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TGI PARIS (5e ch. 2e sect.), 24 janvier 2002

Nature : Décision
Titre : TGI PARIS (5e ch. 2e sect.), 24 janvier 2002
Pays : France
Juridiction : TGI Paris. 5e ch. sect. 2
Demande : 01/17035
Date : 24/01/2002
Nature de la décision : Irrecevabilité
Date de la demande : 25/10/2001
Décision antérieure : CA PARIS (25e ch. sect. A), 23 mai 2003
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2609

TGI PARIS (5e ch. 2e sect.), 24 janvier 2002 : RG n° 01/17035

(sur appel CA Paris (25e ch. A), 23 mai 2003 : RG n° 2002/03454)

 

Extraits : 1/ « Les attestations versées aux débats par LGS démontrent suffisamment que le contrat e-pack n'est effectivement plus commercialisé depuis le 15 octobre 2001, ce qui n'est d'ailleurs pas sérieusement contesté par l'association UFC QUE CHOISIR. […] Il en résulte que la demande de cessation de la diffusion du contrat e-pack litigieux est sans objet, la commercialisation de ce contrat ayant d'ores et déjà cessé. »

2/ « L'UFC QUE CHOISIR soutient que le surplus de ses demandes demeure recevable dès lors que le contrat continue à produire des effets juridiques pour plus de 150.000 consommateurs contractants. Toutefois, l'action en suppression de clauses abusives tend non à l'annulation juridique de clauses dans des contrats déjà conclus mais à la suppression matérielle de clauses dans des modèles qui serviront de base à des contrats futurs. L'article L. 412-6 de Code de la Consommation permet en effet aux associations de consommateurs de demander au juge civil la suppression de clauses abusives dans les « modèles de convention habituellement proposés par les professionnels aux consommateurs ». Ces dispositions, ne visant que les contrats « proposés » aux consommateurs, ne sauraient être applicables à un type de contrat qui, lors de l'introduction de l'action, n'est plus proposé au public, sous quelque forme que ce soit, et dont il n'est nullement prétendu que les clauses contestées soient reprises dans une version modifiée du contrat.

L'action collective, en suppression des clauses abusives, est donc sans objet et aucune des demandes fondées sur l'article L. 421-6 du Code de la Consommation ne saurait ainsi prospérer. »

3/ « S'agissant des demandes fondées sur les articles L. 421-1 et L. 421-2 du Code de la Consommation, l'action civile exercée en application de ces dispositions suppose l'existence de faits constitutifs d'infraction pénale lésant l'intérêt collectif des consommateurs.

À cet égard, l'association demanderesse soutient que les contrats en cours ne reproduisent pas de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 du Code de la Consommation et que le consommateur ne pouvait pleinement apprécier la portée des prestations proposées, faute de lisibilité des mentions contractuelles.

Force est cependant de constater que la reproduction des textes reprochée est suffisamment apparente, dans une sous partie clairement intitulée « démarchage », chacun des articles susvisés étant lisiblement reproduit, dans des paragraphes clairement distincts. Si les caractères de l'ensemble des clauses contractuelles sont réduits, la taille de la police, le fait que chaque partie soit visiblement mise en évidence par un titre en caractère gras et la couleur noire de l'impression sur fond jaune, rendent le contrat suffisamment lisible et ne sauraient induire en erreur un consommateur normalement averti.

L'UFC est ainsi mal fondée à se prévaloir du caractère illicite ou de nature à induire en erreur du contrat litigieux. »

 

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS

CINQUIÈME CHAMBRE DEUXIÈME SECTION

JUGEMENT DU 24 JANVIER 2002

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 01/17035. Assignation du 25 octobre 2001.

 

DEMANDEUR :

UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS QUE CHOISIR

[adresse], représentée par Maître Dominique UGUEN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire D1402 et Maître Mathieu DESAUNAY avocat plaidant au barreau

 

DÉFENDERESSE :

SA NET-UP dite LOG GLOBAL SERVICES

[adresse], représentée par la SCP RAMBAUD-MARTEL, avocats au barreau de PARIS, vestiaire P 134

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL : Michèle MARTINEZ, Vice-Président, Anne-Marie GABER, Premier Juge, Christine-Marie COSTE-FLORET, Premier Juge

GREFFIER : Anne LOREAU [minute page 2]

DÉBATS : À l'audience du 30 novembre 2001 tenue publiquement Après clôture des débats, avis a été donné aux Avocats que le jugement serait rendu le 24 janvier 2002.

JUGEMENT : Prononcé en audience publique Contradictoire en premier ressort Sous la rédaction d'Anne-Marie GABER

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l'assignation à jour fixe du 25 octobre 2001 délivrée à la société NET-UP, dite LOG GLOBAL SERVICES, par laquelle l'association UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS QUE CHOISIR, dite UFC QUE CHOISIR, demande, avec le bénéfice de l'exécution provisoire, au visa des articles L. 121-1 et suivants, L. 421-1 et suivants, L. 111-1 du Code de la Consommation et L. 132-1 du Code de la Consommation et de ses annexes, de :

- dire illicite et de nature à induire en erreur le contrat DNCPAR021, dit « e pack », comprenant un abonnement au service d'accès à internet couplé à la vente d'un équipement informatique, proposé aux consommateurs par la défenderesse, faisant valoir que la présentation formelle de ce contrat est :

* contraire aux dispositions de l'article L. 121-23 7° du Code de la Consommation, qui constitue une infraction pénale en application de l'article L. 121-28 du même code,

* constitutive d'une publicité de nature à induire en erreur au sens de l'article L. 121-1 du Code de la Consommation, pénalement réprimée par les articles L. 121-6 et L. 213-1 du même code,

- dire abusives 17 clauses des conditions générales de l'accès internet gratuit, 2 clauses des conditions générales de vente des équipements et 2 des clauses communes à la vente des équipements et à l'ensemble des prestations proposées, faisant valoir que chacune de ces clauses crée un déséquilibre significatif au détriment du consommateur,

- [minute page 3] ordonner la cessation de la diffusion de ce contrat dans sa version litigieuse, sous astreinte,

- condamner la société défenderesse à lui payer 60.979,60 euros en réparation du préjudice direct et indirect causé à l'intérêt collectif des consommateurs,

- ordonner la publication sous astreinte d'un extrait significatif du jugement dans les quotidiens Le Figaro, Le Monde et l'hebdomadaire l'Express à concurrence de 6.097,96 euros par publication, ainsi que la communication sous astreinte du jugement à tous ses clients par courrier électronique,

réclamant, en outre, 4.575,47 euros en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Vu les conclusions du 29 novembre 2001, par lesquelles la société défenderesse s'oppose aux demandes et sollicite 50.000 francs (soit 7.622,45 euros) au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, faisant valoir que :

- l'action est irrecevable comme dépourvue d'objet, le contrat litigieux n'étant plus proposé aux consommateurs depuis le 15 octobre 2001,

- les demandes sont, subsidiairement, dépourvues de fondement :

* la présentation formelle du contrat n'encourant aucun grief, du fait du caractère apparent des dispositions du Code de la Consommation relatives au démarchage à domicile et de l'absence de publicité de nature à induire en erreur,

* les clauses litigieuses n'étant pas abusives, mais parfaitement licites, aucune clause n'étant susceptible dans le contexte global du contrat spécifique d'entraîner un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat,

Vu les conclusions du 30 novembre 2001, par lesquelles la demanderesse réplique que l'action est recevable, faisant valoir que si le contrat dénoncé a apparemment cessé d'être commercialisé le 15 octobre 2001, il fait la loi pour le passé, le présent et l'avenir entre la défenderesse et ses 157.833 consommateurs contractants, et que seule la demande en cessation de diffusion du contrat dans sa version litigieuse peut éventuellement être discutée,

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 4] MOTIFS DE LA DÉCISION :

À la fin de l'année 1999 la société LOG GLOBAL SERVICES, dite LGS, a proposé une offre NET-UP sous forme de souscription d'un contrat e-pack comprenant l'abonnement à un service d'accès à internet, un nombre d'heures de connexions à internet et la vente d'un équipement informatique ainsi que celles d'options payables en 36 mensualités.

L'action dont le tribunal est saisi, par une association de défense des consommateurs, s'analyse à la fois en :

- une action civile relative à des faits prétendument illicites, constitutifs d'infractions pénales, qui porteraient préjudice à l'intérêt collectif des consommateurs (articles L. 421-1 et L. 421-2 du Code de la Consommation),

- une action en suppression de clauses abusives (article L. 421-6 du Code de la Consommation).

Cette action, exercée dans l'intérêt collectif des consommateurs, vise, sur le fondement des articles susvisés, à obtenir la cessation de la diffusion du contrat litigieux, la réparation du préjudice dont les consommateurs auraient collectivement souffert et, en application des dispositions de l'article L. 429-1 du Code de la Consommation, la diffusion du jugement à intervenir.

La société LGS fait valoir que cette action est irrecevable car dépourvue d'objet, le contrat e-pack n'étant plus proposé aux consommateurs au jour de la saisine du tribunal, en date du 25 octobre 2001.

À cet égard, il résulte des pièces produites que dès la fin du mois de septembre 2001, la presse annonçait que NET-UP, filiale d'Avenir Télécom, avait décidé d'arrêter la vente des e-pack d'ici la fin de l'année.

Avenir Télécom confirmait au réseau de vente de LGS, par courrier électronique du 2 octobre 2001, sa décision « de stopper la vente des e-pack en crédit gratuit » à partir du 15 octobre 2001.

[minute page 5] Les attestations versées aux débats par LGS démontrent suffisamment que le contrat e-pack n'est effectivement plus commercialisé depuis le 15 octobre 2001, ce qui n'est d'ailleurs pas sérieusement contesté par l'association UFC QUE CHOISIR.

Un procès-verbal d'huissier de justice du 22 novembre 2001 conforte cet état de fait en constatant, dans deux magasins appartenant au groupe Avenir Télécom, qu'aucune publicité ne fait référence à ce contrat.

Il en résulte que la demande de cessation de la diffusion du contrat e-pack litigieux est sans objet, la commercialisation de ce contrat ayant d'ores et déjà cessé.

L'UFC QUE CHOISIR soutient que le surplus de ses demandes demeure recevable dès lors que le contrat continue à produire des effets juridiques pour plus de 150.000 consommateurs contractants.

Toutefois, l'action en suppression de clauses abusives tend non à l'annulation juridique de clauses dans des contrats déjà conclus mais à la suppression matérielle de clauses dans des modèles qui serviront de base à des contrats futurs.

L'article L. 412-6 de Code de la Consommation permet en effet aux associations de consommateurs de demander au juge civil la suppression de clauses abusives dans les « modèles de convention habituellement proposés par les professionnels aux consommateurs ».

Ces dispositions, ne visant que les contrats « proposés » aux consommateurs, ne sauraient être applicables à un type de contrat qui, lors de l'introduction de l'action, n'est plus proposé au public, sous quelque forme que ce soit, et dont il n'est nullement prétendu que les clauses contestées soient reprises dans une version modifiée du contrat.

L'action collective, en suppression des clauses abusives, est donc sans objet et aucune des demandes fondées sur l'article L. 421-6 du Code de la Consommation ne saurait ainsi prospérer.

[minute page 6] S'agissant des demandes fondées sur les articles L. 421-1 et L. 421-2 du Code de la Consommation, l'action civile exercée en application de ces dispositions suppose l'existence de faits constitutifs d'infraction pénale lésant l'intérêt collectif des consommateurs.

À cet égard, l'association demanderesse soutient que les contrats en cours ne reproduisent pas de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 du Code de la Consommation et que le consommateur ne pouvait pleinement apprécier la portée des prestations proposées, faute de lisibilité des mentions contractuelles.

Force est cependant de constater que la reproduction des textes reprochée est suffisamment apparente, dans une sous partie clairement intitulée « démarchage », chacun des articles susvisés étant lisiblement reproduit, dans des paragraphes clairement distincts.

Si les caractères de l'ensemble des clauses contractuelles sont réduits, la taille de la police, le fait que chaque partie soit visiblement mise en évidence par un titre en caractère gras et la couleur noire de l'impression sur fond jaune, rendent le contrat suffisamment lisible et ne sauraient induire en erreur un consommateur normalement averti.

L'UFC est ainsi mal fondée à se prévaloir du caractère illicite ou de nature à induire en erreur du contrat litigieux.

L'UFC QUE CHOISIR ne peut donc valablement se prévaloir d'un préjudice collectif de ce chef et sera déboutée de sa demande en dommages et intérêts.

Succombant en ses prétentions, l'UFC QUE CHOISIR ne peut pas plus prétendre obtenir, à son profit, une mesure de publication ou de communication de la présente décision.

L'exécution provisoire s'avère sans objet.

Les conditions d'application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ne sont réunies en l'espèce.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 7] PAR CES MOTIFS :

Déclare l'UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS QUE CHOISIR irrecevable en sa demande de cessation de diffusion du contrat e-pack et en toutes ses demandes fondées sur les dispositions de l'article L. 421-6 du Code de la Consommation ;

La déboute de toutes ses demandes fondées sur les dispositions des articles L. 421-1 et L. 412-2 du Code de la Consommation ;

Rejette toute autre demande ;

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ni à application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Condamne l'UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS QUE CHOISIR aux dépens.

Fait à PARIS le 24 janvier 2002.

Le Greffier,                                         Le Président,