CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CASS. CIV. 1re, 19 juin 2001

Nature : Décision
Titre : CASS. CIV. 1re, 19 juin 2001
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. civile 1
Demande : 99-13395
Date : 19/06/2001
Nature de la décision : Rejet
Mode de publication : Bulletins officiels
Décision antérieure : TI GRENOBLE, 29 octobre 1998
Numéro de la décision : 1085
Décision antérieure :
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 2041

CASS. CIV. 1re, 19 juin 2001 : pourvoi n° 99-13395 ; arrêt n° 1085

Publication : Bull. civ. I, n° 18,1 p. 116  ; JCP 2001. II. 10631, note Paisant

 

Extrait : « Attendu que le jugement, qui relève que la clause litigieuse, était rédigée en des termes susceptibles de laisser croire au consommateur qu’elle autorisait seulement la négociation du prix de la prestation, a exactement considéré qu’en affranchissant dans ces conditions le prestataire de service des conséquences de toute responsabilité moyennant le versement d’une somme modique, la clause litigieuse, qui avait pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, était abusive et devait être réputée non écrite selon la recommandation n° 82-04 de la Commission des clauses abusives ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 19 JUIN 2001

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : 99-13395. Arrêt n° 1085.

DEMANDEUR à la cassation : Société SA PRESS LABO SERVICE

DÉFENDEUR à la cassation : Madame X.

Président : M. Lemontey. Rapporteur : M. Bouscharain. Avocat général : M. Sainte-Rose. Avocat : la SCP Bachellier et Potier de la Varde.

 

Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que la société Press labo service, à laquelle Mme X. avait confié des pellicules en vue de leur développement et de leur tirage, n’a pas été en mesure de les restituer à celle-ci ; que cette dernière a recherché la responsabilité de sa cocontractante qui lui a opposé la clause limitant sa garantie, en pareil cas, à la remise d’une pellicule vierge et à son tirage gratuit, ou à leur contre-valeur, faute d’avoir déclaré que les travaux avaient une importance exceptionnelle « afin de faciliter une négociation de gré à gré » ; que le jugement attaqué (tribunal d’instance de Grenoble, 29 octobre 1998), considérant cette clause comme abusive, partant non écrite, a condamné la société Press labo service à indemnisation ;

 

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que le jugement, qui relève que la clause litigieuse, était rédigée en des termes susceptibles de laisser croire au consommateur qu’elle autorisait seulement la négociation du prix de la prestation, a exactement considéré qu’en affranchissant dans ces conditions le prestataire de service des conséquences de toute responsabilité moyennant le versement d’une somme modique, la clause litigieuse, qui avait pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, était abusive et devait être réputée non écrite selon la recommandation n° 82-04 de la Commission des clauses abusives ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyen produit par la SCP Bachellier et Potier de la Varde, Avocat aux Conseils, pour la société PRESS LABO SERVICE ;

 

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN     (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Le moyen reproche au jugement attaqué d'avoir condamné la Société PRESS LABO SERVICE à payer à Madame X. la somme de 2.000 Francs à titre de dommages et intérêts ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS QUE Madame X. a reçu lors du dépôt des films auprès de Monsieur DROZE ou de sa fille, un ticket client comportant au verso les mentions suivantes : ''Le présent reçu est délivré ... Dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle la pochette a été réclamée, la non-restitution ou la détérioration totale de tous clichés, films ou documents confiés donnera lieu à un dédommagement représenté par un film vierge et son traitement gratuit, ou par leur contre-valeur (avoir ou espèces), au choix du client. Cette disposition ne sera applicable que si la réclamation intervient dans un délai de trois mois à compter du dépôt initial ... Dans le cas de travaux ayant une importance exceptionnelle, il est recommandé d'en faire la déclaration lors de leur remise afin de faciliter une négociation de gré à gré'' ; qu'en premier lieu, il y a lieu d'examiner ''toutes les circonstances entourant la conclusion du contrat'' ; qu'à cet égard, le reçu remis à Madame X., mesure 16,5 centimètres de largeur sur 3,5 centimètres de hauteur ; qu'il comporte, au recto, des couleurs vives et les mentions manuscrites portées par le mandataire du laboratoire et non par le client ; qu'aucune indication ne figure sur le recto pour indiquer que d'importantes mentions figurent au verso du ticket ; que ce verso est rédigé de façon uniforme, les lettres étant de couleur gris clair sur fond blanc, mesurant un millimètre de hauteur et deux millimètres pour les lettres telles que p, b, q, d... ; qu'aucune indication n'est portée sur le verso du reçu pour indiquer qu'il contient une clause limitative de responsabilité et attirer l'attention du client sur cette clause contractuelle ; qu'en conséquence, cette clause est difficilement repérable et lisible, et escamotée à la vigilance d'un consommateur de bonne foi ; que cette clause apparaît particulièrement confuse ; que le mot de responsabilité n'est d'ailleurs pas employé ; que la mention ''dans le cas de travaux ayant une importance exceptionnelle, il est recommandé d'en faire la déclaration lors de leur remise afin de faciliter une négociation de gré à gré'' peut induire le consommateur en erreur, en laissant penser qu'il s'agit du prix de la prestation de travaux ayant un caractère exceptionnel qui peut être négociée ; qu'ainsi cette clause apparaît difficilement compréhensible en l'absence d'indications sur son objet et sa nature ; que le professionnel doit prouver qu'il a porté à la connaissance du consommateur qu'il avait la possibilité d'écarter la clause limitative de responsabilité (V. en ce sens, CA AIX EN PROVENCE, 11è Chambre, 20 septembre 1995 ; qu'à cet égard, il doit être souligné que ce reçu n'est remis au client qu'après dépôt des films, placés dans la pochette destinée au laboratoire ; que le client n'a donc aucun délai préalablement à la remise des films pour prendre connaissance de cette clause, qu'aucun élément n'établit que son attention ait été attirée sur ce point, telle qu'une simple case à cocher sur la pochette portant le choix entre régime de responsabilité de droit commun ou régime de responsabilité pour travaux exceptionnels ; que cette clause limitative de responsabilité induit un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; qu'elle porte, en effet, sur les obligations principales du contrat de développement photographique, en affranchissant, en contrepartie d'une somme modique représentant la valeur du produit facturée par le fabricant de pellicules, le prestataire de sa responsabilité pour non exécution de la totalité de ses prestations (révélation, développement, tirage et restitution des films) ; qu'ainsi, la SA PRESS LABO SERVICE ne supporte aucune conséquence financière au titre de l'inexécution de la prestation constitutive d'une valeur ajoutée qu'elle s'était engagée à fournir ; qu'il ne découle de cette limitation de responsabilité aucune contrepartie ou avantage pour le consommateur, que le prestataire peut, en application de cette clause, s'abriter derrière une quasi-irresponsabilité au regard de sa propre prestation, ainsi que le soutient la demanderesse ; qu'ainsi la clause limitative de responsabilité insérée dans ses contrats de développement photographique par la SA PRESS LABO SERVICE, au regard de la matérialité du support de la clause, de ses conditions de notification au client et de la preuve de cette notification, du déséquilibre significatif qu'elle introduit dans les relations contractuelles est constitutive d'une clause abusive au sens de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

ALORS QUE d'une part aucune disposition légale ou réglementaire n'impose un mode de rédaction particulier des clauses limitatives de responsabilité figurant sur les reçus remis au consommateur ; qu'il suffit que la clause soit lisible ; qu'ainsi en considérant qu'était abusive à raison de la matérialité de son support la clause figurant en caractères suffisamment lisibles au verso du reçu, faute pour celui-ci d'attirer suffisamment l'attention du client sur la présence de cette clause, le Tribunal a violé l'article L. 132-1 du Code de la Consommation ;

ALORS QUE d'autre part en évoquant un dédommagement forfaitaire en cas de perte ou détérioration et en ajoutant que le déposant est invité à faire la déclaration des travaux d'une importance particulière pour faciliter une négociation de gré à gré, la clause litigieuse envisage nécessairement l'indemnisation du préjudice causé au déposant ; qu'en jugeant cette rédaction ambiguë quant à son objet, le Tribunal a violé l'article 1134 du Code Civil et l'article L. 132-1 du Code de la Consommation ;

ALORS QUE d'autre part encore il suffit pour que la clause relative à l'indemnisation de gré à gré en cas de remise de travaux d'une importance exceptionnelle puisse produire effet que le client fasse sa déclaration avant l'envoi des films au laboratoire pour le développement ; qu'ainsi en considérant que cette clause était dénuée de portée faute d'être portée à la connaissance du client avant dépôt des films dans la pochette, le Tribunal a violé l'article L. 132-1 du Code de la Consommation ;

ALORS QU'enfin la clause réservant au client la faculté de déclarer les travaux d'une importance exceptionnelle lui ouvrant la possibilité d'une indemnisation négociée de son préjudice en cas de vol ou détérioration des films rétablit l'équilibre entre les droits et obligations des parties au contrat ; qu'en faisant abstraction de cette faculté pour déclarer abusive la clause limitative de responsabilité, le Tribunal a violé l'article L. 132-1 du Code de la Consommation .