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T. COM. CRÉTEIL (1re ch.), 13 octobre 2009

Nature : Décision
Titre : T. COM. CRÉTEIL (1re ch.), 13 octobre 2009
Pays : France
Juridiction : T. Com Créteil. 1re ch.
Demande : 2008F00629
Date : 13/10/2009
Nature de la décision : Avant dire droit
Mode de publication : Lexbase
Date de la demande : 14/05/2008
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4355

T. COM. CRÉTEIL (1re ch.), 13 octobre 2009 : RG n° 2008F00629

Publication : Lexbase

 

Extraits : 1/ « Attendu que l'article 56 du CPC dispose en son alinéa 2 qu'a peine de nullité, l’assignation doit contenir « l'objet de la demande avec un exposé des moyens en fait et en droit » et n'impose aucune forme particulière pour cet exposé ; Attendu que l'assignation demande notamment au Tribunal de dire et juger que les prestations stipulées dans les contrats intitulés « politique nationale d'enseigne » ne correspondent à aucun service commercial effectif rendu aux fournisseurs ou, à tout le moins, sont rémunérées de manière disproportionnée ; Attendu que l'assignation demande notamment au Tribunal de constater que les contrats en cause ont été conclus en infraction des dispositions de l'article L. 442-6 et d'en tirer toutes les conséquences de droit au regard du III dudit article, relatives au prononcé d'une amende civile sur la demande du ministre chargé de l'économie ou du ministère public ; Attendu que la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC ne peut donc se méprendre sur l'objet de l'assignation ; Attendu que le fait que la demande ne soit pas chiffrée dans le cadre de l'assignation ne rend pas cette dernière irrecevable au regard de l'article 56 du CPC. En conséquence, le Tribunal dira que l'assignation, qui contient un exposé des moyens en tait et en droit, est valide au regard de l'article 56 du CPC ; […]

Attendu que l'article 4 du décret du 10 février 2009 précise que « les actions en justice engagées par M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL DE LA CONCURRENCE sur le fondement du III de l'article L. 442-6 du Code de commerce sont poursuivies par LE PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE ». Attendu que la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC estime que le décret du 10 février 2009 ne peut être appliqué et doit faire l'objet d'une question préjudicielle au Conseil d'État Mais attendu que le Tribunal observe que l'ordonnance du 13 novembre 2008 dispose que « dans toutes les dispositions législatives et réglementaires, la référence au Conseil de la concurrence est remplacée par la référence à l'Autorité de la concurrence ». Attendu que le Tribunal estime que le Président de l'Autorité de la Concurrence se substitue naturellement au Président du Conseil de la Concurrence et reprend donc à son compte les actions engagées, il dira mal fondée la demande de sursis à statuer motivée par une question préjudicielle qu'il n'y a lieu de poser. […]

Mais attendu que l'article L. 470-5 du Code de commerce dispose que le Ministre chargé de l'économie peut, devant les juridictions civiles, déposer des conclusions et les développer oralement à l'audience. Attendu que la Cour de cassation dans son arrêt du 17 juillet 2005 précise que le Ministre intervient lors d'une instance pendante à titre accessoire dans le cadre de sa mission de protection générale de l'ordre public. En conséquence, le Tribunal estime que les conclusions de Mme LE MINISTRE DE L'ÉCONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI ont été déposées à titre accessoire de l'action principale initiée par M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL DE LA CONCURRENCE et poursuivie par M. LE PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE et les dira recevables.

En conséquence, le Tribunal dira mal fondée la demande de la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC tendant à déclarer nulle l'assignation et éteinte l'instance et l'en déboutera. »

2/ « Attendu que les parties conviennent que les prérogatives d'enquêtes octroyées par l'article L. 450-1 et suivants du Code de commerce ont été épuisées. Que la demande du Président du Conseil de la Concurrence est faite au titre de l'article L. 442-6-III du Code de commerce, que cet article ne prévoit pas que la saisine du Tribunal soit liée à la décision éventuelle du Conseil de la Concurrence.

Attendu que l'arrêt de principe de la Chambre commerciale de la Cour de cassation précise que l'action menée au vu de l'article L. 442-6-III du Code de commerce est une action autonome de protection du fonctionnement du marché et de la concurrence qui n'est pas soumise au consentement ou à la présence des fournisseurs. Attendu que le Tribunal estime que le Président de l'Autorité de la Concurrence agit en l'espèce en tant que garant de l'ordre public économique, que son action revêt donc la même nature que celle du ministre, que sa demande de communication de pièces ne remet pas en cause les principes de l'article 6 de la CESDH ni ceux de l'article 1er du premier protocole.

Attendu que des tiers non parties à l'instance pourraient être concernés par ces communications. Mais attendu qu'aucune protection du secret des affaires contenues dans les pièces demandées en communication par le Président de l'Autorité de la Concurrence ne pourra être organisée car elle n'est prévue ni dans le Code de commerce ni dans le Code de procédure civile. Attendu que le Tribunal estime qu'il y a de ce fait un empêchement légitime à la demande formulée.

Attendu que le Tribunal relève toutefois que LE PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE est en mesure d'obtenir auprès du Greffe du Tribunal de commerce les comptes annuels publiés et est en conséquence à même d'apprécier globalement la nature des opérations résultant des contrats conclus per la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC avec ses fournisseurs. »

 

TRIBUNAL DE COMMERCE DE CRÉTEIL

PREMIÈRE CHAMBRE

JUGEMENT DU 13 OCTOBRE 2009

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 2008F00629.

 

DEMANDEURS :

M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL DE LA CONCURRENCE

[adresse], comparant en personne

Mme LE MINISTRE DE L'ÉCONOMIE DE L’INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI

[adresse], comparant en personne

 

DÉFENDEUR :

SOCIÉTÉ COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D’ACHATS DES CENTRES LECLERC (SC GALEC)

[adresse], comparant par SEP SEVELLEC - CRESSON- RUELLE [adresse] et par Maître Gilbert PARLEANI [ville]

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL : La présente affaire a été débattue devant M. Eric DE MONTILLE en qualité de Juge rapporteur qui a clos les débats et mis en délibéré.

Décision contradictoire en premier ressort.

Délibérée par M. Eric de MONTILLE, Président, M. Franck WIMART, M. Michel MATHEVON, Juges.

Prononcée ce jour par la mise à disposition au Greffe de ce Tribunal, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa .de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

Minute signée par M. Eric DE MONTILLE, Président du délibéré, et Mme Maryse DENIEL, Greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] LES FAITS

M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL DE LA CONCURRENCE, puis son successeur M. LE PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE, a demandé au Tribunal de Juger contraires aux dispositions de l'article L. 442-6 du Code de commerce les pratiques de la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC qui ont consisté à imposer aux fournisseurs de l'enseigne LECLERC, par le biais de contrat d'adhésions, l'octroi d'une rémunération non justifiée par la fourniture d'un service commercial effectif.

Mme LE MINISTRE DE L'ÉCONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI a déposé des conclusions d'intervention volontaire dans l'instance.

 

LA PROCÉDURE

Par acte extrajudiciaire signifié le 14 mai 2008 à personne habilitée, M. LE PRÉSIDENT DU

CONSEIL DE LA CONCURRENCE a assigné la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC demandant au Tribunal de :

- Dire et Juger que la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC a obtenu des fournisseurs mentionnés à la pièce jointe à la présente assignation (PJ n° 04), de 2001 à 2004, une rémunération injustifiée au titre du contrat intitulé « politique nationale d'enseigne » ;

- Dires et juger que les prestations stipulées par ce contrat ne correspondent à aucun service commercial effectif rendu aux fournisseurs, ou, à tout le moins, sont rémunérées de façon disproportionnée ;

- Dire et Juger que les engagements de volumes et de programmations de commandes prévus dans les contrats de « dynamique commerciale et promotionnelle » conclus entre les sociétés COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC et BANDAI, et les sociétés COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC et GOLIATH en 2002 et 2003, sont sans objet au regard de l'objet social de la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC ;

- Dires et juger que la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC a exploité abusivement la situation de dépendance économique des fournisseurs mentionnés à la pièce jointe à la présente assignation (PJ n° 04), de 2001 à 2004, en leur imposant annuellement l'adhésion à l'intégralité du contrat de « politique nationale d'enseigne » ;

- Constater que tes contrats en cause ont été conclus en infraction des dispositions de l'article L. 442-6-I-2°, a), b), et 3° du Code de commerce et en tirer toutes conséquences de droit au regard du III dudit article, relatives notamment au prononcé d'une amende civile, sur la demande du ministre chargé de l'économie ou du ministère public ;

- Condamner la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC aux entiers dépens ;

- Condamner la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC au paiement au profit de l'État, de le somme de 3.000,00 € au litre de l'article 700 du CPC.

A l'audience collégiale du 1er juillet 2008 où les parties étalent présentes, Mme LE MINISTRE DE L'ÉCONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI a déposé des conclusions demandant au Tribunal de :

- Recevoir l'Intervention volontaire du ministre chargé de l'économie sur le fondement de l'article L. 470-5 du Code de commerce.

[minute page 3] A l'audience collégiale du 7 octobre 2008, les parties ont comparu sans conclure.

A l'audience collégiale du 2 décembre 2008, les parties ont comparu sans conclure et une injonction de communication de pièces a été faite au défendeur.

A l'audience collégiale du 3 février 2009, la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC a déposé des conclusions en nullité d'assignation et en extinction d'instance demandant au Tribunal de :

In limite litis et avant tout examen au fond,

Vu notamment les articles 4, 12, 31, 32, 56, 66, 112, 114, 117 et 384 du CPC, ensemble !es articles L. 442-6 et L. 470-5 du Code de commerce, l'article 95 de la loi du 4 août 2008 instaurant une Autorité de la concurrence, l'article 5.II de l'ordonnance 2008-1161 du 13 novembre 2008, et le décret du 14 janvier 2009 désignant le Président de l'Autorité de la Concurrence,

- Constater que l'assignation délivrée à la demande du Président du Conseil de la Concurrence ne respecte aucunement les dispositions de l'article 56 du CPC ;

- Constater encore l'extinction de l'instance, en raison de la disparition de l'autorité administrative qu'était le Président du Conseil de la concurrence, sans qu'ait été publiée la moindre règle organisant le transfert de sa capacité à agir au civil sur le fondement de l'article L. 442-6-III du Code de commerce au profit de la nouvelle autorité qu'est le Président de l'Autorité de la Concurrence ;

- Constater que les conclusions déposées le 1er juillet 2008 par Mme LE MINISTRE DE L'ÉCONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI ne peuvent caractériser une intervention, qu'elles ne lui confèrent pas la qualité de partie et qu'elles ne contiennent aucune demande précise et autonome, autre que celle tendant à sa propre recevabilité ;

En conséquence,

- Dire et juger que l'assignation du 14 mai 2008 est atteinte d'une nullité péremptoire ;

- Dire et juger que l'instance est de surcroît éteinte ;

- Dire et juger que l'acte par lequel Mme LE MINISTRE DE L'ÉCONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI s'est introduite dans l'instance pendante engagée par le Conseil de la concurrence ne saurait prospérer indépendamment de l'assignation, que cet acte dénommé conclusions est insusceptible en l'espèce et en raison du contexte de droit de produire quelque effet et qu'il doit donc être déclaré caduc ;

- Prononcer te dessaisissement du Tribunal ;

- Constater encore, que la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC ne sollicite à ce stade aucune condamnation des autorités présentes dans la procédure sur le fondement de l'article 700 du CPC, et qu'il se borne à solliciter leur condamnation aux dépens.

A cette même audience collégiale, une injonction de communication de pièces a été faite au défendeur.

A l'audience collégiale du 10 mars 2009, LE PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE a déposé des conclusions en réplique demandant au Tribunal de :

- Joindre l'examen des exceptions de procédure au fond ;

- Dire et juger que l'action introduite par assignation du Président du Conseil de la concurrence à l'encontre de la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES [minute page 4] CENTRES LECLERC le 14 mai 2008 est valide eu regard du III de l'article L. 442-6 du Code de commerce et de l’article 56 du CPC ;

- Dire et juger que l'instance doit être poursuivie indépendamment de la création de l'Autorité de la concurrence postérieurement à ladite assignation ;

- Dire et juger que l'action du ministre chargé de l'économie caractérise une intervention volontaire, qu'elle est recevable et non caduque.

A l'audience collégiale du 7 avril 2009 où toutes les parties ont comparu, l'affaire a été envoyée devant un Juge rapporteur pour jugement sur l'incident.

A l'audience du Juge rapporteur du 9 juin 2009 où toutes les parties étaient présentes, la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC a déposé des conclusions en nullité d'assignation et en extinction d'instance […] demandant au Tribunal de :

Vu notamment les articles 4, 12, 31, 32, 56, 66, 112, 114, 117, 122 et 384 du CPC, ensemble les articles L. 442-6 et L. 470-5 du Code de commerce, l'article 95 de la loi du 4 août 2008 instaurant une Autorité de la concurrence, l'article 5.II de l'ordonnance 2008-1161 du 13 novembre 2008 et le décret du 14 janvier 2009 désignant Président de l'Autorité de la Concurrence,

- Constater que l'assignation délivrée à la demande du Président du Conseil de la concurrence ne respecte aucunement les dispositions de l'article 56 du CPC ;

- Constater à la lumière des articles 34 et 37 de la Constitution, que le décret 2009-141 du 10 février 2009 est dépourvu de toute base législative alors qu'il lui en fallait une, qu'il a été pris de surcroît en violation de l'article 6 de la CESDH, qu'il constitue donc à la fois une intervention administrative rétroactive dans un procès civil, et un empiétement sur les prérogatives du législateur, que son illégalité doit être déclarée et qu'il doit être inappliqué, ce qui entraîne l'irrecevabilité du Président de l'Autorité de la concurrence ;

- Constater encore l'extinction de l'instance en raison de la disparition de l'autorité administrative qu'était le Président du Conseil de la concurrence sans qu'ait été publiée la moindre règle organisant le transfert de sa capacité à agir au civil sur le fondement de l'article L. 442-6-III du Code de commerce au profit de la nouvelle autorité qu'est le Président de l'Autorité de la Concurrence ;

- Constater que ces questions sont fondamentales, qu'in limine litis, il s'agit pour le Tribunal de statuer sur la possibilité même du lieu d'instance [N.B. conforme à la minute, lire « lien » d’instance ?] ;

- Constater de surcroît que les conclusions déposées le 1er juillet 2008 par Mme LE MINISTRE DE L'ÉCONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI ne peuvent caractériser une intervention, qu'elles ne lui confèrent pas la qualité de partie, et qu'elles ne contiennent aucune demande précise et autonome, autre que celle tendant à sa propre recevabilité.

En conséquence

- Dire et juger que l'assignation du 14 mai 2008 est atteinte d'une nullité péremptoire ;

- Dire et juger que l'instance est de surcroît éteinte ;

- Dire et juger que le décret 2009-141 du 10 février 2009 est dépourvu de toute base législative alors qu'il lui en fallait une ;

- Poser au Conseil d'État, la question préjudicielle de la légalité du décret 2009-141 du 10 février 2009, et surseoir à statuer ;

- Dire et juger que l'acte par lequel, Mme LE MINISTRE DE L'ÉCONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI s'est introduite dans l'instance pendante engagée par le Conseil de la [minute page 5] concurrence ne saurait prospérer indépendamment de l'assignation, que cet acte dénommé conclusions est insusceptible en l'espèce et en raison du contexte de droit de produire quelque effet, et qu'il doit donc être déclaré caduc ;

- Prononcer en définitive le dessaisissement du Tribunal ;

- Constater encore que la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC ne sollicite à ce stade aucune condamnation des autorités présentes dans la procédure sur le fondement de l'article 700 du CPC et qu'il se borne à solliciter leur condamnation aux dépens.

A cette même audience du Juge rapporteur, la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC a déposé des conclusions en défense sur la demande de communication des pièces […] demandant au Tribunal de :

Vu l'article 10 et suivants, 138 et suivants du CPC, ensemble les articles 8 de la CESDH et 1er du protocole qui y est annexé,

- Dire et juger qu'il appartient au Juge de veiller à l'application des principes fondamentaux d'applicabilité directe contenus dans les dispositions précitées de la CESDH, lesquels doivent gouverner l'interprétation des dispositions du CPC ;

- Dire et juger que toute procédure civile doit, à la lumière de la CESDH, être examinée dans son ensemble et que le stade de la preuve ne peut pas être dissocié de celui du fond ;

- Dire qu'un empêchement légitime à la demande de communication de pièces tirée de la CESDH doit conduire le Juge à la rejeter ;

- Dire et juger qu'Il y a empêchement légitime à toute demande de communication de pièces dès lors qu'elle vise à attenter au principe d'égalité des armes et au droit de propriété des tiers ;

- Rejeter les demandes de communication de pièces formulées par M. le Président du Conseil de la Concurrence, puis par M. le Président de l'Autorité de la Concurrence ;

- Débouter M. le Président de l'Autorité de la concurrence des demandes qu'Il formulerait dans le cadre de l’« incident ».

Le tout sous réserve de la contestation par la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC de la validité de l'assignation introductive d'Instance, du droit à agir ou à poursuivre une action dont prétend disposer M. LE PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE, et de la caducité de l'introduction de Mme LE MINISTRE DE L'ÉCONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI dans la procédure.

A cette même audience du Juge rapporteur, M. LE PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE a demandé au cours de sa plaidoirie de :

En ce qui concerne les incidents de procédure, de :

- Joindre l'examen des exceptions de procédure au fond ;

- Dire et juger que l'action introduite par assignation de M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL DE LA CONCURRENCE à l'encontre de la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC le 14 mal 2008 est valide au regard du III de l’article L. 442-6 du Corde de commerce et de l'article 56 du CPC ;

- Dire et juger que l’instance doit être poursuivie indépendamment de la création de l'Autorité de la concurrence postérieurement à ladite assignation ;

- Dire et juger que le Tribunal n'est pas compétent pour se prononcer sur la légalité d'un acte administratif ;

- [minute page 6] Dire et Juger que la demande de question préjudicielle de la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC est infondée ;

- Dire et juger que l'action du Ministre de l'économie caractérise une intervention volontaire, qu'elle est recevable et non caduque.

En ce qui concerne l'incident de communication de pièces,

- Faire injonction à la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC de produire les pièces mentionnées (contrats de coopération commerciale avec 12 sociétés nommément désignées) dans le courrier du 15 juillet 2008, en application de l’article 11 du CPC sous astreinte de 5.000,00 € par jour de retard à compter du délai de deux semaines après ta notification du jugement à intervenir.

Le juge rapporteur a alors clos les débats, mis le jugement en délibéré et dit qu'il serait prononcé le 13 octobre 2009 par mise à disposition au greffe.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOYENS DES PARTIES ET MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la nullité de l'assignation et l'extinction de l'instance :

La société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC expose :

- que l'assignation du 14 mai 2008 ne contient aucune demande explicite ou implicite mais seulement la suggestion au Tribunal de tirer toutes les conséquences des contrats critiqués ;

- que le procès civil est la chose des parties et que le Juge civil n'est pas une autorité susceptible de prononcer une sanction et ne peut de sa propre autorité tirer toutes les conséquences des faits qui lui sont déférés ;

- que la succession d'autorités intervenues en 2008 conduit à appliquer le principe d'extinction car les mesures de nature législatives ou sur habilitations législatives n'ont pas visé les procès devant les juridictions civiles ;

- que la loi en vigueur en mai 2008 donnait au Président du Conseil de la Concurrence le pouvoir d'assigner la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC, que la loi n'avait pas désigné l'État mais seulement le Président du Conseil de la Concurrence, que cette autorité a disparu et qu'il n'a été prévu aucune substitution ou remplacement possible à cette autorité, qu'une autre autorité est maintenant titulaire du droit d'agir en justice, le Président de l'Autorité de la Concurrence ;

- que la disparition d'une autorité est chose rarissime et affecte les actes processuels qu'elle a pu valablement accomplir auparavant et que sa conséquence est l'extinction de l'instance ;

- que l'ordonnance du 13 novembre 2008 dispose que « la validité des actes de poursuites, d'instruction et de sanction accomplis antérieurement à la première réunion de l'autorité de la concurrence est appréciée au regard des textes en vigueur à la date à laquelle ils ont été pris ou accomplis », qu'une assignation en matière civile ne peut être considérée comme un acte de poursuite, encore moins d'instruction ou de sanction, que donc l'instance engagée par le Président du Conseil de la Concurrence est éteinte ;

- que le décret du 10 février 2009, précisant les pouvoirs du Président de l'Autorité de la Concurrence et notamment sa qualité à agir en demande et en défense et présenter des observations devant toute juridiction, a été pris plusieurs jours après le dépôt des conclusions où la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC contestait au Président de l'Autorité de la Concurrence le droit à agir au lieu et place du Président du Conseil de la Concurrence, que ce décret constitue une ingérence du [minute page 7] pouvoir exécutif dans une procédure judiciaire, est contraire à l'article 6 de la CESDH et illégal au regard des dispositions relatives aux domaines respectifs de la loi et du règlement ;

- que dans ses conclusions du 1er juillet 2008, Mme LE MINISTRE DE L'ÉCONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI ne demande pas que les prétentions contenues dans l'assignation soient satisfaites, le dispositif se limitant à la seule recevabilité de son intervention volontaire ;

- que la Cour de cassation a jugé que l'introduction du Ministre dans une procédure pendante permise par l'article L. 470-5 du Code de commerce ne constituait pas une intervention, ne lui conférait pas la qualité de partie et ne pouvait l'autoriser à engager une action principale, que donc l'introduction de Mme LE MINISTRE DE L'ÉCONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI doit suivre le sort de l'action principale ;

- qu'en l'espèce, les conclusions déposées par Mme LE MINISTRE DE L'ÉCONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI sont privées de cause et d'objet.

Le Président de l'Autorité de la Concurrence réplique :

- que dans la rédaction de l'article L. 442-6 du Code de commerce qui concerne les pratiques restrictives de concurrence, le législateur a distingué d'une part l'introduction de l'action devant la juridiction compétente qui peut être faite à la diligence du Président de l'Autorité de la Concurrence et d'autre part, la formulation des conséquences de la demande faite à l'initiative du ministère public et du ministre chargé de l'économie ;

- que ces dispositions de l'article L. 442-6 qui prévoient et organisent l'introduction d'une action par le Président de l'Autorité de la Concurrence complètent les dispositions réglementaires de droit commun contenues dans le CPC ;

- que l'article 56 du CPC n'impose aucune forme particulière pour l'exposé de l'objet d'une demande qui peut être exprimé de façon implicite et qu'une demande non chiffrée n'est pas irrecevable, que la seule exigence relative à l'objet de la demande est que le destinataire ne puisse se méprendre sur cet objet ;

- que l'absence d'indication de l'objet de la demande fait encourir une nullité de forme, car non mentionnée à l'article 117 du CPC relatif aux irrégularités de fond, que cette nullité ne peut être prononcée que lorsque la preuve d'un grief est apportée, que la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC se contente d'indiquer qu'elle est « dans l'impossibilité de conduire la moindre défense faute de connaître les demandes qui lui sont adressées », allégation dépourvue de toute démonstration, en particulier de l'existence d'un préjudice, le Juge ne pouvant retenir d'office un grief non invoqué ;

- qu'il rappelle que l'Autorité de la concurrence est dépourvue de personnalité morale, tout comme l'était le Conseil de la concurrence, que l'action en justice du PRÉSIDENT DU CONSEIL DE LA CONCURRENCE aujourd'hui de l'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE est donc menée au nom de l'État, et repose sur une action défendant l'ordre public économique, nullement attachée à la personne du PRÉSIDENT DU CONSEIL DE LA CONCURRENCE et ne peut être considérée comme éteinte ;

- que l'article 4 du décret du 10 février 2009 précise que les actions en justice engagées par le PRÉSIDENT DU CONSEIL DE LA CONCURRENCE sur le fondement du III de l'article L. 442-6 du même Code sont poursuivies par LE PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE et que la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRÉS LECLERC estime que ce décret ne peut être appliqué et doit faire l'objet d'une question préjudicielle au Conseil d'État ;

- que les deux conditions de recevabilité d'une question préjudicielle ne sont pas remplies : d'une part, présenter un caractère sérieux et d'autre part, être nécessaire au règlement du litige ;

- [minute page 8] que sur le premier point le décret aurait eu pour objet de purger après coup la contestation de la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRÉS LECLERC, alors que la rédaction et l'examen par le Conseil d'État sont antérieurs au dépôt des premières conclusions de la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC, que les lois qui établissent la procédure s'appliquent aussi aux contentieux déjà engagés, que de surcroît, une loi ne relevant pas de la procédure pénale peut rétroagir sans violer l'article 6.1 de la CESDH à condition que la rétroaction soit nécessaire et non disproportionnée, qu'enfin l'ordonnance du 13 novembre 2008 dispose que « dans toutes les dispositions législatives et réglementaires, la référence au Conseil de la concurrence est remplacée par la référence à l'Autorité de la concurrence », que donc ce moyen de défense est dépourvu de tout caractère sérieux ;

- que sur le deuxième point, l'exception d'illégalité soulevée ne conditionne pas l'issue du litige car la création de l'Autorité de la concurrence, n'a pas donné lieu à la dissolution du Conseil de la concurrence, ces deux autorités étant dépourvues de la personnalité morale et que l'action menée par le Président de l'Autorité de la Concurrence est une action de défense de l'ordre public ;

- qu'au total, la demande de question préjudicielle n'est pas recevable ;

- que la Cour de cassation précise dans son arrêt du 17 juillet 2001 que l'article L. 470-5 du Code de commerce ne concerne que l'intervention de l'Administration lors d'une instance pendante et non une action principale de celle-ci ;

- qu'en l'espèce, le ministre intervient à titre accessoire, « dans le cadre de sa mission de protection générale de l'ordre public économique ».

 

SUR CE, LE TRIBUNAL :

Attendu que l'article 56 du CPC dispose en son alinéa 2 qu'à peine de nullité, l’assignation doit contenir « l'objet de la demande avec un exposé des moyens en fait et en droit » et n'impose aucune forme particulière pour cet exposé ;

Attendu que l'assignation demande notamment au Tribunal de dire et juger que les prestations stipulées dans les contrats intitulés « politique nationale d'enseigne » ne correspondent à aucun service commercial effectif rendu aux fournisseurs ou, à tout le moins, sont rémunérées de manière disproportionnée ;

Attendu que l'assignation demande notamment au Tribunal de constater que les contrats en cause ont été conclus en infraction des dispositions de l'article L. 442-6 et d'en tirer toutes les conséquences de droit au regard du III dudit article, relatives au prononcé d'une amende civile sur la demande du ministre chargé de l'économie ou du ministère public ;

Attendu que la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC ne peut donc se méprendre sur l'objet de l'assignation ;

Attendu que le fait que la demande ne soit pas chiffrée dans le cadre de l'assignation ne rend pas cette dernière irrecevable au regard de l'article 56 du CPC.

En conséquence, le Tribunal dira que l'assignation, qui contient un exposé des moyens en tait et en droit, est valide au regard de l'article 56 du CPC ;

Attendu que la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC invoque le principe de l'extinction de l'instance car cette dernière a été introduite, au titre de l'article L. 442-6 du Code de commerce, par LE PRÉSIDENT DU CONSEIL DE LA CONCURRENCE, que cette autorité a été remplacée par LE PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE, que LE PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE n'a pas compétence pour poursuivre l'instance initiée par le Président du Conseil de la concurrence, selon la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DÉS CENTRES LECLERC.

[minute page 9] Attendu que l'article 4 du décret du 10 février 2009 précise que « les actions en justice engagées par M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL DE LA CONCURRENCE sur le fondement du III de l'article L. 442-6 du Code de commerce sont poursuivies par LE PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE ».

Attendu que la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC estime que le décret du 10 février 2009 ne peut être appliqué et doit faire l'objet d'une question préjudicielle au Conseil d'État

Mais attendu que le Tribunal observe que l'ordonnance du 13 novembre 2008 dispose que « dans toutes les dispositions législatives et réglementaires, la référence au Conseil de la concurrence est remplacée par la référence à l'Autorité de la concurrence ».

Attendu que le Tribunal estime que le Président de l'Autorité de la Concurrence se substitue naturellement au Président du Conseil de la Concurrence et reprend donc à son compte les actions engagées, il dira mal fondée la demande de sursis à statuer motivée par une question préjudicielle qu'il n'y a lieu de poser.

Attendu que la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC invoque que le dispositif des conclusions de Mme LE MINISTRE .DE L'ÉCONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI en date du 1er juillet 2008 se limite à seule recevabilité de son intervention volontaire et que l'analyse des arrêts de la Cour de cassation montre que l'introduction du Ministre dans une procédure pendante ne conférait pas la qualité de partie à Mme LE MINISTRE DE L'ÉCONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI, que donc en l'espèce les conclusions déposées par Mme LE MINISTRE DE L'ÉCONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI sont privées de cause et d'espèce.

Mais attendu que l'article L. 470-5 du Code de commerce dispose que le Ministre chargé de l'économie peut, devant les juridictions civiles, déposer des conclusions et les développer oralement à l'audience.

Attendu que la Cour de cassation dans son arrêt du 17 juillet 2005 précise que le Ministre intervient lors d'une instance pendante à titre accessoire dans le cadre de sa mission de protection générale de l'ordre public.

En conséquence, le Tribunal estime que les conclusions de Mme LE MINISTRE DE L'ÉCONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI ont été déposées à titre accessoire de l'action principale initiée par M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL DE LA CONCURRENCE et poursuivie par M. LE PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE et les dira recevables.

En conséquence, le Tribunal dira mal fondée la demande de la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC tendant à déclarer nulle l'assignation et éteinte l'instance et l'en déboutera.

 

Sur la communication des pièces :

La société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC expose :

- que LE PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE a demandé à la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC les contrats de coopération commerciale avec 12 sociétés nommément désignées ;

- que ces contrats se présentent avec un socle contractuel commun et identique intitulé « Politique nationale d'enseigne » (PNE) auquel s'ajoutent des contrats spécifiques intitulés « dynamique commerciale et promotionnelle » (DCP) ;

- que cette demande a été prolongée par voie de conclusions devant le Tribunal de céans sur la base de l'article 11 du CPC ;

- [minute page 10] que LE PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE avance comme unique motivation qu'Il ne dispose pas d'autre moyen légal pour obtenir cette communication, que les Agents de l'Autorité sont tenus au secret professionnel, qu'Il ne saurait y avoir violation du secret des affaires du fait de cette communication ;

- que LE PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE convient que les prérogatives que les articles L. 450-1 et suivants donnaient aux enquêteurs du Conseil (aujourd'hui Autorité) de la concurrence ont été épuisées ;

- que LE PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE ne peut élargir le champ de la saisine du Tribunal tel que circonscrit par la décision 07-D-50 du 20 décembre 2007 du Conseil de la concurrence ;

- que les contrats dont la production est demandée contiennent des secrets d'affaires y compris de tiers non-attraits dans la procédure, que la publicité de ces secrets causera un préjudice à ces tiers ;

- que les plaidoiries et jugements sont publics en matière civile ;

- qu'il y a là un empêchement légitime à la demande formulée ;

- que la demande du PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE est illégitime au regard de la CESDH ;

- qu'il est évident que l'objet de l'assignation est de faire constater que certains fabricants sont des victimes de la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC et donc de remettre en cause la licéité de ces contrats et la validité des consentements qui les ont fait naître, ce qui revient à priver de tout effet l'article 1134 du Code civil ;

- que cela crée un déséquilibre dans le procès qui devient inéquitable et non contradictoire ;

- que cela pourrait priver une partie non attraite dans le procès de la propriété de ses droits contractuels en violation de l'article 1er du premier protocole annexé à la CESDH ;

- qu'il s'agit d'une ingérence de l'État dans des rapports de droits privés en violation de l'article 6 de la CESDH ;

- que selon la CESDH, une procédure doit être considérée dans son ensemble et que l'on ne saurait dissocier le stade de la preuve du stade de rechange d'arguments devant le Tribunal et que la communication forcée des pièces ne peut être exigée en présence d'un motif légitime tirée de la CESDH ;

- que la demande de communication doit être rejetée pour tentative illégitime de procès inéquitable et pour tentative illégitime d'atteinte aux droits des tiers à la procédure.

LÉ PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE réplique :

- que l'alinéa 1er de l'article L. 450-1 du Code de commerce dispose que les « Agents... de l'Autorité de la concurrencé... peuvent procéder à toute enquête nécessaire à l'application des dispositions des titres II et III du présent livre » ;

- que l’action introduite par le Président du Conseil de la Concurrence tend à la constatation de pratiques restrictives commises en infraction de l'article L. 442-6 du Code de commerce, c'est-à-dire du titre IV du livre IV de ce Code ;

- que donc les agents de l'Autorité se trouvent dans l'impossibilité de mener par eux-mêmes les enquêtes permettant l'obtention de preuves ;

- [minute page 11] que l'article 11 du CPC dispose que les parties sont tenues d'apporter leurs concours aux mesures d'instruction… que le Juge à la requête de l'une des parties peut ordonner… la production de tous documents détenus par des tiers, s'il n'existe pas d'empêchement légitime ;

- que la jurisprudence estime que cet article permet aux parties qui ne disposent pas de moyen légal permettant d'obtenir la communication des éléments de preuve de demander cette communication et que tel est le cas en l'espèce ;

- que le champ de la saisine du Tribunal n'est pas modifié par cette communication de pièces car l'assignation a demandé au Tribunal de constater que les contrats mentionnés en annexe de l'assignation contenaient des stipulations contraires aux dispositions de l'article L. 442-6 du Code de commerce ;

- que le Conseil de la concurrence ayant rendu la décision du 07-D-050 n'est pas partie à la procédure et n'a pas compétence pour circonscrire la demande de son Président ;

- que la protection du secret des affaires n'est. Applicable qu’en cas de procédure menée devant l'Autorité de la Concurrence, qu'en l'espèce la procédure est menée devant le Tribunal de commerce et qu'aucune protection équivalente n'est organisée par le CPC et que les données éventuellement confidentielles seront communiquées aux Agents de l'Autorité tenus au secret professionnel ;

- que l'action du Présidant de l’Autorité prévue au III de l'article L. 442-6 est une action destinée à pallier l'inaction des contractants victimes des pratiques commises en infraction dudit article ;

- que la Cour de cassation en a déduit que l'absence des fournisseurs à la « procédure introduite en vertu du III de l'article L. 442-6 ne contrevenait pas à la CESDH, s'agissant d'"une action autonome de protection du fonctionnement du marché et de la concurrence qui n'est pas soumise au consentement ou à la présence des fournisseurs » ;

- que l'action du Président de l'Autorité de la Concurrence revêt la même nature que l'action du Ministre, qu'elle permet la défense de l'ordre public économique et le bon fonctionnement du marché, que le Président de l'Autorité de la Concurrence agit donc en tant que garant de l'ordre public économique.

 

SUR CE, LE TRIBUNAL

Attendu que les parties conviennent que les prérogatives d'enquêtes octroyées par l'article L. 450-1 et suivants du Code de commerce ont été épuisées.

Que la demande du Président du Conseil de la Concurrence est faite au titre de l'article L. 442-6-III du Code de commerce, que cet article ne prévoit pas que la saisine du Tribunal soit liée à la décision éventuelle du Conseil de la Concurrence.

Attendu que l'arrêt de principe de la Chambre commerciale de la Cour de cassation précise que l'action menée au vu de l'article L. 442-6-III du Code de commerce est une action autonome de protection du fonctionnement du marché et de la concurrence qui n'est pas soumise au consentement ou à la présence des fournisseurs.

Attendu que le Tribunal estime que le Président de l'Autorité de la Concurrence agit en l'espèce en tant que garant de l'ordre public économique, que son action revêt donc la même nature que celle du ministre, que sa demande de communication de pièces ne remet pas en cause les principes de l'article 6 de la CESDH ni ceux de l'article 1er du premier protocole.

Attendu que des tiers non parties à l'instance pourraient être concernés par ces communications.

[minute page 12] Mais attendu qu'aucune protection du secret des affaires contenues dans les pièces demandées en communication par le Président de l'Autorité de la Concurrence ne pourra être organisée car elle n'est prévue ni dans le Code de commerce ni dans le Code de procédure civile.

Attendu que le Tribunal estime qu'il y a de ce fait un empêchement légitime à la demande formulée.

Attendu que le Tribunal relève toutefois que LE PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE est en mesure d'obtenir auprès du Greffe du Tribunal de commerce les comptes annuels publiés et est en conséquence à même d'apprécier globalement la nature des opérations résultant des contrats conclus per la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC avec ses fournisseurs.

En conséquence, le Tribunal dira mal fondée la demande de communication des contrats de coopération commerciale formulée par LE PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE, l'en déboute et renverra les parties à l'audience collégiale du 15 décembre 2009.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal, statuant par un jugement contradictoire et en premier ressort,

Dit mal fondée la demande de la société COOPÉRATIVE GROUPEMENTS D'ACHATS DES CENTRES LECLERC tendant à déclarer nulle l'assignation et éteinte l'instance et l'en déboute.

Dit mal fondée la demande de communication de pièces telle que formulée par LE PRÉSIDENT DU CONSEIL DE LA CONCURRENCE puis par LE PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE.

Renvoie les parties à l'audience collégiale du 15 décembre 2009 et leur fait injonction de conclure sur le fond.

Réserve les dépens.

12ème  et dernière page.