CA LYON (1re ch. civ. A), 31 mai 2012
CERCLAB - DOCUMENT N° 3867
CA LYON (1re ch. civ. A), 31 mai 2012 : RG n° 10/08366
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « La société Batirenov indique que le tribunal de Marseille était compétent, et non celui de Saint-Étienne, dès lors qu'elle a son siège social à Marseille. Elle relève que la clause de compétence territoriale figurant au contrat ne peut pas s'appliquer, puisqu'elle vise les tribunaux du siège social du cessionnaire, alors que le cessionnaire n'est pas mentionné, et que les conditions générales ne sont ni lisibles ni compréhensibles.
Il ressort du contrat signé entre les parties qu'une mention en gras se trouve sur le recto du document, précisant que tout litige relatif au contrat sera de la compétence du siège social du cessionnaire. La cession du contrat est prévue par l'article 1er des conditions générales du contrat, qui mentionne au titre des cessionnaires envisageable la société Locam, dont le siège social se trouve à Saint-Étienne. En signant le contrat, la société Batirenov a déclaré avoir pris connaissance des conditions générales recto et verso, comme cela est stipulé sur le recto du contrat. Les caractères typographiques des conditions générales, bien qu'assez réduits, permettent une lecture aisée, et la clause relative à la compétence est écrite en gras, ce qui attire l'attention du contractant. »
2/ « Mais il ressort du contrat signé entre les parties que « le client déclare avoir pris connaissance et approuvé les termes recto et verso des conditions générales et particulières ». De plus, si les conditions générales sont rédigées en petits caractères, elles sont cependant parfaitement lisibles, la compréhension étant facilitée par les titres accompagnant chaque article. Les conditions générales du contrat sont donc opposables à la société Batirenov. »
3/ « Mais la société Batirenov est une société commerciale qui contractait pour les besoins de son activité, puisque la création du site internet visait à promouvoir son activité et à se faire connaître. La société Batirenov n'est ni un consommateur ni un non-professionnel, elle ne peut donc pas se prévaloir des dispositions du code de la consommation sanctionnant les clauses abusives. »
COUR D’APPEL DE LYON
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE A
ARRÊT DU 31 MAI 2012
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 10/08366. Décision du tribunal de commerce de Saint-Étienne (1re ch.), Au fond, du 21 septembre 2010 : R.G. n° 2010/2722.
APPELANTE :
SARL PF BATIRENOV
représentée par Maître Patrick BAUDY, avocat au barreau de LYON, assistée de Maître Benoît CANDON, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMÉE :
SAS LOCAM
représentée par la SCP LAFFLY - WICKY, avocats au barreau de LYON, assistée de la SELARL LEXI, avocats au barreau de SAINT-ÉTIENNE
Date de clôture de l'instruction : 24 février 2012
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 23 mars 2012
Date de mise à disposition : 31 mai 2012
Audience présidée par Michel GAGET, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier.
Composition de la Cour lors du délibéré : - Michel GAGET, président, - François MARTIN, conseiller, - Philippe SEMERIVA, conseiller
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Michel GAGET, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu le jugement du 21 septembre 2010 du tribunal de commerce de Saint Etienne qui condamne la société Batirenov à payer à la société Locam la somme de 5.788,64 euros outre 1euros au titre de la clause pénale, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, la société Batirenov n'ayant pas comparu ;
Vu la déclaration d'appel formée par la société PF Batirenov le 23 novembre 2010 ;
Vu les conclusions du 14 décembre 2011 de la société Batirenov qui conclut à l'annulation du jugement au motif que l'assignation n'a pas été délivrée à la bonne adresse et qui soulève l'incompétence du tribunal de commerce de Saint Etienne et de la Cour d'appel de Lyon ;
Vu les mêmes conclusions dans lesquelles la société Batirenov demande à titre subsidiaire la réformation du jugement et s'oppose aux demandes de la société Locam, au motif que cette société est irrecevable à agir, que les conditions générales du contrat sont inopposables à la société Batirenov, que la mise en demeure délivrée par la société Locam est nulle et que le contrat contient des clauses abusives qui doivent être écartées ;
Vu les conclusions du 16 septembre 2011 de la société Locam qui conclut à la confirmation du jugement sauf en ce qu'il a réduit le montant de la clause pénale à 1euros, au motif qu'elle est bien recevable à agir puisque le contrat lui a été cédé, que les conditions générales ont été approuvées, que la mise en demeure a bien été reçue par la société Batirenov et que le code de la consommation n'est pas applicable en l'espèce ;
Vu l'ordonnance de clôture du 24 février 2012 ;
Les parties ont présenté leurs observations orales à l'audience du 23 mars 2012 après le rapport de Monsieur le Président Michel Gaget.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
DÉCISION :
La société PF Batirenov a signé le 16 juillet 2009 un contrat de licence d'exploitation de site internet avec la société Arpaline pour un montant TTC de 131,56 euros par mois pendant 48 mois.
L'article 1 des conditions générales du contrat prévoyait la possibilité pour la société Arpaline de céder les droits du contrat à la société Locam.
Le 10 septembre 2009, la société PF Batirenov a signé un procès-verbal de réception.
Le 26 mars 2010, la société Locam résiliait le contrat en vertu de la clause résolutoire pour défaut de paiement.
Sur la nullité du jugement :
La société Batirenov soutient qu'elle n'a pas été assignée à la bonne adresse en première instance, puisqu'elle avait changé de siège social, ce que la société Locam savait puisque la bonne adresse était indiquée sur le contrat, malgré l'utilisation du tampon commercial portant l'ancienne adresse.
Elle indique qu'elle a changé de siège social lors d'une assemblée générale du 14 novembre 2008, la modification ayant été enregistrée au greffe du tribunal de commerce de Marseille le 9 janvier 2009.
La société Locam indique que la société Batirenov avait pourtant bien signé l'accusé de réception de la mise en demeure adressée à l'ancienne adresse le 26 mars 2010. De plus, elle souligne que l'huissier de justice a relevé le nom de la société sur la boîte aux lettres à l'ancienne adresse.
En effet, il ressort du procès-verbal de signification dressé le 2 juillet 2010 que l'acte a été déposé en l'étude de Maître Fontani, Huissier de justice. Aucun procès-verbal de recherches infructueuses n'a été dressé puisque le nom de la société Batirenov apparaissait sur la boîte aux lettres du [...].
De plus, la mise en demeure adressée par la société Locam le 26 mars 2010 à l'ancienne adresse a bien été reçue par la société Batirenov qui a signé l'accusé de réception. La société Locam pouvait donc en déduire qu'elle adressait ses courriers à la bonne adresse.
Enfin, il ne peut être reproché à la société Locam d'avoir envoyé l'assignation au [...] alors que cette adresse apparaît sur le cachet commercial apposé sur le contrat, même si l'autre adresse est mentionnée de façon manuscrite.
La demande tendant à obtenir la nullité du jugement est donc rejetée.
Sur la compétence :
La société Batirenov indique que le tribunal de Marseille était compétent, et non celui de Saint-Étienne, dès lors qu'elle a son siège social à Marseille.
Elle relève que la clause de compétence territoriale figurant au contrat ne peut pas s'appliquer, puisqu'elle vise les tribunaux du siège social du cessionnaire, alors que le cessionnaire n'est pas mentionné, et que les conditions générales ne sont ni lisibles ni compréhensibles.
Il ressort du contrat signé entre les parties qu'une mention en gras se trouve sur le recto du document, précisant que tout litige relatif au contrat sera de la compétence du siège social du cessionnaire.
La cession du contrat est prévue par l'article 1er des conditions générales du contrat, qui mentionne au titre des cessionnaires envisageable la société Locam, dont le siège social se trouve à Saint-Étienne.
En signant le contrat, la société Batirenov a déclaré avoir pris connaissance des conditions générales recto et verso, comme cela est stipulé sur le recto du contrat.
Les caractères typographiques des conditions générales, bien qu'assez réduits, permettent une lecture aisée, et la clause relative à la compétence est écrite en gras, ce qui attire l'attention du contractant.
La société Batirenov ne peut donc demander que cette clause soit écartée, alors qu'elle est mise en évidence sur le contrat et que la question de la cession est évoquée dès l'article 1er des conditions générales.
Le Tribunal de commerce de Saint-Étienne était donc compétent pour statuer sur le litige.
En conséquence, la présente Cour statue sur le litige présenté.
Sur l'irrecevabilité à agir de la société Locam :
La société Batirenov reproche à la société Locam de ne pas l'avoir informée du transfert du contrat. Elle souligne que la société Locam reste alors un tiers au contrat, et n'a pas qualité pour agir.
Mais l'article 1er des conditions générales opposables à la société Batirenov précise que le client est informé de la cession par tout moyen et notamment par le libellé de la facture échéancier ou de l'avis de prélèvement qui est émis.
Or, il n'est pas contesté que la société Batirenov s'est acquittée du paiement des 4 premiers mois de loyer auprès de la société Locam.
Elle était donc parfaitement informée de la cession de contrat intervenue entre la société Arpaline et la société Locam.
En conséquence, la société Locam, qui est bien partie au contrat, a bien qualité et intérêt à agir.
Sur le fond :
La société Batirenov indique en premier lieu que les conditions générales du contrat ne lui sont pas opposables puisqu'elles ne sont pas formulées clairement et de façon lisible alors que les clauses sont dérogatoires du droit commun. De plus, elle relève qu'elle n'a pas apposé sa signature au verso du document.
Mais il ressort du contrat signé entre les parties que « le client déclare avoir pris connaissance et approuvé les termes recto et verso des conditions générales et particulières ».
De plus, si les conditions générales sont rédigées en petits caractères, elles sont cependant parfaitement lisibles, la compréhension étant facilitée par les titres accompagnant chaque article.
Les conditions générales du contrat sont donc opposables à la société Batirenov.
La société Batirenov invoque également la nullité de la mise en demeure adressée par la société Locam, au motif qu'elle a été envoyée à la mauvaise adresse.
Mais il ressort des pièces du dossier que la société Batirenov a signé l'accusé de réception de cette mise en demeure, qui a été adressée par la société Locam à une des deux adresses figurant sur le contrat.
Ensuite, la société Batirenov se prévaut des dispositions du code de la consommation, en soutenant que son domaine d'activité, à savoir le bâtiment, n'a aucun lien particulier avec l'informatique, ce qui fait d'elle un client profane, qui doit être protégé.
Mais la société Batirenov est une société commerciale qui contractait pour les besoins de son activité, puisque la création du site internet visait à promouvoir son activité et à se faire connaître.
La société Batirenov n'est ni un consommateur ni un non-professionnel, elle ne peut donc pas se prévaloir des dispositions du code de la consommation sanctionnant les clauses abusives.
Pour finir, la société Batirenov souligne qu'elle n'a pas reçu de contrepartie puisque le référencement du site internet n'a pas eu lieu comme prévu.
Cependant, la société Arpaline, prestataire du service, n'est pas dans la cause.
Le contrat signé par la société Batirenov fait état aux articles 2.4, 5.1 et 11 d'une indépendance juridique entre la fourniture du site internet par la société Arpaline et le financement de cette opération par la société Locam.
La société Batirenov ne peut donc opposer à la société Locam des arguments tirés de ses relations avec la société Arpaline, d'autant plus qu'un procès-verbal de réception ne mentionnant aucune réserve a été signé le 10 septembre 2009.
En conséquence, la société Locam était fondée à mettre en œuvre la clause résolutoire pour défaut de paiement.
Il est prévu à l'article 16 du contrat que le contractant doit verser à la société Locam la somme des loyers impayés, majorée d'une clause pénale de 10 % et la somme des loyers à échoir majorée d'une clause pénale de 10 %.
La société Batirenov est donc condamnée à payer à la société Locam :
- 394,68 euros (3 x 131.56 euros) au titre des loyers impayés en janvier, février et mars 2010,
- 5.393,96 euros (41 x 131,56 euros) au titre des 41 loyers à échoir jusqu’à la fin du contrat,
Soit 5.788,64 euros à titre principal.
Il n'y a pas lieu de réduire la clause pénale qui n'apparaît pas manifestement excessive.
La société Batirenov est donc condamnée à payer à la société Locam la somme de 578,86 euros au titre de la clause pénale.
Ces sommes sont assorties des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 26 mars 2010, qui seront capitalisés par années entières conformément à l'article 1154 du code civil.
Il n'y a pas lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile en appel.
La société Batirenov qui succombe supporte les dépens.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a réduit la clause pénale à 1 euro et en ce qu'il a fixé le point de départ des intérêts au jour de l'assignation ;
Statuant à nouveau sur ces points,
Condamne la société Batirenov à payer à la société Locam la somme de 578,86 euros au titre de la clause pénale ;
Fixe le point de départ des intérêts courant sur les sommes dues à la mise en demeure du 26 mars 2010 ;
Y ajoutant,
Ordonne la capitalisation des intérêts par années entières conformément à l'article 1154 du code civil ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en appel ;
Condamne la société Batirenov aux dépens d'appel ;
Autorise ceux des mandataires des parties qui en ont fait la demande à les recouvrer dans les formes et conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
Joëlle POITOUX Michel GAGET
- 5860 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Personnes morales (avant la loi du 17 mars 2014) - Clauses abusives - Protection implicite
- 5878 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères alternatifs : besoins de l’activité
- 5901 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Indices - Finalité du contrat - Promotion de l’activité
- 5944 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Promotion de l’activité : site internet
- 6088 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Contenu initial du contrat - Opposabilité des conditions générales - Conditions figurant sur l’écrit signé par le consommateur - Clauses devant être mentionnées de façon apparente
- 6389 - Code civil et Droit commun - Sanction indirecte des déséquilibres significatifs - Acceptation et opposabilité des clauses