CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 12 février 2009
CERCLAB - DOCUMENT N° 2344
CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 12 février 2009 : RG n° 07/07560
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « En matière de crédits utilisables par fractions, si l'article L. 311-9 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable au contrat, ne pose l'obligation d'une offre préalable que pour le contrat initial, la dispense qui en résulte pour le prêteur de soumettre à l'acceptation de l'emprunteur une nouvelle offre préalable, lors d'un renouvellement du contrat initial, ne saurait s'étendre aux ouvertures de crédits qui emportent une augmentation du montant du crédit et/ou du taux du crédit pratiqué ; en effet, celles-ci doivent s'analyser en l'octroi d'un crédit complémentaire lequel constitue un nouveau contrat sur lequel le consommateur doit pouvoir s'exprimer en toute connaissance de cause, il doit donc être conclu dans les termes d'une offre préalable répondant aux exigences des dispositions des articles L. 311-9-1 et L. 311-10 du même Code. Au surplus, l'acceptation ne peut être tacite mais doit résulter d'un acte univoque de l'emprunteur. »
2/ « L'examen de l'historique du compte produit (pièce 4) permet de constater que ce seuil a été atteint et dépassé en juillet 2004 par l'effet d'un achat d'un montant de 1.600 € pour atteindre à cette date la somme de 4.534,47 € et ne plus par la suite redescendre en deçà du seuil initialement convenu par l'effet de versements du débiteur ou d'une offre régulière dans les termes des textes précités. En effet, le nouveau plafond de 6.040 €, prévu à l'avenant du 15 septembre 2005, n'a pu avoir d'effet régulateur puisqu'à la date de sa signature le montant de l'utilisation était déjà dépassé pour s'élever à la somme de 9.364,06 € ».
COUR D’APPEL DE DOUAI
HUITIÈME CHAMBRE PREMIÈRE SECTION
ARRÊT DU 12 FÉVRIER 2009
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 07/07560. Jugement (N° 07-000542) rendu le 18 octobre 2007 par le Tribunal d'Instance de BOULOGNE SUR MER
APPELANTE :
SA LASER COFINOGA exerçant sous l'enseigne COFINOGA
agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, ayant son siège social [adresse], Représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la Cour, Assistée de la SCP REMBOTTE, avocats au barreau de BOULOGNE SUR MER
INTIMÉS :
Monsieur X.
demeurant [adresse], N'a pas constitué avoué.
Madame Y. épouse X.
demeurant [adresse], N'a pas constitué avoué.
DÉBATS : A l'audience publique du 5 novembre 2008, tenue par Madame VEJUX magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
[minute Jurica page 2] GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame DESBUISSONS
COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ : M. CHARBONNIER, Président de chambre, Madame CONVAIN, Conseiller, Madame VEJUX, Conseiller
ARRÊT : RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 12 février 2009 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par M. CHARBONNIER, Président, et Madame DESBUISSONS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu le jugement contradictoire rendu par le tribunal d'instance de Boulogne-sur-Mer le 18 octobre 2007 ;
Vu l'appel formalisé par la société anonyme COFINOGA le 27 novembre 2007 ;
Vu les conclusions déposées au greffe de la cour le 18 mars 2008 par la société COFINOGA ;
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Par acte d'huissier en date du 29 juin 2007, la société anonyme de COFINOGA a assigné Monsieur X. et Madame Y. épouse X. en paiement du solde d'une ouverture de crédit utilisable par fractions consentie le 17 novembre 1999 devant le tribunal d'instance de Boulogne-sur-Mer lequel, après avoir constaté la forclusion des demandes de cette société, a déclaré son action irrecevable.
La société COFINOGA soutient tout d'abord que le mécanisme du découvert maximum autorisé et de la fraction disponible est parfaitement légal et conforme aux dispositions de l'article L. 311-9 du Code de la consommation et que son contrat est exempt de toute clause abusive ; ensuite qu'elle n'est pas tenue à proposer une nouvelle offre de crédit à l'emprunteur mais aussi que sa créance n'est pas forclose et qu'en tout état de cause la sanction de l'irrégularité qui pourrait être soulevée serait au plus la déchéance du droit aux intérêts.
Monsieur X. et Madame Y. épouse X. ont été assignés le 25 mars 2008 en l'étude de l'huissier après vérification du domicile et réassignés le 15 mai 2008 pour Madame Y. épouse X. à sa personne, pour Monsieur X. à la personne de son épouse présente au domicile. Monsieur X. et Madame Y. épouse X. n'ont pas constitué avoué ; les conclusions précitées du 18 mars 2008 ainsi que le bordereau de communication de pièces leur ont été signifiée lors de la première assignation. Il sera statué par arrêt de défaut par application de l'article 474 du Code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 25 septembre 2008 ; l'affaire est venue à l'audience de plaidoirie du 5 novembre 2008 date à laquelle elle a été mise en délibéré au 12 février 2009.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE
En la forme, sur les pouvoirs et l'office du juge, il sera rappelé qu'aux termes de l'article 12 du Code de procédure civile, il est fait obligation à ce dernier de trancher le litige non seulement conformément aux règles de droit qui lui sont applicables mais également, au besoin, après avoir donné ou restitué leur exacte qualification juridique aux faits ou aux actes litigieux sans s'arrêter aux [minute Jurica page 3] dénominations que les parties en auraient proposée ; de plus, cette obligation pour le juge d'asseoir sa décision sur un raisonnement juridique adéquat doit également se lire à la lumière de l'article 125 du Code de procédure civile qui fait obligation au juge de relever d'office les fins de non recevoir lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public.
Le Code de la consommation français intègre dans le droit national [diverses directives européennes] : les directives n° 87/102 le 22 décembre 1986 (modifiée par les directives n° 90/88 du 22 février 1990 et n° 98/7 du 16 février 1998) et 93/13 du 5 avril 1993 relatives respectivement aux crédits à la consommation et aux clauses abusives. La Cour de Justice des Communautés Européenne a par ailleurs été amenée à préciser à plusieurs reprises dans l'un et l'autre de ces domaines, notamment dans les arrêts des 4 octobre 2007 (Franfinance, KparK/ épx Rampion) et 4 mars 2004 (COFINOGA/Sachithanathan) en matière de crédit à la consommation ou les arrêts du 27 juin 2000 (Oceano Grupo) ou du 21 novembre 2002 (Cofidis/Fredout) que le but recherché par ces directives est une meilleure protection des consommateurs par l'imposition de certaines conditions valables pour toutes les formes de crédits ; cet objectif, double, doit donc tendre non seulement à la création d'un marché commun du crédit mais aussi à assurer la protection du consommateur. En raison des risques liés à l'ignorance de ses droits ou aux difficultés à les exercer dans laquelle le consommateur peut se trouver et afin de permettre l'émergence de ce marché unique et concurrentiel, la Cour a été amenée à préciser que pour que ce double objectif soit effectivement atteint il convient de permettre au juge national d'appliquer d'office les dispositions transposant en droit interne les directives précitées. De ce double objectif, la protection du consommateur et le marché commun et concurrentiel étant d'égale importance, il se déduit également qu'il n'y a plus lieu en droit interne de distinguer selon que ces dispositions relèvent d'un ordre public de direction ou de protection.
En matière de crédits utilisables par fractions, si l'article L. 311-9 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable au contrat, ne pose l'obligation d'une offre préalable que pour le contrat initial, la dispense qui en résulte pour le prêteur de soumettre à l'acceptation de l'emprunteur une nouvelle offre préalable, lors d'un renouvellement du contrat initial, ne saurait s'étendre aux ouvertures de crédits qui emportent une augmentation du montant du crédit et/ou du taux du crédit pratiqué ; en effet, celles-ci doivent s'analyser en l'octroi d'un crédit complémentaire lequel constitue un nouveau contrat sur lequel le consommateur doit pouvoir s'exprimer en toute connaissance de cause, il doit donc être conclu dans les termes d'une offre préalable répondant aux exigences des dispositions des articles L. 311-9-1 et L. 311-10 du même Code. Au surplus, l'acceptation ne peut être tacite mais doit résulter d'un acte univoque de l'emprunteur.
Par ailleurs, aux termes de l'article L. 311-37 du Code de la consommation dans sa rédaction applicable lors de la conclusion du contrat, les actions nées d'un contrat de crédit à la consommation doivent être engagées, à peine de forclusion, dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance ; s'agissant d'une action en paiement, le point de départ du délai de forclusion est fixé à la date de l'exigibilité des sommes dont le recouvrement est poursuivi. Plus précisément, dans le cas d'une ouverture de crédit, d'un montant déterminé et reconstituable, assortie d'une obligation de remboursement à échéances convenues, le point de départ de ce délai se situe au moment où le montant du dépassement maximum initialement convenu n'est pas régularisé, cette situation constituant un incident caractérisant la défaillance de l'emprunteur.
2. Au cas d'espèce, l'offre du 11 novembre 1999 est relative à un crédit utilisable par fractions assortie d'une carte de crédit et remboursable par échéances mensuelles fixées en fonction du solde dû, le taux du crédit étant lui-même révisable suivant les variations en plus ou en moins du taux de base que le prêteur applique aux opérations de même nature.
Des mentions relatives à l'utilisation du compte figurant aux conditions générales au verso de l'offre (§ 4) comme des stipulations particulières de l'offre du 17 novembre 1999 il apparaît que le montant maximum du découvert initialement consenti était de 20.000 Francs soit 3.048,98 €.
[minute Jurica page 4] L'examen de l'historique du compte produit (pièce 4) permet de constater que ce seuil a été atteint et dépassé en juillet 2004 par l'effet d'un achat d'un montant de 1.600 € pour atteindre à cette date la somme de 4.534,47 € et ne plus par la suite redescendre en deçà du seuil initialement convenu par l'effet de versements du débiteur ou d'une offre régulière dans les termes des textes précités. En effet, le nouveau plafond de 6.040 €, prévu à l'avenant du 15 septembre 2005, n'a pu avoir d'effet régulateur puisqu'à la date de sa signature le montant de l'utilisation était déjà dépassé pour s'élever à la somme de 9.364,06 €.
Ce dépassement du plafond autorisé constitue, au sens des textes précités et de la jurisprudence subséquente, un incident de paiement manifestant la défaillance de l'emprunteur, point de départ du délai de forclusion. Or l'assignation ayant été délivrée le 29 septembre 2007, il y a lieu de constater l'irrecevabilité de l'action de la société COFINOGA par l'effet de la forclusion.
Le jugement sera confirmé
3. La société COFINOGA qui succombe en appel dans ses prétentions, supportera la charge des dépens de cette instance.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire ;
Confirme le jugement ;
Condamne la sa COFINOGA aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
A. DESBUISSONS P. CHARBONNIER
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