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CA AIX-EN-PROVENCE (11e ch. A), 19 juin 2009

Nature : Décision
Titre : CA AIX-EN-PROVENCE (11e ch. A), 19 juin 2009
Pays : France
Juridiction : Aix-en-provence (CA), 11e ch. A
Demande : 07/15169
Décision : 2009/402
Date : 19/06/2009
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Juris Data
Date de la demande : 14/09/2007
Décision antérieure : TI MARTIGUES, 24 juillet 2007
Numéro de la décision : 402
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2616

CA AIX-EN-PROVENCE (11e ch. A), 19 juin 2009 : RG n° 07/15169 ; arrêt n° 2009/402

Publication : Juris-Data n° 2009-007312

 

Extrait : « Attendu qu'aux termes de conclusions confuses, M. X. soulève la nullité des clauses du contrat de mandat relatives à la durée de celui-ci et à la clause pénale comme étant abusives.

Attendu que la recommandation n° 03-02 du 18 septembre 2003 de la commission des clauses abusives demande d'éliminer des contrats les clauses ayant pour objet ou pour effet d'une part de ne pas limiter dans le temps les effets du contrat, notamment en prévoyant une durée indéfiniment renouvelable par tacite reconduction et d'autre part d'interdire au mandant, à peine d'avoir à verser une indemnité, de traiter sans le concours du mandataire, directement ou indirectement avec un acquéreur ayant été présenté par lui ou ayant visité les locaux avec lui, sans que le mandat limite raisonnablement la durée de cette interdiction.

Attendu qu'en l'espèce, en ce qui concerne la durée du mandat, il apparaît que s'il est stipulé, au bas de la première page du contrat, que ce mandat est donné pour une durée de trois mois et qu'au-delà, sauf révocation expresse, il se poursuivra par tacite reconduction par période de six mois, il n'est mentionné aucune limite de temps à ces tacites reconductions successives.

Attendu que de même il apparaît que l'interdiction pour le mandant de traiter sans le concours du mandataire avec un acquéreur présenté par lui ou ayant visité les locaux avec lui n'a aucune limitation de durée puisqu'elle se poursuit pendant tout le cours du mandat et de ses renouvellements tacites, ceux-ci n'étant pas limités dans le temps.

Attendu qu'il apparaît que ces deux clauses sont contraires à la recommandation susvisée et sont abusives ; qu'il y a lieu en conséquence d'infirmer le jugement déféré, et de prononcer leur annulation. Attendu que la SAS Immobilière de la Résidence ne peut se prévaloir de la clause pénale annulée pour réclamer à M. X. l'indemnité forfaitaire prévue à cette clause. »

 

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

ONZIÈME CHAMBRE A

ARRÊT DU 19 JUIN 2009

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 07/15169. Arrêt n° 2009/402.

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal d'Instance de MARTIGUES en date du 24 juillet 2007 enregistré au répertoire général sous le n° 11-06-1430.

 

APPELANT :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], demeurant […], représenté par la SCP USERAS - BUVAT - MICHOTEY, avoués à la Cour, Assisté de Maître Maria COMMANDE, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Maître Anne-Laure VEYNE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

 

INTIMÉS :

- SAS IMMOBILIÈRE DE LA RÉSIDENCE, prise en la personne de son Président en exercice,

demeurant […], représentée par la SCP BLANC-CHERFILS, avoués à la Cour, Assistée de Maître Willi SCHWANDER, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE substitué par Maître Bérengère BERNART, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE

- Monsieur Y.

né le [date] à [ville], demeurant […], représenté par la SCP DE SAINT FERREOL-TOUBOUL, avoués à la Cour, Assisté de la SCP BENSA & GISBERT, avocats au barreau de MARSEILLE substituée par Maître Benjamin LAFON, avocat au barreau de MARSEILLE

[minute page 2]

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 15 avril 2009 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Michèle RAJBAUT, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de : Monsieur Robert PARNEIX, Président, Madame Danielle VEYRE, Conseiller, Madame Michèle RAJBAUT, Conseiller, qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Mireille LESFRITH.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 juin 2009.

ARRÊT : Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 juin 2009, Signé par Monsieur Robert PARNEIX, Président et Madame Mireille LESFRITH, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 3] Vu le jugement rendu le 24 juillet 2007 par le tribunal d'instance de Martigues qui a :

- débouté la Société Immobilière de la Résidence de ses demandes dirigées contre M. Y.

- condamné M. X. à payer à la Société Immobilière de la Résidence la somme de 8.500 Euros représentent le montant de la commission contractuellement convenue.

- ordonné l'exécution provisoire.

- condamne M. X. au paiement de la somme de 800 Euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Vu la déclaration d'appel de M. X. du 14 septembre 2007 et ses conclusions récapitulatives du 20 juin 2008.

Vu l'ordonnance du 23 novembre 2007 constatant le désistement partiel d'appel de M. X. à l'égard de Mme Z.

Vu les conclusions de M. Y. du 5 mai 2008.

Vu les conclusions de la SAS Immobilière de la Résidence du 22 octobre 2008.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Attendu qu'il résulte des pièces versées qu'à partir de la fin de l'année 2005, M. X. a mis en vente un bien immobilier à usage d'habitation lui appartenant situé à [ville] et qu'il a signé un certain nombre de mandats de vente sans exclusivité avec diverses agences immobilières, en particulier le 12 octobre 2005 avec la SARL Immobilière de l'Etang et le 5 janvier 2006 avec la SAS Immobilière de la Résidence.

Attendu que le mandat signé avec la SAS Immobilière de la Résidence était conclu pour une durée de trois mois et au-delà, sauf révocation par lettre recommandée avec accusé de réception avec préavis de 15 jours, se poursuivait par tacite reconduction par période de six mois, qu'il était en outre stipulé que la rémunération du mandataire en cas de réalisation de la vente avec un acheteur présentée par celui-ci serait de 8.500 Euros TTC.

Attendu que ce contrat stipulait également que pendant le cours du mandat et de ses renouvellements ainsi que dans les douze mois suivant l'expiration ou la résiliation de celui-ci, le mandant s'interdisait de traiter directement ou par l'intermédiaire d'un autre mandataire avec un acheteur présenté à lui par le mandataire, et qu'à défaut de respecter cette clause, le mandataire aurait droit à une indemnité forfaitaire, à titre de clause pénale, à la charge du mandant, d'un montant égal à celui de la rémunération TTC du mandataire prévue au contrat.

Attendu que la SAS Immobilière de la Résidence a fait visiter ce bien le 2 mars 2006 à M. Y. qui a signé, le même jour un document intitulé « reconnaissance d'indications et de visite » ; que le 6 mars 2006 M. Y. a signé un compromis de vente de ce bien avec M. X. par l'intermédiaire de la SARL Immobilière de l'Etang.

Attendu que la SAS Immobilière de la Résidence a assigné M. X. et M. Y. sur le fondement des dispositions de l'article 1147 du code civil en paiement solidairement de la somme de 8.500 Euros au titre de la clause pénale prévue au contrat de mandat.

Attendu qu'aux termes de conclusions confuses, M. X. soulève la nullité des clauses du contrat de mandat relatives à la durée de celui-ci et à la clause pénale comme étant abusives.

Attendu que la recommandation n° 03-02 du 18 septembre 2003 de la commission des clauses abusives demande d'éliminer des contrats les clauses ayant pour objet ou pour effet d'une part de ne pas limiter dans le temps les effets du contrat, notamment en prévoyant une durée indéfiniment renouvelable par tacite reconduction et d'autre part d'interdire au mandant, à peine d'avoir à verser une indemnité, de traiter sans le concours du mandataire, directement ou indirectement avec un acquéreur ayant été présenté par lui ou ayant visité les locaux avec lui, sans que le mandat limite raisonnablement la durée de cette interdiction.

[minute page 4] Attendu qu'en l'espèce, en ce qui concerne la durée du mandat, il apparaît que s'il est stipulé, au bas de la première page du contrat, que ce mandat est donné pour une durée de trois mois et qu'au-delà, sauf révocation expresse, il se poursuivra par tacite reconduction par période de six mois, il n'est mentionné aucune limite de temps à ces tacites reconductions successives.

Attendu que de même il apparaît que l'interdiction pour le mandant de traiter sans le concours du mandataire avec un acquéreur présenté par lui ou ayant visité les locaux avec lui n'a aucune limitation de durée puisqu'elle se poursuit pendant tout le cours du mandat et de ses renouvellements tacites, ceux-ci n'étant pas limités dans le temps.

Attendu qu'il apparaît que ces deux clauses sont contraires à la recommandation susvisée et sont abusives ; qu'il y a lieu en conséquence d'infirmer le jugement déféré, et de prononcer leur annulation.

Attendu que la SAS Immobilière de la Résidence ne peut se prévaloir de la clause pénale annulée pour réclamer à M. X. l'indemnité forfaitaire prévue à cette clause.

Attendu que, par ailleurs, et indépendamment de l'existence de cette clause pénale, la SAS Immobilière de la Résidence ne rapporte pas la preuve d'un manquement fautif de M. X. à ses obligations contractuelles de mandant ; qu'en effet il n'est pas rapporté la preuve que M. X. aurait été présent le 2 mars 2006 lors de la visite du bien par M. Y. avec un représentant de l'agence ; qu'il n'est pas davantage rapporté la preuve qu'il ait su au moment de la signature du compromis de vente du 6 mars 2006 par l'intermédiaire de la SARL Immobilière de l'Etang que M. Y. avait déjà vu le bien avec la SAS Immobilière de la Résidence.

Attendu qu'en l'absence de comportement fautif de M. X., la SAS Immobilière de la Résidence sera déboutée de ses demandes à son encontre.

Attendu que la SAS Immobilière de la Résidence demande également la condamnation de M. Y. à lui payer à titre de dommages et intérêts la somme de 8.500 Euros en se fondant sur le document intitulé « reconnaissance d'indication et de visite » signé par lui aux termes duquel il s'engageait à ne traiter l'achat de cette affaire que par l'intermédiaire de cette agence, même après expiration du mandat, sous peine d'être tenu de payer une indemnité égale au montant de la commission.

Attendu qu'à titre subsidiaire M. X. demande la condamnation de M. Y. à payer à la SAS Immobilière de la Résidence la somme de 8.500 Euros comme prévu sur le bon de visite.

Attendu que sur ce point il convient de rappeler qu'en vertu du principe de droit selon lequel nul en France ne plaide par procureur, M. X. est irrecevable à demander la condamnation d'une partie, en l'occurrence M. Y. au profit d'une autre partie, la SAS Immobilière de la Résidence.

Attendu que le document intitulé « reconnaissance d'indications et de visite » n'a aucune valeur contractuelle et ne créé pas de lien contractuel entre l'agent immobilier et un acquéreur éventuel ; qu'il s'agit d'un simple document permettant au mandataire de justifier de l'exécution de son mandat auprès du mandant et de conserver la liste et les identités des visiteurs du bien.

Attendu que seule la responsabilité délictuelle ou quasi-délictuelle de M. Y. pourrait être envisagée à l'égard de la SAS Immobilière de la Résidence ; que celle-ci ne vise dans ses conclusions que les articles du code civil relatifs à la responsabilité contractuelle et au contrat de mandat et n'allègue aucun comportement fautif de nature délictuelle au sens des articles 1382 et 1383 du code civil.

Attendu que la SAS Immobilière de la Résidence sera déboutée de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de M. Y.

[minute page 5] Attendu que M. Y. ne justifie pas de ce que M. X. et la SAS Immobilière de la Résidence aient abusé de leur droit d'agir ou de se défendre en justice ou d'user des voies de recours prévues ; qu'il sera débouté de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Attendu que M. X. demande que soit ordonnée la restitution des sommes qu'il a versées en vertu du jugement assorti de l'exécution provisoire.

Mais attendu que le présent arrêt infirmatif constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement, et les sommes devant être restituées porteront intérêts au taux légal à compter de la notification valant mise en demeure de la décision ouvrant droit à restitution ; qu'il n'y a donc pas lieu de statuer sur ce chef de demande ;

Attendu que l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

Attendu que partie succombante, la SAS Immobilière de la Résidence supportera la charge des dépens de première instance et d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

- Infirme le jugement déféré.

- Statuant à nouveau,

- Annule comme étant abusives les clauses du contrat de mandat signé le 5 janvier 2006 entre M. X. et la SAS Immobilière de la Résidence relatives à la durée du contrat du mandat et à la clause pénale.

- Déboute la SAS Immobilière de la Résidence de ses demandes à l'encontre de M. X. et de M. Y.,

- Déclare irrecevables les demandes de M. X. tendant à voir condamner M. Y. au paiement de sommes à la SAS Immobilière de la Résidence.

- Déboute M. Y. de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive à l'encontre de M. X. et de la SAS Immobilière de la Résidence.

- Dit n'y avoir lieu de statuer sur la demande de restitution des sommes versées en vertu de l'exécution provisoire du jugement.

- Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamne la SAS Immobilière de la Résidence aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers étant recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER                LE PRÉSIDENT