5755 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Principes généraux
- 5700 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Principes généraux
- 5765 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Conditions - Suppression volontaire - Clauses supprimées avant l’action - Droit postérieur à la loi du 17 mars 2014
- 5767 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Conditions - Suppression volontaire - Clauses supprimées en cours d’instance - Droit postérieur à la loi du 17 mars 2014
- 5802 - Code de la consommation - Clauses abusives - Évolution de la protection (2) - Cass. civ. 1re, 14 mai 1991 - Application directe de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 : principe
- 5760 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Conditions - Contrats - Modèle de contrat
- 5770 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Procédure - Compétence
- 5804 - Code de la consommation - Clauses abusives - Évolution de la protection (3) - Directive 93/13/CEE du 5 avril 1993
- 6165 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Présentation - Nature de l’action du Ministre
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 5755 (23 septembre 2022)
PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - RÉGIME
ACTION D’UNE ASSOCIATION DE CONSOMMATEURS - PRINCIPES GÉNÉRAUX
Présentation. La possibilité d’une action de groupement de consommateurs existait déjà avant la directive du 5 avril 1993, même si celle-ci a provoqué l’évolution du droit interne (A). Les justifications (B) et la nature de l’action doivent être précisées (C), ainsi que certaines de ses caractéristiques originales (D).
A. ÉVOLUTION DES TEXTES
Loi du 5 janvier 1988. L’art. 6 de la loi n° 88-14 du 5 janvier 1988, relative aux actions en justice des associations agréées de consommateurs et à l'information des consommateurs, disposait que : « les associations mentionnées à l'article 1er peuvent demander à la juridiction civile d'ordonner, le cas échéant sous astreinte, la suppression de clauses abusives dans les modèles de conventions habituellement proposés par les professionnels aux consommateurs ». Le texte a été ultérieurement codifié à l’ancien art. L. 421-6 lors de la création du Code de la consommation par la loi n° 93-949 du 26 juillet 1993 (codification à l’identique, sauf le renvoi à l’art. 1er qui devient un renvoi à l’ancien art. L. 421-1 C. consom.). § Sur l’influence de ce texte sur la consécration jurisprudentielle d’un élargissement du contrôle judiciaire des clauses abusives, V. Cerclab n° 5802.
Directive du 5 avril 1993. La directive n° 93/13/CEE du 5 avril 1993 a consacré cette idée de façon générale. Selon son art. 7 § 1, « les États membres veillent à ce que, dans l'intérêt des consommateurs ainsi que des concurrents professionnels, des moyens adéquats et efficaces existent afin de faire cesser l'utilisation des clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs par un professionnel ». Directive 93/13/CEE : Cerclab n° 3854. § Selon son art. 7 § 2, « les moyens visés au paragraphe 1 comprennent des dispositions permettant à des personnes ou à des organisations ayant, selon la législation nationale, un intérêt légitime à protéger les consommateurs de saisir, selon le droit national, les tribunaux ou les organes administratifs compétents afin qu'ils déterminent si des clauses contractuelles, rédigées en vue d'une utilisation généralisée, ont un caractère abusif et appliquent des moyens adéquats et efficaces afin de faire cesser l'utilisation de telles clauses ». Directive 93/13/CEE : Cerclab n° 3854 (considérant n° 23 : cette faculté n'implique pas un contrôle préalable des conditions générales utilisées dans tel ou tel secteur économique). § Selon son art. 7 § 3, « dans le respect de la législation nationale, les recours visés au paragraphe 2 peuvent être dirigés, séparément ou conjointement, contre plusieurs professionnels du même secteur économique ou leurs associations qui utilisent ou recommandent l'utilisation des mêmes clauses contractuelles générales, ou de clauses similaires ». Directive 93/13/CEE : Cerclab n° 3854.
Introduction en droit interne : loi du 1er février 1995. Compte tenu de la préexistence de l’action depuis 1988, la loi du 1er février 1995 s’est contentée d’adapter la rédaction de l’ancien art. L. 421-6 C. consom. : « les associations mentionnées à l'article L. 421-1 peuvent demander à la juridiction civile d'ordonner, le cas échéant sous astreinte, la suppression de clauses abusives dans les modèles de conventions habituellement proposés par les professionnels aux consommateurs et dans ceux destinés aux consommateurs et proposés par les organisations professionnelles à leurs membres ». § La modification concerne la mention finale du texte qui se conforme à l’art. 7 § 3 de la directive. § V. aussi ci-dessous D, pour l’interprétation.
Ordonnance du 23 août 2001. L’ancien art. L. 421-6 C. consom. a été modifié par l’ordonnance n° 2001-741 du 23 août 2001. « Les associations mentionnées à l'article L. 421-1 et les organismes justifiant de leur inscription sur la liste publiée au Journal officiel des Communautés européennes en application de l'article 4 de la directive 98/27/CE du Parlement européen et du Conseil relative aux actions en cessation en matière de protection des consommateurs peuvent agir devant la juridiction civile pour faire cesser ou interdire tout agissement illicite au regard des dispositions transposant les directives mentionnées à l'article 1er de la directive précitée » (alinéa 1). « Le juge peut à ce titre ordonner, le cas échéant sous astreinte, la suppression d'une clause illicite ou abusive dans tout contrat ou type de contrat proposé ou destiné au consommateur » (alinéa 2).
V. pour une illustration explicite : une association de consommateurs est recevable à demander la suppression de clauses abusives, dès lors que ce texte, dans sa version applicable à l’espèce, l’autorise à demander la cessation ou l’interdiction de tout agissement illicite au regard des dispositions transposant les directives mentionnées à l'article premier de la directive européenne n° 98/27/CE, parmi lesquelles figure la directive n° 93/13/CE relative aux clauses abusives. TGI Laval, 22 octobre 2007 : RG n° 06/00173 ; jugt n° 07/755 ; Cerclab n° 4181, sur appel CA Angers (ch. com.), 24 février 2009 : RG n° 07/02296 ; arrêt n° 49 ; site CCA ; Cerclab n° 2884 (rejet de l’argument d’une banque soutenant que l’association n'est pas recevable à contester la clause qualifiant un compte de dépôt de compte courant, sur le fondement de l'ancien art. L. 421-6 C. consom., au motif qu'aucune directive communautaire « ne contient la moindre disposition relative à la notion de compte de dépôt et, de ce fait, aucun texte national afférent à cette question ne résulte de la transposition de ladite directive », dès lors que l’association peut se fonder sur l’ancien art. L. 132-1 [L. 212-1 nouveau] C. consom., texte issu de la transposition de la directive 93/13/CEE qui est visée à l'article 1er de la directive 98/27/CE mentionnée par l’ancien art. L. 421-6 C. consom. dans sa rédaction applicable à l’espèce). § Dans le même sens : TGI Paris (9e ch. 2e sect.), 13 septembre 2006 : RG n° 05/1493 ; Cerclab n° 3184.
Loi du 17 mai 2011. L’alinéa 1 de l’ancien art. L. 421-6 C. consom. a été modifié par la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, pour le mettre en harmonie avec une nouvelle directive européenne : « Les associations mentionnées à l'article L. 421-1 et les organismes justifiant de leur inscription sur la liste publiée au Journal officiel des Communautés européennes en application de l'article 4 de la directive 2009/22/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 relative aux actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs peuvent agir devant la juridiction civile pour faire cesser ou interdire tout agissement illicite au regard des dispositions transposant les directives mentionnées à l'article 1er de la directive précitée ».
Loi du 17 mars 2014 et du 6 août 2015. La loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 (retouchée par la loi du 6 août 2015) a en revanche profondément modifié le texte, pour mettre fin à des difficultés rencontrées en jurisprudence (V. Cerclab n° 5765 et n° 5767), en lui ajoutant un troisième alinéa qui renforce considérablement la portée de la décision du juge : « les associations et les organismes mentionnés au premier alinéa peuvent également demander au juge de déclarer que cette clause est réputée non écrite dans tous les contrats identiques conclus par le même professionnel avec des consommateurs, y compris les contrats qui ne sont plus proposés, et de lui ordonner d'en informer à ses frais les consommateurs concernés par tous moyens appropriés. »
Ordonnance du 14 mars 2016. L’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 a une nouvelle fois déplacé et modifié le texte aux art. L. 621-1 7 et 8. C. consom. Selon l’art. L. 621-7 C. consom., « les associations mentionnées à l'article L. 621-1 et les organismes justifiant de leur inscription sur la liste publiée au Journal officiel de l'Union européenne en application de l'article 4 de la directive 2009/22/ CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 modifiée relative aux actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs, peuvent agir devant la juridiction civile pour faire cesser ou interdire tout agissement illicite au regard des dispositions transposant les directives mentionnées à l'article 1er de la directive précitée ». L’art. L. 621-8 C. consom. dispose quant à lui : « Lorsqu'il est saisi en application de l'article L. 621-7, le juge peut ordonner, le cas échéant sous astreinte, la suppression d'une clause illicite ou abusive dans tout contrat ou type de contrat proposé ou destiné au consommateur ou dans tout contrat en cours d'exécution. [alinéa 1] Les associations et les organismes mentionnés à l'article L. 621-7 peuvent également demander au juge de déclarer que cette clause est réputée non écrite dans tous les contrats identiques conclus par le même professionnel avec des consommateurs, et de lui ordonner d'en informer à ses frais les consommateurs concernés par tous moyens appropriés. [alinéa 2] »
Sur le respect strict du texte quand au domaine de l’action : les art. L. 621-1, L. 621-2 et L. 621-7 C. consom. habilitent les associations agréées, d'une part, à exercer les droits reconnus à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des consommateurs, d'autre part, à agir devant les juridictions civiles en cessation, interdiction, ou réparation de tout agissement illicite au regard des dispositions transposant les directives mentionnées à l'article 1er de la directive 2009/22/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 modifiée relative aux actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs ; n'est pas recevable à agir sur le fondement de ces dispositions l'association qui ne justifie ni de l'existence d'une infraction, ni de la méconnaissance d'une disposition issue de la transposition du droit de l'Union. Cass. civ. 1re, 30 mars 2022 : pourvoi n° 21-13970 ; arrêt n° 277 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 9781 (association fondant son action sur la méconnaissance alléguée de dispositions du code des assurances relatives à l'obligation des maîtres d'ouvrage, ayant la qualité de consommateurs, de souscrire une assurance de dommages-ouvrage), pourvoi contre CA Paris (pôle 4 ch. 8), 16 février 2021 : Dnd.
B. JUSTIFICATIONS DE L’ACTION
Infériorité du consommateur individuel. Le système de protection mis en œuvre par la directive repose sur l'idée que le consommateur se trouve dans une situation d'infériorité à l'égard du professionnel, en ce qui concerne tant le pouvoir de négociation que le niveau d'information, situation qui le conduit à adhérer aux conditions rédigées préalablement par le professionnel, sans pouvoir exercer une influence sur le contenu de celles-ci. CJCE, 27 juin 2000, Océano Grupo Editorial : Aff. C-240/98 à C-244/98 ; Rec. p. I-4941 ; Cerclab n° 4405 ; JCP éd. G 2001. II. 10513, note Carballo Fidalgo et Paisant ; Petites affiches 24 juillet 2001, note Hourdeau ; RTD civ. 2001. 878, obs. Mestre et Fages (point n° 25). § Cette situation inégale ne peut être compensée que par une intervention positive, extérieure aux seules parties au contrat. CJCE, 27 juin 2000, Océano Grupo Editorial : précité (point n° 27 : situation rendant nécessaire l’action des groupements prévue par l’art. 7 de la directive) - CJCE (5e ch.), 24 janvier 2002, Commission/République italienne : Aff. C-372/99 ; Cerclab n° 4406 ; D. 2002. AJ. 1065, obs. Chevrier (point n° 14 ; idem) - CJCE (1re ch.), 26 octobre 2006, Mostaza Claro / Centro Móvil Milenium SL. : Aff. C-168/05 ; Rec. p. I‑10421 ; Cerclab n° 4379 CJUE (1re ch.), 26 avril 2012, Nemzeti Fogyasztóvédelmi Hatóság/ Invitel Távközlési Zrt. : Aff. C-472/10 ; Cerclab n° 4411 (l’art. 6 § 1 est une disposition impérative).
Effectivité de la protection. Si la directive ne vise pas à harmoniser les sanctions applicables dans l’hypothèse d’une reconnaissance du caractère abusif d’une clause dans le cadre des actions en cessation, l’art. 7 § 1 oblige néanmoins les États membres à veiller à ce que des moyens adéquats et efficaces existent afin de faire cesser l’utilisation des clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs. CJUE (1re ch.), 26 avril 2012, Nemzeti Fogyasztóvédelmi Hatóság/ Invitel Távközlési Zrt. : Aff. C-472/10 ; Cerclab n° 4411 (point n° 35). § Ces moyens comprennent la possibilité pour des personnes ou des organisations ayant un intérêt légitime à protéger les consommateurs de saisir les tribunaux afin de faire déterminer si des clauses rédigées en vue d’une utilisation généralisée présentent un caractère abusif et d’obtenir, le cas échéant, leur interdiction. CJUE (1re ch.), 26 avril 2012, Nemzeti : précité (point n° 36). § … Et l’exigence que les clauses reconnues abusives ne lient pas les consommateurs, même s’ils n’étaient pas partie à l’action. CJUE (1re ch.), 26 avril 2012, Nemzeti : précité (point n° 38). § Sur l’effectivité, V. aussi Cerclab n° 5700 et les renvois.
Dissuasion. L’action des organisations ayant un intérêt légitime à protéger les consommateurs (art. 7 directive) a un objectif dissuasif. CJCE (5e ch.), 24 janvier 2002, Commission/République italienne : Aff. C-372/99 ; Cerclab n° 4406 ; D. 2002. AJ. 1065, obs. Chevrier (point n° 15) - CJUE (1re ch.), 26 avril 2012, Nemzeti Fogyasztóvédelmi Hatóság/ Invitel Távközlési Zrt. : Aff. C-472/10 ; Cerclab n° 4411 (point n° 37). § V. aussi pour les juges du fond : TI Grenoble, 28 juin 2012 : RG n° 11-09-000872 ; site CCA ; Cerclab n° 4109 (nature préventive et objectif dissuasif) - CA Paris (pôle 5, ch. 6), 15 octobre 2010 : RG n° 07/21494 ; Cerclab n° 2989 (nature préventive et objectif dissuasif), confirmant TGI Paris (1re ch. sect. soc.), 6 novembre 2007 : RG n° 05/09745 ; jugt n° 7 ; Cerclab n° 4162 (objet dissuasif) - CA Paris (pôle 5, ch. 4), 3 décembre 2014 : RG n° 12/15519 ; Cerclab n° 4987 ; Juris-Data n° 2014-029879 (l’action ouverte aux associations est une action préventive et dissuasive), sur appel de TGI Paris, 19 juin 2012 : RG n° 09/16180 ; Dnd.
C. NATURE DE L’ACTION
Action de droit privé. L’action en élimination de clauses abusives intentée par une association de protection des consommateurs, qui revêt le caractère d'un organisme de nature privée, n'a pas pour objet une manifestation de la puissance publique, puisque le litige ne concerne aucunement l'exercice de pouvoirs exorbitants par rapport aux règles de droit commun applicables dans les relations entre particuliers et qu’au contraire, une telle action relative vise à soumettre au contrôle du juge des rapports de droit privé. CJCE (6e ch.), 1er octobre 2002, Verein für Konsumenteninformation/Henkel : Aff. C-167/00 ; Cerclab n° 4408 ; Juris-Data n° 2002-204748 (point n° 30 ; conséquence : action relevant de la matière civile au sens de l'art. 1er, premier alinéa, de la convention de Bruxelles ; rejet de l’argumentation du gouvernement du Royaume-Uni soutenant qu'une association de protection des consommateurs doit être qualifiée d'autorité publique et que son droit d'obtenir une injonction juridictionnelle visant à interdire l'utilisation de clauses abusives constitue un pouvoir de droit public).
Action préventive. L’action des organisations ayant un intérêt légitime à protéger les consommateurs (art. 7 de la directive) a une nature préventive. CJCE (5e ch.), 24 janvier 2002, Commission/République italienne : Aff. C-372/99 ; Cerclab n° 4406 ; D. 2002. AJ. 1065, obs. Chevrier (point n° 15) - CJUE (1re ch.), 26 avril 2012, Nemzeti Fogyasztóvédelmi Hatóság/ Invitel Távközlési Zrt. : Aff. C-472/10 ; Cerclab n° 4411 (point n° 37). § V. aussi : CA Grenoble (1re ch. civ.), 1er avril 2014 : RG n° 13/05011 ; Cerclab n° 4750 (action à double objet : caractère indemnitaire permettant l'indemnisation du préjudice occasionné à l'intérêt collectif des consommateurs, mais aussi caractère préventif visant à éviter pour l'avenir l'usage de clauses jugées abusives au détriment des consommateurs), sur appel de TI Grenoble, 31 octobre 2013 : RG n° 11-13-000589 ; Dnd.
Dans le même sens pour la Cour de cassation : Cass. civ. 1re, 3 février 2011 : pourvoi n° 08-14402 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 3052 (« l’action préventive en suppression de clauses abusives ») et sur renvoi CA Lyon (1re ch. civ. A), 22 novembre 2012 : RG n° 11/02789 ; Cerclab n° 4076.
Dans le même sens pour les juges du fond : TGI Strasbourg (3e ch. civ.), 19 juillet 1994 : RG n° 94-3538 ; site CCA ; Cerclab n° 406 (action préventive, visant les contrats futurs), sur appel CA Colmar (2e ch. civ.), 16 juin 1995 : RG n° 4336/94 ; Cerclab n° 1416 (problème non examiné, solution implicitement identique) - CA Paris (1re ch. B), 7 mai 1998 : RG n° 96/86626 ; arrêt n° 160 ; Cerclab n° 1103 ; Juris-Data n° 1998-023868 ; RJDA 8-9/98, n° 1058 ; D. Affaires 1998. 1851, obs. V.A.-R ; Lamyline (les anciens art. L. 421-1 et L. 421-6 C. consom. n'interdisent pas que l’action soit éventuellement préventive), confirmant TGI Paris (1re ch.), 8 octobre 1996 : RG n° 15827/95 ; Cerclab n° 426 ; Juris-Data n° 1996-049942 (action collective pour demander l’élimination de façon préventive et généralisée, indépendamment de toute action individuelle d'un consommateur, et de la signature effective d'un tel contrat) - CA Paris (25e ch. A), 23 mai 2003 : RG n° 2002/03454 ; arrêt n° 198 ; Cerclab n° 878 ; Juris-Data n° 2003-217480 (l'ancien art. L. 412-6 C. consom. autorise les associations à agir à des fins préventives), confirmant TGI Paris (5e ch. 2e sect.), 24 janvier 2002 : RG n° 01/17035 ; Cerclab n° 2609 (l'action en suppression de clauses abusives tend à la suppression matérielle de clauses dans des modèles qui serviront de base à des contrats futurs) - TGI Grenoble (4e ch. civ.), 13 septembre 2004 : RG n° 02/04238 ; Site CCA ; Cerclab n° 3900 (l'objet de l'action est défini comme la dissuasion, résultat d’une action préventive, dans la mesure où il importe de protéger les consommateurs par avance contre des pratiques répréhensibles) - TGI Grenoble (4e ch. civ.), 26 mai 2008 : RG n° 05/03119 ; jugt n° 166 ; site CCA ; Cerclab n° 4161 (action préventive) - TGI Grenoble (4e ch.), 8 juillet 2009 : RG n° 05/2253 ; jugt n° 164 ; Cerclab n° 4166 (action présentant pour partie un caractère préventif) - CA Paris (pôle 5, ch. 6), 15 octobre 2010 : RG n° 07/21494 ; Cerclab n° 2989 (nature préventive et objectif dissuasif), confirmant TGI Paris (1re ch. sect. soc.), 6 novembre 2007 : RG n° 05/09745 ; jugt n° 7 ; Cerclab n° 4162 (objet dissuasif) - TGI Paris (1/4 soc.), 22 mars 2011 : RG n° 09/18791 ; site CCA ; Cerclab n° 4062 (accès internet ; l'action ouverte aux associations de consommateurs par les articles L. 421-2 et L. 421-6 C. consom. a pour objet de faire cesser des agissements illicites et pour objectif essentiel de prévenir les atteintes portées aux droits des consommateurs) - TI Grenoble, 28 juin 2012 : RG n° 11-09-000872 ; site CCA ; Cerclab n° 4109 (nature préventive et objectif dissuasif) - CA Grenoble (1re ch. civ.), 10 septembre 2013 : RG n° 11/02728 ; Cerclab n° 4620 (action préventive), confirmant TGI Grenoble, 16 mai 2011 : RG n° 0704030 ; Dnd - CA Grenoble (1re ch. civ.), 24 février 2014 : RG n° 09/04276 ; Cerclab n° 4707 (action préventive) - CA Paris (pôle 5, ch. 4), 3 décembre 2014 : RG n° 12/15519 ; Cerclab n° 4987 ; Juris-Data n° 2014-029879 (l’action ouverte aux associations est une action préventive et dissuasive), sur appel de TGI Paris, 19 juin 2012 : RG n° 09/16180 ; Dnd - CA Paris (pôle 2 ch. 2), 5 juin 2015 : RG n° 13/20479 ; arrêt n° 2015-149 ; Cerclab n° 5296 (action préventive), sur appel de TGI Paris, 9 juillet 2013 : RG n° 10/13976 ; Dnd - CA Paris (pôle 2 ch. 2), 5 juin 2015 : RG n° 13/20482 ; arrêt n° 2015-150 ; Cerclab n° 5294 (idem).
Pour une position plus nuancée : TGI Grenoble (4e ch. civ.), 27 octobre 2008 : RG n° 07/03705 ; Cerclab n° 4256 (l'action en suppression de clauses abusives ou illicites présente « pour partie un caractère préventif ») - TGI Grenoble (4e ch.), 2 novembre 2009 : RG n° 07/3093 ; Cerclab n° 14 (action qui « présente pour partie un caractère préventif »), sur appel CA Grenoble (1re ch. civ.), 17 juin 2013 : RG n° 09/04822 ; Cerclab n° 4632.
Action curative. Pour une décision estimant, dans le prolongement de l’arrêt Invitel, que l’action a également une finalité curative : cette conception de l’action curative, et non simplement préventive, des associations concernant des anciennes clauses aujourd’hui supprimées ou substituées ne peut avoir pour effet de supprimer le droit à la preuve des prestataires concernés et peut donc donner lieu à des débats de recevabilité de façon à permettre à ces derniers d’apporter le cas échéant la preuve, qui leur incombe, que les nouvelles conditions générales de vente (CGV), qu’il leur est toujours ultérieurement loisible de substituer aux anciennes dans ces contrats à exécution successive, ont bien été régulièrement et personnellement notifiées aux parties intéressées et ce, vis-à-vis de l’ensemble de leur clientèle. TGI Paris (ch. 1-4 soc.), 30 octobre 2018 : RG n° 13/03227 ; Cerclab n° 8256. § V. aussi : CA Paris (pôle 5 ch. 11), 30 mars 2018 : RG n° 16/16694 ; Cerclab n° 7534 (l’association étant chargée d'une mission de promotion et de défense des droits et intérêts des consommateurs, dont l'objet est préventif, dissuasif et curatif, établit agir pour l'intérêt collectif des consommateurs) - CA Paris (pôle 5 ch. 11), 30 mars 2018 : RG n° 15/08688 ; Cerclab n° 7532 (téléphonie mobile ; référence à la fonction curative évoquée par la CJUE).
Action délictuelle ou quasi délictuelle. Les règles de compétence énoncées par la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, modifiée, concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, doivent être interprétées en ce sens qu'une action juridictionnelle préventive, introduite par une association de protection des consommateurs en vue de faire interdire l'utilisation par un commerçant de clauses jugées abusives dans des contrats avec des particuliers, est de nature délictuelle ou quasi délictuelle au sens de l'art. 5, point 3, de ladite convention. CJCE (6e ch.), 1er octobre 2002, Verein für Konsumenteninformation/Henkel : Aff. C-167/00 ; Cerclab n° 4408 ; Juris-Data n° 2002-204748 (points n° 34 à 49 ; arg. 1/ l’action n’est pas de nature contractuelle, dès lors que l’association et le commerçant ne sont pas liés par un contrat, même si elle fait suite à un contrat déjà conclu, et que l’association agit sur la base d’un droit qui lui a été conféré par la loi aux fins de faire interdire l'utilisation de clauses que le législateur juge illicites dans les relations entre un professionnel et un consommateur final privé, point n° 39 ; arg. 2/ l’action correspond aux actions de nature délictuelle ou quasi délictuelle, dès lors que la notion de « fait dommageable » visée à l'art. 5, point 3, de la convention de Bruxelles revêt une large portée de sorte que, s'agissant de la protection des consommateurs, elle recouvre non seulement les situations dans lesquelles un particulier a subi un préjudice à titre individuel, mais aussi, notamment, les atteintes à l'ordre juridique résultant de l'utilisation de clauses abusives que les associations ont pour mission d'empêcher, point n° 42, interprétation en harmonie avec la finalité de l'art. 7 de la directive 93/13, point n° 43).
Dans le même sens, appliquant les règles de compétence territoriale applicables en matière délictuelle : CA Lyon (1re ch.), 21 septembre 1995 : RG n° 93/03524 ; Cerclab n° 1151, confirmant TGI Lyon (1re ch.), 21 avril 1993 : RG n° 92/10778 ; Cerclab n° 1089 (accord des parties sur la nature délictuelle de l’action) - CA Paris (25e ch. A), 19 décembre 2003 : RG n° 2002/04822 ; Cerclab n° 868 ; Juris-Data n° 2003-230702 (sans lien contractuel avec la société organisant la loterie, l’association de consommateurs introduit une action de nature quasi délictuelle à son encontre, ce qui ne fait nullement obstacle au caractère contractuel des documents publicitaires et des règlements des jeux adressés par la société à des consommateurs par publipostage), confirmant TGI Paris (1re ch. soc.), 13 février 2002 : RG n° 00/20927 ; jugt n° 16 ; Cerclab n° 3327 - TI Rennes, 21 mai 2007 : RG n° 11-07-000342 ; Cerclab n° 2766 (application de l’art. 46 CPC), sur appel CA Rennes (1re ch. B), 27 mars 2008 : RG n° 07/03298 ; arrêt n° 243 ; Cerclab n° 1775 ; Juris-Data n° 2008-364502 (problème non examiné) - CA Grenoble (1re ch. civ.), 2 décembre 2013 : RG n° 13/02048 ; Cerclab n° 4639 (il est constant que l'action en suppression des clauses abusives ou/et illicites fondée sur l'ancien art. L. 421-6 C. consom. est une action civile quasi délictuelle soumise aux règles de compétence territoriale prévues par les art. 42 et 46 CPC), sur appel de TI Grenoble, 23 avril 2013, TI Grenoble, 11 avril 2013 : RG n° 11-12-0373 ; Dnd.
Comp. l’action de l'ancien art. L. 421-6 C. consom. présente les caractères d'une action à double objet ; elle a un caractère indemnitaire en permettant l'indemnisation du préjudice occasionné à l'intérêt collectif des consommateurs, mais aussi un caractère préventif visant à éviter pour l'avenir l'usage de clauses jugées abusives au détriment des consommateurs ; l'art. 46 CPC qui s'applique en matière contractuelle comme en matière délictuelle a ainsi vocation à s'appliquer. CA Grenoble (1re ch. civ.), 1er avril 2014 : RG n° 13/05011 ; Cerclab n° 4750 (seule reste à apporter la preuve que le contrat litigieux est appliqué sur le ressort du tribunal d'instance), sur appel de TI Grenoble, 31 octobre 2013 : RG n° 11-13-000589 ; Dnd.
D. CARACTÉRISTIQUES ORIGINALES DE L’ACTION
Règles spécifiques d’interprétation. La directive n° 93/13/CEE du 5 avril 1993 contient des dispositions particulières sur la rédaction et l’interprétation des contrats de consommation en général, qui prévoient une règle particulière pour l’action des groupements de consommateurs. Selon son art. 5, « dans le cas des contrats dont toutes ou certaines clauses proposées au consommateur sont rédigées par écrit, ces clauses doivent toujours être rédigées de façon claire et compréhensible. En cas de doute sur le sens d'une clause, l'interprétation la plus favorable au consommateur prévaut. Cette règle d'interprétation n'est pas applicable dans le cadre des procédures prévues à l'art. 7 paragraphe 2 ». Directive 93/13/CEE : Cerclab n° 3854 (art. 5).
Cette différence a été explicitée par la CJUE, qui ne la considère pas comme défavorable aux consommateurs : la distinction faite à l’art. 5 de la directive, quant à la règle d’interprétation applicable, entre les actions impliquant un consommateur individuel et les actions en cessation, qui concernent des personnes ou des organisations représentatives de l’intérêt collectif des consommateurs, s’explique par la finalité différente de ces actions ; dans le premier cas, les tribunaux ou les organes compétents sont appelés à porter une appréciation in concreto sur le caractère abusif d’une clause contenue dans un contrat déjà conclu, tandis que, dans le second cas, il leur incombe d’effectuer une appréciation in abstracto sur le caractère abusif d’une clause susceptible d’être incorporée dans des contrats qui n’ont pas encore été conclus ; dans le premier cas, une interprétation favorable au consommateur individuellement concerné bénéficie immédiatement à celui-ci ; dans le second cas, en revanche, pour obtenir, à titre préventif, le résultat le plus favorable à l’ensemble des consommateurs, il n’y a pas lieu, en cas de doute, d’interpréter la clause comme comportant des effets favorables à leur égard ; une interprétation objective permet ainsi d’interdire plus souvent l’utilisation d’une clause obscure ou ambiguë, ce qui a pour conséquence une protection plus large des consommateurs. CJCE (1re ch.), 9 septembre 2004, Commission/Royaume d’Espagne : Aff. C-70/03 ; Cerclab n° 4413 (point n° 16). § En conséquence, la précision contenue à l’art. 5, troisième phrase, de la directive constitue une règle normative et contraignante, qui confère aux consommateurs des droits et concourt à définir le résultat auquel tend cette directive. CJCE (1re ch.), 9 septembre 2004, Commission/Royaume d’Espagne : précité (point n° 17 ; manquement constaté à l’encontre de l’Espagne, la preuve n’étant pas rapportée que cette distinction résultait de l’application jurisprudentielle des textes espagnols).
La loi n° 95-96 du 1er février 1995 introduisant la directive a repris les exigences posées par celle-ci. Selon l’alinéa 2 de l’ancien art. L. 133-2 C. consom., les clauses « s'interprètent en cas de doute dans le sens le plus favorable au consommateur ou au non-professionnel. Le présent alinéa n'est toutefois pas applicable aux procédures engagées sur le fondement de l'art. L. 421-6. » Le nouvel article L. 211-1 C. consom., al. 2, reprend la même règle : « Elles s'interprètent en cas de doute dans le sens le plus favorable au consommateur. Les dispositions du présent alinéa ne sont toutefois pas applicables aux procédures engagées sur le fondement de l'article L. 621-8 ».
Effet relatif de la chose jugée et conformité à l’art. 5 C. civ. À raison du pouvoir dévolu au juge par la loi, en l'espèce les dispositions de l'ancien art. L. 132-1 [L. 212-1 nouveau] C. consom. d'apprécier le caractère abusif et illicite de certaines stipulations contractuelles, l’examen préventif des stipulations contractuelles susceptibles d'être abusives pour en proposer la suppression ne contrevient pas à la prohibition de l'art. 5 C. civ. CA Paris (25e ch. B), 13 février 2009 : RG n° 06/06059 ; site CCA ; Cerclab n° 3145 ; Lexbase. § Le juge qui ordonne la suppression de la clause déclarée abusive ne statue pas par voie de disposition générale et réglementaire, mais se borne à tirer les conséquences légales de ses constatations dans le litige précis opposant une association agréée de consommateurs et un professionnel, de sorte qu'il ne rend en aucune manière un arrêt de règlement au sens de l’art. 5 C. civ. CA Paris (pôle 5, ch. 6), 15 octobre 2010 : RG n° 07/21494 ; Cerclab n° 2989 (autre arg. : l'interdiction de l'arrêt de règlement étant de niveau législatif, le législateur a pu parfaitement y déroger dans l’ancien art. L. 132-1 C. consom.), confirmant TGI Paris (1re ch. sect. soc.), 6 novembre 2007 : RG n° 05/09745 ; jugt n° 7 ; Cerclab n° 4162 (le prononcé du caractère inopposable des clauses abusives ne conduit pas le tribunal à statuer par voie générale et à donner une solution pour l'avenir, mais à constater un fait juridique passé à l'occasion d'une cause qui lui est soumise).
Sur cette question, V. aussi sous l’angle de l’autorité de la chose jugée Cerclab n° 5710.
Rappr., en droit européen, pour une décision fixant les limites au pouvoir de certaines juridictions suprêmes de prendre des décisions abstraites et générales (pouvant s’apparenter à des arrêts de règlement) dans le cadre d’une action individuelle : la directive 93/13/CEE, lue à la lumière de l’art. 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, ne s’oppose pas à ce qu’une juridiction suprême d’un État membre adopte, dans l’intérêt d’une interprétation uniforme du droit, des décisions contraignantes au sujet des modalités de mise en œuvre de cette directive, pour autant que celles-ci n’empêchent le juge compétent ni d’assurer le plein effet des normes prévues dans ladite directive et d’offrir au consommateur un recours effectif en vue de la protection des droits qu’il peut en tirer, ni de saisir la Cour d’une demande de décision préjudicielle à ce titre, ce qu’il appartient toutefois à la juridiction de renvoi de vérifier. CJUE (3e ch.), 14 mars 2019, Zsuzsanna Dunai / ERSTE Bank Hungary Zrt : Aff. C 118/17 ; Cerclab n° 8155.
E. LOI APPLICABLE
Application dans l’espace. Le règlement (CE) n° 593/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 17 juin 2008, sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I) et le règlement (CE) n° 864/2007 du Parlement européen et du Conseil, du 11 juillet 2007, sur la loi applicable aux obligations non contractuelles (« Rome II »), doivent être interprétés en ce sens que, sans préjudice de l’article 1er, paragraphe 3, de chacun de ces règlements, la loi applicable à une action en cessation au sens de la directive 2009/22/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2009, relative aux actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs, dirigée contre l’utilisation de clauses contractuelles prétendument illicites par une entreprise établie dans un État membre qui conclut des contrats par voie de commerce électronique avec des consommateurs résidant dans d’autres États membres et, notamment, dans l’État du for, doit être déterminée conformément à l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 864/2007, alors que la loi applicable à l’appréciation d’une clause contractuelle donnée doit toujours être déterminée en application du règlement n° 593/2008, que cette appréciation soit effectuée dans le cadre d’une action individuelle ou dans celui d’une action collective. CJUE (3e ch.), 28 juillet 2016, Verein für Konsumenteninformation / Amazon EU Sàrl : Aff. C‑191/15 ; Cerclab n° 6589.