CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

TI MARSEILLE, 29 juin 2004

Nature : Décision
Titre : TI MARSEILLE, 29 juin 2004
Pays : France
Juridiction : Marseille (TI)
Demande : 11-02-005189
Date : 29/06/2004
Nature de la décision : Rejet
Date de la demande : 30/10/2002
Décision antérieure : CA AIX-EN-PROVENCE (11e ch. A), 9 janvier 2008
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 4098

TI MARSEILLE, 29 juin 2004 : RG n° 11-02-005189

(sur appel CA Aix-en-Provence (11e ch. A), 9 janvier 2008 : RG n° 05/08624 ; arrêt n° 2008/6)

 

Extrait : « L'article L. 121-22 prévoit quant à lui expressément que […]. En d'autres termes, un professionnel, tel un commerçant, a droit à la protection prévue en matière de démarchage à domicile au même titre qu'un consommateur particulier dès lors que le contrat souscrit porte sur une opération qui n'est pas en rapport direct avec son activité commerciale.

En l'espèce, les pièces du dossier permettent d'établir que Madame X. a été démarchée sur son lieu de travail par la société ABBYSS, en vue de la souscription auprès de cette dernière d'un contrat d'approvisionnement et de maintenance d'un appareil de climatisation, et auprès de la société PARFIP, spécialisée dans la location de biens mobiliers aux entreprises et aux professionnels, d'un contrat de location de ce même appareil pour une durée de 48 mois. […]. En outre, force est de constater que la location d'un appareil de climatisation, qui a pour seul objectif d'apporter au commerçant ainsi qu'à ses éventuels salariés un certain confort climatique, ne présente pas de rapport direct avec l'activité particulière de toilettage d'animaux exercée par Madame X.

La simple mention sur le contrat, dans son article 17, de la clause selon laquelle sont exclues du bénéfice de ces dispositions les locations destinées aux besoins d'une exploitation commerciale ou d'une activité professionnelle ne peut suffire à écarter les règles protectrices du droit de la consommation. En effet, ces règles étant d'ordre public, conformément à l'article L. 121-20-7 du Code de la consommation, leur application ne peut être exclue par le biais de stipulations contractuelles contraires, et relève de l'appréciation casuistique et souveraine des magistrats.

Il s'ensuit que ce contrat est bien soumis aux dispositions protectrices du Code de la consommation... ».

 

TRIBUNAL D’INSTANCE DE MARSEILLE

JUGEMENT DU 29 JUIN 2004

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 11-02-005189.

DEMANDEUR A L'INJONCTION DE PAYER :

DÉFENDEUR A L'OPPOSITION :

 

PARFIP FRANCE

[adresse] représenté(e) par Maître SAGNES-JIMENEZ, avocat du barreau de Bourg-en-Bresse

 

DÉFENDEUR A L'INJONCTION DE PAYER :

DEMANDEUR A L'OPPOSITION :

Madame X.

[adresse], représenté(e) par Maître BORODA Sophie, avocat du barreau de MARSEILLE, AJ N°200300XX

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : Madame FEVRE

Assisté de : Monsieur TAVERNI F.F. [N.B. faisant fonction] de Greffier

DÉBATS : Audience publique du 4 mai 2004

JUGEMENT : Délibéré du 15 juin 2004 prorogé et Prononcé publiquement le 29 juin 2004

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

La société PARFIP a obtenu, le 19 juillet 2002, du Tribunal d'instance de MARSEILLE, la délivrance d'une ordonnance portant injonction à Madame X. de lui payer en principal la somme de 2.642,28 euros au titre d'un solde de loyers impayés.

Cette ordonnance a été signifiée à personne le 25 octobre 2002.

Par déclaration au greffe du Tribunal le 30 octobre 2002, Madame X. a formé opposition à ladite ordonnance.

La société PARFIP demande au Tribunal, sur le fondement de l'article 1134 du Code civil :

- qu'il constate la résiliation du contrat qu'elle a conclu avec Madame X. ;

- qu'il condamne Madame X. à lui payer les sommes suivantes : 2.454,04 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 18 juillet 2002 au titre du solde des loyers impayés depuis le mois de juin 2001, 2.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, et 1.500 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- qu'il condamne Madame X. à restituer à son siège social et à ses frais exclusifs le matériel loué ;

- qu'il ordonne l'exécution provisoire ;

- qu'il déboute Madame X. de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles.

La société demanderesse réfute les arguments soulevés par Madame X., considérant que :

- les dispositions protectrices et d'ordre public du Code de la consommation en matière de démarchage à domicile ne peuvent trouver application en l'espèce, la location du matériel de chauffage et de climatisation présentant un rapport direct avec l'activité professionnelle de toilettage d'animaux exercée par Madame X. ;

- la défenderesse n'est pas en droit de soutenir qu'elle n'a pas reçu d'exemplaire du contrat, puisque celui-ci porte la mention « fait en autant d'exemplaires que de parties » ;

- elle a souscrit avec la société PARFIP un simple contrat de location d'un appareil de chauffage et de climatisation, distinct du contrat de maintenance signé avec la société ABBYSS ;

- la société PARFIP a respecté l'ensemble des obligations qui résultent du contrat de location, et ne peut donc se voir opposer une quelconque exception d'inexécution.

 

A titre principal, Madame X. sollicite, sur le fondement de l'article 121-3 du Code de la consommation, l'annulation du contrat qu'elle a souscrit avec la société PARFIP, au motif que :

- le contrat a été souscrit suite à un démarchage de la société ABBYSS sur son lieu de travail, pour la vente et la location d'un bien mobilier qui ne présente pas de lien direct avec l'activité professionnelle de toilettage d'animaux ;

- [minute page 3] il ne respecte pas les dispositions protectrices et d'ordre public prévues par les articles L. 121-1 et suivants du Code de la consommation en matière de démarchage, et notamment l'obligation faite au vendeur ou au bailleur de remettre au cocontractant un exemplaire du contrat qu'il a signé.

Elle réclame en conséquence le remboursement par la société PARFIP de l'ensemble des sommes qui lui ont été prélevées indûment sur son compte entre septembre 2000 et juin 2001, soit la somme totale de 623,07 euros.

A titre subsidiaire, la demanderesse soutient que la société PARFIP n'a pas exécuté ses obligations contractuelles en ne délivrant pas un appareil conforme à sa destination et en ne procédant pas à la réparation ou au remplacement des éléments défectueux de l'appareil, en violation de son obligation de maintenance.

Par conséquent, elle estime être en droit de :

- soulever une exception d'inexécution et de refuser de poursuivre les paiements afférents au contrat litigieux à compter du 30 juin 2001 ;

- demander la résiliation du contrat, par application de l'article 1184 du Code civil, ainsi que le remboursement de l'ensemble des sommes versées indûment, à savoir une somme totale de 623,07 euros représentant les prélèvements effectués du mois de septembre 2000 au mois de juin 2001.

En tout état de cause, Madame X. sollicite du Tribunal la condamnation de la société PARFIP au paiement des sommes suivantes :

- 2.000 euros à titre de dommages et intérêts, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil ;

- 1.000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

I / Sur la nullité du contrat signé entre Madame X. et la société PARFIP :

A) Sur la nature du contrat :

Il résulte des éléments versés au dossier que le 3 août 2000, Madame X. a signé :

- avec la société ABBYSS un contrat d'approvisionnement et de maintenance portant sur un appareil de climatisation de marque LG ;

- avec la société PARFIP un contrat de location de l'appareil pour une durée de 48 mois moyennant un loyer mensuel de 58,35 euros (382,74 FF).

Aux termes du contrat, et notamment de son article 1er, la société PARFIP s'est portée acquéreur du matériel, tout en donnant mandat à Madame X. pour désigner le type et la marque du matériel qui répond à ses propres besoins d'utilisation, et l'a mis à disposition de la locataire pendant une durée de 48 mois, moyennant le versement d'un loyer mensuel.

[minute page 4] Il convient donc, au vu de ces éléments, de constater que le contrat qui lie la société PARFIP à Madame X., et qui ne comporte aucune possibilité d'acquisition du bien loué pour le locataire, est un contrat de location d'un bien mobilier, distinct du contrat d'approvisionnement et de maintenance souscrit auprès de la société ABBYSS.

 

B) Sur l'application des dispositions protectrices du Code de la consommation :

L'article L. 121-21 du Code de la consommation dispose qu'est soumis aux dispositions protectrices des articles L. 121-23 à L. 121-29 du Code de la consommation quiconque pratique ou fait pratiquer le démarchage au domicile d'une personne physique, à sa résidence ou à son lieu de travail, même à sa demande, afin de lui proposer l'achat, la vente, la location, la location-vente ou la location avec option d'achat de biens ou la fourniture de services.

L'article L. 121-22 prévoit quant à lui expressément que ne sont pas soumises à ces dispositions les ventes, locations ou locations-ventes de biens ou les prestations de services lorsqu'elles ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation agricole, industrielle, commerciale ou artisanale ou de toute autre profession.

En d'autres termes, un professionnel, tel un commerçant, a droit à la protection prévue en matière de démarchage à domicile au même titre qu'un consommateur particulier dès lors que le contrat souscrit porte sur une opération qui n'est pas en rapport direct avec son activité commerciale.

En l'espèce, les pièces du dossier permettent d'établir que Madame X. a été démarchée sur son lieu de travail par la société ABBYSS, en vue de la souscription auprès de cette dernière d'un contrat d'approvisionnement et de maintenance d'un appareil de climatisation, et auprès de la société PARFIP, spécialisée dans la location de biens mobiliers aux entreprises et aux professionnels, d'un contrat de location de ce même appareil pour une durée de 48 mois.

Ainsi, la souscription du contrat de location avec la société PARFIP est la résultante directe du démarchage effectuée par la société ABBYSS, qui a proposé à la défenderesse de souscrire ces deux contrats de prestation de services, et qui a donc agi en tant que mandataire de la société PARFIP.

En outre, force est de constater que la location d'un appareil de climatisation, qui a pour seul objectif d'apporter au commerçant ainsi qu'à ses éventuels salariés un certain confort climatique, ne présente pas de rapport direct avec l'activité particulière de toilettage d'animaux exercée par Madame X.

La simple mention sur le contrat, dans son article 17, de la clause selon laquelle sont exclues du bénéfice de ces dispositions les locations destinées aux besoins d'une exploitation commerciale ou d'une activité professionnelle ne peut suffire à écarter les règles protectrices du droit de la consommation. En effet, ces règles étant d'ordre public, conformément à l'article L. 121-20-7 du Code de la consommation, leur application ne peut être exclue par le biais de stipulations contractuelles contraires, et relève de l'appréciation casuistique et souveraine des magistrats.

[minute page 5] Il s'ensuit que ce contrat est bien soumis aux dispositions protectrices du Code de la consommation, et notamment de son article L. 121-23, qui prévoit qu'un exemplaire du contrat de location résultant d'une activité de démarchage doit être remis au client et que ce contrat doit comporter, à peine de nullité, plusieurs mentions obligatoires, et notamment la désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés, les conditions et les modalités d'exécution de la prestation de services, ainsi que le prix et les modalités de paiement.

Or, le contrat de location souscrit par Madame X. auprès de la société PARFIP, s'il a été fait en autant d'exemplaires que de parties, la signature de cette dernière sous la mention en faisant état en établissant la preuve, désigne quant à la nature et aux caractéristiques du bien loué l'appareil suivant : SPLIT LG L5J761 HL.

Par ailleurs, le loyer mensuel « Toutes Taxes Comprises » n'est à aucun moment mentionné sur le contrat, et englobe le coût de la maintenance qui doit être réalisée sur l'appareil par la société ABBYSS, sans qu'il ne soit jamais indiqué la part du loyer qui sera reversée à cette société à ce titre.

Ni les caractéristiques essentielles du bien loué, d'autant que celui effectivement posé n'est pas de la marque mentionnée au contrat mais d'une autre, « HALER », de telle sorte que le contrat de location avec la société PARFIP n'a même pas d'objet, ni son prix de location n'apparaissent clairement sur le contrat.

Par conséquent, il convient de prononcer, sur le fondement de l'article L. 121-23 du Code de la consommation, la nullité du contrat de location signé entre Madame X. et la société PARFIP, et de condamner cette dernière à rembourser à la défenderesse la totalité des sommes qu'elle a perçues dans le cadre de ce contrat, soit une somme de 623,07 euros représentant les prélèvements effectués du mois de septembre 2000 au mois de juin 2001, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

Dans la mesure où le bien en possession effective de Madame X. n'est pas celui figurant sur le contrat dont se prévaut la société PARFIP, la restitution ne peut en être ordonnée, et Madame X. en disposera à sa guise.

 

II / Sur la demande de dommages et intérêts formulée par Madame X. :

En l'espèce, la défenderesse sollicite le paiement de la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du Code civil.

Toutefois, elle ne fournit aucun élément à l'appui de sa demande permettant d'établir une quelconque mauvaise foi ou négligence fautive de la part de la société demanderesse, et ne caractérise pas les éléments du préjudice subi permettant de prétendre à indemnisation.

Au demeurant, la requête en injonction de payer formulée par la société PARFIP a eu pour seul objectif de permettre le recouvrement de loyers impayés considérés comme dus en vertu du contrat de location.

[minute page 6] Il convient donc de débouter Madame X. de sa demande en dommages et intérêts, aucune somme ne pouvant être allouée à ce titre.

 

III/ Sur la demande de dommages et intérêts formulée par la société PARFIP :

Déboutée de sa demande principale en paiement, la société PARFIP ne peut prétendre à l'existence d'une résistance abusive de la défenderesse.

 

IV/ Sur les dépens et l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile :

La société PARFIP, qui succombe en toutes ses prétentions, sera condamnée au paiement des dépens de la présente instance sur le fondement de l'article 696 du Nouveau Code de Procédure Civile.

En outre, Madame X., qui bénéficie de l'aide juridictionnelle, ne justifie pas de frais irrépétibles.

Il s'ensuit que sa demande au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile sera rejetée.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

PRONONCE la nullité du contrat de location souscrit le 3 août 2000 par Madame X. auprès de la société PARFIP, en application de l'article L. 121-23 du Code de la consommation ;

DÉBOUTE en conséquence la société PARFIP de l'ensemble de ses demandes ;

CONDAMNE la société PARFIP à rembourser à Madame X. la totalité des sommes perçues indûment, soit la somme de 623,07 euros correspondant aux prélèvements effectués sur le compte de cette dernière du mois de septembre 2000 au mois de juin 2001, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;

DÉBOUTE la société PARFIP de sa demande en restitution du matériel loué, qui n'est pas celui en possession de la locataire ;

DÉBOUTE Madame X. de sa demande de dommages et intérêts formulée à l'encontre de la société PARFIP ;

[minute page 7] DÉBOUTE la société PARFIP de sa demande de dommages et intérêts formulée à l'encontre de Madame X. ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

CONDAMNE la société PARFIP au paiement des dépens de la présente instance, qui seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.

AINSI JUGÉ ET PRONONCÉ PUBLIQUEMENT LES JOUR, MOIS ET AN QUE DESSUS.

LE GREFFIER         LE JUGE