CA ANGERS (1re ch. A), 6 avril 2010
CERCLAB - DOCUMENT N° 2885
CA ANGERS (1re ch. A), 6 avril 2010 : RG n° 09/00691 ; arrêt n° 152
Publication : Jurica
Extrait : « De même, les frais administratifs et de délivrance des quittances ont été facturés en application de l'article 6 dernier alinéa du contrat de bail alors qu'une telle clause est réputée non écrite en vertu de l'article 4 p) de la loi du 6 juillet 1989. La somme de 14 euros sera donc également déduite du montant de la condamnation. […]
Sur la clause pénale, les intimés sont fondés à soutenir que la recommandation de la Commission des clauses abusives du 17 février 2000 sur les contrats de location de locaux à usage d'habitation ne concerne que les personnes morales bailleurs professionnels ou les personnes physiques ayant la qualité de loueur professionnel et que le premier juge ne pouvait déclarer non écrite la clause de l'article 2-13 du contrat de bail pour ce motif, étant de simples particuliers. Le jugement sera infirmé de ce chef. »
COUR D’APPEL D’ANGERS
PREMIÈRE CHAMBRE A
ARRÊT DU 6 AVRIL 2010
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 09/00691. Arrêt n° 152. Jugement du 27 février 2009 - Tribunal d'Instance du MANS - n° d'inscription au RG de première instance 08/0987.
APPELANT :
Monsieur X.,
né le [date] à [ville], (bénéficiant de l'aide juridictionnelle partielle (85 %) numéro 2009/XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'ANGERS), représenté par Maître Jacques VICART, avoué à la Cour
INTIMÉS ET INCIDEMMENT APPELANTS :
Monsieur Y.,
Madame Z. épouse Y.,
représentés par la SCP CHATTELEYN ET GEORGE, avoués à la Cour, assistés de Maître Alain GUIBERT, avocat au barreau du MANS
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 23 février 2010 à 14 H 00, en audience publique, devant la Cour composée de : Madame VERDUN, conseiller faisant fonction de président en application de l’ordonnance du 15 février 2010, Madame RAULINE, conseiller, ayant été entendue en son rapport, et Madame LECAPLAIN-MOREL, conseiller, qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame LEVEUF
ARRÊT : Contradictoire. Prononcé publiquement le 6 avril 2010, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile. Signé par Madame VERDUN, président, et par Madame LEVEUF, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Par acte sous seing privé en date du 5 août 2006, Monsieur et Madame Y. ont donné à bail à Monsieur X. un appartement situé [...] moyennant un loyer mensuel actualisé de 679,24 euros.
Le 5 août 2008, les bailleurs ont fait délivrer au locataire un commandement de payer la somme de 699,24 euros au titre des loyers impayés et visant la clause résolutoire insérée au bail.
Par acte d'huissier en date du 13 novembre 2008, Monsieur et Madame Y. ont fait assigner Monsieur X. devant le tribunal d'instance du Mans aux fins de résiliation du bail, d'expulsion et de paiement de diverses sommes. L'assignation a été notifiée au préfet le 14 novembre 2008.
Par un jugement réputé contradictoire du 27 février 2009, le tribunal a :
- condamné Monsieur X. à payer à Monsieur et Madame Y. 4.761,16 euros au titre de l'arriéré locatif arrêté au 15 octobre 2008, en deniers ou quittances, avec intérêts au taux légal à compter du jugement,
- constaté la résiliation du bail au 6 octobre 2008,
- dit que Monsieur X. devra libérer les lieux dans le délai d'un mois à compter de la signification de la décision,
- ordonné à défaut son expulsion,
- dit qu'il devra payer une indemnité d'occupation égale au montant du loyer indexé plus charges jusqu'à la libération effective des lieux,
- déclaré la clause pénale du contrat de bail non écrite,
- rejeté la demande d'exécution provisoire,
- condamné Monsieur X. à payer à Monsieur et Madame Y. la somme de 300 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.
Monsieur X. a interjeté appel de cette décision le 2 avril 2009. Monsieur et Madame Y. ont relevé appel incident.
Les parties ont conclu. L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 janvier 2010.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par conclusions du 23 septembre 2009, Monsieur X. demande à la cour d'infirmer le jugement, de « constater » la nullité de l'assignation du 13 novembre 2008 et, en conséquence, du jugement déféré, en toute hypothèse, de le décharger des condamnations prononcées à son encontre, de débouter Monsieur et Madame Y. de toutes leurs demandes et de les condamner aux dépens de première instance et d'appel.
Il expose qu'il n'a pas eu connaissance de l'assignation et n'a donc pas été en mesure d'assurer sa défense devant le tribunal. Il fait observer que la comparaison du décompte joint au commandement de payer et de celui produit devant le tribunal fait apparaître que celui-ci était nécessairement erroné car il ne pouvait devoir 699,24 euros en juillet et 4.761,16 euros en octobre puisque le loyer s'élève à 689,26 euros.
Par conclusions du 4 décembre 2009, Monsieur et Madame Y. demandent à la cour de débouter Monsieur X. de son appel, de confirmer le jugement, sauf sur la clause pénale, de condamner Monsieur X. à leur payer 476 euros à ce titre et, à défaut, à titre de dommages-intérêts, ainsi que 2.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile et les dépens d'appel.
Ils indiquent que la citation a été délivrée à la personne présente au domicile, qu'un avis de passage a été laissé à l'appelant et une lettre envoyée le lendemain par l'huissier de justice. Monsieur X. a donc nécessairement pris connaissance de la convocation devant le tribunal.
Ils expliquent l'écart entre les deux décomptes par le fait que celui qui était annexé au commandement ne reprenait l'historique que depuis le 1er janvier 2007. Or, l'appelant restait devoir des sommes au titre de l'année 2006, à savoir les frais de rédaction du bail et le dépôt de garantie, au total la somme de 2.598,44 euros.
Ils sollicitent l'infirmation du jugement sur la clause pénale en faisant valoir que la recommandation 2000-01 de la commission des clauses abusives ne s'applique qu'aux baux conclus par des bailleurs professionnels conformément à l’article L. 134-1 du Code de la consommation. Ils précisent qu'ils sont des particuliers, victimes des agissements d'un preneur indélicat, et qu'ils n'ont que de modestes ressources.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
1°) Sur la nullité de l'assignation :
L'assignation du 13 novembre 2008 a été délivrée à une personne présente au domicile, Madame A., cousine de l'appelant, qui a accepté de recevoir l'acte. L'huissier de justice mentionne dans l'acte qu'il a laissé un avis de passage au domicile de ce dernier et il justifie lui avoir envoyé le lendemain un courrier lui notifiant la copie de l'acte.
Dès lors, la citation est régulière comme étant conforme aux prescriptions des articles 655 à 658 du Code de procédure civile et le moyen sera rejeté.
2°) Sur le fond :
L'appelant critique le montant des sommes qui lui sont réclamées. Les intimés sollicitent l'infirmation du jugement sur la clause pénale.
D'après le décompte du 15 octobre 2008, l'appelant serait redevable, selon les bailleurs, des sommes suivantes :
- 579,20 euros au titre de sa contribution aux frais de rédaction du bail (juin 2006),
- 1.320 euros au titre du dépôt de garantie (juillet 2006),
- 2.716,96 euros au titre des loyers impayés (juillet à octobre 2008),
- 95 euros au titre des ordures ménagères (année 2008),
- 14 euros au titre de frais administratifs ou d'avis d'échéance,
- 36 euros au titre des frais d'entretien de la chaudière.
Il est exact que le commandement de payer visait uniquement le loyer du mois de juillet 2008.
Aux termes de la loi du 6 juillet 1989, la résiliation de plein droit du bail ne peut intervenir que pour défaut de paiement des loyers, des charges ou du dépôt de garantie. La somme due au titre des honoraires de rédaction d'acte n'avait donc pas à figurer dans le commandement de payer du 5 août 2008 qui visait la clause résolutoire. Quant au dépôt de garantie, la délivrance d'un commandement de payer est une simple faculté pour le bailleur, s'il entend faire jouer la clause résolutoire pour non paiement. L'appelant ne peut donc se prévaloir du montant figurant dans le commandement de payer pour contester les sommes dues aux bailleurs.
C'est à juste titre que le premier juge a constaté que la clause résolutoire était acquise au bailleur, le locataire, qui était redevable d'un mois de loyer à la date de la délivrance du commandement, n'en ayant pas acquitté les causes dans les deux mois de celle-ci. Le jugement sera confirmé sur la résiliation du bail, l'expulsion et l'indemnité d'occupation.
Sur le montant de la condamnation, c'est à tort que le premier juge a fait droit à la demande des bailleurs au titre du dépôt de garantie (1.320 euros). En effet, ces derniers ne pouvaient exiger le paiement de cette somme au stade de la résiliation du bail alors qu'elle était due au début du bail compte tenu de sa finalité, les garantir d'un éventuel non paiement du loyer, des charges ou des réparations locatives. Il appartenait aux intimés de délivrer au locataire en temps utile un commandement de payer visant la clause résolutoire pour défaut de paiement du dépôt de garantie, comme le bail leur en donnait la possibilité. A défaut, le bail étant résilié, ils ne peuvent plus exiger le paiement de cette somme.
De même, les frais administratifs et de délivrance des quittances ont été facturés en application de l'article 6 dernier alinéa du contrat de bail alors qu'une telle clause est réputée non écrite en vertu de l'article 4 p) de la loi du 6 juillet 1989. La somme de 14 euros sera donc également déduite du montant de la condamnation.
En conséquence, l'appelant sera condamné à payer aux intimés la somme de 3.427,16 euros au titre de l'arriéré arrêté au 15 octobre 2008, le jugement étant infirmé sur ce point.
Sur la clause pénale, les intimés sont fondés à soutenir que la recommandation de la Commission des clauses abusives du 17 février 2000 sur les contrats de location de locaux à usage d'habitation ne concerne que les personnes morales bailleurs professionnels ou les personnes physiques ayant la qualité de loueur professionnel et que le premier juge ne pouvait déclarer non écrite la clause de l'article 2-13 du contrat de bail pour ce motif, étant de simples particuliers. Le jugement sera infirmé de ce chef.
Cette disposition est licite et la somme de 476 euros réclamée par les bailleurs à ce titre n'est pas manifestement excessive. Il sera donc fait droit à leur appel incident.
Il convient d'allouer aux intimés la somme de 500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel.
Chacune des parties succombant partiellement en ses prétentions, conservera la charge de ses dépens d'appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS ;
Statuant publiquement et contradictoirement,
REJETTE l'exception de nullité de l'assignation du 13 novembre 2008,
CONFIRME le jugement déféré, sauf sur le montant de la condamnation et la clause pénale,
Statuant à nouveau,
CONDAMNE Monsieur X. à payer à Monsieur et Madame Y. :
- la somme de 3.427,16 euros au titre de l'arriéré locatif au 15 octobre 2008,
- celle de 476 euros au titre de la clause pénale,
- celle de 500 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel,
DIT que Monsieur X. et Monsieur et Madame Y. conserveront chacun la charge de leurs dépens d'appel, étant précisé que Monsieur X. est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle, et DIT qu'ils seront recouvrés conformément à l’article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
C. LEVEUF F. VERDUN
- 5848 - Code de la consommation - Domaine d’application - Personne soumise à la protection - Notion de professionnel - Principes
- 6023 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Réciprocité - Réciprocité des prérogatives - Asymétrie
- 6122 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Responsabilité du consommateur - Clauses pénales ou d’indemnité forfaitaire - Droit antérieur au décret du 18 mars 2009 (indices)
- 6395 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Location (bail) - Location d’immeuble - Bail d’habitation (3) - Obligations du locataire : paiement du prix
- 6402 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Location (bail) - Location d’immeuble - Bail d’habitation (10) - Litiges