CA POITIERS (2e ch. civ.), 7 janvier 2014
CERCLAB - DOCUMENT N° 4781
CA POITIERS (2e ch. civ.), 7 janvier 2014 : RG n° 13/01020 ; arrêt n° 13
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Le contrat de fourniture et pose de panneaux photovoltaïques conclu entre la SAS PLANET SOLAIRE et les époux Y. est expressément daté du 7 juin 2010 et stipule expressément qu'il est financé au moyen d'un prêt de la société SOFEMO de 26.000 euros remboursable en 180 mensualité au taux nominal d'intérêt de 5,54 % l'an. Ces éléments font présumer, de manière grave, précise et concordante, que le contrat de prêt affecté, bien que non daté formellement, a été conclu le même jour (7 juin 2010).
Ce contrat de prêt n'est donc pas régi par la législation du crédit à la consommation instituée par la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, applicable aux contrats dont l'offre a été émise après le 1er mai 2011. Il n'est pas légalement régi par la législation du crédit à la consommation antérieure à ladite loi, puisque le montant du capital prêté (26.000 euros) excède le plafond du domaine d'application de cette législation, fixé à 21.500 euros en vertu des articles L. 311-3 § 2° et 4°c, D. 311-1 et D. 311-2 anciens du même code. Il n'est pas conventionnellement soumis au régime du crédit à la consommation puisqu'il stipule en tête de la page 3 : « si l'opération de crédit (...) est d'un montant supérieur à 21.500 euros (...), les articles L. 311-1 et suivants du Code de la Consommation ne s'appliquent pas et les dispositions figurant ci-après aux articles 12 (.... reprenant ces dispositions légales) sont inapplicables ».
Par ailleurs, la société SOFEMO dénie l'applicabilité de la législation régissant le crédit immobilier en soutenant que la condition d'application de ce régime, posée par l'article L. 312-2 § 1° c du même code dans sa rédaction antérieure à la loi du 1er juillet 2010 (financement des dépenses relatives à la construction, l'amélioration ou l'entretien des immeubles à usage d'habitation, pour un montant supérieur à 21.500 euros) n'est pas applicable dès lors que l'installation, sur la toiture existante, de panneaux photovoltaïques exclusivement destinés à produire de l'électricité et n'ayant aucune fonction de couverture, ne constitue pas une amélioration de l'habitat de l'immeuble.
Il en résulte que - ainsi que le fait valoir la société SOFEMO - le contrat de prêt est régi par le droit commun des obligations. Il est indifférent que ce contrat soit de nature civile ou commerciale, dès lors qu'aucune disposition d'ordre public du code de commerce n'est applicable en la matière. »
2/ « À supposer, pour les seuls besoins du raisonnement, que ce contrat ait constitué un acte de commerce ainsi que le soutient la société SOFEMO, cette qualification n'aurait pas pour effet de l'exclure du champ d'application de la législation relative au démarchage à domicile, dès lors :
- que l'article L. 121-22 § 4° du même code n'exclut de son champ d'application que les « ventes (...) de biens ou les prestations de services lorsqu'elles ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation agricole, industrielle, commerciale ou artisanale ou de toute autre profession »,
- que la locution « toute autre profession », concluant une énumération, implique que ne sont exclus du champ d'application de la législation relative au démarchage à domicile que les contrats ayant, pour l'acquéreur, un rapport direct avec son activité professionnelle,
- que les panneaux photovoltaïques objet du contrat, destinés à équiper la maison d'habitation des époux Y., sont sans rapport direct avec leur activité professionnelle, de sorte que le contrat n'est pas exclu du champ d'application de la législation relative au démarchage à domicile, peu important, à cet égard, qu'il constitue ou non un acte de commerce. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE POITIERS
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 7 JANVIER 2014
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 13/01020. ARRÊT n°13. Décision déférée à la Cour : Jugement au fond du 11 février 2013 rendu par le Tribunal de Grande Instance de NIORT.
APPELANTE :
SA GROUPE SOFEMO
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, ayant pour avocat postulant la SCP GALLET ALLERIT, avocat au barreau de POITIERS, ayant pour avocat plaidant la SELARL HAUSSMANN-KAINIC-HASCOET, avocats au barreau de l'ESSONNE
INTIMÉS :
Madame X. épouse Y.
née le [date] à [ville], ayant pour avocat plaidant Maître Patrick ARZEL, avocat au barreau de POITIERS
Monsieur Y.
né le [date] à [ville], ayant pour avocat plaidant Maître Patrick ARZEL , avocat au barreau de POITIERS
Maître BERTRAND JEANNE
SAS PLANET SOLAIRE
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 20 novembre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de : Mme Elisabeth JOUVENET, Président, Monsieur Thierry RALINCOURT, Conseiller, Madame Catherine FAURESSE, Conseiller, qui en ont délibéré
GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,
ARRÊT : - CONTRADICTOIRE, - Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, - Signé par Mme Elisabeth JOUVENET, Président et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu le jugement du Tribunal de Grande Instance de Niort en date du 11 février 2013 qui a :
- prononcé la nullité de la vente conclue le 7 juin 2010 entre la SAS PLANET SOLAIRE et les époux Y.,
- prononcé la nullité du prêt accessoire à cette vente, consenti aux époux Y. par la société SOFEMO,
- condamné la société SOFEMO à rembourser aux époux Y. les sommes versées en exécution du prêt annulé,
- dit que la SAS PLANET SOLAIRE devra restituer à la société SOFEMO le montant de la somme prêtée aux époux Y., dont elle a reçu paiement,
- condamné la SAS PLANET SOLAIRE à reprendre les panneaux photovoltaïques qu'elle avait installés sur la toiture des époux Y. et à remettre la toiture en état, à ses frais, dans les quatre mois suivant la signification du jugement, sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard à l'expiration de ce délai,
- rejeté la demande des époux Y. en dommages et intérêts,
- condamné la SAS PLANET SOLAIRE à payer aux époux Y. une indemnité de 1.500 euros par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- condamné la SAS PLANET SOLAIRE aux dépens,
Vu l'appel interjeté par la société SOFEMO selon déclaration du 15 mars 2013,
Vu les dernières conclusions du 30 octobre 2013 de la SA GROUPE SOFEMO (la société SOFEMO), demandant à la Cour de :
- rejeter les demandes des époux Y.,
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau,
- dire que les époux Y. ont accompli des actes de commerce et que seules les dispositions du Code de Commerce et de droit commun sont applicables à l'exception des dispositions du Code de la Consommation,
- dire en toute hypothèse n'y avoir lieu à nullité des conventions et cela pour les causes sus énoncées,
- dire n'y avoir lieu non plus, quel que soit le cas de figure, à résolution,
- condamner solidairement les époux Y. à payer normalement l'ensemble des échéances du prêt tel que définies par le contrat de prêt et retracé au tableau d'amortissement, et donner acte à la SA GROUPE SOFEMO de ce qu'elle se réserve de prononcer la déchéance du terme et l'exigibilité de l'intégralité des sommes dues,
- pour le cas où la Cour prononcerait la nullité ou la résolution du contrat de financement par suite de la nullité ou de la résolution du contrat de vente consenti par la SAS PLANET SOLAIRE, condamner alors solidairement les époux Y., emprunteurs solidaires, à payer à la SA GROUPE SOFEMO, sous déduction des échéances payées, une somme de 26.000 euros en capital, et avec intérêts de droit à compter de la signification des conclusions initiales de la société SOFEMO devant le tribunal de grande instance,
- dans un pareil cas de figure, condamner solidairement les époux Y. à payer à la SA GROUPE SOFEMO, à titre de dommages et intérêts et pour les causes sus-énoncées en réparation du préjudice subi et de la perte du bénéfice escompté, une somme de 14.014,20 euros,
- en tout cas condamner solidairement les époux Y. à payer à la SA GROUPE SOFEMO une indemnité de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- ordonner la capitalisation annuelle des intérêts dans le cadre de l'anatocisme,
Vu les dernières conclusions du 7 août 2013 de M. & Mme Y., demandant à la Cour de :
- prononcer la nullité du contrat de vente signé le 7 juin 2010 entre eux et la SAS PLANET SOLAIRE,
- prononcer la nullité du prêt accessoire à cette vente que leur a consenti la Société SOFEMO,
- condamner la société SOFEMO à leur rembourser les sommes versées en exécution du prêt annulé,
- dire et juger qu'il appartiendra à la société SOFEMO de procéder à la déclaration de sa créance auprès du Mandataire Liquidateur de la SAS PLANET SOLAIRE pour le montant de la somme prêtée aux époux Y. dont la SAS PLANET SOLAIRE a reçu paiement,
- chiffrer leur créance à l'égard de la liquidation de la SAS PLANET SOLAIRE à une somme qui sera chiffrée en l'état à 20.000 euros au titre de la remise en état de la toiture,
- rejeter l'ensemble des demandes de la société SOFEMO,
- dire et juger que Maître JEANNE, Mandataire-liquidateur de la SAS PLANET SOLAIRE, sera condamné au paiement d'une indemnité de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, outre la somme déjà allouée au titre des frais irrépétibles en première instance.
- dire et juger que la société SOFEMO sera condamnée également au paiement d'une indemnité de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Vu la signification de la déclaration d'appel et des conclusions délivrée les 3 juin et 11 octobre 2013 (par dépôt en l'étude de l'huissier de justice instrumentaire puis par procès-verbal de recherches infructueuses) par la société SOFEMO à la SAS PLANET SOLAIRE qui n'a pas constitué avocat,
Vu les significations de la déclaration d'appel et des conclusions délivrées les 5 septembre 2013 (par dépôt en l'étude de l'huissier de justice instrumentaire) et 10 octobre 2013 (à domicile) par les époux Y. et par la société SOFEMO à Maître JEANNE ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SAS PLANET SOLAIRE, lequel n'a pas constitué avocat ;
Vu l'ordonnance de clôture du 6 novembre 2013 ;
* * *
Selon contrat conclu le 7 juin 2010 par démarchage à domicile, les époux Y. ont fait poser par la SAS PLANET SOLAIRE sur la toiture de leur habitation des panneaux photovoltaïques au prix de 26.000 euros TTC, ledit contrat étant financé par un prêt accessoire à une vente ou une prestation de services consenti par la société SOFEMO aux époux Y. selon offre préalable acceptée sans date, pour un capital de 26.000 euros remboursable en 180 mensualités de 281,84 euros (assurance comprise) au taux proportionnel d'intérêt de 5,54 % l'an avec différé d'amortissement de 9 mois.
Par assignation du 29 novembre 2011 introductive de l'instance dont appel, les époux Y. ont agi à l'encontre de la SAS PLANET SOLAIRE et de la société SOFEMO en annulation des contrats de vente et de crédit affecté, et en remboursement par la société SOFEMO du montant des mensualités versées, outre diverses demandes accessoires.
En cours d'instance d'appel, le Tribunal de Commerce de Bobigny a ouvert la liquidation judiciaire de la SAS PLANET SOLAIRE par jugement du 25 juillet 2013.
Les époux Y. ont adressé le 19 septembre 2013 leur déclaration de créance au liquidateur judiciaire de ladite société.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS de la DÉCISION :
1 - Sur le régime juridique applicable au contrat de prêt :
La société SOFEMO fait valoir que le contrat de prêt ne serait pas régi par le Code de la Consommation, mais par les règles de droit commun du Code Civil et celles du Code de Commerce, dès lors que le prêt serait un acte de commerce par accessoire de l'acte de commerce par nature que serait la vente, par les époux Y., aux organismes habilités, de l'électricité devant être produite par les panneaux photovoltaïques financés par le prêt litigieux.
Le contrat de fourniture et pose de panneaux photovoltaïques conclu entre la SAS PLANET SOLAIRE et les époux Y. est expressément daté du 7 juin 2010 et stipule expressément qu'il est financé au moyen d'un prêt de la société SOFEMO de 26.000 euros remboursable en 180 mensualité au taux nominal d'intérêt de 5,54 % l'an.
Ces éléments font présumer, de manière grave, précise et concordante, que le contrat de prêt affecté, bien que non daté formellement, a été conclu le même jour (7 juin 2010).
Ce contrat de prêt n'est donc pas régi par la législation du crédit à la consommation instituée par la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, applicable aux contrats dont l'offre a été émise après le 1er mai 2011.
Il n'est pas légalement régi par la législation du crédit à la consommation antérieure à ladite loi, puisque le montant du capital prêté (26.000 euros) excède le plafond du domaine d'application de cette législation, fixé à 21.500 euros en vertu des articles L. 311-3 § 2° et 4°c, D. 311-1 et D. 311-2 anciens du même code.
Il n'est pas conventionnellement soumis au régime du crédit à la consommation puisqu'il stipule en tête de la page 3 : « si l'opération de crédit (...) est d'un montant supérieur à 21.500 euros (...), les articles L. 311-1 et suivants du Code de la Consommation ne s'appliquent pas et les dispositions figurant ci-après aux articles 12 (.... reprenant ces dispositions légales) sont inapplicables ».
Par ailleurs, la société SOFEMO dénie l'applicabilité de la législation régissant le crédit immobilier en soutenant que la condition d'application de ce régime, posée par l'article L. 312-2 § 1° c du même code dans sa rédaction antérieure à la loi du 1er juillet 2010 (financement des dépenses relatives à la construction, l'amélioration ou l'entretien des immeubles à usage d'habitation, pour un montant supérieur à 21.500 euros) n'est pas applicable dès lors que l'installation, sur la toiture existante, de panneaux photovoltaïques exclusivement destinés à produire de l'électricité et n'ayant aucune fonction de couverture, ne constitue pas une amélioration de l'habitat de l'immeuble.
Il en résulte que - ainsi que le fait valoir la société SOFEMO - le contrat de prêt est régi par le droit commun des obligations.
Il est indifférent que ce contrat soit de nature civile ou commerciale, dès lors qu'aucune disposition d'ordre public du code de commerce n'est applicable en la matière.
2 - Sur l'action des époux Y. en nullité du contrat de fourniture et pose des panneaux photovoltaïques :
Les époux Y. font valoir que ledit contrat serait nul pour non-respect de la législation sur le démarchage à domicile, au motif que l'envoi du formulaire détachable de renonciation aurait été de nature à faire disparaître plusieurs mentions obligatoires prévues par l'article L. 121-23 du Code de la Consommation (lieu et date de la signature du contrat, signature des deux parties, renseignements relatifs au vendeur).
La société SOFEMO fait valoir en réplique :
- que la législation relative au démarchage à domicile serait inapplicable, aux motifs :
* que le contrat d'achat ne ferait aucune allusion à un tel démarchage à domicile,
* que les contrats de vente et de prêt constitueraient des actes de commerce (le premier par nature et le second par accessoire),
- que la nullité relative du contrat de vente ne pourrait être prononcée dès lors qu'elle aurait été couverte par la volonté des époux Y. de contracter, manifestée par la conclusion du contrat de prêt, leur demande de déblocage des fonds, et le commencement d'exécution de leur obligation de remboursement du prêt.
Le contrat ayant lié la SAS PLANET SOLAIRE et les époux Y. a été conclu par démarchage à domicile, ainsi qu'il résulte du faisceau de présomptions graves, précises et concordantes suivantes :
- le lieu de conclusion du contrat, apposée sous forme manuscrite, est « [ville F.] », commune dans laquelle résidaient les époux Y., étant observé que la SAS PLANET SOLAIRE était établie à [ville B.] (93),
- le contrat fait expressément mention du nom du démarcheur (« D. »), une telle mention n'étant imposée que par la législation sur le démarchage à domicile (article L. 121-23 § 1° du Code de la Consommation),
- l'article 2 des conditions générales du contrat est intitulé « législation applicable au démarchage et à la vente à domicile ».
À supposer, pour les seuls besoins du raisonnement, que ce contrat ait constitué un acte de commerce ainsi que le soutient la société SOFEMO, cette qualification n'aurait pas pour effet de l'exclure du champ d'application de la législation relative au démarchage à domicile, dès lors :
- que l'article L. 121-22 § 4° du même code n'exclut de son champ d'application que les « ventes (...) de biens ou les prestations de services lorsqu'elles ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation agricole, industrielle, commerciale ou artisanale ou de toute autre profession »,
- que la locution « toute autre profession », concluant une énumération, implique que ne sont exclus du champ d'application de la législation relative au démarchage à domicile que les contrats ayant, pour l'acquéreur, un rapport direct avec son activité professionnelle,
- que les panneaux photovoltaïques objet du contrat, destinés à équiper la maison d'habitation des époux Y., sont sans rapport direct avec leur activité professionnelle, de sorte que le contrat n'est pas exclu du champ d'application de la législation relative au démarchage à domicile, peu important, à cet égard, qu'il constitue ou non un acte de commerce.
L'article L. 121-24 alinéa 1er du Code de la Consommation, expressément invoqué par les époux Y., dispose :
Le contrat visé à l'article L. 121-23 doit comprendre un formulaire détachable destiné à faciliter l'exercice de la faculté de renonciation dans les conditions prévues à l'article L. 121-25. Un décret en Conseil d'Etat précisera les mentions devant figurer sur ce formulaire.
L'article R. 121-4 alinéa 1er du même code dispose : le formulaire prévu à l'article L. 121-24 comporte, sur une face, l'adresse exacte et complète à laquelle il doit être envoyé.
L'article R. 121-5 alinéa 1er du même code dispose : le formulaire prévu à l'article L. 121-24 comporte, sur son autre face, les mentions successives ci-après : (...).
L'article R. 121-6 du même code dispose : le vendeur ne peut porter sur le formulaire que les mentions prévues aux articles R. 121-4 et R. 121-5, ainsi que des références d'ordre comptable.
En l'occurrence, l'une des faces du formulaire dont est doté le contrat conclu entre la SAS PLANET SOLAIRE et les époux Y. comporte exclusivement les mentions prescrites par l'article R. 121-5 précité.
En revanche, l'autre face du formulaire comporte non seulement l'adresse de la SAS PLANET SOLAIRE à laquelle le formulaire a vocation à être envoyé, mais également :
- les mentions préimprimées « je reconnais avoir pris connaissance des conditions générales de vente figurant au dos du contrat d'achat dont j'ai reçu un exemplaire. Fait en 3 exemplaires à : (....) le (...). Signature client (précédée de la mention manuscrite « lu et approuvé ») signature du représentant Planet Solaire »,
- les mentions manuscrites des lieu et date de conclusions du contrat,
- et les signatures de l'un des époux Y. et du démarcheur.
Cette face du formulaire est irrégulière en ce qu'elle contrevient aux prescriptions des articles R. 121-4 alinéa 1er et R. 121-6 précités.
En outre, le caractère détachable du formulaire ne satisfait pas aux prescriptions des articles L. 121-23 et L. 121-24 puisque son détachement aurait eu pour effet d'amputer l'exemplaire du contrat en possession des acquéreurs des éléments essentiels que constituent la mention du lieu de conclusion du contrat (déterminant l'applicabilité du régime du démarchage à domicile), la mention de sa date, et la signature de l'acquéreur.
Dans la mesure où l'article L. 121-24 alinéa 1er est expressément rattaché à l'article L. 121-23, la nullité dont ce dernier texte sanctionne les irrégularités affectant le contrat de vente par démarchage à domicile, sanctionne également les irrégularités affectant le bordereau détachable de renonciation, dès lors que la faculté de renonciation de l'acquéreur constitue un élément essentiel du régime du contrat de vente par démarchage à domicile.
La société SOFEMO soutient à tort que la nullité relative du contrat serait couverte par la volonté des époux Y. de contracter puisqu'ils ont conclu le contrat de prêt, réclamé le déblocage des fonds, et commencé à rembourser le prêt.
En droit, l'exécution du contrat entaché de nullité relative ne vaut confirmation et donc couverture de la nullité qu'en cas d'exécution, par la partie concernée, de son engagement en connaissance du vice qui l'affecte.
En l'occurrence, il n'est aucunement démontré que les époux Y. auraient eu connaissance de l'irrégularité affectant le contrat de vente et l'entachant de nullité, lorsqu'ils ont conclu le contrat de prêt avec la société SOFEMO, ou lorsqu'ils ont commencé à le rembourser.
Au vu des éléments du dossier, il est seulement établi qu'ils avaient acquis cette connaissance au jour de la délivrance de l'assignation introductive d'instance (29 novembre 2011), laquelle vise expressément les articles L. 121-21 et suivants du Code de la Consommation.
Il résulte des motifs qui précèdent que le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de vente conclu entre la SAS PLANET SOLAIRE et les époux Y. en raison de l'irrégularité affectant le formulaire détachable de renonciation.
3 - Sur l'action des époux Y. en nullité du contrat de prêt :
Ainsi que l'a retenu avec pertinence le premier Juge sans que la société SOFEMO n'oppose aucune réfutation en cause d'appel, le contrat de vente à crédit conclu entre la SAS PLANET SOLAIRE et les époux Y., et le contrat de prêt affecté au financement de cette vente, conclu entre la société SOFEMO et les époux Y., sont interdépendants, dès lors qu'ils s'inscrivent dans la réalisation d'une même opération.
En raison de cette interdépendance des deux contrats, la nullité du contrat de vente a privé de cause le contrat de prêt affecté, dont la nullité doit dès lors être prononcée, en confirmation du jugement entrepris, non réfuté sur ce point par la société SOFEMO en cause d'appel.
4 - Sur les conséquences de la nullité du contrat de prêt :
La demande initiale des époux Y. en restitution des sommes versées par eux au titre des mensualités de remboursement du prêt n'est pas discutée par la société SOFEMO.
Concernant la demande reconventionnelle de cette dernière en restitution du capital prêté sous déduction, par compensation, du montant des mensualités payées par les emprunteurs, contrairement à ce que soutiennent les époux Y. et conformément à ce que soutient la société SOFEMO, l'annulation du contrat de prêt en conséquence de l'annulation du contrat de vente emporte obligation, pour l'emprunteur, de rembourser au prêteur le capital prêté par ce dernier pour le financement de l'acquisition, peu important que ce capital ait été versé directement au vendeur par le prêteur, en vertu d'une simple modalité de déblocage des fonds prêtés qui est sans incidence sur le rapport de droits et obligations liant le prêteur et l'emprunteur.
Les époux Y. soutiennent, de manière inopérante, que la société SOFEMO aurait commis une faute en ayant débloqué les fonds prêtés sans avoir vérifié que l'installation des panneaux photovoltaïques financée par le prêt affecté était effective et conforme, alors :
- que, d'une part, les époux Y. ne se fondent sur aucune disposition contractuelle qui aurait imposé au prêteur SOFEMO une telle obligation,
- et que, d'autre part, la société SOFEMO justifie de ce que les époux Y. ont eux-mêmes sollicité le déblocage du prêt le 10 septembre 2010 en vertu d'un document intitulé « attestation de livraison - demande de financement » comportant la mention manuscrite suivante des emprunteurs : « je confirme avoir obtenu et accepter sans réserve la livraison des marchandises. Je constate expressément que tous les travaux et prestations qui devaient être effectués à ce titre ont été pleinement réalisés. En conséquence, je demande à SOFEMO de bien vouloir procéder au décaissement de ce crédit et d'en verser le montant directement entre les mains de la société PLANET SOLAIRE » (pièce n° 2 de la société SOFEMO).
La demande reconventionnelle de la société SOFEMO envers les époux Y. en remboursement du capital prêté doit donc être accueillie, en infirmation du jugement entrepris.
5 - Sur les conséquences de la nullité du contrat de vente :
Les époux Y. demandent la fixation de leur créance au passif de la liquidation judiciaire de la SAS PLANET SOLAIRE à une somme de 20.000 euros au titre de la remise en état de la toiture de leur habitation.
En raison de la nullité du contrat de fourniture et pose des panneaux photovoltaïques, les époux Y. sont fondés à réclamer la remise en état initial de la toiture de leur immeuble, et donc la dépose desdits panneaux.
S'agissant d'une obligation de faire qui se résout en dommages et intérêts, ils sont fondés à réclamer le paiement d'une somme correspondant au coût de cette remise en état.
Le contrat a été conclu le 7 juin 2010 au prix de 24.644,54 euros HT ventilé comme suit :
- 21.144,54 euros HT au titre de la fourniture du matériel,
- 3.500 euros HT au titre de la visite technique et de la pose.
Au regard du coût de pose initiale des panneaux, le coût de leur dépose, par une entreprise distincte de celle ayant procédé à la pose, sera apprécié à hauteur de 5.500 euros TTC.
Le coût d'évacuation des panneaux sera estimé à 500 euros TTC.
La créance des époux Y. sera fixée à la somme de 6.000 euros.
Il n'y a pas lieu d'inclure un coût de réparation des infiltrations qui avaient affecté la toiture de l'immeuble à la suite de la pose des panneaux photovoltaïques, dès lors qu'il résulte du rapport d'expertise d'assurance en date du 3 mai 2011 (page 3) produit par les époux Y. (pièce n° 17) que ce désordre a été réparé.
6 - Sur la demande reconventionnelle de la société SOFEMO en dommages et intérêts :
La société SOFEMO réclame aux époux Y. une somme de 14.014,20 euros en indemnisation du préjudice consistant en la perte des intérêts du prêt de 26.000 euros, en raison de la faute commise par les emprunteurs, ayant consisté à avoir demandé le déblocage de ces fonds.
Cette demande est irrecevable, comme nouvelle en cause d'appel, au sens de l'article 564 du Code de Procédure Civile.
En tant que de besoin, elle est non seulement infondée, mais abusive au double motif :
- que, d'une part, la demande par les époux Y. du déblocage des fonds prêtés, qui ne tendait qu'à l'exécution de l'obligation contractuelle du prêteur au sens de l'article 1875 du Code Civil, a été dénuée d'un quelconque caractère fautif, étant observé que la société SOFEMO ne prouve aucunement qu'à la date de cette demande (10 septembre 2010) les époux Y. auraient eu connaissance de la nullité du contrat de vente et, par voie de conséquence, de la nullité du contrat de prêt ;
- et que, d'autre part, il n'existe aucun lien de causalité entre le comportement des époux Y. et la non-perception des intérêts par le prêteur SOFEMO, induite par la nullité du contrat de prêt, puisque cette dernière est provoquée par la nullité du contrat de vente, elle-même imputable à la SAS PLANET SOLAIRE qui a soumis au consentement des époux Y. un contrat irrégulier.
7 - Sur les dépens et les frais de procédure :
Dès lors que la nullité des contrats est imputable à la SAS PLANET SOLAIRE, les dépens d'appel doivent incomber à sa liquidation judiciaire.
Les demandes indemnitaires réciproques formées par la société SOFEMO et les époux Y., sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, doivent être rejetées puisque ces parties ne sont pas condamnées aux dépens d'appel.
La demande indemnitaire formée par les époux Y. à l'encontre de la SAS PLANET SOLAIRE sur le même fondement doit être accueillie dans son principe et son montant.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR
Confirme le jugement du Tribunal de Grande Instance de Niort en date du 11 février 2013, mais seulement en ce qu'il a :
- prononcé la nullité de la vente conclue le 7 juin 2010 entre la SAS PLANET SOLAIRE et les époux Y.,
- prononcé la nullité du prêt accessoire à cette vente, consenti aux époux Y. par la société SOFEMO,
- condamné la SAS PLANET SOLAIRE à payer aux époux Y. une indemnité de 1.500 euros par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- condamné la SAS PLANET SOLAIRE aux dépens.
Infirme ledit jugement, mais seulement en ce qu'il a :
- dit que la SAS PLANET SOLAIRE devra restituer à la société SOFEMO le montant de la somme prêtée aux époux Y., dont elle a reçu paiement,
- condamné la SAS PLANET SOLAIRE à reprendre les panneaux photovoltaïques qu'elle avait installés sur la toiture des époux Y. et à remettre la toiture en état, à ses frais, dans les quatre mois suivant la signification du jugement, sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard à l'expiration de ce délai,
- rejeté la demande des époux Y. en dommages et intérêts,
Statuant à nouveau,
Condamne M. & Mme Y. solidairement à payer à la SA Groupe SOFEMO une somme de 26.000 euros (vingt-six mille euros) sous déduction, par compensation, des échéances de remboursement du prêt versées par les époux Y. à la SA Groupe SOFEMO, outre intérêts au taux légal à compter du 6/11/2012, date de la demande reconventionnelle de la SA Groupe SOFEMO, capitalisables annuellement.
Fixe la créance des époux Y. au passif de la liquidation judiciaire de la SAS PLANET SOLAIRE à la somme de 6.000 euros (six mille euros) à titre chirographaire.
Rejette toutes demandes autres, plus amples ou contraires.
Condamne Maître JEANNE ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SAS PLANET SOLAIRE à payer aux époux Y. une indemnité de 3.000 euros (trois mille euros) par application, en cause d'appel, de l'article 700 du Code de Procédure Civile, outre l'indemnité déjà allouée en première instance sur le même fondement.
Met les dépens d'appel à la charge de la liquidation judiciaire de la SAS PLANET SOLAIRE.
Dit qu'il sera fait application des dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
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