CA RIOM (ch. com.), 7 mars 2012
CERCLAB - DOCUMENT N° 3775
CA RIOM (ch. com.), 7 mars 2012 : RG n° 11/00056
Publication : Jurica
Extrait : « que la clause figurant sous l'article II- 3 du contrat relatif à sa reconduction d'année en année qui prévoit une variation du montant maximum du découvert autorisé sur simple demande de l'emprunteur acceptée par le prêteur est contraire aux dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation issue de la loi du 1er février 1995 intégrant dans le droit interne la directive européenne concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs ; que doit être réputée non écrite comme abusive la clause prévoyant l'augmentation du montant du crédit initial par simple avenant, sans acceptation par l'emprunteur d'une nouvelle offre de crédit ; que la commission des clauses abusives a condamné les clauses qui créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, au détriment de l'emprunteur, en l'induisant en erreur lorsqu'il est enclin à croire que le prêteur ne serait pas tenu de délivrer une nouvelle offre préalable, exigeant son acceptation formelle, et qu'il ne disposerait pas à cette occasion de la faculté d'ordre public de rétracter son acceptation ;
qu'en l'espèce la reconduction du contrat intervenue le 23 décembre 2002 après l'entrée en vigueur de la loi MURCEF est irrégulière et n'a pas pu valider un dépassement du montant de découvert autorisé dans l'offre initiale ; qu'en outre les dispositions de la loi du 28 janvier 2005, applicables aux contrats en cours et à leur reconduction, entrées en vigueur six mois à compter de la date de sa promulgation, a modifié l'article L. 311-9 du code de la consommation en prévoyant que l'offre préalable est obligatoire pour le contrat initial et pour toute augmentation du crédit consenti ; que le 23 décembre 2005, date du renouvellement de l'offre le montant du découvert concernant la « réserve projet » était de 7.624,73 euros, dépassant largement le montant autorisé dans l'offre préalable ;
Attendu qu'en conséquence si les époux X. sont forclos à invoquer le caractère abusif de la clause litigieuse pour la période antérieure à l'entrée en vigueur de la loi MURCEF, ils sont recevables à invoquer l'irrégularité du renouvellement de l'offre à compter du renouvellement intervenu le 23 décembre 2002 ; qu'ils sont également bien fondés à solliciter l'application des dispositions de la loi du 28 janvier 2005 ;
qu'il en résulte incontestablement que l'action en paiement engagée par la société FRANFINANCE le 9 juin 2010 est atteinte de forclusion ».
COUR D’APPEL DE RIOM
DEUXIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 7 MARS 2012
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11/00056. Sur APPEL d'une décision du 17 décembre 2010 du Tribunal d'instance de THIERS.
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré de : Mme Claudine BRESSOULALY, Présidente, M. J. DESPIERRES, Conseiller, Mme Chantal JAVION, Conseillère, lors des débats et du prononcé : Mme C. GOZARD, Greffière.
ENTRE :
APPELANTS :
M. X. et Mme Y. épouse X.
demeurant ensemble [adresse], Représentant : la SCP PORTEJOIE (avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND)
ET :
INTIMÉ :
SA FRANFINANCE
[adresse], Représentant : la SCP TREINS-KENNOUCHE-POULET-VIAN (avocat au barreau de RIOM) - Représentant : Maître Sébastien RAHON (avoué/avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND)
DÉBATS : Après avoir entendu en application des dispositions des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile, à l'audience publique du 2 février 2012, sans opposition de leur part, les représentants des parties, Mme Bressoulaly Magistrat chargé du rapport en a rendu compte à la Cour dans son délibéré et à l'audience publique de ce jour, indiquée par le magistrat rapporteur, l'arrêt suivant a été prononcé publiquement conformément aux dispositions de l'article 452 du Code de Procédure Civile :
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS - PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par acte sous seing privé en date du 23 décembre 1997, Madame et Monsieur X. ont accepté l'offre préalable d'ouverture de crédit utilisable par fractions qui leur avait été soumise par la SA FRANFINANCE pour un découvert autorisé de 30.000 francs « réserve achat » et de 7.000 francs « réserve projet » remboursables par mensualités variables en fonction du découvert utilisé et ouvrant droit pour le prêteur à perception d'intérêts..
Suite à la défaillance des débiteurs dans le remboursement des mensualités, la SA FRANFINANCE a fait application de la clause de déchéance du terme et après mise en demeure restée infructueuse, a assigné Monsieur et Madame X. en paiement par actes du 9 juin 2010.
* * *
Par jugement du 17 décembre 2010, le juge d'instance de THIERS a reçu la société FRANFINANCE en son action et condamné solidairement Monsieur et Madame X. à lui payer la somme de 10.145,74 euros avec les intérêts au taux de 17,64 % sur la somme de 9.733,41 euros à compter du 6 mai 2010. Le tribunal a débouté les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile
Le 10 janvier 2011, Monsieur et Madame X. ont interjeté appel de la décision.
Vu les conclusions signifiées le 26 mai 2011 aux termes desquelles Monsieur et Madame X. demandent de :
- déclarer irrecevable car forclose l'action en paiement formée par la société FRANFINANCE à leur encontre
- condamner la société FRANFINANCE à leur payer la somme de 2.500 euros à titre de dommages intérêts
- débouter la société FRANFINANCE de toutes ses prétentions
- condamner la société FRANFINANCE à leur payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions signifiées le 22 avril 2011 aux termes desquelles la société FRANFINANCE sollicite la confirmation pure et simple du jugement entrepris et la condamnation des appelants solidairement à lui payer la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Attendu que pour écarter le moyen tiré de la forclusion invoqué par les débiteurs, le premier juge a retenu qu'en application de l'article L. 311-37 du code de la consommation dans ses dispositions antérieures à la publication de la loi MURCEF du 11 décembre 2001, la forclusion s'appliquait non seulement aux actions en paiement du prêteur, mais également et notamment aux contestations de la régularité de l'offre préalable formée par voie d'actions ou d'exception ; qu'estimant que la loi MURCEF ne pouvait recevoir application en l'espèce au regard de la date du contrat, le premier juge a considéré que la contestation relative à la régularité de l'offre ou à l'absence de nouvelle offre qui devait être formée dans les deux années à compter de l'événement qui lui avait donné naissance, était irrecevable, la forclusion étant acquise ;
Attendu qu'en l'occurrence il est constant que l'offre initiale, renouvelable par tacite reconduction chaque année, prévoyait des montants maxima de découverts autorisés de 4.573,47 euros (30.000 francs) pour la « réserve achat » et de 1.067,14 euros (7.000 francs) pour la « réserve projet » ;
qu'au 23 décembre 2002, date de reconduction de l'offre préalable après entrée en vigueur de la loi MURCEF, le montant du découvert « achat » était de 0 euro, mais le montant du découvert « projet » était de 6.132,45 euros ;
que la clause figurant sous l'article II- 3 du contrat relatif à sa reconduction d'année en année qui prévoit une variation du montant maximum du découvert autorisé sur simple demande de l'emprunteur acceptée par le prêteur est contraire aux dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation issue de la loi du 1er février 1995 intégrant dans le droit interne la directive européenne concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs ; que doit être réputée non écrite comme abusive la clause prévoyant l'augmentation du montant du crédit initial par simple avenant, sans acceptation par l'emprunteur d'une nouvelle offre de crédit ; que la commission des clauses abusives a condamné les clauses qui créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, au détriment de l'emprunteur, en l'induisant en erreur lorsqu'il est enclin à croire que le prêteur ne serait pas tenu de délivrer une nouvelle offre préalable, exigeant son acceptation formelle, et qu'il ne disposerait pas à cette occasion de la faculté d'ordre public de rétracter son acceptation ;
qu'en l'espèce la reconduction du contrat intervenue le 23 décembre 2002 après l'entrée en vigueur de la loi MURCEF est irrégulière et n'a pas pu valider un dépassement du montant de découvert autorisé dans l'offre initiale ;
qu'en outre les dispositions de la loi du 28 janvier 2005, applicables aux contrats en cours et à leur reconduction, entrées en vigueur six mois à compter de la date de sa promulgation, a modifié l'article L. 311-9 du code de la consommation en prévoyant que l'offre préalable est obligatoire pour le contrat initial et pour toute augmentation du crédit consenti ; que le 23 décembre 2005, date du renouvellement de l'offre le montant du découvert concernant la « réserve projet » était de 7.624,73 euros, dépassant largement le montant autorisé dans l'offre préalable ;
Attendu qu'en conséquence si les époux X. sont forclos à invoquer le caractère abusif de la clause litigieuse pour la période antérieure à l'entrée en vigueur de la loi MURCEF, ils sont recevables à invoquer l'irrégularité du renouvellement de l'offre à compter du renouvellement intervenu le 23 décembre 2002 ; qu'ils sont également bien fondés à solliciter l'application des dispositions de la loi du 28 janvier 2005 ;
qu'il en résulte incontestablement que l'action en paiement engagée par la société FRANFINANCE le 9 juin 2010 est atteinte de forclusion ;
Attendu que le jugement sera en conséquence infirmé en toutes ses dispositions et la société FRANFINANCE déclarée irrecevable en toutes ses demandes ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort et après en avoir délibéré,
Infirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris.
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déclare forclose l'action en paiement engagée par la société FRANFINANCE à l'encontre des époux X.
Condamne la société FRANFINANCE à payer aux époux X. la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la société FRANFINANCE aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La greffière La présidente
C. Gozard C. Bressoulaly
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