TGI PARIS (1re ch. 1re sect.), 26 mai 1997
CERCLAB - DOCUMENT N° 3221
TGI PARIS (1re ch. 1re sect.), 26 mai 1997 : RG n° 18076/96
(sur appel CA Paris (25e ch. B), 28 mai 1999 : RG n° 1997/18167)
Publication : Bull. inf. C cass. 1997, n° 1408 ; D. affaires 1997. 1075 ; Gaz. Pal. 1997. Somm. 339
Extrait : « Attendu que si, en vertu du sixième alinéa du même texte, les clauses abusives sont réputées non écrites, le bénéfice de ces dispositions, en tant qu'elles constituent une exception à la liberté contractuelle et à la force obligatoire des conventions, est réservé à ceux qui, contractant pour leurs besoins personnels, sont susceptibles de ne pas mesurer la portée exacte de leurs engagements et de ne pas pouvoir négocier librement l'étendue des prérogatives accordées au cocontractant ; Attendu en revanche que le texte susvisé ne saurait être invoqué par la personne morale défenderesse, dès lors qu'elle a conclu le contrat litigieux pour les nécessités de son activité et en toute connaissance de cause, les stipulations actuellement contestées étant comparables dans leur mécanisme et leurs effets à celles contenues dans des conventions précédentes, passées par l'Union Syndicale avec le même fournisseur en 1991 et 1992 ».
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS
PREMIÈRE CHAMBRE PREMIÈRE SECTION
JUGEMENT DU 26 MAI 1997
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 18076/96.
DEMANDERESSE :
- La Société GESTETNER SERVICES, SA,
dont le siège est à [adresse], représentée par : Maître Bruno CECCARELLI, avocat - D 1383.
DÉFENDERESSE :
- L'UNION SYNDICALE CGT DES PERSONNELS DU COMMERCE, DE LA DISTRIBUTION ET DES SERVICES,
dont le siège est à [adresse], représentée par la SCP Pierre BOUAZIZ BENAMARA, avocats - P 215.
[minute page 2]
COMPOSITION DU TRIBUNAL Magistrats ayant délibéré : Monsieur LACABARATS, Président, Madame THOMAS, Juge, Madame NESI, Juge.
GREFFIER : Madame MOREAU.
DÉBATS à l'audience du 21 avril 1997, tenue publiquement,
JUGEMENT prononcé en audience publique, contradictoire, susceptible d'appel.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Le 22 avril 1996, la Société GESTETNER SERVICES a fait assigner devant ce Tribunal l'Union Syndicale CGT COMMERCE et SERVICES en paiement, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, de loyers arriérés s'élevant en principal à 49.015,56 francs, d'une indemnité contractuelle de résiliation de 171.580 francs, la société demanderesse sollicitant en outre l'allocation d'une somme de 7.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure Civile.
La Société GESTETNER SERVICES [minute page 3] a donné en location à l'Union Syndicale CGT COMMERCE & SERVICES, par contrat du 22 janvier 1993, pour une durée de soixante-douze mois du matériel de reprographie.
La locataire ayant cessé de payer les redevances convenues, la Société GESTETNER a mis en œuvre la procédure de résiliation du contrat, repris possession du matériel le 1er avril 1996 et réclame aujourd'hui le paiement des échéances impayées, correspondant aux termes des 1er avril, 1er octobre 1995, 1er janvier 1996, et d'une indemnité de résiliation égale aux échéances restant à courir jusqu'au terme du contrat.
Le 31 juillet 1996, l'Union Syndicale CGT du COMMERCE, DE LA DISTRIBUTION ET DES SERVICES DE PARIS (l'Union Syndicale) a fait signifier des conclusions par lesquelles elle demande au Tribunal :
* de dire abusives et en conséquence réputées non écrites les clauses suivants :
- l'article 2, alinéa 2, stipulant une durée irrévocable de 72 mois,
- l'article 3 alinéa 2, relatif au montant des sommes dues quel que soit le nombre de copies effectuées durant la période considérée,
- l'article 10, alinéa 2, relatif au calcul de l'indemnité de résiliation ;
* en conséquence de débouter la Société GESTETNER SERVICES de sa demande relative à l'indemnité de résiliation,
* de débouter la société de sa demande relative aux loyers impayés,
* de recevoir l'Union Syndicale en [minute page 4] sa demande reconventionnelle et de condamner la Société GESTETNER SERVICES à lui restituer la somme de 64.889,47 francs trop perçue par elle sur le forfait copie,
* subsidiairement de réduire à 0 F sur le fondement de l'article 1152 du Code Civil le montant de l'indemnité de résiliation,
* de condamner la Société GESTETNER SERVICES au paiement de la somme de 15.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Par acte du 26 août 1996, la Société GESTETNER a conclu au rejet des prétentions de l'Union Syndicale et sollicité le bénéfice de son assignation, en faisant valoir que l'Union Syndicale ne peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation, que les clauses contractuelles litigieuses ont été librement négociées et ne sont nullement abusives.
Par conclusions en réplique du 30 août 1996, l'Union Syndicale a soutenu qu'elle est un non-professionnel recevable à se prévaloir de la législation sur les clauses abusives et réitéré son argumentation sur le caractère abusif des stipulations contractuelles critiquées.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu qu'aux termes de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre [minute page 5] significatif entre les droits et obligations portées au contrat ;
Attendu que si, en vertu du sixième alinéa du même texte, les clauses abusives sont réputées non écrites, le bénéfice de ces dispositions, en tant qu'elles constituent une exception à la liberté contractuelle et à la force obligatoire des conventions, est réservé à ceux qui, contractant pour leurs besoins personnels, sont susceptibles de ne pas mesurer la portée exacte de leurs engagements et de ne pas pouvoir négocier librement l'étendue des prérogatives accordées au cocontractant ;
Attendu en revanche que le texte susvisé ne saurait être invoqué par la personne morale défenderesse, dès lors qu'elle a conclu le contrat litigieux pour les nécessités de son activité et en toute connaissance de cause, les stipulations actuellement contestées étant comparables dans leur mécanisme et leurs effets à celles contenues dans des conventions précédentes, passées par l'Union Syndicale avec le même fournisseur en 1991 et 1992 ;
Attendu que le décompte produit aux débats par la Société GESTETNER établit que pour les trois échéances dont elle réclame le paiement, les redevances restant dues par l'Union Syndicale s'élèvent à 49 015,56 francs ;
Attendu, sur l'indemnité contractuelle de résiliation que, même si la somme demandée à ce titre correspond aux échéances restant à courir jusqu'au terme de la convention, elle a pour effet, compte tenu de la durée particulièrement longue de celle-ci, d'imposer au débiteur une pénalité manifestement excessive en procurant au bailleur, [minute page 6] qui conservait la possibilité de revendre le matériel utilisé pour un temps inférieur de moitié à ce qui était prévu, un avantage injustifié ; qu'il convient dès lors, en application de l'article 1152 du Code Civil, de la réduire à 80 000 francs ;
Attendu qu'aucune circonstance ne justifie l'exécution provisoire du jugement ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL,
Condamne l'Union Syndicale CGT du Commerce, de la Distribution et des Services de Paris à payer à la Société GESTETNER SERVICES les sommes de QUARANTE NEUF MILLE QUINZE francs CINQUANTE SIX centimes (49.015,56) au titre des redevances impayées et de QUATRE VINGT MILLE francs (80.000) pour l'indemnité contractuelle de résiliation, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 25 mars 1996 ;
Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;
Condamne l'Union Syndicale à payer à la Société GESTETNER la somme de SEPT MILLE francs (7.000) sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Fait et jugé à PARIS, le 26 mai 1997.
- 5825 - Code de la consommation - Clauses abusives - Nature de la protection - Législation d’exception
- 5860 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Personnes morales (avant la loi du 17 mars 2014) - Clauses abusives - Protection implicite
- 5885 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères combinés : rapport direct et compétence
- 5947 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Activité administrative - Reprographie : présentation globale
- 5948 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Activité administrative - Reprographie : présentation par type d’activité