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CA LYON (1re ch. civ. A), 3 mai 2012

Nature : Décision
Titre : CA LYON (1re ch. civ. A), 3 mai 2012
Pays : France
Juridiction : Lyon (CA), 1er ch. civ.
Demande : 10/08464
Date : 3/05/2012
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 26/11/2010
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3821

CA LYON (1re ch. civ. A), 3 mai 2012 : RG n° 10/08464 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Mais il ressort des pièces, notamment du contrat de location, que la société Locam était bien désignée comme loueur sur le document. La société SBI ne peut donc avancer qu'elle ignorait l'existence de la société Locam avant la mise en demeure, puisque le contrat qu'elle a signé mentionne clairement une location entre la société Locam et elle-même, la société Star Web n'étant que le fournisseur. Il n'y donc eu aucune cession de contrat entre la société Star Web et la société Locam. Le contrat de location a pour objet le financement du site web par la société Locam, bailleresse. La société SBI a pour obligation de verser les loyers alors qu'en contrepartie la société Locam a financé la création du site auprès du fournisseur. Le contrat est parfaitement causé, la demande de nullité du contrat pour absence de cause est rejetée comme mal fondée. »

2/ « Le contrat de location signé par la société SBI mentionne clairement au-dessus de la signature de celle-ci que « le locataire déclare avoir pris connaissance, reçu et accepte les conditions générales et particulières figurant au recto et verso ». La société SBI ne peut dès lors invoquer l'inopposabilité de ces conditions générales, alors qu'elle a attesté en avoir pris connaissance.

La société SBI indique que le contrat contient des clauses abusives, puisqu'elles créent un déséquilibre entre les droits et obligations des parties, et que la société SBI doit être considérée comme consommateur, puisqu'elle n'agissait pas dans son domaine d'activité.

Mais la société SBI ne peut se prévaloir des dispositions du code de la consommation qui sanctionnent l'existence de clauses abusives dès lors qu'elle est une société commerciale, qui contractait pour les besoins de son activité. De plus, la société SBI a pour activité la vente de matériel informatique, de fournitures de bureau et de consommables informatiques. Elle ne peut donc avancer que la signature de ce contrat était dépourvue de lien avec son domaine d'activité alors qu'il s'agissait du financement de la création d'un site internet. »

 

COUR D’APPEL DE LYON

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE A

ARRÊT DU 3 MAI 2012

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 10/08464. Décision du tribunal de commerce de Saint-Étienne (1re chambre), Au fond du 2 novembre 2010 : R.G. n° 2010/3401.

 

APPELANTE :

EURL SERVICES BUREAUTIQUE INFORMATIQUE (SBI)

représentée par Maître Charles-Henri BARRIQUAND, avocat au barreau de LYON, assistée de Maître Romana LAURINI-NAVARRE, avocat au barreau de SAINT DENIS

 

INTIMÉE :

SA LOCAM

représentée par la SCP LAFFLY - WICKY, avocats au barreau de LYON, assistée de la SELARL LEXI, avocats au barreau de SAINT-ETIENNE

 

Date de clôture de l'instruction : 4 novembre 2011

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 22 février 2012

Date de mise à disposition : 3 mai 2012

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré : - Michel GAGET, président - François MARTIN, conseiller - Philippe SEMERIVA, conseiller, assistés pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier

A l'audience, Michel GAGET a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Michel GAGET, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu le jugement du 2 novembre 2010 du tribunal de commerce de Saint-Étienne qui condamne la société SBI à payer à la société Locam la somme de 10.623,88 euros et 1 euro au titre de la clause pénale, outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation, la société SBI étant défaillante ;

Vu la déclaration d'appel formée par la société SBI le 26 novembre 2010 ;

Vu les conclusions en réplique du 4 août 2011 de la société SBI qui conclut à la réformation du jugement et demande à la Cour de prononcer la nullité du contrat pour absence de cause, à titre subsidiaire de prononcer l'inopposabilité de celui-ci et de ses conditions générales, d'écarter des débats le procès-verbal de livraison et de conformité et de condamner la société Locam à lui payer 15.000 euros de dommages et intérêts et 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, au motif que le contrat est dépourvu de cause, qu'il a été exécuté de mauvaise foi, que son consentement au procès-verbal de réception était vicié, que les contrats sont indivisibles et que le site n'ayant pas été livré, elle ne peut être condamnée à payer, et qu'à titre subsidiaire les conditions générales du contrat lui sont inopposables ;

Vu les conclusions du 17 mai 2011 de la société Locam qui conclut à la confirmation du jugement sauf en ce qu'il a réduit la clause pénale à 1 euros et qu'il a fait courir les intérêts à compter de l'assignation et non de la mise en demeure, et qui demande la condamnation de la société SBI à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, au motif que le contrat n'est pas dépourvu de cause, que les conditions générales du contrat sont applicables à la société SBI et que la société Locam ne peut être tenue des défaillances du fournisseur ;

Vu l'ordonnance de clôture du 4 novembre 2011 ;

Les conseils des parties ont présenté leurs observations orales à l'audience du 22 février 2012 après que Monsieur le Président Michel Gaget ait fait le rapport.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

DÉCISION :

La société SBI a signé un contrat de location de site web avec la société Star Web, fournisseur, pour 226,04 euros par mois pendant une durée de 48 mois.

Ce contrat est daté du mois de mars 2010, mais le jour précis est illisible, les parties s'accordant à le dater du 5 mars, date qui peut effectivement se deviner sur le document.

Le 17 mars 2010, un procès verbal de livraison et de conformité désignant la société Locam comme loueur a été signé par la société SBI, sans aucune réserve.

Le 2 juillet 2010, la société Locam faisait part de la résiliation du contrat à la société SBI pour défaut de paiement et mettait en demeure cette dernière de lui payer les arriérés et les loyers à échoir, avec clause pénale et intérêts de retard, pour un montant total de 11.782,10 euros.

La société SBI estime que le contrat n'a pas été exécuté de bonne foi dès lors qu'elle a appris au moment de la mise en demeure que le contrat avait été vendu à la société Locam.

De plus, elle indique que l'obligation essentielle du contrat n'a pas été exécutée, puisque le site web n'est pas créé. Elle soulève l'absence de cause du contrat.

Elle indique également qu'elle n'a en aucun cas signé les conditions générales, qui ne lui sont donc pas opposables.

Mais il ressort des pièces, notamment du contrat de location, que la société Locam était bien désignée comme loueur sur le document.

La société SBI ne peut donc avancer qu'elle ignorait l'existence de la société Locam avant la mise en demeure, puisque le contrat qu'elle a signé mentionne clairement une location entre la société Locam et elle-même, la société Star Web n'étant que le fournisseur. Il n'y donc eu aucune cession de contrat entre la société Star Web et la société Locam.

Le contrat de location a pour objet le financement du site web par la société Locam, bailleresse. La société SBI a pour obligation de verser les loyers alors qu'en contrepartie la société Locam a financé la création du site auprès du fournisseur. Le contrat est parfaitement causé, la demande de nullité du contrat pour absence de cause est rejetée comme mal fondée.

Le contrat de location signé par la société SBI mentionne clairement au-dessus de la signature de celle-ci que « le locataire déclare avoir pris connaissance, reçu et accepte les conditions générales et particulières figurant au recto et verso ».

La société SBI ne peut dès lors invoquer l'inopposabilité de ces conditions générales, alors qu'elle a attesté en avoir pris connaissance.

La société SBI indique que le contrat contient des clauses abusives, puisqu'elles créent un déséquilibre entre les droits et obligations des parties, et que la société SBI doit être considérée comme consommateur, puisqu'elle n'agissait pas dans son domaine d'activité.

Mais la société SBI ne peut se prévaloir des dispositions du code de la consommation qui sanctionnent l'existence de clauses abusives dès lors qu'elle est une société commerciale, qui contractait pour les besoins de son activité.

De plus, la société SBI a pour activité la vente de matériel informatique, de fournitures de bureau et de consommables informatiques. Elle ne peut donc avancer que la signature de ce contrat était dépourvue de lien avec son domaine d'activité alors qu'il s'agissait du financement de la création d'un site internet.

La société SBI ne peut donc se prévaloir de clauses abusives.

La société SBI souligne le caractère indivisible du contrat de location d'une part et du contrat entre l'hébergeur et elle d'autre part, puisqu'ils poursuivent le même but, à savoir la création d'un site internet.

Enfin, la société SBI relève qu'elle a signé le procès-verbal de réception sous l'effet de la surprise, et que son consentement n'était donc pas lucide et librement donné. Sans cet effet de surprise, elle n'aurait pas signé ce document, puisque la durée écoulée entre la signature du contrat et celle du procès-verbal ne permettait pas la réalisation du site.

Elle soulève également le manquement du fournisseur à ses obligations, puisqu'aucun calendrier de réalisation des travaux, aucun cahier des charges ni aucune version beta n'a été établie.

Mais la société SBI a bien signé le procès-verbal de livraison et de conformité en date du 17 mars 2010, soit 12 jours après la signature du contrat. Le document ne fait mention d'aucune réserve ni d'aucune non-conformité.

La société SBI ne rapporte pas la preuve que le fournisseur ait manqué à ses obligations contractuelles, dès lors qu'elle a signé ce procès-verbal.

Elle ne rapporte pas non plus la preuve que sa signature sur ce procès-verbal ait été obtenue par un effet de surprise.

En tout état de cause, l'article 5.2 des conditions générales du contrat prévoit que « le présent contrat (contrat de location) et le contrat conclu entre le locataire et l'hébergeur sont divisibles et indépendants juridiquement. Aucune clause ou conséquence de l'exécution du contrat conclu entre le locataire et l'hébergeur ne pourra être opposée au loueur pour quelque raison que ce soit'. L'article 2.2 prévoit également qu’'en cas de défaillance du fournisseur dans la délivrance du site web, le locataire dégage le loueur de toute responsabilité ».

La société SBI ne peut donc pas se plaindre auprès de la société Locam d'un quelconque manquement contractuel du fournisseur, les deux contrats étant divisibles et indépendants.

En conséquence, les demandes de la société SBI sont rejetées.

L'article 18 des conditions générales prévoit le jeu de la clause résolutoire mis en œuvre par la société Locam par sa mise en demeure du 2 juillet 2010.

Il résulte de cette clause que le locataire est tenu de verser au loueur le montant des loyers impayés majorés d'une clause pénale de 10 % et d'intérêts de retard et le montant des loyers restant à courir majoré d'une clause pénale de 10 %.

Il n'y a pas lieu à réduction de cette clause pénale, qui ne présente aucun caractère manifestement excessif.

La société SBI est donc condamnée à verser à la société Locam la somme de :

- 678,12 euros au titre des loyers impayés de mai, juin et juillet 2010,

- 9.945,76 euros au titre des 44 loyers restant à échoir.

Soit la somme de 10.623,88 euros au titre des loyers, outre la somme de 1.062,39 euros au titre de la clause pénale.

Cette somme est assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de mise en demeure, soit à compter du 2 juillet 2010.

Il y a lieu d'ordonner la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du code civil.

Il n'y a pas lieu d'appliquer l'article 700 du code de procédure civile en appel.

La société SBI qui succombe supporte les dépens.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a réduit la clause pénale à 1 euro et en ce qu'il a fait courir les intérêts à compter de l'assignation ;

Statuant à nouveau sur ces points,

Condamne la société SBI à payer à la société Locam la somme de 1.062,39 euros au titre de la clause pénale ;

Fixe le point de départ des intérêts au taux légal à la date de la mise en demeure, le 2 juillet 2010 ;

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en appel ;

Condamne la société SBI au paiement des dépens en appel ;

Autorise ceux des mandataires des parties qui en ont fait la demande à recouvrer les dépens d'appel dans les formes et conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER         LE PRÉSIDENT

Joëlle POITOUX       Michel GAGET