TI NICE, 21 avril 2009
CERCLAB - DOCUMENT N° 3826
TI NICE, 21 avril 2009 : RG n° 11-08-004246 ; jugt n° 0310/09C
(sur appel CA Aix-en-Provence (15e ch. B), 18 mars 2010 : RG n° 09/08056 ; arrêt n° 2010/116)
Extrait : « Aucune discrimination n'est établie de la part de la compagnie d'assurances ni aucun déséquilibre, alors que le contrat de prêt concerne une période de 20 ans, le délai de carence de 12 mois étant parfaitement proportionné à la durée de ce contrat et ne pouvant être qualifié d'abusif. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL D’INSTANCE DE NICE
JUGEMENT DU 21 AVRIL 2009
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11-08-004246. Jugement n° 0310/09C.
PRÉSIDENT DU TRIBUNAL : Jeanne PELLEFIGUES, Vice-Présidente, Juge au tribunal de grande instance de Nice, chargé du service du tribunal d'instance de Nice
GREFFIER : BESSE Marika, présente lors des débats et du prononcé du délibéré
DEMANDERESSE :
Madame X.
[adresse], comparant par Monsieur Y. (son fils),
DÉFENDEUR :
GENWORTH ASSURANCES
[adresse], représenté(e) par Maître DUEZ, avocat au barreau de Paris, substitué par Maître LEJEUNE, avocat au barreau de Nice
Après clôture des débats à l'audience publique du 17 mars 2009, l'affaire a été mise en délibéré.
Le Tribunal ayant avisé les parties présentes de la date du prononcé de la décision a rendu ce jour 21 avril 2009 le jugement dont la teneur suit en vidant son délibéré.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE :
Par acte du 15 octobre 2008 Madame X. a assigné GENWORTH ASSURANCES agissant poursuites et diligences de son représentant légal aux fins de voir dire et juger que la clause d'exclusion qui lui est opposée dans l'exécution du contrat d'assurance est abusive et voir déclarer cette clause non écrite et que les autres dispositions contractuelles sont applicables.
Elle sollicite également voir dire que l'arrêt total temporaire suite à sa maladie est soumis aux dispositions communes du contrat d'assurance et que la prise en charge du paiement des échéances du crédit immobilier est effective après le délai de carence de trois mois d'arrêt consécutif soit au 13 juin 2008.
Elle sollicite voir dire que cette compagnie d'assurances lui est redevable d'une somme correspondant à 85 % du montant des mensualités du crédit immobilier à compter du 13 juin 2008.
Elle demande la condamnation de la compagnie d'assurances à lui régler la somme de 1.661,58 € de dommages et intérêts à titre de compensation pour les échéances indûment versées par celle-ci jusqu'au 1er octobre 2008 avec astreinte d'un montant de 300 € par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir.
Elle sollicite voir dire que jusqu'à sa reprise de travail effective, la compagnie d'assurances devra régler à GE MONEY BANK prêteur, 85 % du montant des échéances du crédit immobilier et la somme de 2.000 € pour résistance abusive ainsi que la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle expose être fonctionnaire de l'éducation nationale, avoir souhaité faire un investissement locatif et avoir contracté un contrat de prêt immobilier avec la Société GE MONEY BANK le 9 mai 2003 pour un montant de 70.000 € remboursable sur 240 mensualités différentes d'une année à l'autre en application du taux d'intérêt variable convenu.
Elle rembourse aujourd'hui ses échéances suivant le versement de sommes mensuelles de 488,70 €.
Elle avait contracté en même temps que ce prêt une assurance décès invalidité incapacité et arrêt de travail auprès de la Société GENWORTH ASSURANCES.
Le contrat d'assurance prévoyait que la prise de garantie en cas d'arrêt temporaire définitif de travail par suite de maladies n'est effective que passé un délai de 90 jours ininterrompus d'arrêt.
Dans ce cas l'assurance prenait à sa charge 85 % du montant des mensualités postérieures à ce délai.
[minute page 3] Elle souffrait d'un certain nombre d'affections qui la contraignaient à une immobilisation et à un état de dépression incompatible avec une quelconque reprise de son activité professionnelle.
Elle subissait un premier arrêt établi le 9 novembre 2007 puis un nouvel arrêt établi du 12 au 16 octobre prolongé jusqu'au 14 décembre 2007.
Après une reprise de travail le 15 décembre 2007, un arrêt était à nouveau établi du 3 au 13 janvier 2008, à nouveau objet de deux prolongations jusqu'au 18 et 25 janvier 2008.
Au terme de plusieurs arrêts maladie après examen d'une commission d'experts le 29 mai 2008, elle recevait le 20 juin 2008 un arrêté de l'inspection d'académie lui indiquant qu'elle faisait l'objet d'un arrêt longue maladie à compter du 13 mars 2008.
Elle transmettait alors à sa compagnie d'assurances tous les documents médicaux utiles pour la prise en charge de son crédit.
Cette compagnie d'assurances lui répondait par courrier du 11 avril 2008 que la demande de prise en charge de son crédit n'était pas recevable du fait de la nature et de la pathologie concernée.
Choquée par une telle exclusion, elle tentait de négocier et adresser une lettre recommandée avec accusé de réception le 23 mai 2008 au directeur juridique de la société auquel il ne lui était pas fait réponse.
Elle se prévaut des dispositions de l'article L. 112-4 du Code des assurances suivant lesquelles les clauses d'exclusion ne sont valables que si elles sont mentionnées en caractères très apparents.
Elle invoque également les dispositions du code de la consommation en son article L. 132-1 prévoyant que les clauses abusives de nature à créer au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat sont réputés non écrites.
Elle considère que le contrat fait une différenciation qui n'a pas lieu d'être en considérant différemment les maladies classiques et la maladie d'ordre psychique et en opérant par là même une discrimination.
La Société FACL dont le nom commercial est GENWORTH ASSURANCES et pour son représentant légal sollicite voir constater qu'elle prend actuellement en charge 85 % des mensualités du crédit de Madame X. conformément aux stipulations de la garantie et que son arrêt de travail résulte d'une affection psychique de sorte que la garantie ne peut s'appliquer qu'au terme d'un délai de carence de 12 mois.
[minute page 4] Elle considère qu'un tel délai de carence est parfaitement valable et doit recevoir application en l'espèce, la demande en dommages et intérêts de Madame X. étant dépourvue de toute justification.
Elle conclut au débouté de celle-ci et à sa condamnation à lui régler la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR QUOI :
Aux termes de l'article 1134 du Code civil les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Elles doivent être exécutées de bonne foi.
En l'espèce Madame X. reproche à la Compagnie d'assurances le délai de carence de 12 mois qui lui a été appliqué et conditionnant la mise en œuvre de la garantie consécutivement à la dépression nerveuse dont elle est atteinte ayant été placée en arrêt longue maladie le 13 mars 2008 alors que le premier arrêt maladie pour cette affection avait débuté le 9 novembre 2007.
Elle considère que ce délai de carence est abusif et doit être soumis aux dispositions du code de la consommation concernant les clauses abusives et donc ne pas lui être opposable.
II résulte des circonstances dans lesquelles cette personne institutrice de son état a contracté, qu'elle était libre de contracter ou pas une assurance auprès de cette compagnie dont elle a accepté les conditions générales de garantie qui étaient spécifiées au contrat et dont elle a été parfaitement informée.
De par sa profession elle est supposée comprendre le libellé de telles dispositions et elle a d'ailleurs manifesté par son comportement et les échanges qu'elle a eus avec la compagnie d'assurances, sa capacité à envisager la portée des engagements réciproques des parties.
Elle n'établit pas en tout cas une incapacité dont elle serait affectée et l'empêchant de contracter dans des conditions normales.
Elle reproche à la Compagnie d'assurances une clause d'exclusion alors qu'il s'agit d'un délai de carence de 12 mois applicable aux maladies d'ordre psychique en raison de leur spécificité.
Aucune discrimination n'est établie de la part de la compagnie d'assurances ni aucun déséquilibre, alors que le contrat de prêt concerne une période de 20 ans, le délai de carence de 12 mois étant parfaitement proportionné à la durée de ce contrat et ne pouvant être qualifié d'abusif.
[minute page 5] La compagnie d'assurances démontre prendre en charge actuellement 85 % des mensualités du crédit de la demanderesse conformément aux stipulations du contrat et avoir dès lors parfaitement respecté celles-ci qui disposent : arrêt temporaire total de travail par suite de maladies : 85 % des mensualités venant à échéance postérieurement à un délai de 90 jours ininterrompus d'arrêt total de travail.
La prise en charge par la compagnie d'assurances est intervenue à l'issue de ce délai de carence et à compter de décembre 2008 puisque le premier arrêt de travail de l'assurée est intervenu en novembre 2007.
La demanderesse sera déboutée de l'ensemble de ses prétentions et condamnée à verser à la défenderesse la somme de 700 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement contradictoirement en premier ressort ;
Déboute Madame X. de l'ensemble de ses prétentions.
La condamne à verser à la Société FACL dont le nom commercial est GENWORTH ASSURANCES et pour elle son représentant, légal, la somme de 700 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La dit tenue aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé en audience publique les jour, mois et an ci-dessus indiqués et J. PELLEFIGUES, Vice Présidente, a signé avec M. BESSE, [faisant fonction] de greffier présent lors du prononcé du délibéré.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
- 6011 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Principes généraux - Appréciation de la personne du consommateur
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