CA ROUEN (ch. proxim.), 27 mars 2014
CERCLAB - DOCUMENT N° 4753
CA ROUEN (ch. proxim.), 27 mars 2014 : RG n° 13/01330
Publication : Jurica
Extrait : « Attendu que, cependant, l'article L. 141-4 du Code de la consommation, tel qu'il résulte de la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008, dispose que le juge peut soulever d'office toutes les dispositions du code dans les litiges nés de son application ; Attendu que l'office du juge s'exerce dans le respect du contradictoire ; Qu'en l'espèce, la question de la déchéance du droit aux intérêts encourue du fait de la non conformité éventuelle de l'offre de prêt par rapport aux modèles types applicables a bien été soulevée au cours des débats, l'établissement bancaire ayant été autorisé à remettre, en première instance, une note en délibérée sur ce point ; Qu'il en résulte que le moyen soulevé en appel sur ce point doit être écarté ;
Attendu que le juge peut relever d'office le caractère abusif d'une clause insérée dans une offre de crédit ; que, cependant, la sanction de la déchéance du préteur de son droit aux intérêts n'a pas vocation à recevoir application à l'égard d'une clause abusive qui ne peut qu'être réputée non écrite et ce contrairement à ce qui a été retenu par le premier juge ;
Que, par ailleurs, si l'article 6-4 du contrat, qui prévoit la possibilité pour le préteur d'exiger le remboursement immédiat des sommes dues, sans autre formalité qu'une mise en demeure, dans l'hypothèse où les garanties prévues dans les conditions particulières n'ont pas été matérialisées, pourrait être qualifiée de clause abusive au sens de l'article L. 132-1 du Code de la consommation dès lors qu'elle peut aggraver de façon significative la situation du débiteur pour une raison autre que celle tirée d'un défaut de paiement et pourrait dès lors être réputée non écrite, force est de constater, en la présente espèce, que la déchéance du terme n'a été prononcée qu'en raison du non-paiement par la débitrice des mensualités prévues dans le contrat soit sur le fondement d'une clause non abusive ».
COUR D’APPEL DE ROUEN
CHAMBRE PROXIMITÉ
ARRÊT DU 27 MARS 2014
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 13/01330. DÉCISION DÉFÉRÉE : Jugement du TRIBUNAL D'INSTANCE DE BERNAY du 23 novembre 2012.
APPELANTE :
SA BANQUE CIC NORD OUEST
Représentée et assistée par Maître Vincent MESNILDREY de la SCP MESNILDREY LEPRETRE, avocat au barreau de l'EURE
INTIMÉE :
Madame X.
N'ayant pas constitué avocat bien que régulièrement assignée à personne par acte d'huissier en date du 7 octobre 2013
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l'article 786 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 20 janvier 2014 sans opposition des avocats devant Madame APELLE, Présidente, et Madame POITOU, Conseiller rapporteur,
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de : Madame APELLE, Présidente, Madame LABAYE, Conseiller, Madame POITOU, Conseiller
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme NOEL-DAZY, Greffier
DÉBATS : A l'audience publique du 20 Janvier 2014, où l'affaire a été mise en délibéré au 27 mars 2014
ARRÊT : Réputé contradictoire, Prononcé publiquement le 27 mars 2014, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, Signé par Madame APELLE, Présidente et par Mme NOEL-DAZY, Greffier présent à cette audience.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
La société CIC Nord-Ouest est appelante du jugement en date du 23 novembre 2012 rendu par le tribunal d'Instance de Bernay qui a :
- « constaté la recevabilité de l'action en paiement de la SA Banque CIC Nord-Ouest,
- condamné Mme X. à payer à la SA Banque CIC Nord-Ouest la somme de 3.356,28 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- condamné Mme X. aux dépens,
- ordonné l'exécution provisoire. »
La société CIC Nord-Ouest a interjeté appel le 12 mars 2013.
La société CIC Nord-Ouest, par des écritures enregistrées le 11 juillet 2013, demande la réformation du jugement entrepris et entend voir :
- condamner Mme X. à lui payer les sommes de :
* 9.061,52 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 5,90 % ainsi que les cotisations d'assurance-vie à compter du 14 juin 2012 jusqu'à parfait paiement,
* 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner Mme X. aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la SCP Mesnildrey Leprêtre.
Au soutien de ses prétentions, la société CIC Nord-Ouest expose que la méconnaissance des exigences des articles L. 311-2, L. 311-8 et L. 311-10 du Code de la consommation, même d'ordre public, ne peut être opposée qu'à la demande de la personne que ces dispositions ont pour objet de protéger ; qu'en l'espèce le tribunal d'instance a relevé d'office que la Banque n'avait pas saisi les emprunteurs d'une offre préalable conforme aux conditions fixées par les articles L. 311-8 à L. 311-13 du Code de la consommation, alors que la débitrice n'avait pas invoqué ce moyen.
La déclaration d'appel et les conclusions de la société CIC Nord-Ouest ont été régulièrement signifiées à Mme X. qui n'a pas constitué avocat.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
Attendu que, le 16 février 2008, la société CIC Nord-Ouest a consenti à Mme X. un prêt personnel d'un montant de 21.500 euros, au taux effectif global de 6,13 % ; que, le 4 juillet 2011, l'établissement bancaire a prononcé la déchéance du terme et mis en demeure Mme X. de s'acquitter du solde de la créance ; que faute de paiement, l'établissement bancaire a saisi le tribunal d'instance d'une action en paiement ;
Attendu que la société CIC Nord-Ouest fait grief au jugement attaqué de l'avoir déboutée de sa demande tendant au paiement des intérêts contractuels, alors que la méconnaissance des exigences des articles L. 311-8 et suivants du Code de la consommation en matière de présentation d'une offre de crédit, même d'ordre public, ne peut être opposée que par la personne que ces dispositions ont pour objet de protéger et ne peut être soulevée d'office par le juge devant lequel le bénéficiaire n'a pas comparu ;
Attendu que, cependant, l'article L. 141-4 du Code de la consommation, tel qu'il résulte de la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008, dispose que le juge peut soulever d'office toutes les dispositions du code dans les litiges nés de son application ;
Attendu que l'office du juge s'exerce dans le respect du contradictoire ;
Qu'en l'espèce, la question de la déchéance du droit aux intérêts encourue du fait de la non conformité éventuelle de l'offre de prêt par rapport aux modèles types applicables a bien été soulevée au cours des débats, l'établissement bancaire ayant été autorisé à remettre, en première instance, une note en délibérée sur ce point ;
Qu'il en résulte que le moyen soulevé en appel sur ce point doit être écarté ;
Attendu que le juge peut relever d'office le caractère abusif d'une clause insérée dans une offre de crédit ; que, cependant, la sanction de la déchéance du préteur de son droit aux intérêts n'a pas vocation à recevoir application à l'égard d'une clause abusive qui ne peut qu'être réputée non écrite et ce contrairement à ce qui a été retenu par le premier juge ;
Que, par ailleurs, si l'article 6-4 du contrat, qui prévoit la possibilité pour le préteur d'exiger le remboursement immédiat des sommes dues, sans autre formalité qu'une mise en demeure, dans l'hypothèse où les garanties prévues dans les conditions particulières n'ont pas été matérialisées, pourrait être qualifiée de clause abusive au sens de l'article L. 132-1 du Code de la consommation dès lors qu'elle peut aggraver de façon significative la situation du débiteur pour une raison autre que celle tirée d'un défaut de paiement et pourrait dès lors être réputée non écrite, force est de constater, en la présente espèce, que la déchéance du terme n'a été prononcée qu'en raison du non-paiement par la débitrice des mensualités prévues dans le contrat soit sur le fondement d'une clause non abusive ;
Attendu qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que la décision querellée sera réformée en ce qu'elle a déchu la SA Banque CIC Nord-Ouest de son droit aux intérêts depuis l'origine du contrat ;
Attendu qu'il résulte des relevés et décomptes produits que la créance de l'établissement bancaire s'élève à la somme de 9.061,52 euros avec intérêts au taux conventionnel à compter du 14 juin 2012 sur la somme de 7.301,64 euros ;
Attendu qu'il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la banque les frais irrépétibles qu'elle a exposés ; que la décision entreprise sera donc confirmée en ce qu'elle a débouté la SA Banque CIC Nord-Ouest de sa demande formée en application de l'article 700 du Code de procédure civile ; que la banque sera déboutée de sa demande formée au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;
Attendu que Mme X., partie succombante, supportera les dépens exposés en cause d'appel, le jugement entrepris étant confirmé en ce qu'elle a lui fait supporter les dépens de première instance.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Statuant par arrêt public et réputé contradictoire,
Confirme la décision déférée en ce qu'elle a débouté la SA Banque CIC Nord-Ouest de sa demande formée au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et mis les dépens de première instance à la charge de Mme X.
La réforme pour le surplus.
Statuant de nouveau de ces chefs,
Condamne Mme X. à payer à la SA Banque CIC Nord-Ouest la somme de 9.061,52 euros avec intérêts au taux conventionnel à compter du 14 juin 2012 sur la somme de 7.301,64 euros.
Déboute la SA Banque CIC Nord-Ouest du surplus de ses demandes.
Dit que Mme X. supportera les dépens d'appel qui seront recouvrés en application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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