TJ PARIS (5e ch. 1re sect.), 25 février 2025
CERCLAB - DOCUMENT N° 24421
TJ PARIS (5e ch. 1re sect.), 25 février 2025 : RG n° 22/06333
Publication : Judilibre
Extrait : « Sur la disparition du contrat de prestation AXECIBLES, Monsieur X. se prévaut de sa nullité pour un manquement de la société à son obligation « précontractuelle d’information déterminante » portant sur les caractéristiques essentielles que sont la prestation, le prix et les modalités de paiement, les conditions particulières de la vente et de l’exécution des services, entre autres et pour dol, ainsi que de sa résolution pour inexécution d’une condition essentielle par son co-contractant fournisseur.
Or, d’une part, la société AXECIBLES n’a pas été appelée dans la cause par Monsieur X. qui ne produit pas même le contrat litigieux conclu avec cette dernière, étant précisé que ce dernier ne peut pas valablement contester la livraison du matériel puisqu’en signant les documents contractuels et notamment la « CONFIRMATION DE LIVRAISON », il a confirmé avoir réceptionné l’intégralité du matériel loué et son état de fonctionnement et qu’il a payé les loyers y afférents pendant un an et demi, d’avril 2019 à octobre 2020.
D’autre part, Monsieur X. ne peut pas se prévaloir des dispositions du code de la consommation dès lors qu’aux termes de l’article L. 221-3 de ce code de la consommation, les dispositions qu’il invoque applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, ne sont étendues qu’aux contrats conclus entre deux professionnels hors établissement définis à l’article L. 221-1-I-2° du code de la consommation, dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq.
Tel n’est pas le cas en l’espèce compte tenu du schéma contractuel litigieux et du fait que Monsieur X. ne produit aucun élément prouvant que les contrats de prestation et de location financière ont été conclus « en la présence physique simultanée des parties » comme exigé par l’article L. 221-1-I-2° du code de la consommation, ou établissant le nombre de salariés qu’il emploie. De plus, il est manifeste que le matériel litigieux (site web) lui est indispensable à l’exercice de son activité d’avocat et était destiné à son usage professionnel dans le cadre de son activité principale.
La première condition de l'article 1186 du code civil tenant à la disparition du contrat de prestation AXECIBLES n'est donc pas remplie. »
2/ « Selon l’article 1171 du code civil, dans un contrat d’adhésion, toute clause qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite et l’appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix à la prestation.
L’article 10 du contrat de location financière stipule que « le Bailleur peut résilier le Contrat à effet immédiat par courrier recommandé adressé au Locataire en cas de retard de paiement de 3 loyers mensuels consécutifs ou non, ou d’un loyer trimestriel ». L’article 11 « CONSEQUENCE D’UNE TERMINAISON ANTICIPEE DU CONTRAT POUR TOUS MOTIFS : RESILIATION, RESOLUTION OU PRONONCE DE CADUCITE » stipule que « Le Locataire sera tenu de payer le Bailleur le prix du Contrat, c’est-à-dire les loyers échus impayés et les loyers à échoir jusqu’au terme prévu du Contrat pour la période contractuelle en cours, et à titre de compensation du préjudice subi, les intérêt de retard de paiement éventuels restant dus ainsi qu’une somme égale à 10% du montant des loyers à échoir pour la période contractuelle en cours. »
Le contrat de location financière litigieux, bien qu’imprimé à l’avance et comportant un ensemble de clauses non négociables déterminées en amont par la SAS GRENKE LOCATION, ne peut pas être qualifié de contrat d’adhésion au sens de l’article 1171 précité, dès lors qu’il existe une rencontre de volonté entre les parties au contrat qui se caractérise par la possible négociation du montant du loyer, de la périodicité du loyer, de la durée totale du contrat de location, du choix du matériel et du fournisseur.
En tout état de cause, d’une part, le mécanisme d’un contrat de location financière implique que la société de financement, à la demande du locataire, acquiert le matériel pour le donner en location, de sorte que l’obligation du bailleur consistant à mettre le matériel loué à disposition du locataire intervient dès la conclusion du contrat alors que l’obligation du locataire est à exécution successive. Il en résulte que le risque d’inexécution concernant l’obligation du locataire est plus important que le risque d’inexécution de la part du bailleur. Cela explique l’insertion de la clause de résiliation prévue au profit du bailleur, qui ne créée pas de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat mais se justifie par l’économie générale du contrat de location financière.
D’autre part, l’article 1171 alinéa 2 prévoit que l’appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix à la prestation. Or, la clause relative à l’indemnité de résiliation porte justement sur le détail du montant de l’indemnité de résiliation due au bailleur en cas d’inexécution de ses obligations par le locataire.
Par ailleurs, au vu des motifs adoptés, les dispositions du code de la consommation ne sont pas applicables et Monsieur X. ne peut pas invoquer l’article R. 212-1 5°, 7°, 9° au soutien de sa demande tendant à voir déclarer ces deux clauses non écrites.
Par conséquent, Monsieur X. sera débouté de sa demande de voir déclarer non écrites les clauses 10 et 11 du contrat de location financière. »
3/ « Au vu des motifs adoptés, Monsieur X. ne peut être que débouté de toutes ses demandes reconventionnelles en restitution des sommes qu’il a payées et dommages et intérêts, comme en restitution des “contenus utilisés pour la réalisation du nouveau site internet ainsi que l’ensemble des droits de gestion sur le nom de domaine “x.-avocat.com”. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE
CINQUIÈME CHAMBRE PREMIÈRE SECTION
JUGEMENT DU 25 FÉVRIER 2025
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 22/06333. N° Portalis 352J-W-B7G-CW456. Assignation du : 13 mai 2022.
DEMANDERESSE :
La société GRENKE LOCATION
SAS au capital de XXX €, ayant son siège social [Adresse 2], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Strasbourg sous le numéro B YYY, agissant poursuites et diligences de son Président domicilié en cette qualité audit siège, représentée par Maître Jean-Didier MEYNARD agissant pour la SCP BRODU CICUREL MEYNARD GAUTHIER MARIE, avocats au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #P0240 et par la SELAS PwC Société d’Avocats agissant par Maître Valérie FLUC, avocat plaidant, avocat au barreau de SSTRASBOURG
DÉFENDEUR :
Monsieur X.
né le [date], à [Localité 3] ([Pays]), de nationalité américaine, de profession d’avocat, demeurant à [Adresse 1] – SIREN ZZZ, représenté par Maître Diane PROTAT agissant pour l’AARPI PROTAT, avocats au barreau de PARIS, avocats plaidant, vestiaire #C0084
COMPOSITION DU TRIBUNAL : Thierry CASTAGNET, Premier Vice-Président adjoint, Antoine de MAUPEOU, Premier Vice-Président adjoint, Lise DUQUET, Vice-Présidente, assistés de Gilles ARCAS, Greffier
DÉBATS : A l’audience du 15 janvier 2025 tenue en audience publique devant Lise DUQUET, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile. Avis a été donné aux conseils des parties que la décision serait rendue le 25 février 2025 par mise à disposition au greffe
JUGEMENT : Prononcé par mise à disposition, Contradictoire, En premier ressort
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
Le 21 mai 2019, la SAS GRENKE LOCATION et Monsieur X. ont conclu un contrat de location longue durée portant sur un site web fourni par la société AXECIBLES, moyennant le paiement d’un loyer mensuel de 340 euros HT sur une période de 48 mois.
Monsieur X. a cessé le paiement des loyers, estimant que la livraison par la société AXECIBLES n’était pas intervenue.
Par courrier recommandé du 11 septembre 2020 avec accusé de réception du 2 octobre 2020, la SAS GRENKE LOCATION a mis en demeure Monsieur X. de payer les loyers échus impayés et lui a indiqué qu’à défaut de paiement, elle résilierait le contrat et prononcerait la déchéance du terme.
Par courrier recommandé du 17 novembre 2020 avec accusé de réception du 7 décembre 2020, la société GRENKE LOCATION a résilié le contrat de location financière et a mis en demeure Monsieur X. de payer ses arriérés et de restituer le matériel loué.
Par acte du 13 mai 2022, la SAS GRENKE LOCATION a fait assigner Maître X. devant ce tribunal, aux mêmes fins.
[*]
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 4 décembre 2023, la SAS GRENKE LOCATION demande au tribunal, au visa des articles 1709 et 1728-2° du code civil, de :
- débouter Maître X. de l’intégralité de ses fins, moyens et conclusions,
- condamner Maître X. à lui payer la somme en principal de 13 112,95 euros, augmentée des intérêts au taux légal majoré de cinq points sur la somme de 12 085,20 euros à compter du 17 novembre 2020, date de la dernière mise en demeure extrajudiciaire jusqu’au complet paiement,
- ordonner la capitalisation des intérêts,
- lui donner acte de ce qu’elle renonce à solliciter la restitution du matériel loué,
A titre subsidiaire, en cas de nullité ou caducité du contrat de location
- condamner Maître X. à lui payer la somme de 14.213,11 euros TTC correspondant au prix du matériel, et la somme de 4 475,74 euros correspondant au bénéfice escompté au titre du contrat de location, avec intérêts légaux à compter de la décision à intervenir,
- condamner Maître X. à lui payer une indemnité de 3 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile avec intérêts au taux légal en sus,
- condamner Maître X. aux entiers frais et dépens de la procédure, avec distraction par application de l’article 699 du code de procédure civile au profit de Maître Jean-Didier Meynard agissant pour la SCP BRODU CICUREL MEYNARD GAUTHIER MARIE, avocat au barreau de Paris,
- déclarer et à tout le moins rappeler que le jugement à intervenir exécutoire par provision sans caution, au besoin moyennant caution.
A l’appui de ses demandes, la SAS GRENKE LOCATION indique que :
- elle a intégralement exécuté ses obligations à l’égard du locataire tandis que Monsieur X. n’a pas exécuté son obligation principale de payer les loyers aux échéances contractuellement convenues ;
- Monsieur X. ne lui a pas restitué le matériel objet du contrat de location en dépit de sa mise en demeure et en violation de l’article 12 des conditions générales de location, mais dans la mesure où le matériel loué est un bien immatériel - un site web - elle renonce à sa restitution, y compris à la communication des codes et identifiants du site.
La SAS GRENKE LOCATION s’oppose aux moyens adverses en soutenant tout d’abord que le contrat de location n’est pas nul.
A ce titre, elle explique qu’elle intervient uniquement au niveau du financement et que, conformément à l’article 1 des conditions générales de location, elle ne remplit dans les faits qu’un rôle purement financier, le locataire choisissant sous sa seule responsabilité, tant le matériel que le fournisseur, de sorte que son engagement se limite à se porter acquéreur du matériel objet du contrat de location auprès du fournisseur en lui versant le prix correspondant, et à donner ce matériel en location au locataire.
Elle ajoute que dans le cadre d'une opération tripartite entre la société AXECIBLES, Monsieur X. et elle, un contrat de vente a été conclu entre la société AXECIBLES (vendeur et fournisseur) et elle (acquéreur) et un contrat de location entre elle (propriétaire et bailleur) et Monsieur X. (locataire).
Elle fait valoir que Monsieur X. ne saurait contester la livraison du site internet alors qu’il a non seulement signé les documents contractuels mais aussi spontanément payé les loyers y afférents pendant un an et demi (d’avril 2019 à octobre 2020), ce qui établit qu’il a pu utiliser le matériel loué dès sa livraison en avril 2019, tandis qu’elle n’a failli à aucune de ses obligations.
Elle insiste sur le fait que par la confirmation de livraison, Monsieur X. lui a confirmé avoir réceptionné l’intégralité du matériel loué et que ce dernier était en parfait état de fonctionnement.
Elle ajoute que :
- les droits et obligations de chaque partie au contrat de location sont parfaitement indiqués dans les conditions générales de location ;
- la circonstance avancée d’une absence de signature d’un contrat avec le fournisseur portant sur la création et la livraison d’un site internet est sans emport, précisément parce que l’absence de contrat écrit ne prouve pas que la prestation n’a pas été réalisée, alors que la signature du procès-verbal de livraison démontre la livraison et la réception du produit commandé par le locataire, et alors que Monsieur X. produit des échanges de correspondances entre la société AXECIBLES et lui prouvant la réalité de la prestation fournie ;
- il n’existe aucune obligation légale concernant la conclusion d’un contrat écrit lors de la réalisation d’un site internet, de sorte que le contrat de location ne saurait être dépourvu de contenu certain au motif que les conditions essentielles pour la création d’un site web ne seraient pas prévues par un contrat principal ;
- la jurisprudence a eu l’occasion de se prononcer à maintes reprises sur la portée de la signature du procès-verbal de livraison par le locataire et sur la portée de l’obligation de délivrance de la chose louée par le bailleur, laquelle est remplie en cas de signature du procès-verbal de livraison par le locataire ;
- en réglant les loyers pendant un an et demi, soit en lui donnant pleine et entière exécution, Monsieur X. a confirmé tacitement l’acte prétendument nul, conformément à l’article 1182 du code civil.
La SAS GRENKE LOCATION conteste ensuite l’applicabilité des dispositions du code de la consommation invoquées par Monsieur X. à l’appui de sa demande de nullité du contrat de location pour inexécution de ses obligations précontractuelles.
Elle précise que les trois conditions cumulatives d’application de l’article L. 221-3 du code de la consommation ne sont pas réunies en l’espèce :
- le contrat entre Monsieur X. et elle n’a pas été conclu hors établissement, aucune des conditions prévues par l’article L. 221-1-I-2° du code de la consommation, reprises l’une après l’autre, ne correspondant au cas présent ;
- Monsieur X. ne rapporte aucun élément de preuve concernant le nombre de salarié qu’il emploie ;
- l’objet du contrat de location entre nécessairement dans le champ de l’activité principale de Monsieur X., le matériel concerné lui étant absolument indispensable à l’exercice de son activité d’avocat en ce qu’il lui permet d’exploiter son établissement ou d’exercer son activité, conformément à la jurisprudence qu’elle rappelle.
La SAS GRENKE LOCATION soutient ensuite que le contrat de location n’est pas caduc, notamment pour dol compte tenu des conditions de formation du contrat de location qu’elle rappelle, dont il résulte qu’elle n’était pas présente lorsque la société AXECIBLES a présenté la liasse contractuelle au locataire, de sorte qu’il ne peut lui être reproché aucune faute dans le recueil du consentement du locataire. Elle précise qu’elle ne saurait être tenue pour responsable des éventuelles manœuvres qu’aurait commises la société AXECIBLES.
Elle ajoute que les prétendues irrégularités dénoncées par Monsieur X. ne constituent pas des manœuvres dolosives constitutives d’un vice du consentement. A ce titre, elle fait état de la mauvaise foi de ce dernier qui a reconnu avoir pris connaissance de l’intégralité des conditions générales de location annexées, lesquelles déterminent avec précision l’ensemble des droits et obligations de chaque partie, en ce compris les rôles respectifs de chaque contractant, tandis que les qualités de chaque partie sont clairement mentionnées tant sur la première page du contrat qu’à travers les clauses des conditions générales de location.
La SAS GRENKE LOCATION se prévaut de ce que le contrat de location n’est pas plus caduc du fait de la résolution du contrat principal de prestation conclu avec la société AXECIBLES pour manquement à ses obligations (consistant soit disant en une absence constante de concertation sur le développement du site web et une approximation de sa méthode de travail, en vertu de l’interdépendance des contrats) en vertu de l’interdépendance des contrats, dans la mesure où une demande de caducité du contrat de location financière nécessite au préalable l’anéantissement du contrat principal, à savoir le contrat de maintenance. Or, elle fait valoir que Monsieur X. n’a pas fait assigner la société AXECIBLES dans la cause, ne produit pas le contrat de prestation conclu avec cette dernière dont il demande la résolution judiciaire, et ne prouve pas les prétendus manquements de la société AXECIBLES justifiant une telle demande.
Elle se prévaut encore de ce que le contrat de location ne peut pas être caduc en vertu de l’interdépendance des contrats, du fait de la nullité du procès-verbal de livraison comme ayant été signé en suite de manœuvres dolosives imputables à la société AXECIBLES, dès lors que le procès-verbal de livraison fait partie intégrante de la liasse contractuelle appartenant au contrat de location et conclu entre eux et qu’il n’y a pas deux contrats distincts entre deux parties différentes mais qu’il s’agit d’un même ensemble contractuel.
Elle se prévaut enfin de ce qu’elle ignorait l’existence d’un quelconque contrat conclu concomitamment ou antérieurement au contrat de location, entre la société AXECIBLES et Monsieur X. qui ne rapporte pas la preuve contraire et qui ne produit aucun contrat de prestation conclu entre la société AXECIBLES et lui. Elle cite plusieurs décisions dont il ressort selon lui qu’il est désormais acquis que le contrat de location ne peut être déclaré caduc en l’absence de preuve de la connaissance de l’existence du contrat principal par le bailleur et d’une opération d’ensemble, que le contrat principal soit produit ou non aux débats.
La SAS GRENKE LOCATION conteste tout déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties sur le fondement de l’article 1171 code civil, en faisant état de ce que :
- le contrat de location litigieux n’est pas un contrat d’adhésion au sens des dispositions du code civil qui comporterait un ensemble de clauses non négociables, déterminées à l’avance par l’une des parties ;
- en tout état de cause, la clause relative à l’indemnité de résiliation ne crée pas de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat puisqu’elle correspond exactement à l’économie générale du contrat de location, le risque d’inexécution concernant l’obligation du locataire étant notamment bien plus grand que le risque d’inexécution de la part du bailleur ;
- le déséquilibre significatif ne peut pas porter sur l’adéquation du prix à la prestation conformément à l’article 1171 alinéa 2 du code civil et à la jurisprudence récente en la matière.
La SAS GRENKE LOCATION conteste ensuite toute réduction de la clause de résiliation car elle n’a pas de caractère manifestement abusif dans la mesure où l’indemnité correspond très exactement à son préjudice, Monsieur X. n’ayant pas satisfait à ses obligations contractuelles, peu important qu’elle ait vocation à récupérer le matériel loué puisqu’elle est la seule et unique propriétaire du matériel et qu’elle a en tout état de cause vocation à le récupérer soit de façon anticipée en cas de résiliation, soit au terme du contrat.
Elle ajoute que le matériel litigieux est en tout état de cause considéré comme du matériel d’occasion, que Monsieur X. ne lui a pas restitué le matériel et qu’il résulte de la jurisprudence constante que l’indemnité de résiliation convenue contractuellement, qui s’analyse en une clause pénale, n’est pas manifestement excessive.
La SAS GRENKE LOCATION conteste encore le bien-fondé de la demande de Monsieur X. de remboursement des loyers qu’elle a perçus, précisément parce que le contrat de location ne saurait être remis en cause et doit recevoir pleine et entière exécution, le locataire ayant bénéficié de la jouissance du matériel pendant un an et demi.
Elle conteste de la même manière le bien-fondé de la demande de dommages et intérêts parce qu’elle ne saurait supporter l’éventuelle négligence de Monsieur X. lors de la conclusion du contrat de location et que l’obligation de livraison du matériel loué ne pèse pas sur elle mais sur le fournisseur, la société AXECIBLES, de sorte que le lien de causalité fait défaut.
A titre subsidiaire, la SAS GRENKE LOCATION soutient que si le tribunal de céans considérait que le contrat de location devait être déclaré nul, résolu ou caduc, Monsieur X. serait condamné à lui payer la somme correspondant au prix qu’elle a décaissé entre les mains de la société AXECIBLES (14 213,11 euros TTC) sur le fondement de l’article 1240 du code civil et de la jurisprudence en la matière, puisqu’il a engagé sa responsabilité en signant les confirmations de livraison dans le cadre de la conclusion du contrat de location litigieux.
[*]
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 4 septembre 2023, Maître X. demande au tribunal, au visa des articles 1104, 1112-1, 1128, 1130, 1133, 1137, 1138, 1139, 1162, 1163, 1169, 1178, 1182, 1170, 1171, 1186, 1217, 1219, 1224, 1227, 1231-5, 1352-6, du code civil, L. 111- 1 : 1°, 2°, 3°, 5°, 6°, R. 111-1, 2°, L. 212-1, R. 212-1, 5°, L. 112-1, L. 111-5 et L. 111-8 du code de la consommation, de :
- débouter la société GRENKE LOCATION de l’ensemble de ses demandes sauf en ce qui concerne la renonciation de sa demande d’ordonner la restitution du « Matériel »,
- à titre principal, prononcer la nullité du contrat de location financière ainsi que la « confirmation de livraison »,
- à titre subsidiaire, prononcer la nullité du contrat de prestation principal présumé entraînant la caducité du contrat de location financière ainsi que la « confirmation de livraison »,
Ou dans l’alternative
- prononcer la résolution du contrat de prestation principal présumé aux torts de la société GRENKE LOCATION entraînant la caducité du contrat de location financière ainsi que la “confirmation de livraison”,
- à titre très subsidiaire, prononcer les articles 10 et 11 du contrat de location financière réputés non écrits,
Ou dans l’alternative
- prononcer la requalification des articles 10 et 11 du contrat de location financière en clauses pénales, les déclarer manifestement excessives et exercer son pouvoir de modérer ladite clause au paiement de la somme d’un euro,
- à titre reconventionnel, ordonner à la société GRENKE LOCATION de restituer 5 861,83 euros majorée au taux d’intérêt légal à compter de leur paiement,
- condamner la société GRENKE LOCATION au paiement d’une indemnité de 10% de ladite somme majorée au taux d’intérêt légal à compter de leur paiement à titre de préjudice subi pour la perte de la valeur de la jouissance à compter du paiement,
- ordonner à la société GRENKE LOCATION de lui restituer tous les contenus utilisés pour la réalisation du nouveau site internet ainsi que l’ensemble des droits de gestion sur le nom de domaine « x.-avocat.com »,
- ordonner la capitalisation des intérêts,
- condamner la société GRENKE LOCATION au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société GRENKE LOCATION aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Diane Protat, avocat, en application de l'article 699 du code de procédure civile,
- ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
Maître X. fait valoir que c’est la société AXECIBLES qui lui a fait signer le contrat litigieux et que ce contrat pour la réalisation d’un site web était totalement inadapté à la prestation envisagée et « fait état » d’une pratique déloyale qui était la genèse de cette opération « ubuesque ».
Il se prévaut de la réponse ministérielle du 5 mai 2022 et de la communication publique de la DGCCRF du 16 mars 2022 qui est régulièrement saisie de plaintes qui émanent des professionnels isolés, ayant été démarchés dans leurs locaux et incités à signer des contrats de location de biens ou de prestation de service dont ils n’ont pas nécessairement besoin mais qui leur sont présentés comme permettant de faire connaître et de développer leur activité.
Il se prévaut aussi de ce que l’identité du « Bailleur » n’est désignée nulle part dans l’ensemble des écrits et que la qualité de la société GRENKE LOCATION n’est explicitée nulle part dans le contrat de location financière ni dans la confirmation de livraison, seule la société AXECIBLES étant nommée dans le contrat en sa qualité propre.
Il ajoute que les termes du contrat de location financière ne permettent pas de déterminer avec précision ni les qualités essentielles du « Matériel », ni les conditions des « prestations de services éventuellement requises dans le cadre de leur utilisation » afin de déterminer leur bonne exécution.
Maître X. indique qu’à titre liminaire, il demande au tribunal de « permettre l’assignation de la société AXECIBLES en intervention forcée ».
A titre principal, Maître X. soutient que le contrat de location financière est nul :
- sur le fondement de l’article 1169 du code civil, en raison du caractère illusoire de la contrepartie de la société GRENKE LOCATION : selon lui, le contrat litigieux constitue une relation de servage par lequel il ne reçoit aucune contrepartie pour son obligation de payer, mais au contraire, doit se soumettre à la volonté purement arbitraire de la société GRENKE LOCATION en ce qui concerne l’usage du “Matériel” ;
- sur le fondement des articles 1128, 1163 et 1178 du code civil, en raison de l’absence d’un contenu certain du contrat de location financière, le caractère incertain du montage contractuel étant encore plus manifeste du fait qu’aucun contrat de prestation n’a été convenu entre les parties qui prévoient les conditions de l’exécution de la prestation de base et qu’un site web n’est pas un bien fongible mais un produit numérique personnalisé selon des conditions convenues par les parties au préalable de la conclusion de la prestation ;
- sur le fondement de l’article 1182 du code civil, en l’absence de confirmation de la nullité de sa part, rien ne démontrant qu’il avait connaissance de ce vice de consentement entachant la validité du contrat de location financière, ni l’intention de le réparer lorsqu’il a autorisé le paiement des mensualités par prélèvement automatique qui a été mis en route dès la signature.
A titre subsidiaire, Maître X. soutient que le contrat de location financière est caduc sur le fondement de l’article 1186 du code civil, au motif que le contrat de prestation présumé qui le lie au fournisseur (la société AXECIBLE) et le contrat de location financière qui le lie à la société GRENKE LOCATION constituent une seule opération, de sorte que la nullité, la résolution ou la résiliation de l’un entraîne la caducité de l’autre.
Il se prévaut d’une part, sur le fondement des articles 1104, 1112-1, 1130, 1131, 1133 et 1162 du code civil, ainsi que de l’article liminaire et des articles L. 111- 1 1°, 2°, 3°, 5°, 6°, R. 111-1, 2°, L. 112-1, L. 111-5 et L. 111-8 du code de la consommation, d’un manquement de la société AXECIBLES à l’obligation précontractuelle d’information déterminante portant sur les caractéristiques essentielles de la prestation, le prix et les modalités de paiement, les conditions particulières de la vente et de l’exécution des services, entre autres, justifiant le prononcé de la nullité du contrat de prestation présumé le liant à la société AXECIBLES, qui entraîne nécessairement la caducité du contrat de location financière de la société GRENKE LOCATION.
Il souligne que les « provisions protectrices » applicables aux relations entre consommateurs et professionnels sont étendues à des professionnels personnes physiques lorsque celles-ci concluent des contrats en des matières qui sortent du domaine de compétences de leurs activités professionnelles, les siennes étant la prestation de services de conseil en matière de droit américain.
Il indique que les sociétés AXECIBLES et GRENKE LOCATION ont refusé d’observer les obligations qui leur incombaient en vertu des dispositions du code de consommation, de lui communiquer de manière lisible et compréhensible, avant que les parties ne soit liées, des informations portant sur les caractéristiques essentielles du bien ou du service, relatives au prix, aux modalités de paiement et aux conditions particulières de la vente et de l’exécution des services. Il conclut qu’en l’absence de ces informations, il ne pouvait pas valablement conclure un contrat en connaissance de cause.
Il se prévaut d’autre part de la nullité de la “Confirmation de livraison” pour l’action dolosive émanant des sociétés AXECIBLES et GRENKE LOCATION qui, par leur connivence, l’ont conduit à s’engager par erreur, sur le fondement des articles 1137, 1138 et 1139 du code civil.
Il se prévaut enfin de la résolution du contrat de prestation présumé pour l’inexécution d’une condition essentielle, sur le fondement des articles article 1217, 1219, 1224 et 1227 du code civil, en l’absence de démarche effectuée par la société AXECIBLES, le nom de domaine “x..com” restant vide et le site qui est actuellement en place sur le nom de domaine “x.-avocat.com” étant toujours la maquette avec des éléments incomplets.
A titre très subsidiaire, Maître X. soutient que les clauses d’indemnité de résiliation sont réputées non écrites sur le fondement des articles 1171, R. 212-1 5°, 7°, 9° du code de la consommation et 1186 du code civil, ainsi qu’en application de la jurisprudence y afférente, ou qu’elles doivent être requalifiées en clause pénale en application de l’article 1231-5 du code civil.
A l’appui de ses demandes reconventionnelles, Maître X. soutient qu’il résulte des articles 1178, 1217, 1227, 1229 portant sur la nullité ou la résolution d’un contrat que les parties devront restituer ce qu’elles avaient reçu en vertu des articles 1352 et suivants du code civil et si, lorsque les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l’exécution complète du contrat résolu, les parties doivent restituer “son intégralité l’une à l’autre”.
Il ajoute qu’en cas de condamnation au paiement des indemnités ou des dommages et intérêts, il est en droit d’obtenir la réparation des dommages subis au titre des articles 1240 et 1241 du code civil, des faits de la société AXECIBLES.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
[*]
L'ordonnance de clôture a été rendue le 27 mars 2024, les plaidoiries étant prévues le 15 janvier 2025. A l’audience, les parties ont été informées que la décision était mise en délibéré au 25 février 2025.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
A titre liminaire, le tribunal relève que la demande de “permettre l’assignation de la société AXECIBLES en intervention forcée” n’est pas énoncée au dispositif des conclusions de Monsieur X., de sorte qu’il ne statuera pas sur cette prétention conformément à l’article 768 du code de procédure civile. Elle serait en outre sans pertinence à ce stade de la procédure.
Sur la nullité du contrat de location financière et de la “confirmation de livraison” :
Aux termes de l’article 1128 du code civil, la validité d'un contrat suppose notamment qu’il ait un contenu licite et certain.
Aux termes de l’article 1163 du code civil, l'obligation a pour objet une prestation présente ou future et celle-ci doit être possible et déterminée ou déterminable.
Aux termes de l’article 1169 du code civil, un contrat à titre onéreux est nul lorsque, au moment de sa formation, la contrepartie convenue au profit de celui qui s'engage est illusoire ou dérisoire.
Enfin, aux termes de l’article 1178 du code civil, un contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nul.
En l’espèce, le contrat du 21 mai 2019 conclu entre la SAS GRENKE LOCATION qui apparaît très visiblement en entête, dans le paragraphe « DECLARATION DU LOCATAIRE » juste avant sa signature et dans la case réservée à sa signature avec la mention « le Bailleur », et Monsieur X., dûment signé par les deux parties, est un contrat de location de longue durée dont une simple lecture permet de comprendre que la première intervient pour financer un matériel désigné - un site web fourni par la société AXECIBLES - selon des modalités de paiement à la charge du locataire clairement exposées - loyer mensuel de 340 euros HT sur une période de 48 mois et manière dont il est débité.
L’article 1er « OBJET - CHOIX DES PRODUITS ET DU FOURNISSEUR » des conditions générales mentionne ensuite expressément le fait que la SAS GRENKE LOCATION intervient uniquement dans le financement des produits, le locataire ayant choisi le matériel « sous sa seule et entière responsabilité (...) sans aucune intervention du bailleur » et « l’engagement du Bailleur €consistant€ exclusivement et ce, à partir de la conclusion du Contrat, à se porter acquéreur des Produits en versant le prix au Fournisseur, le donner en location au Locataire et d’assumer la charge des obligations stipulées ci-après notamment au titre des Prestations.” »
Il en résulte incontestablement que les obligations et engagements des parties clairement identifiées sont parfaitement déterminés et réciproques.
Par conséquent, le contrat de location financière n’est pas nul, sans qu’il soit nécessaire de s’interroger sur l’existence d’une confirmation de la nullité de la part de Monsieur X.
Monsieur X. sera donc débouté de sa demande de voir prononcer la nullité du contrat de location financière.
Il en ira de même de sa demande de nullité de la « confirmation de livraison » figurant dans le dispositif de ses conclusions, qui n’est étayée ni en fait, ni en droit dans la discussion.
Sur la caducité du contrat de location financière :
Aux termes de l'article 1186 du code civil, un contrat valablement formé devient caduc si l'un de ses éléments essentiels disparaît. Lorsque l'exécution de plusieurs contrats est nécessaire à la réalisation d'une même opération et que l'un d'eux disparaît, sont caducs les contrats dont l'exécution est rendue impossible par cette disparition et ceux pour lesquels l'exécution du contrat disparu était une condition déterminante du consentement d'une partie. La caducité n'intervient toutefois que si le contractant contre lequel elle est invoquée connaissait l'existence de l'opération d'ensemble lorsqu'il a donné son consentement.
Il résulte de ces dispositions que la caducité du contrat conclu avec la SAS GRENKE LOCATION suppose deux conditions, que sont la disparition du contrat passé par Monsieur X. avec la société AXECIBLES, et la connaissance de ce contrat par la société GRENKE LOCATION avec la conscience que les deux forment une même opération.
Sur la disparition du contrat de prestation AXECIBLES, Monsieur X. se prévaut de sa nullité pour un manquement de la société à son obligation « précontractuelle d’information déterminante » portant sur les caractéristiques essentielles que sont la prestation, le prix et les modalités de paiement, les conditions particulières de la vente et de l’exécution des services, entre autres et pour dol, ainsi que de sa résolution pour inexécution d’une condition essentielle par son co-contractant fournisseur.
Or, d’une part, la société AXECIBLES n’a pas été appelée dans la cause par Monsieur X. qui ne produit pas même le contrat litigieux conclu avec cette dernière, étant précisé que ce dernier ne peut pas valablement contester la livraison du matériel puisqu’en signant les documents contractuels et notamment la « CONFIRMATION DE LIVRAISON », il a confirmé avoir réceptionné l’intégralité du matériel loué et son état de fonctionnement et qu’il a payé les loyers y afférents pendant un an et demi, d’avril 2019 à octobre 2020.
D’autre part, Monsieur X. ne peut pas se prévaloir des dispositions du code de la consommation dès lors qu’aux termes de l’article L. 221-3 de ce code de la consommation, les dispositions qu’il invoque applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, ne sont étendues qu’aux contrats conclus entre deux professionnels hors établissement définis à l’article L. 221-1-I-2° du code de la consommation, dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq.
Tel n’est pas le cas en l’espèce compte tenu du schéma contractuel litigieux et du fait que Monsieur X. ne produit aucun élément prouvant que les contrats de prestation et de location financière ont été conclus « en la présence physique simultanée des parties » comme exigé par l’article L. 221-1-I-2° du code de la consommation, ou établissant le nombre de salariés qu’il emploie. De plus, il est manifeste que le matériel litigieux (site web) lui est indispensable à l’exercice de son activité d’avocat et était destiné à son usage professionnel dans le cadre de son activité principale.
La première condition de l'article 1186 du code civil tenant à la disparition du contrat de prestation AXECIBLES n'est donc pas remplie.
De façon surabondante, Monsieur X. ne produit aucun élément pour établir la connaissance par la SAS GRENKE LOCATION du contrat passé avec la société AXECIBLES, étant précisé qu’il s’agit d’une preuve spécifique de la connaissance de l’existence du contrat principal et non d’une preuve générale consistant à soutenir qu’un bailleur financier ne peut pas ignorer l’existence d’un tel contrat.
Il s'ensuit que la seconde condition de l'article 1186 n'est pas non plus remplie.
Monsieur X. sera donc débouté de sa demande de voir prononcer la caducité du contrat de location financière et de la “confirmation de livraison”.
Sur l’application des articles 10 et 11 des conditions générales du contrat de location financière concernant les conséquences de la résiliation anticipée du contrat :
Selon l’article 1171 du code civil, dans un contrat d’adhésion, toute clause qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite et l’appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix à la prestation.
L’article 10 du contrat de location financière stipule que « le Bailleur peut résilier le Contrat à effet immédiat par courrier recommandé adressé au Locataire en cas de retard de paiement de 3 loyers mensuels consécutifs ou non, ou d’un loyer trimestriel »,
L’article 11 « CONSEQUENCE D’UNE TERMINAISON ANTICIPEE DU CONTRAT POUR TOUS MOTIFS : RESILIATION, RESOLUTION OU PRONONCE DE CADUCITE » stipule que « Le Locataire sera tenu de payer le Bailleur le prix du Contrat, c’est-à-dire les loyers échus impayés et les loyers à échoir jusqu’au terme prévu du Contrat pour la période contractuelle en cours, et à titre de compensation du préjudice subi, les intérêt de retard de paiement éventuels restant dus ainsi qu’une somme égale à 10% du montant des loyers à échoir pour la période contractuelle en cours. »
Le contrat de location financière litigieux, bien qu’imprimé à l’avance et comportant un ensemble de clauses non négociables déterminées en amont par la SAS GRENKE LOCATION, ne peut pas être qualifié de contrat d’adhésion au sens de l’article 1171 précité, dès lors qu’il existe une rencontre de volonté entre les parties au contrat qui se caractérise par la possible négociation du montant du loyer, de la périodicité du loyer, de la durée totale du contrat de location, du choix du matériel et du fournisseur.
En tout état de cause, d’une part, le mécanisme d’un contrat de location financière implique que la société de financement, à la demande du locataire, acquiert le matériel pour le donner en location, de sorte que l’obligation du bailleur consistant à mettre le matériel loué à disposition du locataire intervient dès la conclusion du contrat alors que l’obligation du locataire est à exécution successive. Il en résulte que le risque d’inexécution concernant l’obligation du locataire est plus important que le risque d’inexécution de la part du bailleur. Cela explique l’insertion de la clause de résiliation prévue au profit du bailleur, qui ne créée pas de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat mais se justifie par l’économie générale du contrat de location financière.
D’autre part, l’article 1171 alinéa 2 prévoit que l’appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix à la prestation. Or, la clause relative à l’indemnité de résiliation porte justement sur le détail du montant de l’indemnité de résiliation due au bailleur en cas d’inexécution de ses obligations par le locataire.
Par ailleurs, au vu des motifs adoptés, les dispositions du code de la consommation ne sont pas applicables et Monsieur X. ne peut pas invoquer l’article R. 212-1 5°, 7°, 9° au soutien de sa demande tendant à voir déclarer ces deux clauses non écrites.
Par conséquent, Monsieur X. sera débouté de sa demande de voir déclarer non écrites les clauses 10 et 11 du contrat de location financière.
Sur l’indemnité de résiliation :
Aux termes des articles 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits et ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.
En application des articles 10 et 11 des conditions générales précités, la SAS GRENKE LOCATION a procédé à la résiliation du contrat par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 décembre 2020 et demandé le paiement de l’indemnité de résiliation égale au montant des loyers échus et des loyers à échoir jusqu'au terme initialement prévu majorés à 10% à titre de sanction.
La SAS GRENKE LOCATION ne conteste pas la qualification de clause pénale.
Pour apprécier le caractère manifestement excessif ou non de cette indemnité, le tribunal doit examiner l'équilibre financier du contrat.
En l'espèce, il apparaît au vu de la facture d'achat du 18 avril 2019 que la SAS GRENKE LOCATION a financé le matériel à hauteur de la somme de 14 213,11 euros TTC, que le contrat a été conclu pour une durée de 48 mois et que les loyers sont impayés depuis octobre 2020.
Il s'ensuit que le préjudice financier subi par la SAS GRENKE LOCATION correspond à la fois à la perte des loyers échus impayés soit 1 845,20 euros augmentée des intérêts légaux à compter de la date d'échéance soit 7,75 euros et par l'absence de versement des loyers à échoir auxquels Monsieur X. s'était engagé soit 10.200 euros HT.
L'indemnité n’est donc manifestement pas excessive au regard de l’interruption des versements convenus et de la perte du bénéfice escompté, et doit être chiffrée à 13 072,95 euros après déduction de l'indemnité forfaitaire de 40 euros prévu par l'article L. 441-10 du code de commerce et qui n'est applicable que dans les transactions commerciales entre professionnels.
Le taux d'intérêts majoré de 5 points n'apparaît pas applicable à l'indemnité de résiliation au vu de l'article 9.2 du contrat dont se prévaut la SAS GRENKE LOCATION, de sorte qu'elle portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 7 décembre 2020 sur la somme de 12 085,20 euros et à compter du présent jugement sur le surplus, et conformément à la demande les intérêts dus pour une année entière produiront à leur tour intérêts.
Sur la restitution du matériel :
La SAS GRENKE LOCATION a expressément renoncé à sa demande de restitution du matériel litigieux loué et, comme sollicité, il convient de lui en donner acte.
Sur les demandes reconventionnelles de Monsieur X. :
Au vu des motifs adoptés, Monsieur X. ne peut être que débouté de toutes ses demandes reconventionnelles en restitution des sommes qu’il a payées et dommages et intérêts, comme en restitution des “contenus utilisés pour la réalisation du nouveau site internet ainsi que l’ensemble des droits de gestion sur le nom de domaine “x.-avocat.com”.”
Sur les autres demandes :
Partie qui succombe, Monsieur X. sera condamné aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Il sera également condamné à payer à la SAS GRENKE LOCATION une indemnité au titre des frais exposés et non compris dans les dépens qu'il apparaît équitable de fixer à la somme sollicitée de 3 500 euros.
L’exécution provisoire de la présente décision est de droit par application de l’article 514 du code de procédure civile et aucune circonstance particulière ne justifie qu’elle soit écartée en l’espèce.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le tribunal statuant par jugement contradictoire, en premier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe,
Condamne Monsieur X. à payer à la SAS GRENKE LOCATION la somme de 13 072,95 euros avec intérêts au taux légal à compter du 7 décembre 2020 sur la somme de 12 085,20 euros et à compter du présent jugement sur le surplus ;
DIT que les intérêts dus pour une année entière produiront à leur tour intérêts ;
Donne acte à la SAS GRENKE LOCATION de ce qu’elle renonce à solliciter la restitution du matériel loué ;
Déboute Monsieur X. de toutes ses demandes reconventionnelles ;
Condamne Monsieur X. à payer à la SAS GRENKE LOCATION la somme de 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
Condamne Monsieur X. aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;
Déboute les parties de toutes autres demandes ;
Rappelle que la présente décision est de droit exécutoire à titre provisoire.
Fait et jugé à Paris le 25 Février 2025
Le Greffier Le Président
- 6392 - Code civil et Droit commun - Sanction indirecte des déséquilibres significatifs – Indivisibilité dans les locations financières - Droit postérieur aux arrêts de Chambre mixte
- 8261 - Code civil et Droit commun - Sanction directe des déséquilibres significatifs - Droit postérieur à l’ordonnance du 10 février 2016 -Loi de ratification n° 2018-287 du 20 avril 2018 - Art. 1171 C. civ. – Domaine d'application
- 8262 - Code civil - Sanction directe des déséquilibres significatifs - Art. 1171 C. civ. (Ord. 10 février 2016 – L. ratif. 20 avril 2018). – Présentation par contrat – Location financière sans option d’achat
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- 5889 - Code de la consommation - Domaine d’application – Contrats conclus hors établissement par des « petits professionnels » (art. L. 221-3 C. consom.) – 1 - Présentation générale
- 5944 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Promotion de l’activité : site internet