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CA PARIS (Pôle 4 - 9e ch.), 28 janvier 2010

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (Pôle 4 - 9e ch.), 28 janvier 2010
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), 9e ch.
Demande : 07/20670
Date : 28/01/2010
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Juris Data
Date de la demande : 7/12/2007
Décision antérieure : TI PARIS (16e ardt.), 27 novembre 2007
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CERCLAB - DOCUMENT N° 1651

CA PARIS (Pôle 4 - 9e ch.), 28 janvier 2010 : RG n° 07/20670

Publication : Juris-Data

 

Extrait : « Considérant que le contrat liant les parties est rédigé de la manière suivante : […] ; Considérant qu'à l'évidence, la première phrase ne fait pas état d'une autorisation de découvert accordée, mais seulement « pouvant » l'être ; qu'elle n'a pour objet que de rappeler le plafond réglementaire de ce type de crédit et seul le montant du découvert maximum autorisé à l'ouverture du compte constitue le montant maximum du découvert autorisé en matière de crédit permanent, l'emprunteur pouvant l'utiliser par fractions, dans cette limite ; Considérant, dès lors, que le montant du découvert maximum autorisé en l'espèce était de 20.000 Francs et non de 140.000 Francs ;

Considérant que, lorsqu'une clause est abusive, elle n'entraîne pas l'irrégularité du contrat de crédit mais est simplement réputée non écrite ; considérant que la clause estimée abusive par le premier juge prévoit que le montant du découvert maximum autorisé à l'ouverture, fixée à 20.000 Francs « est révisable par la SA COFINOGA qui se réserve le droit de la modifier à la hausse ou à la baisse » et qu'il peut être augmenté « sur simple demande » de l'emprunteur, après acceptation de la SA COFINOGA ;

Qu'il s'agit bien d'une clause contractuelle prévoyant l'augmentation du montant du crédit initial sans acceptation par l'emprunteur d'une nouvelle offre préalable de crédit ; Considérant qu'une telle clause laisse penser que le prêteur ne doit pas, pour chaque nouveau crédit que constitue l'augmentation du crédit initial, délivrer à l'emprunteur une nouvelle offre que ce dernier doit formellement accepter, et que l'emprunteur ne dispose donc pas à cette occasion de la faculté, d'ordre public, de rétracter son acceptation, observation étant faite que son attention n'a été attirée lors de la signature du contrat que sur le montant initialement limité du crédit et les indications corrélatives s'agissant du taux applicable et du montant des mensualités de remboursement ; qu'elle contrevient manifestement à l'objectif du législateur d'information de l'emprunteur sur l'ensemble des caractéristiques du crédit, et notamment la charge des remboursements, et du délai de réflexion ; que, créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, et ce au détriment du consommateur, elle s'analyse en une clause abusive, réputée non écrite conformément aux dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation ; qu'il en résulte que l'augmentation de l'ouverture de crédit en vertu de ladite clause est sans incidence sur la détermination du point de départ du délai de forclusion ;

Considérant que dès lors que la clause de variabilité du montant maximum emprunté est considérée comme non écrite, et non comme entraînant des irrégularités du contrat de crédit au regard des dispositions des articles L. 311-8 à L. 311-10 du code de la consommation, la sanction ne peut être la déchéance du droit aux intérêts édictée par l'article L. 311-33 ; […] Qu'en l'espèce, il est constant, comme l'établit l'historique du compte produit aux débats, que le montant maximum de 20.000 Francs autorisé à l'ouverture a été constamment dépassé, sans jamais être restauré, à compter d'avril 1997, et ce sans nouvelle offre ; que l'assignation n'ayant été délivrée que le 11 mai 2006, l'action en paiement de la société de crédit est atteinte par la forclusion biennale »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 4 - CHAMBRE 9

ARRÊT DU 28 JANVIER 2010

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

 

Numéro d'inscription au répertoire général : R.G. n° 07/20670. (5 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 novembre 2007 - Tribunal d'Instance de PARIS 16 - RG n° 11-07-000539.

 

APPELANTE :

SA LASER COFINOGA anciennement SA COFINOGA,

représentée par son Président du Conseil d'Administration et tous représentants légaux. [adresse], représentée par la SCP GARNIER, avoués à la cour, assistée de Maître Isabelle de KRASSILNIKOFF-VIALA, avocat au barreau de PARIS, toque : C770

 

INTIMÉS :

Monsieur X.

[adresse], représenté par la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY, avoués à la cour, assisté de Maître Bernard COUDRAY, avocat au barreau de PARIS, toque : C116

Madame X.

[adresse], représentée par la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY, avoués à la cour, assistée de Maître Bernard COUDRAY, avocat au barreau de PARIS, toque : C116

 

COMPOSITION DE LA COUR : [minute page 2] Après rapport oral et en application des dispositions de l'article 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 1er décembre 2009, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Catherine BONNAN-GARÇON, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Marie-José PERCHERON, présidente, Madame Catherine BONNAN-GARÇON, conseillère, Madame Marie-Suzanne PIERRARD, conseillère

Greffier, lors des débats : Madame Hélène BODY

ARRÊT : CONTRADICTOIRE - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Marie-José PERCHERON, présidente et par Madame Hélène BODY, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Aux termes d'une offre préalable signée le 9 octobre 1995, la SA COFINOGA a consenti à M. X. et Mme X. une ouverture de crédit utilisable par fractions avec un découvert autorisé à l'ouverture de 20.000 Francs (3.048,98 €) et un montant maximum autorisé de 140.000 Francs (21.342,86 €) remboursable par mensualités d'un montant dépendant du capital utilisé et incluant des intérêts au taux effectif global variant de 16,50 % à 17,20 % l'an.

Le 11 mai 2006, la SA COFINOGA a fait assigner en paiement les époux X. devant le tribunal d'instance du 16ème arrondissement de Paris.

Par jugement du 27 novembre 2007, ce tribunal a constaté que l'action engagée par la SA COFINOGA était atteinte par la forclusion et dit irrecevables ses demandes et condamné la société COFINOGA à payer aux époux X. la somme de 500 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

La SA COFINOGA a relevé appel de cette décision le 7 décembre 2007.

 

PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Vu les conclusions de la société LASER COFINOGA anciennement dénommée COFINOGA du 23 septembre 2009 tendant à l'infirmation du jugement, à la condamnation solidaire des époux X. à lui payer les sommes de 22.182,24 € avec intérêts au taux contractuel de 16,01 % sur la somme de 20.999,91 € à compter du 2 février 2006 et 800 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions des époux X. en date du 20 octobre 2009 tendant à la confirmation de la décision, subsidiairement à la mise hors de cause de Mme X. après, au besoin, désignation d'un expert en écriture, à titre infiniment subsidiaire à la réduction de la dette à 4.034,02 €, à la condamnation de la société LASER COFINOGA, en sa qualité d'assureur, à rembourser à M. X. les frais des soins résultant de son accident en février 2004 et [minute page 3] à lui verser 15.000 € à titre de dommages intérêts en réparation de son préjudice moral et à la condamnation de la société LASER COFINOGA à verser aux époux X. la somme de 5.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR :

Considérant que le premier juge a retenu que la clause prévoyant l'augmentation du montant du capital sans souscription d'une nouvelle offre est une clause abusive qui doit être réputée non écrite et que le découvert maximum autorisé d'un montant de 20.000 Francs a été dépassé de façon continue à compter du mois d'avril 1997 sans être restauré, ce dépassement caractérisant la défaillance des emprunteurs et constituant le point de départ du délai de forclusion de l'article L. 311-37 du code de la consommation, et que l'assignation ayant été délivrée le 11 mai 2006, l'action de la SA COFINOGA est forclose et ses demandes irrecevables ;

Considérant que la société appelante fait valoir :

- qu'en aucun cas l'évolution du découvert utile initial ne peut constituer la défaillance de l'emprunteur au sens de l'article L. 311-37 du code de la consommation,

- que la défaillance ne peut être caractérisée que par l'absence de paiement d'une mensualité,

- qu'en tout état de cause, la sanction ne pourrait être que la déchéance du droit aux intérêts sur la partie du capital ayant excédé le découvert maximum autorisé,

- que Mme X., qui conteste sa signature, ne verse aux débats aucune pièce de comparaison contemporaine de l'acte contesté,

- qu'en tout état de cause, les conditions de l'article 220 du code civil sont réunies en l'espèce,

- qu'aucun accord de rééchelonnement n'a été accepté par elle,

- que la résiliation de l'assurance est intervenue le 14 octobre 2002 du fait que le souscripteur avait atteint l'âge limite soit 70 ans,

- que la compagnie d'assurance est la compagnie ALICO actuellement AIG ;

Considérant que les époux X. font valoir quant à eux :

- que le montant initial du crédit a été dépassé dès avril 1997 sans être restauré et que la société LASER COFINOGA est forclose en son action au sens de l'article L. 311-37 du code de la consommation,

- que Mme X. n'a jamais signé le contrat,

- qu'ils sont mariés sous le régime de la séparation de biens et que les dispositions de l'article 220 du code civil sont dès lors inapplicables,

- que M. X. a souscrit deux contrats d'assurance et que son interlocuteur était la SA COFINOGA ;

Considérant que le contrat liant les parties est rédigé de la manière suivante :

« dès l'acceptation de votre dossier, la SA COFINOGA vous ouvrira un compte dénommé compte confiance sur lequel vous serez autorisés à effectuer des tirages financiers et/ou après accord de la [minute page 4] SA COFINOGA à inscrire (domicilier) des opérations de débit dans la limite du montant du découvert maximum autorisé. Le montant maximum du découvert pouvant être autorisé est de 140.000 Francs. Ce montant est révisable par la SA COFINOGA qui se réserve le droit de le modifier en hausse ou en baisse. Le montant du découvert autorisé à l'ouverture de votre compte est fixé à 20.000 Francs » ;

Considérant qu'à l'évidence, la première phrase ne fait pas état d'une autorisation de découvert accordée, mais seulement « pouvant » l'être ; qu'elle n'a pour objet que de rappeler le plafond réglementaire de ce type de crédit et seul le montant du découvert maximum autorisé à l'ouverture du compte constitue le montant maximum du découvert autorisé en matière de crédit permanent, l'emprunteur pouvant l'utiliser par fractions, dans cette limite ;

Considérant, dès lors, que le montant du découvert maximum autorisé en l'espèce était de 20.000 Francs et non de 140.000 Francs ;

Considérant que, lorsqu'une clause est abusive, elle n'entraîne pas l'irrégularité du contrat de crédit mais est simplement réputée non écrite ; considérant que la clause estimée abusive par le premier juge prévoit que le montant du découvert maximum autorisé à l'ouverture, fixée à 20.000 Francs « est révisable par la SA COFINOGA qui se réserve le droit de la modifier à la hausse ou à la baisse » et qu'il peut être augmenté « sur simple demande » de l'emprunteur, après acceptation de la SA COFINOGA ;

Qu'il s'agit bien d'une clause contractuelle prévoyant l'augmentation du montant du crédit initial sans acceptation par l'emprunteur d'une nouvelle offre préalable de crédit ;

Considérant qu'une telle clause laisse penser que le prêteur ne doit pas, pour chaque nouveau crédit que constitue l'augmentation du crédit initial, délivrer à l'emprunteur une nouvelle offre que ce dernier doit formellement accepter, et que l'emprunteur ne dispose donc pas à cette occasion de la faculté, d'ordre public, de rétracter son acceptation, observation étant faite que son attention n'a été attirée lors de la signature du contrat que sur le montant initialement limité du crédit et les indications corrélatives s'agissant du taux applicable et du montant des mensualités de remboursement ; qu'elle contrevient manifestement à l'objectif du législateur d'information de l'emprunteur sur l'ensemble des caractéristiques du crédit, et notamment la charge des remboursements, et du délai de réflexion ; que, créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, et ce au détriment du consommateur, elle s'analyse en une clause abusive, réputée non écrite conformément aux dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation ; qu'il en résulte que l'augmentation de l'ouverture de crédit en vertu de ladite clause est sans incidence sur la détermination du point de départ du délai de forclusion ;

Considérant que dès lors que la clause de variabilité du montant maximum emprunté est considérée comme non écrite, et non comme entraînant des irrégularités du contrat de crédit au regard des dispositions des articles L. 311-8 à L. 311-10 du code de la consommation, la sanction ne peut être la déchéance du droit aux intérêts édictée par l'article L. 311-33 ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 311-37 du code de la consommation, l'action en paiement née d'un contrat de crédit à la consommation doit être engagée dans le délai de deux ans de l'événement qui lui a donné naissance ; que, conformément à la règle selon laquelle le point de départ à l'expiration duquel une action ne peut plus être exercée se situe nécessairement à la date d'exigibilité de l'obligation qui lui a donné naissance, le délai biennal de forclusion prévu par ces textes court, dans le cas d'une ouverture de crédit, d'un montant déterminé et reconstituable et assorti d'une obligation de remboursement à échéances convenues, à compter du moment où le montant maximum du découvert autorisé est dépassé sans être régularisé, ce qui caractérise la défaillance de l'emprunteur ;

[minute page 5] Qu'en l'espèce, il est constant, comme l'établit l'historique du compte produit aux débats, que le montant maximum de 20.000 Francs autorisé à l'ouverture a été constamment dépassé, sans jamais être restauré, à compter d'avril 1997, et ce sans nouvelle offre ; que l'assignation n'ayant été délivrée que le 11 mai 2006, l'action en paiement de la société de crédit est atteinte par la forclusion biennale ;

Que le jugement doit en conséquence être confirmé ;

Considérant que, dès lors, il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de mise hors de cause de Mme X. ;

Considérant, sur la demande tendant à voir condamner la société LASER COFINOGA en qualité d'assureur, que le premier juge a à bon droit retenu que l'assureur, la compagnie ALICO était clairement mentionnée au contrat et qu'il appartenait à M. X. de mettre en cause celle-ci ;

Considérant que l'équité ne conduit pas à l'application à l'espèce des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'il y a lieu en conséquence d'infirmer la décision déférée de ce chef et de débouter les parties de leurs demandes en cause d'appel ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Confirme le jugement entrepris hormis en ce qu'il a condamné la société COFINOGA à payer aux époux X. la somme de 500 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Infirme de ce chef et statuant à nouveau ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société LASER COFINOGA aux dépens, qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE       LA PRÉSIDENTE