CA RENNES (1re ch. B), 14 octobre 2005
CERCLAB - DOCUMENT N° 1783
CA RENNES (1re ch. B), 14 octobre 2005 : RG n° 04/04813 ; arrêt n° 607
Publication : Juris-Data n° 295894
Extraits : 1/ « Considérant que c'est à tort que le premier juge au visa de la recommandation 94-02 du 17 décembre 1991 de la commission des clauses abusives et de l'article R. 311-6 du code de la consommation a réputé non écrites toutes les clauses figurant au verso du contrat de prêt dès lors qu'elles n'ont pas été signées des emprunteurs ; Que certes, selon la recommandation, l'ensemble des clauses contractuelles doit précéder la signature des parties ; que cette recommandation est dictée cependant par le souci que le consommateur ait pu effectivement prendre connaissance des clauses sur lesquelles il n'a pas apposé sa signature ; Or, qu'outre le fait que l'article précité du code de la consommation n'exige pas que l'offre de crédit soit la copie servile des modèles-type dès lors qu'il contient sans ambiguïté les mentions exigées, force est de relever que figure expressément sous la signature des emprunteurs la mention selon laquelle ils « déclarent accepter l'offre préalable et, après en avoir pris connaissance, adhérer à toutes les conditions figurant au recto et au verso ».
2/ « Que c'est tout aussi vainement que Madame Y. invoque l'existence d'une clause abusive au motif que le taux de l'intérêt suit le taux de base pratiqué par le prêteur alors qu'il s'agit d'une clause inscrite dans les modèles-type annexés au décret du 24 mars 1998 codifiés sous l'article R. 311-6 du code de la consommation et qu'aux termes de l'article 1er paragraphe 2 de la directive du 5 avril 1993 sur les clauses abusives « les clauses contractuelles qui reflètent des dispositions législatives ou réglementaires impératives ne sont pas soumises aux dispositions de la directive ».
3/ « Qu'enfin, Madame Y. ne peut utilement prétendre à la déchéance du droit aux intérêts en invoquant le caractère abusif de certaines clauses et plus précisément de celle contenue dans l'article 9, offrant au prêteur des possibilités de résiliation du contrat non prévues au modèle-type alors que la sanction d'une clause abusive est d'être réputée non écrite et que seules les irrégularités de l'offre préalable appellent la sanction de la déchéance du droit aux intérêts, pour autant qu'elles ne tombent pas sous le coup de la forclusion biennale applicable pour les contrats conclus avant l'entrée en vigueur de la loi du 11 décembre 2001 ».
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
PREMIÈRE CHAMBRE B
ARRÊT DU 14 OCTOBRE 2005
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 04/04813. Arrêt n° 607.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Monsieur Jean-Bernard PIPERAUD, Président, Madame Ghislaine SILLARD, Conseiller, Monsieur Jean-Malo BOHUON, conseiller.
GREFFIER : Nadine DHOLLANDE, lors des débats et lors du prononcé.
DÉBATS : A l'audience publique du 15 septembre 2005 devant Madame Ghislaine SILLARD, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial.
ARRÊT : Contradictoire, prononcé par Monsieur Jean-Bernard PIPERAUD, Président, à l'audience publique du 14 octobre 2005, date indiquée à l'issue des débats.
APPELANTE :
SA COFIDIS
[adresse], représentée par la SCP CASTRES, COLLEU, PEROT et LE COULS-BOUVET, avoués, assistée de Maître QUESNEL, avocat SCP DEPASSE, SINQUIN, DAUGAN, QUESNEL
INTIMÉE :
Madame X. veuve Y.
[adresse], représentée par la SCP GAUVAIN et DEMIDOFF, avoués, assistée de Maître SEVESTRE, avocat ((bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro XX/YY du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de [ville])
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] FAITS ET PROCÉDURE :
Selon acte du 23 juillet 1999, les époux Y.-X. ont souscrit solidairement auprès de la société COFIDIS une offre préalable de crédit utilisable par fractions assortie d'une carte de crédit intitulée « formule Libravou ». A la suite d'incidents de paiement, la déchéance du terme a été prononcée le 3 mars 2003.
Monsieur Y. est décédé le 10 mai 2003.
Madame Y. a fait opposition le 3 juillet 2003 à l'ordonnance d'injonction de payer rendue le 23 juin 2003 qui lui été signifiée le 1er juillet 2003.
Par jugement du 6 mai 2004, le tribunal a notamment :
* condamné Madame Y. à payer à la société COFIDIS la somme de 1.665,88 euros en capital avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 13 janvier 2003,
* accordé à Madame Y. un délai de grâce de 24 mois avec suspension de tout intérêt conformément au plan conventionnel de surendettement,
* ordonné l'exécution provisoire,
* mis les dépens à la charge de Madame Y. y inclus les frais de la procédure d'injonction de payer.
La société COFIDIS a relevé appel et aux termes de ses dernières conclusions du 30 juin 2005, auxquelles il est renvoyé s'agissant des moyens et arguments développés à l'appui de ses prétentions, demande à la Cour :
* de condamner Madame Y. à lui payer la somme de 4.726,97 euros avec les intérêts au taux contractuel sur la somme de 4.438,16 euros à compter du 3 mars 2003, avec intérêts au taux légal sur la somme de 288,81 euros à compter de la signification de l'ordonnance portant injonction de payer,
* de débouter Madame Y. de toutes ses demandes contraires, y compris au titre des délais de paiement sollicités,
* de la condamner au paiement de la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, outre aux entiers dépens recouvrés selon l'article 699 du même code.
[minute page 3] Appelante incidente, Madame Y. aux termes de ses dernières conclusions du 18 mai 2005, auxquelles il est renvoyé s'agissant des moyens et arguments développés à l’appui de ses prétentions, demande à la Cour :
* de condamner la société COFIDIS à lui payer la somme de 6.000 euros à titre de dommages et intérêts,
subsidiairement :
* de constater que la société COFIDIS ne justifie pas du montant de sa créance et de la débouter de ses demandes,
subsidiairement :
* de dire abusive et donc non écrite la clause prévoyant que le taux de l'intérêt suit le taux de base pratiqué par le prêteur,
* de dire qu'elle ne saurait être tenue au-delà du capital emprunté sous déduction de l'ensemble des intérêts et frais indûment payés, ceux-ci portant intérêts au taux légal à compter de leur date de perception,
subsidiairement :
* de dire la société COFIDIS déchue de tout droit à intérêts,
* de condamner la société COFIDIS à lui payer la somme de 1.250 euros sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991, outre aux entiers dépens recouvrés selon l'article 699 du même code.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE,
Considérant que c'est à tort que le premier juge au visa de la recommandation 94-02 du 17 décembre 1991 de la commission des clauses abusives et de l'article R. 311-6 du code de la consommation a réputé non écrites toutes les clauses figurant au verso du contrat de prêt dès lors qu'elles n'ont pas été signées des emprunteurs ;
Que certes, selon la recommandation, l'ensemble des clauses contractuelles doit précéder la signature des parties ; que cette recommandation est dictée cependant par le souci que le consommateur ait pu effectivement prendre connaissance des clauses sur lesquelles il n'a pas apposé sa signature ;
[minute page 4] Or, qu'outre le fait que l'article précité du code de la consommation n'exige pas que l'offre de crédit soit la copie servile des modèles-type dès lors qu'il contient sans ambiguïté les mentions exigées, force est de relever que figure expressément sous la signature des emprunteurs la mention selon laquelle ils « déclarent accepter l'offre préalable et, après en avoir pris connaissance, adhérer à toutes les conditions figurant au recto et au verso » ;
Que Madame Y. ne reprend d'ailleurs pas à son compte ce moyen en cause d'appel mais entend voir engagée la responsabilité de l'organisme de crédit pour manquement à son obligation de conseil en ce qu'il lui a accordé une avance de 25.000 francs (3.811,22 euros), ultérieurement portée à 4.600 euros alors qu'il connaissait sa situation ;
Que toutefois, les revenus du couple d'un montant de 15.470 francs (2.358,39 euros), uniquement obérés par des charges de 4.793 francs (730,69 euros) apparaissent, même avec trois enfants à charge, tout à fait compatibles avec le remboursement des mensualités de 750 francs (114,34 euros ) puis de 138 euros ;
Que d'ailleurs, le prêt a été honoré sans difficulté pendant plusieurs années ;
Que c'est encore vainement que Madame Y. se prévaut d'un défaut de justification de la créance fondé sur la méconnaissance par le prêteur des dispositions de l'article L. 311-9 alinéa 2 du code de la consommation relatif à l'information qu'il doit délivrer sur les conditions de renouvellement du contrat trois mois avant son échéance, alors que cette exception doit être soulevée en vertu de l'article L. 311-37 du même code dans les deux ans de l'événement qui lui a donné naissance, soit dans les deux ans du dernier renouvellement ; que les conclusions ont été prises le 18 mai 2005 et qu'une mise en demeure a été adressée à Madame Y. le 8 janvier 2003 de sorte qu'aucun renouvellement n'est intervenu postérieurement ;
Que c'est tout aussi vainement que Madame Y. invoque l'existence d'une clause abusive au motif que le taux de l'intérêt suit le taux de base pratiqué par le prêteur alors qu'il s'agit d'une clause inscrite dans les modèles-type annexés au décret du 24 mars 1998 codifiés sous l'article R. 311-6 du code de la consommation et qu'aux termes de l'article 1er paragraphe 2 de la directive du 5 avril 1993 sur les clauses abusives « les clauses contractuelles qui reflètent des dispositions législatives ou réglementaires impératives ne sont pas soumises aux dispositions de la directive »,
Qu'enfin, Madame Y. ne peut utilement prétendre à la déchéance du droit aux intérêts en invoquant le caractère abusif de certaines clauses et plus précisément de celle contenue dans l'article 9, offrant au prêteur des possibilités de résiliation du contrat non prévues au modèle-type [minute page 5] alors que la sanction d'une clause abusive est d'être réputée non écrite et que seules les irrégularités de l'offre préalable appellent la sanction de la déchéance du droit aux intérêts, pour autant qu'elles ne tombent pas sous le coup de la forclusion biennale applicable pour les contrats conclus avant l'entrée en vigueur de la loi du 11 décembre 2001 ;
Considérant que la société COFIDIS justifie de sa créance par la production de l'offre préalable, l'historique du compte et le décompte de celle-ci arrêtée au 3 mars 2003 et se présentant comme suit :
- mensualités impayées au 19 janvier 2004 : 827,99 euros
- capital restant dû : 3.610,17 euros
- indemnité légale (8 % du capital à échoir) : 288, 81 euros
soit : 4.726,97 euros
Que dès lors, Madame Y. sera condamnée à verser à la société COFIDIS la somme de 4.726,97 euros avec les intérêts au taux contractuel sur la somme de 4.438,16 euros (3.610,17 euros + 827,99 euros) à compter du 3 mars 2003, avec intérêts au taux légal sur la somme de 288,81 euros à compter de la signification de l'ordonnance portant injonction de payer, soit le 1er juillet 2003 ;
Considérant que la situation de Madame Y. qui ne dispose que du RMI justifie qu'il lui soit accordé les délais de paiement sollicités ; que la décision du tribunal sera sur ce point confirmée ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
RÉFORMANT le jugement déféré :
CONDAMNE Madame Y. à verser à la société COFIDIS la somme de 4.726,97 euros avec les intérêts au taux contractuel sur la somme de 4.438,16 euros à compter du 3 mars 2003, avec intérêts au taux légal sur la somme de 288,81 euros à compter du 1er juillet 2003 ;
LE CONFIRME du chef des délais de paiement ;
DIT n'y avoir lieu à indemnité au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
CONDAMNE Madame Y. aux entiers dépens recouvrés selon l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
LE GREFFIER. LE PRÉSIDENT.
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