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CA PARIS (8e ch. sect. A), 14 mai 2009

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (8e ch. sect. A), 14 mai 2009
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), 8e ch. sect. A
Demande : 07/13024
Décision : 2009/314
Date : 14/05/2009
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Juris Data
Numéro de la décision : 314
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3393

CA PARIS (8e ch. sect. A), 14 mai 2009 : RG n° 07/13024 ; arrêt n° 314

Publication : Juris-Data n° 2009-006917

 

Extraits : 1/ « Considérant que le juge doit relever d'office les fins de non-recevoir lorsqu'elles sont d'ordre public, ce qui est le cas de la forclusion prévue à l'article L. 311-37 du code de la consommation ; que vainement la société FACET reproche au tribunal d'avoir procédé à une inversion de la charge de la preuve « car il n'appartenait pas à la société exposante de démontrer l'absence de forclusion mais à Mademoiselle X. d'en prouver l'existence éventuelle », alors que c'est sans demander quelque preuve que ce soit à l'organisme de crédit mais en considération des seuls faits soumis à son examen, et en particulier au vu du relevé de compte produit au soutien de la demande, qu'il a constaté que le découvert utile avait été dépassé sans être restauré à compter du 22 octobre 1998, date à laquelle il atteignait 7,652,10 F ».

2/ « Considérant que la thèse de l'appelante selon laquelle dès l'origine un découvert de 50.000 F a été accordé à l'emprunteur, à la demande duquel la première fraction a été limitée à 2.110 F lors de la conclusion du crédit, est contredite par les énonciation du contrat lui-même, dont l'article II 4 subordonne le dépassement du découvert initial à une demande de l'emprunteur - qui serait inutile s'il s'agissait d'une première fraction dont les suivantes pourraient, conformément au modèle type n°4 dont elle se prévaut, être utilisées sans demande préalable aux dates de son choix - et à diverses conditions relatives à l'exécution du contrat ;

Considérant que ladite clause, selon laquelle « sur demande de l'emprunteur le découvert utile pourra être augmenté en une fois ou par fraction successives jusqu'au montant du découvert maximum autorisé » sans délivrance d'une nouvelle offre, et par conséquent sans nécessité d'une acceptation formelle de l'emprunteur et corrélativement sans possibilité de rétractation, crée au détriment du consommateur un déséquilibre entre les droits et obligations des parties justifiant qu'elle soit déclarée abusive et réputée non écrite en application de l'article L. 132-1 du code de la consommation ».

3/ « Considérant que, dès lors que la clause de variabilité du montant emprunté est réputée non écrite, et non considérée comme entraînant des irrégularités du contrat de crédit au regard des dispositions des articles L. 311-8 à L. 311-10 du code de la consommation, la sanction ne peut être la déchéance du droit aux intérêts édictée par l'article L. 311-33 ; […] ; que l'assignation n'ayant été délivrée que le 7 mars 2007, l'action en paiement de la société de crédit est atteinte par la forclusion biennale ; que le jugement doit en conséquence être confirmé ;

Considérant que la sanction que constitue la forclusion biennale ne peut être assimilée à une confiscation prohibée par l'article 1er du protocole additionnel n° 1 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors que le droit de la consommation, qui obéit à des considérations d'ordre public économique, déroge très largement aux règles du droit civil, et qu'il appartient aux organismes de crédit de se conformer à ses prescriptions, observation étant faite que jusqu'à ce que Madame X. s'abstienne de tout règlement, c'est à dire pendant 10 ans, le crédit a été remboursé à un taux d'intérêts de 16,92 % l'an ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

HUITIÈME CHAMBRE SECTION A

ARRÊT DU 14 MAI 2009

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 07/13024. Arrêt n° 314 (4 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 juin 2007 -Tribunal d'Instance de PARIS 12e arrdt - RG n° 11-07-00334.

 

APPELANTE :

SA FACET

agissant en la personne de ses représentants légaux, [adresse], représentée par la SCP TAZE-BERNARD - BELFAYOL-BROQUET, avoués à la Cour, assistée de Maître Stéphane GAUTIER, avocat au barreau de PARIS, toque R233, plaidant pour l'association GAUTIER - VALCIN - GAFFINEL

 

INTIMÉE :

Mademoiselle X.

[adresse], défaillante, Assignation en date du 8 novembre 2007, remise à Mademoiselle X., en personne. Signification en date du 29 janvier 2009, déposée à l'étude de l'huissier de justice, articles 656 et 658 du code de procédure civile.

 

COMPOSITION DE LA COUR : Après rapport oral et en application des dispositions de l'article 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 mars 2009, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-José PERCHERON, présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Marie-José PERCHERON, présidente, Madame Viviane GRAEVE, conseillère, Madame Catherine BONNAN-GARÇON, conseillère.

Vu l'ordonnance de roulement en date du 27 mars 2009,

[minute page 2] Greffier, lors des débats : Madame Hélène BODY

ARRÊT : RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Marie-José PERCHERON, présidente et par Madame Hélène BODY, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l'appel interjeté par la SA FACET du jugement contradictoire rendu le 14 juin 2007 par le tribunal d'instance du 12e  arrondissement de Paris qui a déclaré forclose son action à l'encontre de Frédérique X.,

Vu les conclusions du 27 janvier 2009 par lesquelles la société FACET prie la cour, infirmant cette décision, de condamner Madame X. à lui payer la somme de 4.569,71 € avec intérêts à compter du 13 juillet 2006, au taux contractuel de 16,92 % l'an sur la somme de 4.255,71 € et au taux légal sur celle de 314,02 €, d'ordonner la capitalisation des intérêts, conformément à l'article 1154 du code civil depuis la première demande, et sollicite la somme de 760 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'assignation avec dénonciation de conclusions délivrées le 8 novembre 2007, à personne, à Madame X., qui n'a pas constitué avoué, et la dénonciation des dernières conclusions par acte du 29 janvier 2009,

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR :

Considérant que le 10 février 1996 Madame X. a accepté une offre préalable de crédit utilisable par fractions prévoyant un découvert utile de 2.110 F (321,66 €) susceptible d'être augmenté, sur sa demande, en une fois ou par fractions successives jusqu'au montant maximum du découvert autorisé fixé à 50.000 F (7.622,45 €) au TEG de 16,92 % ;

Que la société FACET, exposant que Madame X. avait cessé de s'acquitter des remboursements à compter du 5 février 2006 et qu'elle lui avait délivré le 13 juillet 2006 une mise en demeure de régler le solde résultant de la clôture du compte, restée infructueuse, l'a assignée par acte du 7 mars 2007 devant le tribunal d'instance, qui a déclaré son action forclose aux motifs que la clause autorisant l'augmentation du découvert initial sans nouvelle offre préalable devait être déclarée abusive et réputée non écrite et que le découvert convenu a été constamment dépassé à compter du 22 octobre 1998, soit plus de deux ans avant la délivrance de l'assignation ;

Considérant qu'au soutien de son appel la société FACET fait valoir que :

- Madame X. ayant comparu en reconnaissant sa dette et proposant un échéancier, le tribunal a violé l'article 5 du code de procédure civile en se prononçant sur ce qui ne lui était pas demandé, outrepassé ses pouvoirs et procédé à une inversion de la charge de la preuve s'agissant de la forclusion, dont il appartenait à Madame X. de démontrer l'existence ;

- [minute page 3] le découvert maximum autorisé constitue bien le crédit consenti et il ne peut être reproché à l'organisme de crédit de le mettre à la disposition de l'emprunteur par fractions, ce que confirme le modèle type n°4 résultant de l'arrêté du 14 mai 2007, et il n'y a dès lors pas clause abusive à ce titre ;

- la forclusion est une sanction illogique car elle ne doit sanctionner qu'un incident de paiement et non un dépassement du découvert, et disproportionnée comme constituant une confiscation prohibée par l'article 1re du protocole additionnel à la CEDH, et la seule sanction envisageable serait la déchéance du prêteur de son droit aux intérêts ;

 

Considérant que les dispositions de l'article 5 du code procédure civile imposant au juge de « se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé » ne concerne pas les moyens de droit dont l'article 16 du même code prévoit expressément que le juge qui les relève d'office ne peut fonder sa décision sur de tels moyens sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations, ce qu'a fait le premier juge ;

Considérant que le juge doit relever d'office les fins de non-recevoir lorsqu'elles sont d'ordre public, ce qui est le cas de la forclusion prévue à l'article L. 311-37 du code de la consommation ; que vainement la société FACET reproche au tribunal d'avoir procédé à une inversion de la charge de la preuve « car il n'appartenait pas à la société exposante de démontrer l'absence de forclusion mais à Mademoiselle X. d'en prouver l'existence éventuelle », alors que c'est sans demander quelque preuve que ce soit à l'organisme de crédit mais en considération des seuls faits soumis à son examen, et en particulier au vu du relevé de compte produit au soutien de la demande, qu'il a constaté que le découvert utile avait été dépassé sans être restauré à compter du 22 octobre 1998, date à laquelle il atteignait 7,652,10 F ;

Considérant que la thèse de l'appelante selon laquelle dès l'origine un découvert de 50.000 F a été accordé à l'emprunteur, à la demande duquel la première fraction a été limitée à 2.110 F lors de la conclusion du crédit, est contredite par les énonciation du contrat lui-même, dont l'article II 4 subordonne le dépassement du découvert initial à une demande de l'emprunteur - qui serait inutile s'il s'agissait d'une première fraction dont les suivantes pourraient, conformément au modèle type n°4 dont elle se prévaut, être utilisées sans demande préalable aux dates de son choix - et à diverses conditions relatives à l'exécution du contrat ;

Considérant que ladite clause, selon laquelle « sur demande de l'emprunteur le découvert utile pourra être augmenté en une fois ou par fraction successives jusqu'au montant du découvert maximum autorisé » sans délivrance d'une nouvelle offre, et par conséquent sans nécessité d'une acceptation formelle de l'emprunteur et corrélativement sans possibilité de rétractation, crée au détriment du consommateur un déséquilibre entre les droits et obligations des parties justifiant qu'elle soit déclarée abusive et réputée non écrite en application de l'article L. 132-1 du code de la consommation ;

Considérant que, dès lors que la clause de variabilité du montant emprunté est réputée non écrite, et non considérée comme entraînant des irrégularités du contrat de crédit au regard des dispositions des articles L. 311-8 à L. 311-10 du code de la consommation, la sanction ne peut être la déchéance du droit aux intérêts édictée par l'article L. 311-33 ;

Que conformément à la règle selon laquelle le point de départ à l'expiration duquel une action ne peut plus être exercée se situe nécessairement à la date d'exigibilité de l'obligation qui lui a donné naissance, le délai biennal de forclusion prévu par l'article L. 311-37 court, dans le cas d'une ouverture de crédit d'un montant déterminé et reconstituable assortie d'une obligation de remboursement à échéances convenues, à compter de la date à laquelle le montant du découvert autorisé a été dépassé sans être [minute page 4] régularisé, ce qui caractérise la défaillance de l'emprunteur, soit en l'espèce le 22 octobre 1998 ; que l'assignation n'ayant été délivrée que le 7 mars 2007, l'action en paiement de la société de crédit est atteinte par la forclusion biennale ; que le jugement doit en conséquence être confirmé ;

Considérant que la sanction que constitue la forclusion biennale ne peut être assimilée à une confiscation prohibée par l'article 1er du protocole additionnel n° 1 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors que le droit de la consommation, qui obéit à des considérations d'ordre public économique, déroge très largement aux règles du droit civil, et qu'il appartient aux organismes de crédit de se conformer à ses prescriptions, observation étant faite que jusqu'à ce que Madame X. s'abstienne de tout règlement, c'est à dire pendant 10 ans, le crédit a été remboursé à un taux d'intérêts de 16,92 % l'an ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Confirme le jugement entrepris

Condamne la SA FACET aux dépens.

LA GREFFIÈRE       LA PRÉSIDENTE