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6165 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Présentation - Nature de l’action du Ministre

Nature : Synthèse
Titre : 6165 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Présentation - Nature de l’action du Ministre
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
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CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6165 (5 août 2023)

PROTECTION CONTRE LES DÉSÉQUILIBRES SIGNIFICATIFS DANS LE CODE DE COMMERCE (ART. L. 442-1-I-2° C. COM.)

PRÉSENTATION GÉNÉRALE - NATURE DE L’ACTION DU MINISTRE OU DE LA VICTIME

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2023)

 

Présentation. La nature de l’action fondée sur l’ancien art. L. 442-6 C. com., spécialement I-2°, I-5° et III, a suscité de nombreuses discussions, les responsables poursuivis tentant de contester cette intrusion d’autorités extérieures dans le contrat. C’est cette action qui a concentré les difficultés, même si les solutions semblent désormais stabilisées et transposables aux nouveaux articles L. 442-1 et L. 442-4 C. com. : l’action est de nature délictuelle (A), autonome (B) et peut être soumise à certaines exigences similaires à celles requises pour des infractions pénales (C).

Action de la victime. L’action de la victime est une action en responsabilité délictuelle, la faute n’étant pas fondée sur un manquement contractuel, mais sur la soumission ou tentative de soumission d’une situation déséquilibrée (rappr. Cerclab n° 6242 pour l’option de compétence territoriale). § V. explicite : CA Paris (pôle 1 ch. 1), 27 février 2018 : RG n° 17/07699 ; Cerclab n° 7463 (contrats d’acquisition et de reprise d’activité d’une entreprise de peinture par une société spécialisée dans le marquage et la décoration ; action de nature délictuelle, dans le cadre de l’art. 46 CPC), sur appel de T. com. Lyon, 11 juillet 2016 : Dnd. § V. aussi affirmant la nature délictuelle de l’action de la victime : CA Douai (ch. 2 sect. 2), 12 juillet 2018 : RG n° 18/00485 ; Cerclab n° 7935 ; Juris-Data n° 2018-018647, sur appel de TGI Lille (réf.), 27 décembre 2017 : RG n° 17/00761 ; Dnd - CA Lyon (3e ch. A), 31 janvier 2019 : RG n° 17/00240 ; Cerclab n° 7982 (action délictuelle : absence de chose jugée au regard d’un précédent arrêt n’ayant retenu qu’une absence de faute contractuelle) - CA Paris (pôle 5 ch. 4), 12 juin 2019 : RG n° 19/03271 ; Cerclab n° 8044, sur appel de T. com. Lyon, 5 février 2019 : RG n° 2017J02070 ; Dnd - CA Paris (pôle 5 ch. 11), 31 janvier 2020 : RG n° 18/01599 ; Cerclab n° 8344 (action de nature délictuelle, soumise à la prescription de l’art. L. 110-4 C. consom.) - CA Paris (pôle 5 ch. 4), 27 janvier 2021 : RG n° 19/03380 ; Cerclab n° 8792, sur appel de T. com. Paris, 26 novembre 2018 : RG n° 16/52454 ; Dnd.

La règle de non-cumul des responsabilités délictuelles et contractuelles interdit la réparation d'un même préjudice, en l’espèce sur le fondement d’un déséquilibre significatif, qui relève de l'anc. art. 442-6 C. com. dont le fondement est délictuel et sur un manquement grave aux obligations contractuelles sur le fondement des anc. art. 1134 et 1147 C. civ., pour obtenir une indemnisation d'un même préjudice ; la demande en indemnisation n'est pas irrecevable, dès lors qu'il appartient au juge du fond saisi de la question de déterminer le régime de responsabilité applicable à l'espèce et de statuer en conséquence. CA Paris (pôle 5 ch. 10), 11 octobre 2021 : RG n° 21/05833 ; Cerclab n° 9172 (contrat d’exploitation du parking d’un centre commercial), sur appel de TJ Paris (JME), 11 février 2021 : RG n° 20/06210 ; Dnd. § Le principe du non-cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle interdit seulement au créancier d'une obligation contractuelle de se prévaloir, contre le débiteur de cette obligation, des règles de la responsabilité délictuelle et n'interdit pas la présentation d'une demande distincte, fondée sur l'anc. art. L. 442-6-I-5 C. com., qui tend à la réparation d'un préjudice résultant, non pas d'un manquement contractuel, mais de la rupture brutale d'une relation commerciale établie. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 10 février 2022 : RG n° 19/00728 ; Cerclab n° 9408, sur appel de T. com. Paris, 20 septembre 2018 : RG n° 2017017038 ; Dnd. § Comp. CA Chambéry (1re ch.), 21 février 2023 : RG n° 20/01610 ; Cerclab n° 10084 (l’action en responsabilité qui sanctionne la rupture brutale de la relation commerciale durable étant de nature délictuelle, une action fondée sur la responsabilité contractuelle n'exclut pas, en soi, une demande indemnitaire fondée sur ce texte - citant Com., 24 oct. 2018, n° 17-25672 - à la condition toutefois qu’elle repose sur un fait générateur distinct de la seule rupture du contrat liant les partenaires commerciaux ; N.B. juridiction incompétente), sur appel de T. com. Annecy, 8 décembre 2020 : Dnd.

Rappr. dans le même sens, dans le cadre de l’ancien art. L. 442-6-I-5° C. com. [L. 442-1-II] : le fait pour tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels, engage la responsabilité délictuelle de son auteur. Cass. com. 11 mai 2010 : pourvoi n° 09-10797 ; Cerclab n° 2372 ; Contr. conc. consom. 2010, comm. n° 205 (absence d’application de la prescription annale de l’art. L. 133-6 C. com.), cassation de CA Bordeaux (2e ch. civ.), 2 décembre 2008 : RG n° 08/03855 ; Dnd (contrat de collecte de verre par un transporteur pour le compte d’un industriel ; application de la prescription d’un an de l’art. L. 133-6 C. com.). § Dans le même sens, sur la nature délictuelle : CA Douai (2e ch. sect. 1), 28 janvier 2010 : RG n° 08/04397 ; arrêt n° 48/10 ; Cerclab n° 3627 (nature influant sur le choix de la loi applicable et l’option de compétence territoriale), sur appel de T. com. Roubaix-Tourcoing, 12 mars 2008 : RG n° 00/02609 ; Dnd, pourvoi rejeté par Cass. com., 6 septembre 2011 : pourvoi n° 10-11975 ; Cerclab n° 3297. § V. aussi refusant de trancher, les deux solutions aboutissant en l’espèce au même résultat : CA Paris (pôle 5 ch. 4), 4 juillet 2018 : RG n° 18/07354 ; Cerclab n° 7625 (contrat de distribution exclusive de produits de nettoyage pour l'entretien des véhicules), sur appel de T. com. Lille, 27 mars 2018 : RG n° 2016003039 ; Dnd.

Mais les dispositions de l’anc. art. L. 442-6-I-5° C. com. [L. 442-1-II], sont exclusives de celles de l’art. 1382, devenu 1240, C. civ. Cass. com., 2 octobre 2019 : pourvoi n° 18-15676 ; arrêt n° 771 ; Cerclab n° 8141 (contrat de gérance-mandat pour la gestion d’un magasin d’une chaîne de distribution de produits non alimentaires à petits prix pour la maison et la famille), pourvoi contre CA Paris (pôle 5 ch. 4), 17 janvier 2018 : RG n° 15/04976 ; Cerclab n° 7390 - Cass. com., 20 novembre 2019 : pourvoi n° 18-15677 ; arrêt n° 860 ; Cerclab n° 8248 (idem), rejetant sur ce point le pourvoi contre CA Paris, 17 janvier 2018 : Dnd.

N.B. La situation est sans doute différente pour le consommateur dans le cadre de l’art. L. 212-1 C. consom., puisque l’action vise à supprimer une clause abusive. Si l’insertion d’une clause abusive est une faute, l’art. L. 212-1 C. consom. vise avant tout à rééquilibrer le contrat et non à rétablir un préjudice. L’action des associations de consommateurs est en revanche qualifiée de délictuelle (Cerclab n° 5755).

A. ACTION DÉLICTUELLE

V. pour la Cour de cassation : si les pratiques restrictives de concurrence sont généralement constatées à l’occasion de relations commerciales fondées sur un contrat, c’est, au travers de l’exécution du contrat, le comportement d’un opérateur économique ayant une pratique injustifiée au regard du jeu normal de la concurrence qui est sanctionné par l’action ouverte par [l’ancien] art. L. 442-6 C. com. [L. 442-1] ; l’arrêt qui retient que l’action autonome du Ministre aux fins de cessation de ces pratiques et aux fins d’annulation des contrats qui en sont le support revêt la nature d’une action en responsabilité quasi délictuelle, en a exactement déduit qu’il peut former sa demande, à son choix, devant la juridiction du domicile du défendeur, celle du lieu du fait dommageable ou celle du lieu dans le ressort de laquelle le dommage a été subi. Cass. com., 18 octobre 2011 : pourvoi n° 10-28005 ; Bull. civ. IV, n° 160 ; Cerclab n° 3536 ; Contr. conc. consom. 2012/1, comm. 9, obs. N. Mathey ; Concur­rences 2012/1, p. 133, obs. J.-L. Fourgoux, rejetant le pourvoi contre CA Rennes (1re ch. B), 15 octobre 2010 : RG n° 09/09111 ; arrêt n° 569 ; Cerclab n° 3626 (« l’action autonome du Ministre chargé de l’économie, dont la finalité est la protection du fonctionnement du marché et de la concurrence et qui vise au rétablissement de l’ordre public économique, ne procède pas du droit subjectif des victimes mais tend à la nullité absolue de pratiques contraires à l’ordre public économique », « le Ministre exerce un droit propre et ne met pas en œuvre une action en nullité relative appartenant au contractant, lequel n’a pas à être attrait dans la cause, même s’il dispose du droit d’agir lui-même en annulation »). § V. aussi : Cass. com., 8 juin 2017 : pourvoi n° 15-25712 ; arrêt n° 873 ; Cerclab n° 6895 (la règle selon laquelle nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude ne s’applique pas en matière délictuelle).

Dans le même sens pour les juges du fond : CA Nîmes (2e ch. com. B), 8 mars 2012 : RG n° 11/00692 ; Cerclab n° 3765, sur appel de T. com. Avignon, 7 janvier 2011 : Dnd - CA Orléans (ch. com. écon. fin.), 12 avril 2012 : RG n° 11/02284 ; arrêt n° 143 ; Cerclab n° 3769, pourvoi rejeté par Cass. com. 21 janvier 2014 : pourvoi n° 12-29166 ; Cerclab n° 4699 (problème non examiné) - CA Paris (pôle 5 ch. 4), 1er octobre 2014 : RG n° 13/16336 ; Cerclab n° 5030 ; Juris-Data n° 2014-023551 (action en responsabilité quasi délictuelle), sur appel de T. com. Evry (3e ch.), 26 juin 2013 : RG n° 2009F00729 ; Dnd. § V. aussi : l’ancien art. L. 442-6-I-2° C. com. [L. 442-1-I-2°] est considéré comme dérogatoire au problème de la force obligatoire des contrats. CA Nîmes (2e ch. com. sect. B), 25 juin 2015 : RG n° 14/00157 ; Cerclab n° 5258 (l’arrêt estime que la décision du Conseil constitutionnel du 13 janvier 2011 est « symptomatique d'ailleurs à cet égard »), sur appel de T. com. Nîmes, 26 septembre 2013 : RG n° 2013J71 ; Dnd - CA Paris (pôle 5 ch. 4), 21 juin 2017 : RG n° 15/18784 ; Cerclab n° 6938 (centrale de réservation d’hôtels par internet ; action délictuelle ; analyse des conséquences sur la loi applicable et la juridiction compétente dans un litige international) - T. com. Paris (1re ch.), 2 septembre 2019 : RG n° 2017050625 ; Cerclab n° 8250 (Amazon ; il est constant que le ministre agit sur le fondement de la responsabilité délictuelle).

Jugé que, peu importe que le preneur invoque à l'appui de sa demande l’ancien art. L. 442-6-I-2° C. com., qui n'était pas en vigueur au moment du comportement incriminé, la demande s'analysant à tout le moins comme une action en responsabilité délictuelle fondée sur le principe général de la responsabilité civile issu des dispositions de l’ancien art. 1382 C. civ. [1240 nouveau]. CA Lyon (1re ch. civ. A), 21 novembre 2013 : RG n° 12/03947 ; Cerclab n° 4621 (location de différents produits informatiques associés à un service d'évolution technologique, un service de gestion administrative et un service d'assurance et gestion des sinistres ; ancien art. L. 442-6-I-2° inapplicable à un contrat conclu en 2004 ; arrêt concluant qu’il n’y a pas de faute dans une proposition découlant de l’application des clauses du contrat…), sur appel de T. com. Lyon, 11 mai 2012 : RG n° 2009J3457 ; Dnd.

V. cependant en sens contraire, semblant faire un lien entre l’ancien art. L. 442-6-I-1° C. com. et la possibilité d’une action en responsabilité contractuelle : CA Montpellier (1re ch. sect. B), 6 mars 2013 : RG n° 11/06291 ; Cerclab n° 4312 (arrêt refusant l’action en responsabilité contractuelle, sur le fondement de l’ancien art. L. 442-6 C. com., d’un cafetier contre l’entrepositaire, bénéficiaire d’une stipulation pour autrui pour l’obligation d’approvisionnement exclusif, faute de lien contractuel avec celui-ci), sur appel de T. com. Montpellier, 27 juillet 2011 : RG n° 2010/010418 ; Dnd.

B. ACTION AUTONOME

Principe : action autonome et non action de substitution. Les partenaires commerciaux victimes de contrats déséquilibrés redoutent d’agir contre des professionnels en position de force qui, par rétorsion, risquent de cesser toute relation avec eux. L’action du Ministre vise à pallier ce risque de paralysie, avec des effets énergiques pouvant aller jusqu’à la nullité des clauses litigieuses, la restitution des sommes indûment versées, leur collecte par le Ministre et leur redistribution aux victimes. Ce dispositif a pu apparaître comme une action du Ministre « à la place » des contractants lésés (action de « substitution »), mais cette analyse a été écartée par la Cour de cassation.

V. en ce sens : l’action du Ministre chargé de l’économie, exercée en application des dispositions [l’ancien] art. L. 442-6-III C. com. [L. 442-4-I], qui tend à la cessation des pratiques qui y sont mentionnées, à la constatation de la nullité des clauses ou contrats illicites, à la répétition de l’indu et au prononcé d’une amende civile, est une action autonome de protection du fonctionnement du marché et de la concurrence qui n’est pas soumise au consentement ou à la présence des fournisseurs. Cass. com., 8 juillet 2008 : pourvoi n° 07-16761 ; Bull. civ. IV. n° 103 ; Cerclab n° 3534 ; D. 2008, 3046, note M. Bandrac ; D. 2010, pan. p. 2892, obs. D. Ferrier ; JCP G 2008. 1. 218, n° 18, obs. M. Chagny ; JCP E 2008, n° 30, p. 8, note A.-M. Luciani ; JCP E 2009, 1739, obs. G. Decocq ; Contr. conc. consom. 2008, comm. 237, note M. Malaurie-Vignal ; Rev. Lamy conc. 2008, 43, obs. M. Behar-Touchais ; Lettre distrib. 2008-7/8, p. 1, obs. J. Raynard, cassant CA Versailles (12e ch. sect. 2), 3 mai 2007 : RG n° 05/09223 ; Cerclab n° 3986 ; D. 2007, p. 1656, obs. E. Chevrier ; JCP E 2007, 2303, n° 9, obs. G. Decocq et 2429, note Kœring (si le Ministre de l'économie, grâce à cette habilitation législative, dispose d'un pouvoir et d'une qualité propres à agir à ces fins, il exerce cette action par substitution à la victime des pratiques en cause dont il met en œuvre les droits privés et non de manière autonome) - Cass. com., 8 juillet 2008 : pourvoi n° 07-13350 ; Cerclab n° 3535, rejet du pourvoi contre CA Paris, 20 décembre 2006 : Dnd - Cass. com., 5 mai 2009 : pourvoi n° 08-15264 ; Cerclab n° 3998 (l’action du Ministre chargé de l’économie, exercée en application des dispositions de l’ancien art. L. 442-6-III [L. 442-4-I], est une action autonome de protection du fonctionnement du marché et de la concurrence qui n’est pas soumise au consentement ou à la présence des fournisseurs) - Cass. com. 4 décembre 2012 : pourvoi n° 11-21743 ; Bull. civ. IV, n° 216 ; Cerclab n° 5057 (l'ancien art. L. 442-6-III C. com. [L. 442-4-I] donne au Ministre un droit propre ; espèce concernant l’ancien art. L. 442-6-I-5° C. com. [L. 442-1-II]), cassant CA Paris (pôle 5 ch. 5), 16 juin 2011 : RG n° 09/28449 ; Cerclab n° 7404 ; Juris-Data n° 2011-014224, solution adoptée sur renvoi par CA Paris (pôle 5 ch. 4), 3 décembre 2014 : RG n° 13/06091 ; Cerclab n° 4986, pourvoi rejeté par Cass. com., 18 octobre 2016 : pourvoi n° 15-13834 ; arrêt n° 878 ; Cerclab n° 6552 (problème non examiné) - Cass. civ. 1re, 6 juillet 2016 : pourvoi n° 15-21811 ; arrêt n° 805 ; Cerclab n° 5697 (mission de gardien de l'ordre public économique pour protéger le fonctionnement du marché et de la concurrence par une action autonome dont la connaissance est réservée aux juridictions étatiques au regard de sa nature et de son objet ; Ministre n'agissant ni comme partie au contrat ; inapplicabilité manifeste de la clause d’arbitrage), rejetant le pourvoi contre CA Paris (pôle 1 ch. 1), 19 mai 2015 : Dnd - Cass. com., 25 janvier 2017 : pourvoi n° 15-23547 ; arrêt n° 135 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 6707, rejetant le pourvoi contre CA Paris (pôle 5 ch. 4), 1er juillet 2015 : RG n° 13/19251 ; Cerclab n° 5288 ; Juris-Data n° 2015-016920 (l'action du ministre et celle des fournisseurs sont des actions autonomes), sur appel de T. com. Paris (1re ch. A), 24 septembre 2013 : RG n° 2011058615 ; Dnd.

Cette analyse n’a pas été démentie par la CEDH : CEDH (5e sect.), 17 janvier 2012 : req. n° 51255/08 ; Cerclab n° 4259 ; JCP G 2012, 462, note A. M. Luciani ; Contr. conc. consom. 2012/4, comm. 94, obs. M. Malaurie-Vi­gnal (la Cour observe que, dans les circonstances visées par l’ancien art. L. 442-6 C. com. [L. 442-4-I], le Ministre agit avant tout en défense de l’ordre public économique qui n’est pas limité aux intérêts immédiats des fournisseurs et que cette action du Ministre n’exclut pas les cocontractants lésés par la relation commerciale, puisque ces derniers restent en droit d’engager eux-mêmes une action en justice aux fins d’obtenir l’annulation des clauses ou des contrats illicites, la répétition de l’indu et le paiement de dommages-intérêts, ou de se joindre à l’instance initiée par le Ministre), dans la même affaire que celle abordée par Cass. com., 8 juillet 2008 : précité.

Dans le même sens pour les juges du fond (N.B. certaines décisions sont antérieures à la loi du 4 août 2008 : l’action exercée par le Ministre chargé de l’économie en application de l’ancien art. L. 442-6 C. com., issu de l’ordonnance du 1er décembre 1986 et de ses modifications ultérieures par la loi dite NRE du 15 mai 2001, est bien, non une action de substitution, mais une action principale autonome visant à la défense de l’ordre public économique et non à la restauration des droits patrimoniaux, et ne saurait constituer une atteinte à l’art. 6 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme dès lors que, motivée par des impératifs légitimes d’intérêt général, elle laisse aussi aux fournisseurs victimes la possibilité de défendre leurs droits et d’obtenir la réparation de leur préjudice propre et n’a donc nul besoin, avant d’être introduite, d’obtenir l’avis ou l’accord de ces derniers ; enfin, la sanction de la répétition de sommes indûment versées que l’ancien art. L. 442-6 modifié par la loi NRE permet expressément au Ministre de réclamer ne saurait pas plus transformer cette action en une action de substitution exercée pour le compte des fournisseurs alors que cette sanction n’est que la conséquence de la nullité des clauses illicites à l’origine de ces versements ; il en est de même du prononcé d’une amende civile, expressément prévue par ce texte et qui n’est pas l’accessoire des sanctions d’annulation du contrat et de répétition des sommes versées, mais le type même de la sanction que seules peuvent réclamer les autorités publiques dans l’exercice de leur action autonome destinée à sanctionner le trouble à l’ordre public économique ainsi causé. CA Colmar (1re ch. civ. sect. B), 12 juin 2008 : RG n° 05/05738 ; Legifrance ; Cerclab n° 3235, sur appel de TGI Strasbourg (compét. com.), 25 novembre 2005 : Dnd. § La nullité des clauses ou contrats illicites, la répétition de l’indu ou l’amende sont des sanctions civiles spécifiques dont la finalité est le respect l’ordre public économique notamment dans les rapports entre la grande distribution et ses fournisseurs ; l’action du Ministre ne met pas œuvre par substitution les voies de droit du Code civil mais une action spécifique prévue le Code de commerce. CA Nîmes (2e ch. com. sect. B), 17 janvier 2008 : RG n° 05/01724 ; Cerclab n° 3652, pourvoi rejeté par Cass. com., 16 décembre 2008 : pourvoi n° 08-13162 ; Cerclab n° 3648 ; JCP G 2009. 1. 138, obs. M. Chagny.

V. aussi : CA Reims (ch. civ. 1re sect.), 5 novembre 2007 : RG n° 06/01898 ; Cerclab n° 4328 ; Juris-Data n° 2007-365306 (action autonome visant à la défense de l'ordre public économique et non action de substitution), sur appel de T. com. Châlons-en-Champagne, 15 juin 2006 : Dnd - CA Rennes (2e ch. com.), 20 janvier 2009 : RG n° 07/07013 ; arrêt n° 21 ; Legifrance ; Cerclab n° 3291 (l’action du Ministre chargé de l’économie n’est pas une action de substitution mais confère à l’administration un droit d’action autonome ayant pour finalité d’assurer la protection du fonctionnement marché et du libre jeu de la concurrence ; elle n’est dès lors pas soumise au consentement ou à la présence à la cause du cocontractant, fut-il victime de ces pratiques), sur appel de T. com. Saint-Nazaire, 24 octobre 2007 : Dnd - CA Rennes (2e ch. com.), 20 janvier 2009 : RG n° 08/00246 ; Cerclab n° 4334 ; Juris-Data n° 2009-005280 (idem), sur appel de TGI Dinan, 13 novembre 2007 : Dnd - CA Versailles (12e ch. sect. 2), 24 septembre 2009 : RG n° 08/05366 ; Cerclab n° 3293 (l'action du Ministre de l'économie est une action autonome de protection du fonctionnement du marché et de la concurrence, indépendante de celle des victimes personnelles des pratiques que prohibe l'ancien art. L. 442-6 C. com., au consentement, à l’information ou à la présence desquelles elle n'est pas soumise), sur appel de T. com. Nanterre (6e ch.), 28 mars 2007 : RG n° 2006F01964 ; Cerclab n° 4356 ; Juris-Data n° 2007-363867 - CA Bastia (ch. civ.), 30 septembre 2009 : RG n° 07/00993 ; Cerclab n° 3903 (l'ancien art. L. 442-6-III C. com. [L. 442-4-I] n’instaure pas une action en substitution ou en représentation mais constitue une action autonome de protection du fonctionnement du marché et de la concurrence qui n'est soumise ni au consentement, ni à la présence des fournisseurs lésés), sur appel de T. com. Ajaccio, 3 décembre 2007 : RG n° 06/1419 ; Dnd - CA Versailles (12e ch. sect. 1), 29 octobre 2009 : RG n° 08/07356 ; Cerclab n° 4332 ; Juris-Data n° 2009-015907 (action autonome de protection du fonctionnement du marché et de la concurrence) - T. com. Lille, 6 janvier 2010 : RG n° 2009/5184 ; Cerclab n° 4251 ; D. 2010. p. 1000, note J. Sénéchal ; JCP G. 2010. 516, obs. M. Chagny ; Contr. conc. consom. 2010/3. Comm. n° 71, note N. Mathey ; RDC 2010/3. p. 928, obs. M. Behar-Touchais ; Rev. Lamy conc. 2010, n° 23, p. 43, note M. Behar-Touchais ; Lettre distrib. n° 1-2010, note J.-M. Vertut - T. com. Lille 7 septembre 2011 : RG n° 2009/05105 ; Cerclab n° 4254 ; D. 2012. pan. p. 577, obs. D. Ferrier ; JCP E. 2011. 1701, note G. Chantepie ; Contr. conc. consom. 2011/11. Comm. n° 234, note N. Mathey (action autonome de protection du marché), sur appel CA Paris, (pôle 5 ch. 4), 11 septembre 2013 : RG n° 11/17941 ; Cerclab n° 4630 - CA Orléans (ch. com. écon. fin.), 12 avril 2012 : RG n° 11/02284 ; arrêt n° 143 ; Cerclab n° 3769, sur renvoi de Cass. com., 27 avril 2011 : pourvoi n° 10-13690 ; Bull. civ. IV, n° 61 ; Cerclab n° 3271, 3769, pourvoi rejeté par Cass. com. 21 janvier 2014 : pourvoi n° 12-29166 ; Cerclab n° 4699 (problème non examiné) - CA Nîmes (2e ch. com. B), 8 mars 2012 : RG n° 11/00692 ; Cerclab n° 3765, sur appel de T. com. Avignon, 7 janvier 2011 : Dnd - CA Colmar (1re ch. civ. sect. B), 18 avril 2012 : RG n° 09/04851 ; arrêt n° 306/2012 ; Cerclab n° 3861 (l'action du Ministre n’est pas une action de substitution, mais une action principale autonome visant à la défense de l'ordre public économique et non à la restauration des droits patrimoniaux), sur appel de TGI Strasbourg, 28 septembre 2009 : Dnd - CA Paris (pôle 5 ch. 5), 4 juillet 2013 : RG n° 12/07651 ; Cerclab n° 4619 ; Juris-Data n° 2013-015022 (action propre, visant à maintenir ou à rétablir l’ordre public), pourvoi rejeté par Cass. com., 29 septembre 2015 : pourvoi n° 13-25043 ; arrêt n° 818 ; Cerclab n° 5324 (problème non examiné) - CA Paris (pôle 5 ch. 4), 20 novembre 2013 : RG n° 12/04791 ; Cerclab n° 4622 ; Juris-Data n° 2013-026814 (action propre et autonome de protection de fonctionnement du marché et de la concurrence), pourvoi rejeté par Cass. com., 3 mars 2015 : pourvoi n° 14-10907 ; arrêt n° 239 ; Cerclab n° 5073 - CA Paris (pôle 5 ch. 4), 18 décembre 2013 : RG n° 12/00150 ; arrêt n° 350 ; Cerclab n° 4649 ; Juris-Data n° 2013-030435 (action propre au Ministre dans le but de maintenir ou de rétablir l'ordre public économique), pourvoi rejeté par Cass. com., 27 mai 2015 : pourvoi n° 14-11387 ; arrêt n° 499 ; Cerclab n° 5167 (problème non examiné) - T. com. Paris (1re ch. A), 20 mai 2014 : RG n° 2013070793 ; Cerclab n° 6972 (le Ministère a qualité propre et autonome pour agir en tant que garant de l'ordre public économique, indépendamment de tout préjudice démontré et de toute action éventuelle par des personnes lésées par la pratique contestée, ou susceptibles de l'être) - CA Paris (pôle 5 ch. 4), 1er octobre 2014 : RG n° 13/16336 ; Cerclab n° 5030 ; Juris-Data n° 2014-023551 (action propre, autonome, visant à maintenir ou à rétablir l'ordre public économique et ne se substituant pas à celles des fournisseurs), sur appel de T. com. Evry (3e ch.), 26 juin 2013 : RG n° 2009F00729 ; Dnd - CA Paris (pôle 1 ch. 1), 15 septembre 2015 : RG n° 15/07435 ; Cerclab n° 5312 (l'action qui a été attribuée à ces autorités publiques dans le cadre de leur mission de gardiens de l'ordre public économique et qui vise à la protection du fonctionnement du marché et de la concurrence, et non à celle des intérêts immédiats des contractants lésés, est une action autonome dont l'exercice n'est d'ailleurs pas soumis à l'accord des victimes des pratiques restrictives, ni à leur mise en cause devant le juge saisi, mais seulement à leur information ; la circonstance que l'autorité qui poursuit la cessation de pratiques discriminatoires puisse également faire constater la nullité des clauses ou contrats illicites et demander la répétition de l'indu, n'est pas de nature à modifier le caractère de cette action distincte par son objet de défense de l'intérêt général de celle que la victime peut elle-même engager pour la sauvegarde de ses droits propres et la réparation de son préjudice personnel ; absence d’application de la clause attributive de juridiction), contredit sur T. com. Paris, 24 mars 2015 : RG n° 2014027403 ; Dnd - CA Amiens (ch. écon.), 3 décembre 2015 : RG n° 13/01532 ; Cerclab n° 5346 (l'action du Ministre ne constitue pas une action de substitution), sur appel de T. com. Compiègne, 26 février 2013 : RG n° 2008.00492 ; Dnd - CA Paris (pôle 5 ch. 4), 21 juin 2017 : RG n° 15/18784 ; Cerclab n° 6938 (action autonome et non action de substitution) - CA Paris (pôle 5 ch. 4), 21 juin 2017 : RG n° 15/18784 ; Cerclab n° 6938 (centrale de réservation d’hôtels par internet ; action autonome ; analyse des conséquences sur la loi applicable et la juridiction compétente dans un litige international) - CA Paris (pôle 5 ch. 4), 27 septembre 2017 : RG n° 16/00671 ; Cerclab n° 7064 (l’action du ministre étant une action autonome de protection du fonctionnement du marché, non soumise au consentement ou à la présence des victimes, son intérêt à agir est distinct de l'existence des contrats des plaignants cités dans la procédure), sur appel de T. com. Lille, 10 novembre 2015 : RG n° J2012000024 ; Dnd - T. com. Paris (1re ch.), 2 septembre 2019 : RG n° 2017050625 ; Cerclab n° 8250 (Amazon ; en tant que garant de l'ordre public économique sur le territoire national, l'ancien art. L. 442-6 [442-1] étant une loi de police, le ministre bénéficie d'une action autonome de protection du fonctionnement du marché national et de la concurrence ; le ministre ne prétend nullement agir ici en « gendarme du commerce mondial » mais en garant de l'ordre public national).

V. aussi dans le même sens pour une action intentée par le président de l’Autorité de la concurrence : T. com. Créteil (1re ch.), 13 octobre 2009 : RG n° 2008F00629 ; Cerclab n° 4355 (action autonome de protection du fonctionnement du marché et de la concurrence exercée par le Président de l'Autorité de la Concurrence en tant que garant de l'ordre public économique, action qui revêt donc la même nature que celle du Ministre).

Conséquences de la solution. L’action des personnes visées par l’ancien art. L. 442-6-III C. com. [L. 442-4-I] est autonome des actions qui pourraient être diligentées par les parties elles-mêmes et le fait que les actions en nullité ou en réparation de celles-ci pourraient être prescrites ou seraient rendues difficiles en raison de la disparition d’éléments de preuve ne saurait empêcher le Ministre de l’économie, le ministère public ou l’autorité de la concurrence (ADLC) de mener les actions qui leur sont propres. CA Paris, 3 octobre 2013 : Dnd, pourvoi jugé irrecevable par Cass. com., 3 février 2015 : pourvoi n° 13-26277 ; arrêt n° 114 ; Cerclab n° 5021.

C. ACTION RÉPRESSIVE OU DE NATURE PÉNALE

Amende civile : nature pénale. * Principe. Le principe de la personnalité des peines, résultant des art. 8 et 9 de la Déclaration de 1789, ne fait pas obstacle au prononcé d’une amende civile à l’encontre de la personne morale à laquelle l’entreprise a été juridiquement transmise. Cass. com. 21 janvier 2014 : pourvoi n° 12-29166 ; Cerclab n° 4699, rejetant le pourvoi contre CA Orléans (ch. com. écon. fin.), 12 avril 2012 : RG n° 11/02284 ; arrêt n° 143 ; Cerclab n° 3769. § V. aussi Cerclab n° 6161 (Constitution) et n° 6162 (Conv. EDH). § Comp. Cass. com. 10 septembre 2013 : pourvoi n° 12-21804 ; Cerclab n° 4624 (arrêt jugeant surabondant le motif de la cour d’appel estimant que la violation de l’ancien art. L. 442-6-I-2° C. com. [L. 442-1-I-2°] ne constituait pas une infraction pénale, alors que, selon la société de supermarchés poursuivie, l’amende revêtait le caractère d’une infraction pénale supposant de vérifier le respect du principe de personnalité des délits et des peines, la Cour de cassation relevant par ailleurs qu’il était établi que la société avait personnellement pris part aux pratiques litigieuses).

V. aussi, pour les juges du fond, admettant l’application du principe de légalité : l'action du Ministre de l'économie, en ce qu'elle tend à l'application, à l'initiative des autorités publiques, de mesures à caractère punitif afin de sanctionner un comportement susceptible de troubler l'ordre public économique, constitue une accusation de nature pénale au sens de la Conv. EDH rendant applicable l'art. 6-3-d de cette convention. CA Rennes (2e ch. com.), 20 janvier 2009 : RG n° 08/00246 ; Cerclab n° 4334 ; Juris-Data n° 2009-005280, sur appel de TGI Dinan, 13 novembre 2007 : Dnd. § Les demandes du Ministre fondées sur les anciens art. L. 442-6-I-2° et III C. com. [L. 442-1-I-2° et L. 442-4-I] tendent à obtenir la condamnation des défenderesses à une amende qui peut sous certains aspects être assimilée à une sanction pénale T. com. Évry (3e ch.), 6 février 2013 : RG n° 2009F00727 ; Cerclab n° 4352 (argumentation recevable au titre de l’art. 6 Conv. EDH pour apprécier un refus de communication de pièces ou pour apprécier les conséquences d’une fusion-absorption des responsables).

Comp. : les pratiques abusives visées par l'ancien art. L. 442-6 C. com. [L. 442-1] ne constituant pas des infractions pénales, leur auteur ne peut pas invoquer le principe de la personnalité des délits et des peines. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 2 février 2012 : RG n° 09/22350 ; Cerclab n° 3621 ; Lettre distrib. 2012/3, p. l, obs. J.-M. Vertut, pourvoi rejeté par Cass. com. 10 septembre 2013 : pourvoi n° 12-21804 ; Cerclab n° 4624.

Rappr. cependant pour l’adoption d’une interprétation stricte : les éléments constitutifs des deux « quasi-délits civils » des anciens art. L. 442-6-I-2° [L. 442-1-I-2°] et L. 442-6-II, d) C. com., dont les auteurs encourent des amendes civiles, sont d'interprétation stricte. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 21 juin 2017 : RG n° 15/18784 ; Cerclab n° 6938 - CA Paris (pôle 5 ch. 4), 20 décembre 2017 : RG n° 13/04879 et n° 13/11192 ; Cerclab n° 7372 ; Juris-Data n° 2017-027127 (l’art. L. 442-6-I-2° C. com. doit s'interpréter strictement), pourvoi rejeté par Cass. com., 20 novembre 2019 : pourvoi n° 18-12823 ; arrêt n° 855 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 8228 (argument non examiné).

* Conséquences. Le fait que les dispositions de l’ancien art. L. 442-6 C. com. [L. 442-1] puissent être considérées comme relevant de la matière pénale, au sens de la Conv. EDH, rendant applicables les dispositions de l'art. 6 § 1 et 7 § 1 de cette convention européenne d'application directe en France, n'entraîne pas la conséquence de les soumettre nécessairement aux dispositions des art. 111-3, 111-4, 121-1 et 121-2 du code pénal français. CA Nîmes (2e ch. com. sect. B), 25 février 2010 : RG n° 07/00606 ; Cerclab n° 2350 ; Boccrf n° 3, 30 mars 2010 ; RDC 2010/4, p. 1331, obs. M. Behar-Tou­chais pourvoi rejeté par Cass. com., 12 juillet 2011 : pourvoi n° 10-21551 ; Cerclab n° 3248 (problème non examiné). § V. aussi : l'action du Ministre en tant que gardien de l'ordre public économique n'est pas fondée sur le Code pénal mais sur l'ancien art. L. 442-6-III C. com. [L. 442-4-I], et les règles portant sur la responsabilité pénale des personnes physiques ne sauraient être systématiquement transposées aux personnes morales, au mépris de la réalité économique. T. com. Évry (3e ch.), 6 février 2013 : RG n° 2009F00727 ; Cerclab n° 4352 (possibilité de poursuivre une société ayant absorbé les sociétés ayant conclu les contrats). § Pour l’arrêt frappé de pourvoi dans l’affaire jugée par la Cour de cassation le 21 janvier 2014 : si le principe de légalité des délits et des peines ne concerne pas seulement les peines prononcées par les juridictions répressives, mais s'étend à toute sanction ayant le caractère d'une punition, même si le législateur a laissé le soin de la demander à une autorité de nature non juridictionnelle, l'action du Ministre en vue de censurer une pratique injustifiée au regard du jeu normal de la concurrence revêt la nature d'une action en responsabilité quasi délictuelle ; ses conditions d'exercice figurent dans le code de commerce, hors de toute référence au code pénal, au code de procédure pénale ou à toute autre disposition légale ou réglementaire de nature pénale ; l'amende, ni par sa nature, ni par son objet, ne présente un caractère pénal, mais seulement punitif et indemnitaire, en ce qu'elle tend à restaurer l'équilibre économique dans les relations commerciales entre professionnels et à réparer de façon globale et par l'intermédiaire de l'État le préjudice collectif indirect subi par l'ensemble des acteurs économiques sur le marché. CA Orléans (ch. com. écon. fin.), 12 avril 2012 : RG n° 11/02284 ; arrêt n° 143 ; Cerclab n° 3769 (la réserve d'information des parties au contrat soulevée par la Conseil constitutionnel vise à garantir le droit à un procès équitable et le principe du contradictoire), sur renvoi de Cass. com., 27 avril 2011 : pourvoi n° 10-13690 ; Bull. civ. IV, n° 61 ; Cerclab n° 3271. § Doit être rejeté le moyen tiré de l'art. 121-1 C. pénal selon lequel nul n'est responsable pénalement que de son propre fait, en raison tant de la mission de régulation dont est investi le Ministre de l'économie qu'au fait qu'à la suite de la fusion, la société à laquelle les manquements sont éventuellement imputables a été absorbée intégralement sans être liquidée ou scindée, il n'existe pas d'obstacles au prononcé d'une sanction pécuniaire à l'encontre de la société absorbante ; au surplus, les pratiques anticoncurrentielles sont imputées par l'ancien art. L. 442-6 du code de commerce [L. 442-1] à « tout producteur, commerçant ou industriel », indépendamment de leur statut juridique et sans considération de la personne de l'exploitant, de sorte que le principe de la continuité économique et fonctionnelle d'une entreprise s'applique quel que soit le mode juridique de transfert des activités dans le cadre desquelles ont été commises les pratiques à sanctionner. CA Orléans (ch. com. écon. fin.), 12 avril 2012 : précité.

V. aussi pour le refus d’application immédiate des lois pénales plus douces : les dispositions d’ordre public de l'ancien art. L. 442-6-I-2°-b) C. com., abrogées sans effet rétroactif par la loi n° 2008-776 du 4 août 2008, ne constituent pas une infraction pénale du fait d'une pratique restrictive de concurrence, dont l'abrogation entraînerait l'impossibilité de mise en œuvre de l'action publique au titre de faits antérieurs, et le cas échéant de l'action civile accessoire, mais une faute civile autonome, entraînant la mise en œuvre d'une action en réparation du dommage causé par le responsable de celle-ci à son partenaire commercial, devant la juridiction commerciale compétente. CA Nîmes (2e ch. com. B), 8 mars 2012 : RG n° 11/00692 ; Cerclab n° 3765, sur appel de T. com. Avignon, 7 janvier 2011 : Dnd.

Comp. en sens inverse, pour la modification des sanctions des retards de paiement (art. L. 441-9 et L. 442-6-I-7° C. com.) : en substituant à l'amende civile de 2 millions d'euros prévue par l’anc. art. L. 442-6-I C. com., qui sanctionnait « le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : (...) 7° De soumettre un partenaire à des conditions de règlement qui ne respectent pas le plafond fixé au neuvième alinéa de l'article L. 441-6 », une amende administrative sanctionnant « le fait de ne pas respecter les délais de paiement mentionnés » à l’art. L. 441-6-I, 9e alin. C. com., d'un montant de 75.000 euros pour une personne physique et 375.000 euros pour une personne morale, l'art. 123 L. du 17 mars 2014 a, sans modifier la teneur des faits sanctionnés, modifié les règles de compétence et de procédure et réduit le quantum de la peine applicable ; par suite, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ni d'erreur de qualification juridique en jugeant que cette loi constitue une loi pénale plus douce immédiatement applicable aux faits commis antérieurement à son entrée en vigueur, quand bien même la nouvelle amende administrative serait appliquée plus fréquemment que l'ancienne amende civile. CE (9e et 10e réun.), 3 février 2021 : req. n° 430130 ; tabl. Rec Lebon ; Cerclab n° 8784 (point n° 8), pourvoi contre CAA Marseille, 25 février 2019 : req. n° 18MA01094 ; Dnd, sur appel de TA Marseille, 9 janvier 2018 : req. n° 1509166 ; Dnd. § V. aussi : l'article 124 de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 a abrogé le 7° du I de l’anc. art. L. 442-6 C. com. et modifié le VI de l'anc. art. L. 441-6 du code de commerce, alors que l’art. 123, sans modifier les délais maximaux de paiement entre commerçants, ni réduire ou étendre la consistance de l'infraction aux règles de la concurrence que constitue la méconnaissance de ces délais, a institué un nouveau régime de peine sanctionnant ce manquement ; dès lors, ces dispositions n'ont donc pas procédé à la suppression d'un régime de sanction indissociable d'une réglementation antérieure à laquelle il aurait été mis fin, mais se sont limitées à modifier les règles de compétence et de procédure au terme desquelles sont adoptées les sanctions infligées, tout en réduisant le plafond des peines encourues, l'initiative en revenant toujours à un agent du ministre de l'économie et des finances ; elles ont ainsi instauré une loi pénale plus douce, et les dispositions du VI de l'art. L. 441-6 C. com. telles que modifiées par la loi du 17 mars 2014 pouvaient par suite s'appliquer rétroactivement aux faits commis par la société. CAA Marseille (6e ch.), 29 mars 2021 : RG n° 18MA03850 ; rôle n° 21174 ; Cerclab n° 8880, annulant TA Marseille, 3 juillet 2018 : req. n° 1603377 ; Dnd. § Même sens : sauf à ce que la répression antérieure plus sévère soit inhérente aux règles auxquelles la loi nouvelle s'est substituée, le principe de nécessité des peines implique que la loi pénale plus douce soit rendue immédiatement applicable aux infractions commises avant son entrée en vigueur qui n'ont pas donné lieu à des condamnations passées en force de chose jugée ; ce principe s'applique à toute sanction ayant le caractère d'une punition, même si le législateur a laissé le soin de la prononcer à une autorité de nature non juridictionnelle ; en substituant à l'amende civile de 2 millions d'euros prévue par l’anc. art. L. 442-6-I C. com., qui sanctionnait « le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : / (...) 7° De soumettre un partenaire à des conditions de règlement qui ne respectent pas le plafond fixé au neuvième alinéa de l'article L. 441-6 », une amende administrative sanctionnant « le fait de ne pas respecter les délais de paiement mentionnés » au neuvième alinéa du I de l'article L. 441-6 du code de commerce, d'un montant de 75.000 euros pour une personne physique et 375.000 euros pour une personne morale, l'art. 123 de la loi du 17 mars 2014 a, sans modifier la teneur des faits sanctionnés, modifié les règles de compétence et de procédure et réduit le quantum de la peine applicable ; ainsi, cette loi constitue, pour l'application du principe susvisé, une loi pénale plus douce immédiatement applicable aux faits commis antérieurement à son entrée en vigueur. CAA Nancy (3e ch.), 6 juillet 2021 : req. n° 19NC00777 ; Cerclab n° 8954, sur appel de TA Strasbourg, 16 janvier 2019 : req. n° 1604749 ; Dnd.

Maintien de l’applicabilité des infractions pénales traditionnelles. La circonstance que l’obtention d’un avantage commercial injustifié ne soit passible, en vertu de l’ancien art. L. 442-6-I-2°-a) du code de commerce, que d’une amende civile, ne met pas obstacle aux poursuites exercées du chef de faux, relativement à l’établissement de factures constatant des prestations inexistantes et des prix erronés. Cass. crim. 25 juin 2008 : pourvoi n° 07-80261 ; Bull. crim. n° 167 ; Dnd.