TI PARIS (16e ardt.), 27 novembre 2007
CERCLAB - DOCUMENT N° 2783
TI PARIS (16e ardt.), 27 novembre 2007 : RG n° 11-07-000539 ; jugement n° 1798
(sur appel CA Paris (pôle 4 ch. 9), 28 janvier 2010 : RG n° 07/20670)
Extrait : « que la lecture de cette clause montre bien que le crédit consenti à l'ouverture est le crédit autorisé et non le crédit maximal et que l'augmentation du crédit autorisé n'a rien d'automatique et reste subordonné à l'accord des parties ; Que cette clause ne fait qu'organiser l'augmentation du montant du capital dans des proportions permettant de multiplier par sept le montant du crédit qui n'a alors plus aucun rapport avec l'économie initiale du contrat ; que par ailleurs elle ne prévoit pas que l'augmentation du montant du découvert doit être réalisée dans les termes d'une nouvelle offre préalable qui doit être formellement acceptée par l'emprunteur et à l'occasion de laquelle il soit clairement informé des nouvelles conditions du contrat et dispose de la faculté d'ordre public de rétracter son acceptation ; Que de ce fait cette clause créé un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au détriment du consommateur et doit être réputée non écrite par application de l'article L. 132-1 du Code de la consommation ».
TRIBUNAL D’INSTANCE DE PARIS
SEIZIÈME ARRONDISSEMENT
JUGEMENT DU 27 NOVEMBRE 2007
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11-07-000539. Jugement n° 1798.
DEMANDEUR :
Société Anonyme COFINOGA
Centre Administratif [adresse], représentée par Maître DE KRASSILNIKOFF-VIALA, avocat du barreau de PARIS, 72 rue Michel Ange 75016 PARIS
DÉFENDEURS
Monsieur X.
[adresse], assisté de Maître DE LIPSKI Xavier, avocat au barreau de PARIS, [adresse] PARIS désigné au titre de l'aide juridictionnelle partielle par décision du BAJ de Paris en date du [date] prononcée sous le numéro BAJ 75101/001/2006/XX
Madame X.
[adresse], représentée par Maître DE LIPSKI Xavier, avocat du barreau de PARIS, [adresse] PARIS
COMPOSITION DU TRIBUNAL : Lors des débats : Président, Madame BOHNERT Claire
Faisant fonction de Greffier : M. HARRIONG Benoît
DÉBATS : Audience publique du 30 octobre 2007
JUGEMENT : en premier ressort, contradictoire. Prononcé publiquement par mise à disposition de la décision au greffe du Tribunal, signée par Madame BOHNERT Claire, Juge d'Instance, et M. HARRIONG Benoît, faisant fonction de Greffier
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE :
Par acte d'huissier en date du 11 mai 2006, la SA COFINOGA a fait assigner Monsieur et Madame X. aux fins d'obtenir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, le paiement de :
- 22.182,24 euros avec intérêts au taux de 16,01 % l'an à compter du 2 février 2006 représentant le solde d'un crédit utilisable par fractions souscrit par acte du 9 octobre 1995 pour un montant de découvert autorisé de 21.342,86 euros et dont certaines échéances sent restées impayées malgré une mise en demeure,
- 610 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Par décision en date du 13 février 2007, l'affaire a été radiée suite à une nouvelle demande de renvoi après un dernier renvoi, puis rétablie à la demande de la société COFINOGA à l'audience du 4 septembre 2007.
De leur côté, Monsieur et Madame X. ont fait citer la société COFINOGA devant le juge des référés afin de faire déclarer illégale l'assignation du 11 mai 2006 du fait de l'absence de communication des pièces.
Par décision du 27 juillet 2007, le juge des référés s'est déclaré incompétent et a renvoyé l'affaire au fond à l'audience du 4 septembre 2007.
A l'audience, la SA COFINOGA a maintenu ses demandes.
Monsieur et Madame X. sollicitent la nomination d'un expert pour effectuer la vérification des écritures du contrat du 9 octobre 1995, la réduction de la dette de Monsieur X. à la somme de 4.034,02 €, la condamnation solidaire de la société COFINOGA et de la société ALICO au remboursement des soins résultant de l'accident de février 2004, le paiement à Madame X. de 5.000 € de dommages et intérêts et de 12.000 € de dommages et intérêts à Monsieur X. outre 500 € en vertu de l'article 700 du NCPC.
Ils soutiennent
- que Madame X. n'a jamais signé le contrat du 9 octobre 1995 et sollicite la désignation d'un expert pour le confirmer, et précise qu'étant marié sous le régime de la séparation de biens elle ne peut se voir appliquer les dispositions de l'article 220 du Code civil,
- que Monsieur X. qui avait souscrit le crédit pour un découvert autorisé à l'origine de 20.000 Francs a dépassé cette somme en avril 1997 sans que COFINOGA ne l'informe des conditions de l'augmentation de capital ni de son acceptation d'augmentation de son crédit et que de ce fait il ne peut être tenu que à hauteur du découvert autorisé au moment de l’ouverture de son contrat soit pour la somme de 4 .34,02 €,
- que la société COFINOGA n'a pas respecté les formalités de la déchéance du terme en n'adressant pas celle-ci avec accusé réception et rend nulle son action en paiement qui par ailleurs est forclose, le premier incident de paiement ayant eu lieu le 2 décembre 2004,
- [minute page 3] que la société COFINOGA a adressé avec plus d'un an de retard la demande de prise en charge de l'accident de Monsieur X. et qu'elle est donc coresponsable avec la société ALLICO de sa situation et de sa prise en charge.
La société COFINOGA fait valoir quant à elle :
- qu'elle s'en rapporte sur la demande d'expertise mais indique que Madame X. ne produit pas de spécimen de signature contemporain de la signature du contrat et qu'en tout état de cause elle est tenue en vertu des dispositions de l'article 220 du Code civil,
- qu'il appartient à Monsieur X. qui conteste le refus de prise en charge de mettre en cause la compagnie d'assurance ALICO actuellement AIG qui peut seule répondre sur ce point.
Par décision en date du 2 octobre 2007, la réouverture des débats a été ordonnée afin que les parties puissent faire valoir contradictoirement leurs observations sur la forclusion de la demande de la société COFINOGA.
A l'audience du 30 octobre 2007, COFINOGA fait valoir que le contrat prévoit un montant de découvert maximum autorisé de 140.000 Francs, somme qui n'a jamais été dépassée, que le délai de forclusion court à compter de la première échéance impayée non régularisée soit en l'espèce le 2 décembre 2004 et que l'action n'est donc pas forclose.
En défense, Monsieur X. indique qu'il a dépassé son autorisation de crédit originelle de 20.000 Francs en avril 1997 et que la société COFINOGA ne lui a transmis aucune offre préalable écrite pour l'informer des conditions particulières relatives à l'augmentation du capital dû et que ce n'est qu'en mars 2005 qu'elle lui a adressé un avenant afin de régulariser son découvert, avenant qu'il a refusé de signer. II soutient donc que la clause d'augmentation de crédit doit être considérée comme nulle et que l'action de la société COFINOGA doit être déclarée forclose.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
Sur les sommes dues au titre du prêt :
Attendu que la société COFINOGA verse aux débats :
- l'offre préalable de crédit du 9 octobre 1995,
- la lettre de mise en demeure du 16 février 2006,
- l'historique du compte,
- le décompte de la créance,
[minute page 4] Attendu que selon l'article L. 311-37 du Code de la consommation, les actions en paiement engagées à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion,
Attendu que conformément à la règle selon laquelle le point de départ à l'expiration duquel une action ne peut plus être exercée, se situe nécessairement à la date d'exigibilité de l'obligation qui lui a donné naissance, le délai biennal de forclusion prévu par l'article L. 311-37 du Code de la consommation court, dans le cas d'une ouverture de crédit d'un montant déterminé et reconstituable, assortie d'une obligation de remboursement à échéances convenues, à compter du moment où le montant du dépassement maximum convenu n'est pas régularisé, cette situation constituant un incident qui caractérise la défaillance de l'emprunteur,
Attendu qu'en l'espèce, l'offre de crédit a été émise pour un découvert autorisé de 20.000 Francs, que la clause de variation est libellée ainsi : « dès acceptation de votre dossier, COFINOGA vous ouvrira un compte sur lequel vous serez autorisé à effectuer des tirages financiers et/ou après accord de COFINOGA à inscrire des opérations de débit dans la limite du montant du découvert maximum autorisé. Le montant maximum du découvert pouvant être autorisé est de 140.000 Francs. Le montant du découvert autorisé à l'ouverture de votre compte est fixé à 20.000 Francs. Ce montant peut être augmenté sur simple demande de votre part après acceptation par COFINOGA » ; que la lecture de cette clause montre bien que le crédit consenti à l'ouverture est le crédit autorisé et non le crédit maximal et que l'augmentation du crédit autorisé n'a rien d'automatique et reste subordonné à l'accord des parties ;
Que cette clause ne fait qu'organiser l'augmentation du montant du capital dans des proportions permettant de multiplier par sept le montant du crédit qui n'a alors plus aucun rapport avec l'économie initiale du contrat ; que par ailleurs elle ne prévoit pas que l'augmentation du montant du découvert doit être réalisée dans les termes d'une nouvelle offre préalable qui doit être formellement acceptée par l'emprunteur et à l'occasion de laquelle il soit clairement informé des nouvelles conditions du contrat et dispose de la faculté d'ordre public de rétracter son acceptation ;
Que de ce fait cette clause créé un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au détriment du consommateur et doit être réputée non écrite par application de l'article L. 132-1 du Code de la consommation,
Que le montant initial du crédit de 20.000 Francs a été dépassé en avril 1997, que l'historique du compte montre que le dépassement n'a jamais été régularisé et qu'au contraire la situation débitrice n'a fait que s'aggraver, que ce dépassement du plafond constitue un incident de paiement manifestant la défaillance de l'emprunteur sans régularisation par paiement ou par l'octroi de crédits complémentaires dans des conditions contrevenant à la législation en la matière,
Que l'assignation a été délivrée le 11 mai 2006, soit après l'expiration du délai biennal, l'action de la société COFINOGA est forclose et ses demandes doivent être déclarées irrecevables,
[minute page 5]
Sur les demandes de Monsieur et Madame X. :
Attendu que Monsieur X. conteste le refus de prise en charge par la compagnie d'assurance ; que la société COFINOGA n'est que l'établissement financier, juridiquement distinct de la compagnie d'assurance ALICO clairement mentionnée au contrat et qui seule décide de la prise en charge ou non d'un sinistre,
Qu'il appartient donc à Monsieur X. de diligenter une action à l'encontre de l'assureur et que ces demandes à l'encontre de la société COFINOGA ne peuvent être retenues ;
Sur les dommages-intérêts :
Que Monsieur et Madame X. ne justifient d'aucun préjudice et doivent être déboutés de leur demande de dommages et intérêts ;
Sur l'exécution provisoire :
Que l'ancienneté de la créance et la nature de l'affaire justifient que soit ordonnée l'exécution provisoire ;
Sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile et les dépens :
Attendu que la société COFINOGA succombe et qu'elle devra en conséquence verser à Monsieur et Madame X. la somme de 500 € au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Attendu que la partie succombante supporte les dépens ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal,
Constate la forclusion de l'action engagée par la société COFINOGA et déclare ses demandes irrecevables,
[minute page 6] Ordonne l'exécution provisoire ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;
Condamne la société COFINOGA à payer à Monsieur et Madame X. la somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Condamne la société COFINOGA aux dépens.
LE GREFFIER LE JUGE
- 5745 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Conséquences sur l’issue du litige - Effet rétroactif - Point de départ d’une forclusion - Illustrations
- 5734 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Nature - Clause réputée non écrite
- 5745 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Conséquences sur l’issue du litige - Effet rétroactif - Point de départ d’une forclusion - Illustrations
- 5749 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets de l’action - Autres effets - Déchéance des intérêts
- 6031 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Déséquilibre injustifié - Nature du contrat - Economie du contrat
- 6633 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 4 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Clauses abusives
- 6635 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 6 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Notion d’augmentation du crédit