CA BORDEAUX (1re ch. civ. sect. B), 29 janvier 2009
CERCLAB - DOCUMENT N° 2331
CA BORDEAUX (1re ch. civ. sect. B), 29 janvier 2009 : RG n° 07/03917
Publication : Jurica
Extrait : « Il ne peut être fait grief à la SA Médiatis de n'avoir pas accompagné chaque augmentation d'ouverture de crédit supérieure au crédit initial de 1.500 euros d'une nouvelle offre préalable dès lors que le contrat fixait à 12.500 euros le montant maximum autorisé et permettait aux époux X., dans la limite de cette somme, jamais atteinte en l'espèce, de bénéficier sous réserve de l'accord du prêteur, d'une augmentation du crédit initial.
De plus, le contrat d'ouverture du crédit par le découvert en compte signé par les époux X. date du 14 août 2002. Or l'article L. 311-9 du Code de la consommation dans sa rédaction antérieure à la loi du 28 janvier 2005 précisait que l'offre préalable en cas d'augmentation du crédit consenti n'était obligatoire que pour le contrat initial alors qu'elle imposait dorénavant l'obligation de l'offre préalable à la fois pour le contrat initial et pour toute augmentation du crédit consenti. En vertu de l'article 7 de la loi du 28 janvier 2005, ces dispositions sont entrées en vigueur six mois après la date de sa promulgation et se sont appliquées aux contrats en cours et à leur reconduction à partir de cette promulgation. Cependant, la déchéance du terme concernant cette ouverture de crédit a été prononcée le 12 juin 2005 donc avant la mise en vigueur de la loi nouvelle aux contrats en cours n'imposant, donc, pas une offre préalable pour toute augmentation de crédit. […] Il n'y a, donc, pas lieu de prononcer la déchéance du droit aux intérêts, celle-ci n'étant pas encourue au regard des dispositions de l'article 311-9 du Code de la consommation.
2/ « Madame X. se prévaut de l'existence d'une clause abusive en raison de la fixation dans le contrat du double plafond du découvert global utilisé et de la fraction disponible. Il convient, cependant, d'observer que l'intéressée ne sollicite pas que soit réputée non écrite la dite clause mais que le contrat soit déclaré irrégulier au regard des dispositions de l'article 311-9 du Code de la consommation. Madame X. ne justifie pas en quoi cette clause est abusive alors qu'elle est ici reconnue valable et conforme aux dispositions de l'ancien article 311-9 du Code de la consommation respectées par la SA Médiatis, et aux dispositions de l'article 311-37 du même Code. »
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE SECTION B
ARRÊT DU 29 JANVIER 2009
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 07/03917. Nature de la décision : AU FOND. Décision déférée à la cour : jugement rendu le 6 juin 2007 (R.G. n° 11-06-000393) par le Tribunal d'Instance de LIBOURNE suivant déclaration d'appel du 26 juillet 2007.
APPELANTE :
SA MEDIATIS,
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [adresse], Représentée par la SCP Sophie LABORY-MOUSSIE et Eric ANDOUARD, Avoués Associés à la Cour, et assistée de Maître Alexandra BAUDOUIN, membre de la SCP Cécile et Georges TONNET et Alexandra BAUDOUIN, Avocats Associés au barreau de BORDEAUX
INTIMÉE :
Madame Y. veuve X.
demeurant [adresse], Représentée par la SCP Luc BOYREAU et Raphaël MONROUX, Avoués Associés à la Cour, et assistée de Maître Christophe GUILLAUMEAU, Avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 910 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 3 décembre 2008 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Patrick Gaboriau, président chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : [minute Jurica page 2] Monsieur Patrick GABORIAU, Président, Monsieur Pierre-Louis CRABOL, Conseiller, Monsieur Michel BARRAILLA, Conseiller,
Greffier lors des débats : Monsieur Bernard OLIVIER, Adjoint d'Administration Principal assermenté faisant fonction de Greffier,
ARRÊT : Contradictoire. Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Selon offre préalable du 14 août 2002, la SA Médiatis a accordé à M. et Mme X. une ouverture de crédit par découvert en compte reconstituable.
A la suite du non-remboursement de plusieurs échéances, la déchéance du terme a été prononcée le 12 juin 2005 à l'encontre des deux débiteurs.
Sur requête de la SA Médiatis le président du tribunal d'instance de Libourne a rendu le 23 décembre 2005 une ordonnance portant injonction de payer à l'encontre de monsieur et madame X.
M. X. est décédé le 27 avril 2006.
Mme Y. veuve X. a formé opposition à l'encontre de l'ordonnance d'injonction de payer le 18 août 2006, suite à une saisie-attribution dont elle a fait l'objet le 21 juillet 2006.
Devant le juge d'instance de Libourne, la SA Médiatis a sollicité la condamnation de madame X. au paiement de la somme de 8.895,22 euros dont 8.305,96 euros portant intérêt au taux conventionnel de 15,29 % l'an depuis le 13 juillet 2005.
Elle faisait valoir à l'appui de ses prétentions et en réponse à l'argumentation de madame X. qui soulevait la forclusion de son action à titre principal et subsidiairement la déchéance du droit aux intérêts, en fin très subsidiairement les plus larges délais de paiement :
- que le premier incident de paiement non régularisé établissant la défaillance de l'emprunteur et point de départ du délai de forclusion prévu par l'article L. 311-37 du Code de la consommation ne pouvait être constitué par le dépassement de la fraction disponible (1.500 euros selon l'offre) mais seulement par le dépassement du montant maximum du découvert autorisé (12.500 euros selon l'offre) qui n'a jamais été dépassé,
- que la clause instituant un double plafond (montant maximum autorisé et fraction disponible) ne pouvait être assimilée à une augmentation du crédit initial (1.500 euros à 12.500 euros) sans que soit prévu l'acceptation par l'emprunteur d'une nouvelle offre crédit, clause qui serait dès lors considérée comme abusive et réputée non écrite,
- qu'elle a satisfait à son obligation d'information annuelle sur la reconduction du contrat par [minute Jurica page 3] l'envoi des relevés de compte qui trois mois avant la date anniversaire du contrat comportaient l'indication de la reconduction tacite de l'ouverture de compte,
- qu'elle ne pouvait, dès lors, encourir la déchéance du droit aux intérêts, madame X. de plus n'ayant pas contesté les informations portées sur ces relevés de compte et se trouvant forclose dans sa demande en déchéance des intérêts.
- qu'enfin madame X. ne justifiait pas d'une situation financière délicate de nature à nécessiter à son bénéfice l'application des dispositions de l'article 1244-1 du Code civil.
Par jugement du 6 juin 2007, le tribunal d'instance de Libourne faisant droit à l'argumentation de madame X. :
- a considéré que la mention « Le montant maximum du découvert autorisé par le prêteur est fixé à 12.500 euros » était une condition générale du contrat de prêt sans réelle portée pour l'exécution du contrat, qui n'avait vocation à s'appliquer qu'en l'absence de clause particulière, celle-ci étant constituée par la mention « Le montant que vous choisissez dans cette limite constitue la fraction disponible du découvert. Cette fraction disponible est de 1.500 euros »,
- a constaté après analyse de l'historique du compte que le découvert de 1.500 euros consenti par la SA Médiatis avait été dépassé dès novembre 2002 sans jamais avoir été régularisé par des versements ultérieurs,
- en a déduit qu'en application des dispositions de l'article L. 311-37 du Code de la consommation, l'action de la SA Médiatis était atteinte par la forclusion.
Dans son dispositif, le tribunal a :
- déclaré l'opposition formée par Mme X. recevable,
- mis à néant l'ordonnance d'injonction de payer du 23 décembre 2005,
- déclaré l'action de la SA Médiatis à l'encontre de Mme X. forclose conformément aux dispositions de l'article L. 311-37 du Code de la consommation,
- condamné la SA Médiatis à payer à Mme X. une somme de 500 euros pour frais de procédure,
- condamné la SA Médiatis aux dépens.
Par déclaration du 26 juillet 2007, la SA Médiatis a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Par dernières conclusions signifiées et déposées au greffe de la cour le 13 mars 2008 pour l'appelante, le 29 février 2008 pour l'intimée, les parties font valoir devant la cour les mêmes demandes étayées par les mêmes argumentations que devant le premier juge.
[minute Jurica page 4] La procédure a été clôturée par ordonnance du magistrat chargé de la mise en état en date du 19 novembre 2008.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
* Sur la forclusion de l'action de la SA Médiatis :
Sur l'offre préalable figurent les mentions suivantes relatives aux conditions de l'ouverture du crédit par découvert en compte :
« Le montant maximum du découvert autorisé par le prêteur est fixé à 12.500 euros. Le montant que vous choisissez dans cette limite constitue la fraction disponible du découvert. Cette fraction disponible est de 1.500 euros ».
Concernant la durée de l'ouverture de crédit : « 1 an renouvelable, 3 mois avant la date anniversaire de votre contrat, le prêteur vous informera des conditions de reconduction dudit contrat. Dans l'hypothèse où vous ne souhaiteriez plus bénéficier de cette offre de crédit, vous devrez en aviser le prêteur par lettre recommandée avec accusé de réception devant être reçue par le prêteur au plus tard le jour anniversaire de votre contrat ».
Concernant le coût total du crédit, il est constitué un tableau portant l'encours du compte par tranches successives de 0 euro à 12.500 euros, les mensualités de remboursement correspondantes et le TEG applicable.
Au vu de ce qui précède, il convient de relever :
qu'au termes de l'article L. 311-37 du Code de la consommation les actions en paiement doivent être engagées dans le délai de deux ans de l'événement qui leur a donné naissance,
que le point de départ du délai de forclusion biennal dans le cas d'une ouverture de crédit d'un montant déterminé et reconstituable, assorti d'une obligation de remboursement à échéances convenues, court à compter du moment où le montant du dépassement maximum convenu n'est pas régularisé, cette situation constituant un incident de paiement qui caractérise la défaillance de l'emprunteur,
qu'ainsi le seul dépassement du découvert utile ne manifeste pas la défaillance du débiteur et ne saurait faire courir le délai de forclusion de l'article L. 311-37 du Code de la consommation
que de plus considérer que ce crédit n'a été octroyé qu'à concurrence de 1.500 euros rendrait inutile le tableau du coût total et d'amortissement mensuel du crédit selon les sommes utilisées et jusqu'à 12.500 euros et rendrait également inutile la mention relative aux conditions de l'ouverture du crédit dont le montant maximum du découvert autorisé par le prêteur est fixé à 12.500 euros.
Qu'en l'espèce ce montant maximum du découvert autorisé de 12.500 euros n'a jamais été atteint ce qui n'est ni contesté ni contestable au regard des pièces justificatives fournies.
Dès lors l'action en paiement de la SA Médiatis n'apparaît pas forclose.
* Sur l'absence d'offre préalable pour toute augmentation de crédit :
Il ne peut être fait grief à la SA Médiatis de n'avoir pas accompagné chaque augmentation d'ouverture de crédit supérieure au crédit initial de 1.500 euros d'une nouvelle offre préalable dès lors que le contrat fixait à 12.500 euros le montant maximum autorisé et permettait aux époux X., dans la limite de cette somme, jamais atteinte en l'espèce, de [minute Jurica page 5] bénéficier sous réserve de l'accord du prêteur, d'une augmentation du crédit initial.
De plus, le contrat d'ouverture du crédit par le découvert en compte signé par les époux X. date du 14 août 2002.
Or l'article L. 311-9 du Code de la consommation dans sa rédaction antérieure à la loi du 28 janvier 2005 précisait que l'offre préalable en cas d'augmentation du crédit consenti n'était obligatoire que pour le contrat initial alors qu'elle imposait dorénavant l'obligation de l'offre préalable à la fois pour le contrat initial et pour toute augmentation du crédit consenti.
En vertu de l'article 7 de la loi du 28 janvier 2005, ces dispositions sont entrées en vigueur six mois après la date de sa promulgation et se sont appliquées aux contrats en cours et à leur reconduction à partir de cette promulgation.
Cependant, la déchéance du terme concernant cette ouverture de crédit a été prononcée le 12 juin 2005 donc avant la mise en vigueur de la loi nouvelle aux contrats en cours n'imposant, donc, pas une offre préalable pour toute augmentation de crédit.
En l'espèce, la SA Médiatis a respecté les anciennes dispositions de l'article L. 311-9 du Code de la consommation en informant monsieur et madame X. de la reconduction annuelle de l'offre préalable de crédit par l'envoi de relevés de compte (relevés des 12 mai 2003, 12 mai 2004, 12 mai 2005) comportant toutes les mentions nécessaires à la reconduction du crédit permanent accordé (montant du plafond, réserve disponible, coupon de demande de chèque, intérêts du crédit, montant du prélèvement).
Monsieur et madame X. n'ont jamais contesté cette reconduction de l'ouverture du crédit ou des mentions qui figuraient sur ces relevés si ce n'est pour madame X. par conclusions devant le tribunal d'instance de Libourne.
Il n'y a, donc, pas lieu de prononcer la déchéance du droit aux intérêts, celle-ci n'étant pas encourue au regard des dispositions de l'article 311-9 du Code de la consommation.
* Sur l'existence d'une clause abusive :
Madame X. se prévaut de l'existence d'une clause abusive en raison de la fixation dans le contrat du double plafond du découvert global utilisé et de la fraction disponible.
Il convient, cependant, d'observer que l'intéressée ne sollicite pas que soit réputée non écrite la dite clause mais que le contrat soit déclaré irrégulier au regard des dispositions de l'article 311-9 du Code de la consommation.
Madame X. ne justifie pas en quoi cette clause est abusive alors qu'elle est ici reconnue valable et conforme aux dispositions de l'ancien article 311-9 du Code de la consommation respectées par la SA Médiatis, et aux dispositions de l'article 311-37 du même Code.
Au vu de l'ensemble de ces éléments il y a lieu de réformer la décision déférée en toutes ses dispositions, de débouter madame X. de son opposition recevable mais mal fondée et de la condamner à payer à la SA Médiatis la somme qu'elle ne conteste pas de 8.895,22 euros.
* Sur les délais de paiement sollicités par madame X. :
Au regard des pièces justificatives produites par madame X., il apparaît que sa [minute Jurica page 6] situation financière est gravement obérée et que ses capacités actuelles de remboursement nécessitent des délais qu'en application des dispositions de l'article 1244-1 du Code civil il convient de lui accorder en reportant les effets de la présente décision à deux ans à compter de la date de l'arrêt.
* Sur l'application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile :
Compte tenu de la nature de l'affaire il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Madame X. qui succombe supportera les dépens d'appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Vu les articles 311-8 et suivants, 311-37 du Code de la consommation,
Vu l'article 1244-1 du Code civil,
Réforme la décision déférée en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau :
Déclare l'opposition formée par Mme Y. veuve X. à l'encontre de l'injonction de payer du 23 décembre 2005 recevable mais mal fondée,
La déboute de cette opposition,
Condamne Mme X. à payer à la SA Médiatis la somme de 8.895,22 euros avec intérêts au taux conventionnel de 15,29 % sur celle de 8.305,96 euros depuis le 13 juillet 2005 jusqu'au jour du règlement effectif,
Reporte et suspend les effets de la présente décision à deux ans à compter de la date de l'arrêt,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamne Mme X. aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Signé par Monsieur Patrick GABORIAU, Président, et par Madame Marceline LOISON, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le Magistrat signataire.
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