CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 22 février 2013
CERCLAB - DOCUMENT N° 4298
CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 22 février 2013 : RG n° 11/13415
Publication : Jurica
Extrait : « Mais considérant que l'article L. 121-22 alinéa 2 du même code exclut du champ d'application de ces textes, « les locations de biens lorsqu'elles ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation... commerciale... ou de toute autre profession » ; Que ce texte ne se réfère à aucun critère de spécialité ou de compétence du bailleur au regard du bien loué et que sa seule exigence de « rapport direct » est remplie lorsqu'un commerçant contracte pour les besoins d'une activité professionnelle de sorte qu'il convient de rejeter la demande de nullité ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 5 CHAMBRE 11
ARRÊT DU 22 FÉVRIER 2013
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11/13415. Arrêt n° 48 (7 pages). Décision déférée à la Cour : jugement du 30 juin 2011 - Tribunal de commerce de PARIS (4ème chambre) : R.G. n° 2010/006720.
APPELANTE AU PRINCIPAL et INTIMÉE INCIDENTE :
SAS PARFIP FRANCE,
agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social situé, Représentée par la SCP FISSELIER & ASSOCIES (Maître Alain FISSELIER), avocat au barreau de PARIS, toque L 0044, Assistée de Maître Véronique KLOCHENDLER-LEVY, avocat au barreau de PARIS, toque D 1991
INTERVENANTE VOLONTAIRE EN REPRISE D'INSTANCE et comme telle INTIMÉE AU PRINCIPAL et APPELANTE INCIDENTE :
SAS EIFFAGE ENERGIE THERMIE NORMANDIE, venant aux droits de la SAS FORCLIM NORMANDIE,
prise en la personne de son président domicilié en cette qualité au siège social situé [adresse], Représentée par Maître Edouard GOIRAND, avocat au barreau de PARIS, toque K 03, Assistée de Maître Patrick PONCHELET, avocat au barreau de PARIS, toque E 899
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 910 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 9 janvier 2013, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Françoise CHANDELON, Conseiller, Faisant Fonction de Président, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport
Mme Françoise CHANDELON a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Mme Françoise CHANDELON, Conseiller, Faisant Fonction de Président, Mme Dominique SAINT-SCHROEDER, Conseiller, Mme Sonia LION, Vice-Président Placé
Greffier lors des débats : Mme Carole TREJAUT
ARRÊT : Contradictoire, Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile ; Signé par Mme Françoise CHANDELON, Conseiller, Faisant Fonction de Président, et par Mme Carole TREJAUT, Greffier, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
La société Forclim Normandie, aux droits de laquelle vient aujourd'hui la société Eiffage Energie Thermie Normandie, a souscrit auprès de la société Easydentic, les 8 et 17 janvier 2008, deux contrats dits « d'abonnement de maintenance et de location » portant sur du matériel de biométrie.
Selon facture du 29 janvier 2008, la société Parfip France a acquis le matériel prix à bail, réceptionné sans réserve le même jour.
Les loyers étant restés impayés, à compter du 1er juin 2008 pour le premier contrat, du 1er mai 2008 pour le second, la société Parfip France, après avoir vainement mis en demeure la société Forclim Normandie, le 24 novembre 2009, a engagé la présente procédure par exploit du 15 janvier 2010.
Par jugement du 30 juin 2011, le tribunal de commerce de Paris l'a déboutée de sa demande et l'a condamnée au paiement d'une indemnité de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration du 15 juillet 2011, la société Parfip France a interjeté appel de cette décision.
Dans ses dernières écritures, au sens de l’article 954 du code de procédure civile, déposées le 28 novembre 2011, la société Parfip France demande principalement à la Cour de :
- infirmer le jugement, sauf en ce qu'il a déclaré sa demande recevable,
- prononcer la résiliation des contrats signés à la date du 2 décembre 2009,
- ordonner la restitution sous astreinte du matériel loué,
- condamner la société Eiffage Energie Thermie Normandie au paiement des sommes de 2.790,03 euros et 4.417,55 euros au titre des loyers impayés majorés de la clause pénale contractuelle, portant intérêts de droit à compter du 24 novembre 2009,
- condamner la société Eiffage Energie Thermie Normandie au paiement des sommes de 4.104,67 euros et 8.998,70 euros au titre des indemnités contractuelles de résiliation majorées de la clause pénale contractuelle,
- condamner la société Eiffage Energie Thermie Normandie à lui verser 3.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières écritures, au sens de l’article 954 du code de procédure civile, déposées le 28 novembre 2011, la société Eiffage Energie Thermie Normandie demande à la Cour de :
- déclarer la demande de la société Parfip France irrecevable,
- subsidiairement, annuler le contrat,
- plus subsidiairement, débouter la société Parfip France,
- condamner la société Parfip France à la restitution des loyers perçus, soit 3.612,28 euros,
- condamner la société Parfip France au paiement d'une indemnité complémentaire de 4.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
CELA ÉTANT EXPOSÉ,
LA COUR,
Sur la qualité à agir de la société Parfip France :
Considérant que la société Eiffage Energie Thermie Normandie la conteste sur le fondement des dispositions de l’article 1690 du code civil exposant que la cession du matériel n'a pas été portée à sa connaissance et que son cocontractant est la société Easydentic ;
Qu'elle ajoute avoir manifesté son désaccord à la cession et soutient que la réception du matériel devait intervenir en présence de l'établissement financier cessionnaire ;
Mais considérant qu'aux termes des deux contrats litigieux, la société Eiffage Energie Thermie Normandie a accepté par avance la cession du contrat de location financière, dont l'article 13 précise : « Le locataire reconnaît au loueur le droit de transférer la propriété des matériels, objet des présentes et de céder les droits... au profit notamment d'une des sociétés désignées à l'article 13.4... De telles cessions sont d'ores et déjà acceptées sans réserve par le Locataire et seront portées à sa connaissance par tout moyen... » ;
Et considérant d'une part que la société Parfip France est le seul organisme financier cité à l'article 13.4, d'autre part qu'elle a informé la société Forclim Normandie de sa qualité en lui adressant un échéancier, que cette dernière reconnaît avoir reçu dans son courrier du 19 février 2008, enfin qu'elle ne pouvait assister à la réception, pour n'acquérir le bien qu'une fois livré par le fournisseur et reconnu conforme par le preneur ;
Que ce moyen sera rejeté ;
Sur la nullité des contrats :
Considérant que la société Eiffage Energie Thermie Normandie fonde cette demande sur les articles L. 121-22 à L. 121-26 du code de la consommation relatifs au démarchage ;
Mais considérant que l'article L. 121-22 alinéa 2 du même code exclut du champ d'application de ces textes, « es locations de biens lorsqu'elles ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation... commerciale... ou de toute autre profession » ;
Que ce texte ne se réfère à aucun critère de spécialité ou de compétence du bailleur au regard du bien loué et que sa seule exigence de « rapport direct » est remplie lorsqu'un commerçant contracte pour les besoins d'une activité professionnelle de sorte qu'il convient de rejeter la demande de nullité ;
Sur la période d'essai :
Considérant que la société Eiffage Energie Thermie Normandie suggère avoir valablement résilié le contrat par son courrier précité du 19 février 2008 au motif que la société Easydentic lui aurait garanti qu'elle bénéficiait d'une période d'essai de trois mois ;
Mais considérant qu'à supposer que le commercial de ce fournisseur ait tenu un tel propos, ce qui ne saurait résulter des seules affirmations du « responsable moyens généraux » de la société Forclim Normandie, la lecture des contrats permettait à l'intimée de se convaincre de sa teneur, la location de matériels pour une durée irrévocable de 48 mois ;
Sur le matériel livré :
Considérant que la société Eiffage Energie Thermie Normandie relève que sur les procès verbaux de réception, il n'est pas précisé le mode d'activation du dispositif alors qu'une des deux cases devait être cochée prévoyant :
- En mode support individuel,
- En mode base de données centralisées ;
Qu'elle en déduit que la société Parfip France ne rapporte pas la preuve de l'activation du matériel ni de son bon fonctionnement ;
Considérant que pour débouter la société Parfip France, les premiers juges ont retenu ce moyen ;
Mais considérant, outre que la charge de la preuve de dysfonctionnement du matériel incombe à celui qui s'en prévaut, que la société Parfip France n'est cessionnaire que du contrat de location et qu'en signant, le 29 janvier 2008, les 2 procès verbaux de réception, l'un portant sur une caméra, le second sur un matériel « Easytouch 800 » et « LDM », la société Forclim Normandie a attesté avoir reçu un matériel conforme à sa commande et en bon état de fonctionnement ;
Et considérant que le problème de l'activation du système ne concerne pas la société Parfip France mais la société Easydentic, chargée de la maintenance du dispositif, non attraite en la cause ;
Sur l'irrégularité alléguée des procès-verbaux :
Considérant que la société Eiffage Energie Thermie Normandie relève que les cases « Nom du signataire » et « Qualité du signataire » figurant sur les procès verbaux de réception ne sont pas renseignées ;
Mais considérant que ces documents portent le cachet de la société Forclim Normandie sur lequel est apposée une signature ;
Que faute pour la société Eiffage Energie Thermie Normandie de démontrer ou même d'alléguer que la réception du matériel serait intervenue à son insu, ce que contredisent les autres éléments produits, elle ne saurait tirer aucune conséquence de ces prétendues irrégularités ;
Considérant en conséquence qu'il convient, infirmant le jugement déféré, de débouter la société Eiffage Energie Thermie Normandie de ses demandes ;
Sur les demandes de la société Parfip :
Considérant que par deux courriers du 24 novembre 2009, visant la clause résolutoire contractuelle, la société Parfip France a mis la société Forclim Normandie en demeure de régler les loyers impayés de chacun des contrats dans un délai de 8 jours ;
Que celle-ci n'y ayant pas déféré, c'est à bon droit que la société Parfip France se prévaut de la résiliation du contrat ;
Considérant que les services postaux n'ayant pas précisé la date de délivrance des plis, il convient de fixer la résiliation au 9 décembre 2009, date de retour à la société Parfip France de l'avis de réception ;
Considérant que cette résiliation entraîne l'obligation pour la société Eiffage Energie Thermie Normandie de restituer le matériel pris à bail ;
Que celle-ci ne s'y opposant pas, il n'y a pas lieu d'accueillir la demande d'astreinte sollicitée par l'intimée ;
Considérant que le quantum des réclamations n'étant pas contesté, il convient d'accueillir les demandes de la société Parfip France dans les termes formulés ;
Considérant que l'équité commande d'allouer à la société Parfip France une indemnité de 1.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Infirme le jugement entrepris ;
Statuant à nouveau,
Fixe au 9 décembre 2009 la date de résiliation des contrats liant les sociétés Eiffage Energie Thermie Normandie et Parfip France,
Ordonne à la société Eiffage Energie Thermie Normandie de restituer, à ses frais, le matériel loué au siège de la société Parfip France dans le mois de la signification de cette décision ;
Condamne la société Eiffage Energie Thermie Normandie au paiement des sommes de :
- 2.790,03 euros et 4.417,55 euros au titre des loyers impayés majorés de la clause pénale contractuelle, portant intérêts de droit à compter du 9 décembre 2009,
- 4.104,67 euros et 8.998,70 euros au titre des indemnités contractuelles de résiliation majorées de la clause pénale contractuelle ;
Condamne la société Eiffage Energie Thermie Normandie à payer à la société Parfip France une somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société Eiffage Energie Thermie Normandie aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.
Le Greffier Le Conseiller, Faisant Fonction de Président
- 5861 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Personnes morales (avant la loi du 17 mars 2014) - Démarchage à domicile
- 5881 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères alternatifs : identité de spécialité
- 5883 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères combinés : rapport direct et besoins de l’activité
- 5885 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères combinés : rapport direct et compétence
- 5953 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Protection de l’entreprise - Alarmes et surveillance : présentation générale
- 5954 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Protection de l’entreprise - Alarmes et surveillance : présentation par activité
- 5955 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Protection de l’entreprise - Alarmes et surveillance : présentation par cour d’appel