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CA NANCY (2e ch. civ.), 6 janvier 2011

Nature : Décision
Titre : CA NANCY (2e ch. civ.), 6 janvier 2011
Pays : France
Juridiction : Nancy (CA), 2e ch. civ.
Demande : 09/02322
Date : 6/01/2011
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 21/09/2009
Décision antérieure : TI VERDUN, 15 décembre 2008
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2956

CA NANCY (2e ch. civ.), 6 janvier 2011 : RG n° 09/02322

Publication : Jurica

 

Extrait : « L'article L. 141-4 du Code de la consommation dispose que le juge peut soulever d'office toutes les dispositions dudit Code dans les litiges nés de son application. La société COFIDIS n'est donc pas fondée à prétendre que le tribunal d'instance de VERDUN ne pouvait pas soulever d'office la forclusion. Au surplus, ce débat entretenu par l'appelante n'a plus aucun intérêt à hauteur d'appel puisque les intimés demandent la confirmation du jugement et qu'ils font leur cette fin de non-recevoir tirée de la forclusion ».

 

COUR D’APPEL DE NANCY

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 6 JANVIER 2011

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 09/02322. Décision déférée à la Cour : jugement du Tribunal d'Instance de VERDUN, R.G. n° 11-08-000248, en date du 15 décembre 2008.

 

APPELANTE :

SA COFIDIS,

prise en la personne de ses représentants légaux pour ce domiciliés au siège social, sise [adresse], représentée par la SCP Barbara VASSEUR, avoués à la Cour, assistée de Maître Danielle CHAUDEUR, avocat au barreau de NANCY

 

INTIMÉS :

Monsieur X.,

né le [date] à [ville], demeurant [adresse], représenté par la SCP LEINSTER, WISNIEWSKI & MOUTON, avoués à la Cour

Madame Y. épouse X.,

née le [date] à [...], demeurant [adresse], représentée par la SCP LEINSTER, WISNIEWSKI & MOUTON, avoués à la Cour

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 25 novembre 2010, en audience publique devant la Cour composée de : Madame Sylvette CLAUDE-MIZRAHI, Président de chambre, Monsieur Christian MAGNIN, Conseiller, Monsieur Francis MARTIN, Conseiller, qui a fait le rapport, qui en ont délibéré ;

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame Caroline HUSSON ;

A l'issue des débats, le Président a annoncé que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 6 janvier 2011, en application du deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile ;

ARRÊT : Contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 6 janvier 2011, par Madame Caroline HUSSON, Greffier, conformément à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile, signé par Madame Sylvette CLAUDE-MIZRAHI, Président de chambre et par Madame Caroline HUSSON, greffier ;

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Suivant l'offre préalable acceptée le 28 novembre 1989, la société COFIDIS a accordé aux époux X. un crédit dit « LIBRAVOU » utilisable par fractions et assorti d'une carte de crédit, avec un découvert utile de 15.000 francs, soit 2.286,74 euros.

Plusieurs avenants ont été conclus pour relever progressivement le montant du découvert autorisé : en dernier lieu, le 29 octobre 2005, il a été porté à 11.000 euros.

Suivant l'offre préalable acceptée le 11 mai 1989, la société COFIDIS a accordé aux époux X. un autre crédit, dit « QUATRE ÉTOILES », utilisable par fractions et assorti d'une carte de crédit, avec un découvert utile de 4.000 francs, soit 609,80 euros, porté le 31 octobre 2005 à 2.400 euros.

Par acte d'huissier du 30 juillet 2008, la société COFIDIS a fait assigner les époux X., devant le tribunal d'instance de VERDUN, en paiement des montants dus au titre de ces deux crédits, soit les sommes en principal de 15.309,77 euros et de 2.070,82 euros.

Par jugement rendu le 15 décembre 2008, le tribunal d'instance de VERDUN a déclaré la société COFIDIS forclose et donc irrecevable en son action en paiement au motif, soulevé d'office, que le découvert autorisé a été dépassé dès janvier 1997 pour le premier contrat et dès novembre 1991 pour le second, sans que le prêteur engage son action dans le délai de deux ans, le tribunal précisant que la stipulation des contrats prévoyant que le découvert autorisé pouvait être augmenté sans que soit régularisée une nouvelle offre de crédit était une clause abusive.

La société COFIDIS a régulièrement interjeté appel de ce jugement par déclaration du 21 septembre 2009.

Elle demande à la Cour d'infirmer le jugement déféré et de condamner les époux X. à lui payer les sommes de :

- 15.309,77 euros, outre les intérêts, au titre du contrat « LIBRAVOU »,

- 2.070,82 euros, outre les intérêts, au titre du contrat « QUATRE ÉTOILES »,

- 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Elle expose que le premier juge ne disposait pas du pouvoir de soulever d'office la forclusion et elle fait valoir :

- que les époux X. n'ont jamais dépassé le montant maximum autorisé du prêt, qui était de 50.000 francs (soit 7.622,45 euros) pour le premier crédit et de 30.000 francs (soit 4.573,47 euros) pour le second,

- que le crédit consenti n'est pas le découvert utile, qui n'en est que la première fraction, mais le découvert maximum autorisé,

- qu'il n'est pas nécessaire de faire souscrire une nouvelle offre pour des utilisations de crédit au-delà de la première fraction utilisée, dès lors que le montant du découvert reste dans la limite du crédit offert,

- que les clauses financières n'ont pas de caractère abusif, sauf si elles manquent de clarté ou de précision, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, le montant du découvert maximum autorisé ayant été clairement indiqué,

- que l'irrecevabilité prévue par l’article L. 311-37 du Code de la consommation implique un incident de paiement ou une défaillance de l'emprunteur, ce que ne constitue pas le dépassement du découvert utile,

- que son action a bien été engagée dans le délai de deux ans puisque le premier incident de paiement remonte au mois d'août 2006 pour le contrat LIBRAVOU et au mois d'octobre 2006 pour le contrat QUATRE ÉTOILES.

Les époux X. concluent à la confirmation de la décision du premier juge et à la condamnation de la société COFIDIS à leur payer la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Ils soutiennent que le premier juge tenait de l'article L. 141-4 du Code de la consommation le pouvoir de soulever d'office la forclusion et reprennent la motivation du tribunal sur le fond.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Vu les dernières écritures déposées le 15 février 2010 par la société COFIDIS et le 1er juin 2010 par les époux X.,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 19 octobre 2010.

L'article L. 141-4 du Code de la consommation dispose que le juge peut soulever d'office toutes les dispositions dudit Code dans les litiges nés de son application. La société COFIDIS n'est donc pas fondée à prétendre que le tribunal d'instance de VERDUN ne pouvait pas soulever d'office la forclusion. Au surplus, ce débat entretenu par l'appelante n'a plus aucun intérêt à hauteur d'appel puisque les intimés demandent la confirmation du jugement et qu'ils font leur cette fin de non-recevoir tirée de la forclusion.

 

Sur la recevabilité :

L'article L. 311-37 du Code de la consommation dispose que les actions en paiement engagées devant le tribunal d'instance à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.

Dans le cas de crédits utilisables sous forme de découvert en compte, le dépassement du découvert autorisé, dès lors qu'il n'a pas été ultérieurement restauré, manifeste la défaillance de l'emprunteur et constitue le point de départ du délai biennal de forclusion.

 

1°/ Le contrat de crédit LIBRAVOU :

Le contrat de crédit « LIBRAVOU » conclu entre les parties a fait l'objet de plusieurs avenants destinés à augmenter la « réserve de crédit » (sic) mise à la disposition des époux X. Chacun de ces avenants a eu pour effet de restaurer les dépassements de découvert autorisé qui l'ont précédé. Le dernier avenant a été signé le 29 octobre 2005 et portait à 11.000 euros le montant de la « réserve de crédit » consenti.

Le contrat stipule expressément que l'emprunteur est autorisé à « effectuer des tirages financiers sur le compte Formule Libravou dans la limite du montant du découvert maximum autorisé », lequel était en l'occurrence de 11.000 euros, ce qui est d'autant moins discutable qu'aucun autre plafond de crédit n'est prévu au contrat.

Or, il ressort de l'examen de l'historique des écritures passées sur ce compte que le montant de 11.000 euros a été dépassé le 21 juillet 2006 (il a alors atteint la somme de 11.216,23 euros) et n'a plus jamais été restauré par la suite, puisqu'il n'a fait qu'augmenter pour atteindre la somme de 14.852,19 euros lors de la clôture du compte le 27 novembre 2007.

La société COFIDIS devait engager son action en paiement dans les deux ans du dépassement du découvert autorisé, soit avant le 22 juillet 2008, alors qu'elle a fait assigner ses emprunteurs le 30 juillet 2008 seulement.

La société COFIDIS est donc forclose. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

 

2°/ Le contrat de crédit QUATRE ÉTOILES :

Le contrat de crédit QUATRE ÉTOILES conclu entre les parties a fait l'objet d'un avenant, le 31 octobre 2003, aux fins de porter le montant du crédit utilisable sous forme de découvert en compte de 609,80 euros à 2.400 euros. Cet avenant a eu pour effet de restaurer les dépassements de découvert autorisé qui l'ont précédé.

Les époux X. ont cessé de rembourser leur crédit à compter d'octobre 2006 et le compte a été clôturé le 29 novembre 2007 alors que le découvert s'élevait à 2.011,75 euros.

Il n'y a donc pas eu de dépassement du découvert autorisé et le délai biennal de forclusion n'a commencé à courir qu'en octobre 2006, de sorte qu'en assignant les emprunteurs le 30 juillet 2008, la société COFIDIS ne se heurte pas à la forclusion et son action en paiement doit être déclarée recevable.

La décision du premier juge sera infirmée à cet égard.

 

Sur le fond :

En cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Ces sommes produisent elles- mêmes des intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt, jusqu'à la date du règlement effectif. En outre, le prêteur peut demander à l'emprunteur défaillant une indemnité égale, au plus, à 8 % du capital restant dû à la date de la défaillance.

En l'espèce, il résulte des décomptes produits que les époux X. restaient devoir, lors de la déchéance du terme prononcée le 29 novembre 2007 :

- les mensualités échues impayées :      973,30 euros,

- le capital non échu :                           978,44 euros,

- l'indemnité légale de 8 % :                 119,08 euros,

soit au total la somme de                      2.070,82 euros.

Par conséquent, les époux X. seront condamnés à payer à la société COFIDIS la somme de 2.070,82 euros en principal, avec intérêts au taux contractuel de 17,34 % à compter du 21 décembre 2007, date de la mise en demeure.

 

Sur les dépens et l’article 700 du Code de procédure civile :

Aucune des parties ne triomphe ni ne succombe en totalité.

Il apparaît donc équitable que chacun conserve la charge de ses frais de justice répétibles et irrépétibles sans rien pouvoir réclamer à ce titre à son adversaire.

Aussi les parties seront-elles déboutées de leurs demandes sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile et le jugement sera également infirmé de ce chef.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l’article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile,

DECLARE l'appel recevable ;

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a déclaré la société COFIDIS irrecevable en son action en paiement au titre du crédit LIBRAVOU ;

INFIRME le jugement déféré en toutes ses autres dispositions et, statuant à nouveau :

CONDAMNE les époux X. à payer à la société COFIDIS la somme de DEUX MILLE SOIXANTE DIX EUROSS ET QUATRE VINGT DEUX CENTIMES (2.070,82 euros) en principal, avec intérêts au taux contractuel de 17,34 % à compter du 21 décembre 2007 ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

LAISSE à chacune des parties la charge des dépens qu'elle a engagés tant en première instance qu'en cause d'appel ;

Le présent arrêt a été signé par Madame CLAUDE-MIZRAHI, Président de chambre à la Cour d'Appel de NANCY, et par Madame HUSSON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,        LE PRÉSIDENT,