujettie à une condition dont la réalisation dépend de sa seule volonté

Dans le cas d'espèce, Monsieur X. s'est trouvé définitivement engagé dès l'expiration du délai de renonciation de sept jours. Par contre, la société PELLIN & Cie, qui n'a fait connaître son refus d'exécuter le marché que le 25 octobre 2002, après avoir été interrogée par le maître de l'ouvrage, lequel avait constaté que les travaux n'avaient pas débuté, comme convenu dans la commande, au début du mois d'octobre, a disposé d'un délai de plus de deux mois pour prendre position sur l'acceptation du contrat qu'elle avait fait proposer par ses salariés. L'application de l'article 1er des conditions générales est, dans l'espèce considérée, à l'origine d'un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, en raison du fait que Monsieur X., qui risquait de perdre l'indemnité d'assurance différée, devait savoir, au moment de la conclusion du contrat, si l'entreprise allait ou non exécuter le marché et facturer les travaux avant le 16 décembre 2002.

Si c'est à juste titre que les premiers juges, relevant l'insécurité dans laquelle la clause litigieuse a placé Monsieur X., ont déclaré cette clause abusive, cette décision doit cependant être fondée non pas sur l'article 1134 du Code civil, mais sur l'article L. 132-1 du Code de la consommation, dont les conditions d'application apparaissent réunies en l'espèce. Conformément à ce texte, la clause en litige sera réputée non écrite, si bien que le contrat s'est formé le 23 juillet 2002.  »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE NANCY

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 1er OCTOBRE 2007

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Numéro d'inscription au répertoire général : R.G. n° 05/00450. Arrêt n° 2124/07. Décision déférée à la Cour : jugement du Tribunal de Grande Instance d'ÉPINAL, R.G. n° 03/02078, en date du 2 décembre 2004.

 

APPELANTE :

SARL PELLIN & CIE,

dont le siège est [adresse] représentée par la SCP LEINSTER-WISNIEWSKI-MOUTON, avoués à la Cour, assistée de Maître Claude BOURGAUX, substitué par Maître MARTIN-SERF, avocats au barreau de NANCY

 

INTIMÉ :

Monsieur X.

né le [date] à [lieu], demeurant [adresse], représenté par la SCP CHARDON & NAVREZ, avoués à la Cour, assisté de Maître Francis KIHL, substitué par Maître ABELLAN, avocats au barreau d’ÉPINAL

 

COMPOSITION DE LA COUR : L’affaire a été débattue le 3 septembre 2007, en audience publique devant la Cour composée de : Monsieur Guy DORY, Président de Chambre, Monsieur Gérard SCHAMBER, Conseiller, en son rapport, Madame Pascale TOMASINI- KRIER, Conseiller, qui en ont délibéré ;

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Laïla CHOUIEB ;

ARRÊT : contradictoire, prononcé à l’audience publique du 1er OCTOBRE 2007 date indiquée à l’issue des débats, par Monsieur DORY, Président, conformément à l’article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile ; signé par Monsieur Guy DORY, Président, et par Madame Odile ANTOINE, adjoint administratif faisant fonction de greffier présent lors du prononcé ;

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] FAITS ET PROCÉDURE :

Le manoir de A. a subi des dégâts en toiture lors de la tempête du 26 décembre 1999. Monsieur W., qui était alors propriétaire du domaine, a perçu de la Compagnie AGF, son assureur de dommages, une indemnité immédiate qui devait être complétée par une indemnité différée, valeur à neuf à la condition que les travaux de réfection soient réalisés dans les deux années suivant la survenance du sinistre.

Au courant du mois de septembre 2001 Monsieur X. a acheté le bâtiment en l'état, puis a obtenu de la Cie AGF le transfert à son bénéfice de l'indemnité différée ainsi que la prorogation, d'abord au 1er juillet, puis au 16 décembre 2002, du délai de réalisation des travaux de réparation.

Le 23 juillet 2002, Monsieur Y., agent technico-commercial de la société PELLIN & Cie s'est rendu sur les lieux et a établi un devis relatif à une réfection complète de la toiture pour un prix total de 94.279,02 € TTC, stipulé ferme et définitif Cet acte comporte l'indication manuscrite suivante : « début octobre impératif ». Il reproduit en outre les conditions générales du contrat, dont l'article 1er est rédigé comme suit :

« L'entreprise n'est engagée sur la base du présent contrat qu'à la condition que tous les renseignements y figurant soient exacts et que les prix unitaires soient conformes au tarif fourni au demandeur. La commande n'est définitivement conclue qu'après acceptation de celle-ci par notre société. Cette acceptation ne pourra être considérée qu'après démarrage effectif des travaux ».

Monsieur X. a porté sa signature sur le devis, qui comportait un formulaire destiné à l'exercice éventuel par le non professionnel de la faculté légale de renonciation. Le 21 octobre 2002, il a mis la société PELLIN & Cie en demeure de débuter les travaux. En réponse, par lettre du 25 octobre 2002, la société, se prévalant de l'article 1er des conditions générales, a fait savoir qu'elle n'exécutera pas le contrat. Le 18 novembre suivant il l'a fait assigner en référé pour obtenir l'exécution forcée du contrat. Par ordonnance du 11 décembre 2002, le juge des référés a considéré que la question de la validité de la clause invoquée par l'entreprise ne peut être tranchée que par le juge du principal. Il a néanmoins autorisé Monsieur X. à faire réaliser les travaux par l'entreprise de son choix.

Faisant valoir que le refus fautif de l'entreprise d'exécuter ses obligations lui a fait perdre le bénéfice de l'indemnité de sinistre, qu'il est en outre à l'origine d'une aggravation des dommages et d'un renchérissement du coût des travaux, Monsieur X., par acte du 15 décembre 2003, a fait assigner la société PELLIN & Cie devant le tribunal de grande instance d'ÉPINAL pour obtenir la condamnation de la [minute page 3] défenderesse au paiement d'une somme de 52.293,59 € à titre de dommages-intérêts.

Par jugement du 2 décembre 2004, le tribunal a condamné la société PELLIN & Cie à payer à Monsieur X. une somme de 42.191,96 € et une somme de 1.500 € au titre des frais non compris dans les dépens. Pour se déterminer ainsi, le tribunal a d'abord constaté que le devis a été expressément approuvé par les deux parties, l'entreprise ayant été représentée par son préposé, qui avait le pouvoir de traiter en son nom, ainsi qu'il ressort des termes du contrat liant Monsieur Y. à la société PELLIN & Cie. Puis, le tribunal, se fondant sur les dispositions de l'article 1134 du Code civil et le principe d'exécution de bonne foi des conventions, a qualifié d'abusive la clause stipulée à l'article 1er des conditions générales, en estimant qu'elle prévoit un engagement définitif du consommateur, alors que le professionnel conserve le pouvoir exorbitant, et source d'insécurité, de revenir sur son offre. Ensuite, le tribunal a écarté l'exception de nullité du contrat fondée sur le dol, en retenant qu'il n'est pas démontré que Monsieur X. ait induit en erreur Monsieur Y. et ses collègues en affirmant mensongèrement que la surface de la toiture serait de 450m². Il a relevé qu'il n'est même pas prouvé qu'à la date de conclusion du contrat, Monsieur X. avait déjà connaissance du rapport d'expertise du 3 janvier 2000, qui faisait état d'une surface de toiture de 680 m². Enfin, le tribunal a retenu que le refus fautif de l'entreprise d'honorer ses engagements est bien à l'origine, d'une part, de la perte par Monsieur X. de son droit à percevoir une indemnité de sinistre de 22.388,96 € et d'autre part, du renchérissement pour une somme de 19.803 € du coût des travaux exécutés par une autre entreprise. Par contre, le tribunal n'a pas admis l'existence d'une relation causale avec l'apparition de nouveaux dommages, aux motifs qu'il incombait à Monsieur X. de prendre les mesures nécessaires, alors surtout qu'il avait été autorisé à le faire par le juge des référés.

La société PELLIN & Cie a interjeté appel par déclaration du 11 février 2005.

 

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Par ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 6 octobre 2006, la société PELLIN & Cie demande à la cour, par voie de réformation du jugement déféré, de débouter Monsieur X. de toutes ses demandes et de le condamner au paiement d'une somme de 2.000 € au titre des frais non compris dans les dépens.

La société appelante fait valoir que par application de l'article 1134 du Code civil, l'article 1er des conditions générales a force de loi entre les parties. Elle dénie tout caractère abusif à cette clause en affirmant qu'elle n'institue aucun déséquilibre entre les droits et obligations des parties au [minute page 4] détriment du non professionnel. Elle soutient en particulier qu'elle a légitimement pu se ménager un délai destiné à vérifier la faisabilité de son offre, rappelant que le non professionnel disposait quant à lui du délai de rétractation de 7 jours. Elle rappelle que si Monsieur Y. avait reçu le pouvoir de recueillir les commandes des clients sur son secteur, le contrat la liant à cet agent précisait bien que la société était libre de les refuser. Subsidiairement, la société PELLIN & Cie réitère l'exception de nullité du contrat. Elle maintient, en se fondant sur les attestations établies par Messieurs Y. et Z., que Monsieur X., après avoir dolosivement fourni un chiffre erroné sur la surface de toiture à réaliser, a précipité le processus d'établissement du devis, qu'il s'est empressé d'accepter pour bénéficier d'un prix sans rapport avec les prestations à fournir par l'entreprise.

A titre encore plus subsidiaire, elle oppose l'absence de relation causale entre la faute et les préjudices invoqués. Elle soutient en particulier que la perte du bénéfice de l'indemnité de sinistre est en réalité imputable à la seule négligence de Monsieur X., qui s'est abstenu tant de solliciter des devis dans des délais utiles que d'interrompre la prescription biennale par l'envoi d'une lettre recommandée à l'assureur. Elle soutient en particulier que même si le chantier avait été ouvert au mois d'octobre 2002, comme l'avait exigé le maître de l'ouvrage, les travaux n'auraient pas pu être achevés avant le 16 décembre 2002, date limite fixée par la Cie AGF. Enfin, elle fait valoir que Monsieur X. ne saurait lui faire supporter la différence de prix entre celui du devis du 22 juillet 2002 et celui fixé par l'entreprise qui a en définitive refait la toiture, dès lors que cette entreprise a calculé le coût de ses prestations sur la base de la véritable surface à traiter.

Par ses dernières écritures, notifiées et déposées le 4 mai 2006, Monsieur X. conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation de la société PELLIN & Cie au paiement d'une somme supplémentaire de 1.500 € en remboursement de ses frais irrépétibles de procédure d'appel.

L'intimé réplique que l'article 1er des conditions générales du contrat s'analyse non seulement en une clause abusive, qui doit être réputée non écrite par application de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, mais aussi en condition potestative, nulle par application de l'article 1174 du Code civil. Il en déduit que l'entreprise était définitivement engagée dès la signature du devis et que le refus ultérieur d'exécuter les travaux convenus est fautif. A l'exception de nullité, Monsieur X. oppose qu'aucun dol n'est démontré. Il ajoute sur ce point que la surface exacte de la couverture de son bâtiment demeure inconnue de lui, chaque entreprise ayant ses propres méthodes d'établissement des devis. Il relève à cet égard que selon l'article 2 des propres conditions générales imposées par la société PELLIN & Cie, les méthodes de métrage pour le calcul des prix sont internes à l'entreprise, si bien que ces méthodes ne peuvent être contestées, [minute page 5] les prix étant forfaitaires. S'agissant du préjudice, l'intimé rétorque que l'ultime délai fixé par l'assureur aurait pu être respecté si l'entreprise avait ouvert le chantier suffisamment tôt pour pouvoir achever les travaux, conformément aux indications du devis, au début du mois d'octobre 2002. Il maintient que c'est en raison de l'urgence qui commandait son intervention que l'entreprise CALVISIO, qui a en définitive réalisé les travaux, en a fixé le prix à 114.082,02 € TTC.

L'instruction a été déclarée close le 18 janvier 2007.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

L'acte du 23 juillet 2002, intitulé « devis », dressé sur papier commercial de la société PELLIN & Cie à l'occasion d'un démarchage à domicile, comporte directement au-dessus des signatures d'une part de messieurs Y., C. et D., qui représentaient la société pollicitante au moment de la conclusion de l'acte, et d'autre part de Monsieur X., qui a accepté la proposition de marché faite par l'entreprise, la mention suivante introduite par le terme « commande » :

« déclare par le présent contrat, conformément aux conditions énoncées ci-dessus, ci-dessous et au verso, donner son accord à la Sarl PELLIN et Cie pour les travaux décrits et chiffrés ci-dessus ».

Outre l'article 1er, déjà reproduit en exergue de cet arrêt, les conditions générales de la convention comportent un article 9 qui, en cas de rupture du contrat par le client après l'expiration du délai légal de renonciation, met à sa charge un dédommagement de 40 % du prix du marché.

Il résulte de la combinaison de ces clauses, que sous réserve de l'exercice par le client, dans les sept jours suivant la commande, de la faculté de renonciation imposée par la législation sur le démarchage à domicile, l'acte du 23 juillet 2002 constate un engagement ferme de monsieur X., alors que l'entreprise a différé la formation du contrat à son début d'exécution par l'ouverture du chantier.

Dans sa recommandation n° 80-03 du 24 juin 1980, la Commission des clauses abusives a préconisé l'élimination, dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs de toute clause ayant pour objet ou pour effet de prévoir lors de la signature du contrat un engagement immédiat et définitif du non-professionnel ou consommateur et un engagement éventuel du professionnel. La cour fait sienne la motivation de cette recommandation en retenant qu'un contrat est valablement conclu et engage les deux parties lorsqu'elles ont donné leur accord, et que le professionnel ne peut s'octroyer un délai de réflexion que si, en contrepartie, est laissé au consommateur le même délai pendant lequel il pourra se rétracter.

[minute page 6] En outre, en son 1. c), l'annexe au Code de la consommation, qui énumère les clauses pouvant être regardées comme abusives au sens de l'article L 132-1 de ce même Code, vise le cas des clauses ayant pour objet ou pour effet de prévoir un engagement ferme du consommateur, alors que l'exécution des prestations du professionnel est assujettie à une condition dont la réalisation dépend de sa seule volonté.

Dans le cas d'espèce, Monsieur X. s'est trouvé définitivement engagé dès l'expiration du délai de renonciation de sept jours. Par contre, la société PELLIN & Cie, qui n'a fait connaître son refus d'exécuter le marché que le 25 octobre 2002, après avoir été interrogée par le maître de l'ouvrage, lequel avait constaté que les travaux n'avaient pas débuté, comme convenu dans la commande, au début du mois d'octobre, a disposé d'un délai de plus de deux mois pour prendre position sur l'acceptation du contrat qu'elle avait fait proposer par ses salariés.

L'application de l'article 1er des conditions générales est, dans l'espèce considérée, à l'origine d'un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, en raison du fait que Monsieur X., qui risquait de perdre l'indemnité d'assurance différée, devait savoir, au moment de la conclusion du contrat, si l'entreprise allait ou non exécuter le marché et facturer les travaux avant le 16 décembre 2002.

Lorsqu'il a été informé du refus de la société PELLIN & Cie, refus fondé sur l'application de la clause en litige, il était matériellement devenu impossible de respecter le délai fixé par l'assureur, et qui n'était pas susceptible d'interruption, la prescription biennale édictée par l'article L. 114-1 du Code des assurances n'étant nullement en cause.

L'entreprise a disposé quant à elle d'un important délai, d'ailleurs dépourvu de limite dans le temps, qu'elle a pu mettre à profit pour gérer au mieux de ses intérêts son carnet de commandes et pour choisir les clients qui ont accepté de s'engager dans les meilleures conditions les plus avantageuses pour elle.

Si c'est à juste titre que les premiers juges, relevant l'insécurité dans laquelle la clause litigieuse a placé Monsieur X., ont déclaré cette clause abusive, cette décision doit cependant être fondée non pas sur l'article 1134 du Code civil, mais sur l'article L. 132-1 du Code de la consommation, dont les conditions d'application apparaissent réunies en l'espèce. Conformément à ce texte, la clause en litige sera réputée non écrite, si bien que le contrat s'est formé le 23 juillet 2002. Il s'impose donc de se prononcer sur l'exception de nullité du contrat soulevée par la société PELLIN & Cie à titre subsidiaire sur le fondement du dol.

Pour établir que Monsieur X. a sciemment fourni des informations inexactes sur la superficie de la couverture à remplacer, la société appelante invoque les témoignages de messieurs [minute page 7] Y. et Z. recueillis par des attestations datées respectivement du 17 janvier et du 4 février 2005. Si Monsieur Y. ne se trouvait plus au service de la société PELLIN & Cie à la date à laquelle il a rédigé son attestation, il n'en demeure pas moins que la teneur de celle-ci révèle un évident manque d'objectivité de ce témoin, en particulier en écrivant « il est clair qu'il (M. X.) avait trouvé, avec moi, le pigeon facile », alors que la commande a été signée pas moins par trois préposés de la société PELLIN & Cie. Quant à Monsieur Z., il ressort des termes même de son attestation qu'il se trouvait sous la subordination de l'appelante à l'époque de sa rédaction. Son impartialité étant incertaine, il ne sera pas reconnu de valeur probante à ces deux éléments de preuve. Du reste, l'expertise réalisée par le cabinet P. après le sinistre du 26 décembre 1999, était destinée à Monsieur W., alors propriétaire du bâtiment endommagé, et aucun élément du dossier ne permet de retenir que Monsieur X. avait connaissance de ce rapport, qui certes fait état d'une surface de toiture de 680,53 m², lorsqu'il a accepté l'offre de la société PELLIN & Cie. Cette dernière, qui supporte la charge de la preuve, n'établit pas le dol allégué.

L'exception de nullité du contrat étant écartée, la société PELLIN & Cie doit répondre, sur le fondement de l'article 1147 du Code civil, des conséquences dommageables de l'inexécution de ses obligations.

En ce qui concerne la perte de l'indemnité d'assurance différée, valeur à neuf, il a déjà été relevé que le dépassement du délai conventionnel de réalisation des travaux est une cause de déchéance sans rapport avec la prescription biennale, qui n'avait pas à être interrompue, l'assureur ayant reconnu devoir garantir le sinistre. En outre, si comme l'exigeait la commande, le chantier avait été ouvert au début du mois d'octobre 2002, les travaux auraient pu être achevés et payés avant le 16 décembre 2002.

La perte de l'indemnité est donc bien la conséquence directe, tant du refus de l'entreprise d'exécuter le marché, que de l'information tardive du maître de l'ouvrage de cet état de fait. C'est donc à juste titre que les premiers juges ont alloué à Monsieur X. des dommages-intérêts d'un montant égal à l'indemnité de sinistre perdue, soit 22.388,96 €.

Et alors qu'il aurait dû obtenir la réfection totale par la société PELLIN & Cie de la couverture pour un prix ferme et définitif de 94.279,02 € TTC, Monsieur X. établit par la production des factures que pour ces mêmes travaux, il s'est acquitté auprès de l'entreprise CALVISIO, qui s'est substituée dans les meilleurs délais à l'entreprise défaillante compte tenu de la période hivernale, une somme totale de 114.082,02 € TTC, si bien que c'est encore à juste titre que les premiers juges ont accordé à Monsieur X. une indemnité compensant le renchérissement du coût des travaux pour un montant de 19.803 €.

[minute page 8] Succombant en son recours, et de ce fait tenue aux dépens, la société PELLIN & Cie sera condamnée, par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, à indemniser l'intimé par une somme supplémentaire de 1.000 € de ses frais de défense non compris dans les dépens de la procédure d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant en audience publique et contradictoirement,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

Y ajoutant,

Condamne la société PELLIN & Cie à payer à Monsieur X. une somme de MILLE EUROS (1.000 €) au titre des frais irrépétibles de procédure d’appel ;

La condamne aux dépens de l’instance d’appel et accorde à la SCP CHARDON & NAVREZ, avoués associés à la Cour, un droit de recouvrement direct dans les conditions prévues par l’article 699 du nouveau Code de procédure civile ;

L’arrêt a été prononcé à l’audience publique du un octobre deux mille sept par Monsieur DORY, Président de la première chambre civile de la Cour d’Appel de NANCY, conformément à l’article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile, assisté de Madame ANTOINE, adjoint Administratif faisant fonction de Greffier.

Et Monsieur le Président a signé le présent arrêt ainsi que le Greffier.

Signé : O. ANTOINE.-           Signé : G. DORY.-

Minute en huit pages.