CASS. CIV. 1re, 1er février 2005
CERCLAB - DOCUMENT N° 1993
CASS. CIV. 1re, 1er février 2005 : pourvoi n° 03-16935 ; arrêt n° 244
Extrait : « la cour d'appel qui, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, a constaté, d'une part qu'à la date à laquelle elle statuait le contrat litigieux initialement destiné aux particuliers n'était plus proposé qu'à des professionnels et, d'autre part, que preuve n'était pas apportée que, comme le prétendait l'UFC 38, le contrat eût été proposé à des particuliers postérieurement à l'introduction de l'instance, en a justement déduit que l'action de l'UFC 38 initialement recevable, était devenue sans objet relativement à la demande de suppression de clauses abusives et dépourvue de fondement quant à l'indemnisation du préjudice prétendument causé à l'intérêt collectif des consommateurs et que l'association devait être déboutée de sa demande en dommages-intérêts ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 1er FÉVRIER 2005
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : 03-16935. Arrêt n° 244.
DEMANDEUR à la cassation : Union fédérale des consommateurs Que Choisir de l'Isère (l'UFC 38)
DEFENDEUR à la cassation : Société Protection One France aux droits de la Société Européenne de Télésécurité (Société CET)
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que la Société européenne de télésécurité (CET), aux droits de laquelle se trouve la société Protection One France propose des contrats d'abonnement de télésurveillance pour la protection de locaux tant professionnels qu'à usage d'habitation ; que, par assignation en date du 14 avril 1998 l'UFC 38 a sollicité la suppression de 23 clauses du contrat litigieux sur le fondement de l'article L. 421-6 du Code de la consommation ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que l'UFC 38 fait grief à l'arrêt attaqué (Grenoble, 5 mai 2003) d'avoir déclaré l'action de l'association sans objet et de l'avoir déboutée de sa demande de dommages-intérêts au motif que la société qui avait changé de dénomination sociale proposait depuis le 1er septembre 2000 un nouveau type de contrat réservé aux professionnels et que le contrat critiqué n'était plus proposé aux consommateurs, alors :
1°/ qu'en déclarant sans objet l'action indemnitaire de l'association ainsi que sa demande en suppression de clauses abusives au prétexte que le contrat initialement destiné aux particuliers n'était plus proposé qu'à des professionnels dans sa nouvelle version établie en cours d'instance quand cette circonstance n'empêchait pas qu'un préjudice eût été porté à l'intérêt collectif des consommateurs du fait du contrat qui les concernait à l'origine, en raison de la transgression par celui-ci de la réglementation d'ordre public ayant pour but de les protéger, la cour d'appel a violé les articles L. 421-1 et L. 421-6 du Code de la consommation ;
2°/ qu'en déclarant sans objet les demandes de l'exposante pour la raison qu'il n'aurait pas été établi que les contrats initialement destinés aux particuliers leur auraient été effectivement proposés et que certains d'entre eux auraient dès lors été en cours d'exécution, la cour d'appel a violé les articles L. 421-1 et L. 421-6 du Code de la consommation ;
3°/ qu'en refusant de constater que le professionnel avait continué de proposer à des particuliers des contrats de télésurveillance comportant des clauses abusives au prétexte qu'il n'était pas établi que celui versé aux débats en date du 20 mars 2000 aurait été signé après que le particulier eut été démarché", ajoutant ainsi à la loi une condition qu'elle ne contient pas, la cour d'appel a violé l'article L. 132-1 du Code de la consommation ;
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Mais attendu que si les associations agréées de défense de consommateurs sont en droit, dans l'exercice de leur action préventive en suppression de clauses abusives devant les juridictions civiles, de demander la réparation notamment par l'octroi de dommages-intérêts, de tout préjudice direct ou indirect porté à l'intérêt collectif des consommateurs, la cour d'appel qui, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, a constaté, d'une part qu'à la date à laquelle elle statuait le contrat litigieux initialement destiné aux particuliers n'était plus proposé qu'à des professionnels et, d'autre part, que preuve n'était pas apportée que, comme le prétendait l'UFC 38, le contrat eût été proposé à des particuliers postérieurement à l'introduction de l'instance, en a justement déduit que l'action de l'UFC 38 initialement recevable, était devenue sans objet relativement à la demande de suppression de clauses abusives et dépourvue de fondement quant à l'indemnisation du préjudice prétendument causé à l'intérêt collectif des consommateurs et que l'association devait être déboutée de sa demande en dommages-intérêts ; que le moyen n'est pas fondé ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'association l'Union fédérale des consommateurs de l'Isère aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier février deux mille cinq.
ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyen produit par la SCP MASSE-DESSEN et THOUVENIN, avocat aux Conseils pour l'UFC 38
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré sans objet l'action d'une association de consommateurs (l'UNION FEDERALE DES CONSOMMATEURS DE L'ISERE, l'exposante) tendant à la suppression de clauses abusives insérées dans des contrats d'abonnement de télésurveillance ainsi qu'à la condamnation du professionnel (la CET, devenue la société PROTECTION ONE FRANCE) à réparer le préjudice causé à l'intérêt collectif des consommateurs, outre la publication de la décision à intervenir ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS QUE, avant son changement de dénomination sociale à compter du 1er septembre 2000, décidé par assemblée générale du 26 juin précédent, la CET avait proposé "avec la collaboration d'EUROP ASSISTANCE", un contrat d'abonnement de télésurveillance ; que ce contrat ne mentionnait pas qu'il aurait été uniquement réservé à des professionnels ; que, dans la désignation des locaux à surveiller, il était fait la distinction entre les locaux professionnels et les locaux à usage d'habitation ; qu'il était en effet fait mention de "pavillon", "appartement", "bureau", "commerce", "entrepôt", "usine", "chantier" ; qu'un document produit par la société POF pour les années 1997 à 1999 faisait apparaître qu'un certain nombre de contrats avaient été proposés à des particuliers ; que, cependant, aucun de ces contrats n'était versé aux débats ; que la société POF établissait qu'à compter de janvier 1998 avait été immatriculée au registre du commerce une société dénommée EUROP TELESECURITE, filiale commune d'EUROP ASSISTANCE et de la CET, ayant pour objet "la rentabilisation en France d'une activité de commercialisation de systèmes de télésurveillance, principalement auprès de particuliers" ; qu'en cours d'instance, la société POF avait versé aux débats un nouveau modèle de contrat établi en septembre 2000 au nom de PROTECTION ONE FRANCE, intitulé "contrat d'abonnement de télésurveillance avec option de location de matériel" ; qu'il était expressément mentionné que le contrat était exclusivement réservé aux professionnels agissant dans le cadre de leur activité ; que les locaux visés étaient les bureaux, commerces, entrepôts, usines et chantiers ; que la plaquette publicitaire de la société POF montrait que seule était visée une clientèle de professionnels ; que l'UFC 38 soutenait que des modèles de contrats litigieux étaient encore proposés aux consommateurs en mars 2000 ; que le contrat CET daté du 20 mars 2000, au nom de M. THONY, avait été souscrit initialement par l'entreprise TPI de Rives, M. THONY ayant émis le souhait de prendre la suite de ce contrat ; qu'il était établi que M. THONY n'avait pas été démarché par la CET ; qu'il ne pouvait être déduit de cette situation particulière que la CET avait continué à proposer des contrats de télésurveillance à des particuliers ; qu'il n'était pas versé aux débats d'autres contrats bien qu'en décembre 1999, par la voie de la revue QUE CHOISIR, l'UFC
38 eût lancé un appel aux consommateurs ; que les informations dont se prévalait l'UFC 38, tirées du site internet de PROTECTION ONE concernaient le groupe non la société française POF ; que ces divers éléments établissaient que le contrat litigieux n'était plus proposé aux consommateurs ; que l'action de l'association, recevable lors de la délivrance de l'assignation, était devenue sans objet (arrêt attaqué, p. 6, alinéas 2 à 8 ; p. 7, alinéas 1 à 3) ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
ALORS QUE, d'une part, une association agréée de défense des consommateurs qui agit en suppression de clauses abusives est en droit de demander devant les juridictions civiles la réparation, notamment par l'octroi de dommages et intérêts, de tout préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des consommateurs ; qu'en déclarant sans objet l'action indemnitaire de l'exposante ainsi que sa demande en suppression de clauses abusives au prétexte que le contrat initialement destiné à des particuliers n'était plus proposé qu'à des professionnels dans sa nouvelle version établie en cours d'instance, quand cette circonstance n'empêchait pas qu'un préjudice eût pu être porté à l'intérêt collectif des consommateurs du fait du contrat qui les concernait à l'origine, en raison de la transgression par celui-ci de la réglementation d'ordre public ayant pour but de les protéger, la Cour d'appel a violé les articles L.421-1 et L.421-6 du Code de la consommation ;
ALORS QUE, d'autre part, une association agréée de défense des consommateurs est en droit d'agir, aux fins de faire constater le caractère abusif de clauses insérées dans des contrats destinés aux consommateurs, en suppression desdites clauses ainsi qu'en dommages et intérêts ; qu'en déclarant sans objet les demandes de l'exposante en ce sens, pour la raison qu'il n'aurait pas été établi que les contrats initialement destinés aux particuliers leur auraient été effectivement proposés et que certains d'entre eux auraient dès lors été en cours d'exécution, la Cour d'appel a violé les articles L.421-1 et L.421-6 du Code de la consommation ;
ALORS QUE, enfin, les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat sont réputées non écrites ; qu'en refusant de constater que le professionnel avait continué de proposer à des particuliers des contrats de télésurveillance comportant des clauses abusives au prétexte qu'il n'était pas établi que celui versé aux débats, en date du 20 mars 2000, aurait été signé après que le particulier eut été démarché, ajoutant ainsi à la loi une condition qu'elle ne contient pas, la Cour d'appel a violé l'article L.132-1 du Code de la consommation .
- 5760 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Conditions - Contrats - Modèle de contrat
- 5764 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Conditions - Suppression volontaire - Clauses supprimées avant l’action - Droit antérieur à la loi du 17 mars 2014
- 5766 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Conditions - Suppression volontaire - Clauses supprimées en cours d’instance - Droit antérieur à la loi du 17 mars 2014
- 5770 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Procédure - Compétence
- 5779 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Effets de l’action - Réparation des préjudices - Préjudice collectif des consommateurs - Principes