CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA AIX-EN-PROVENCE (2e ch.), 17 décembre 2015

Nature : Décision
Titre : CA AIX-EN-PROVENCE (2e ch.), 17 décembre 2015
Pays : France
Juridiction : Aix-en-Provence (CA), 2e ch.
Demande : 13/07516
Décision : 2015/444
Date : 17/12/2015
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 11/04/2013
Numéro de la décision : 444
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 5369

CA AIX-EN-PROVENCE (2e ch.), 17 décembre 2015 : RG n° 13/07516 ; arrêt n° 2015/444

Publication : Jurica

 

Extrait : « Le Code de la Consommation ne s'applique pas aux produits et services en relation directe avec l'activité professionnelle du Bureau d’Études C. ; même si ce dernier s'occupe d'ingénierie hydraulique et non de matériels de photocopie-copie-imprimante-scanner-fax, ces derniers sont utiles sinon indispensables à cette activité et de ce fait sont dans cette relation directe ; ainsi le contrat du 26 avril 2011 n'est pas soumis audit Code. » 

 

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

DEUXIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 17 DÉCEMBRE 2015

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 13/07516. Arrêt n° 2015/444. ARRÊT AU FOND. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de TOULON en date du 14 mars 2013 enregistré au répertoire général sous le R.G. n° 2011F00472.

 

APPELANTE :

SAS ESPACE COPIEURS IMPRESSIONS,

demeurant [adresse], représentée et plaidant par Maître Olivier AVRAMO, avocat au barreau de TOULON

 

INTIMÉE :

SARL BUREAU D'ÉTUDES C.,

demeurant [adresse], représentée et plaidant par Maître Magali BOTTEMER, avocat au barreau de TOULON

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 12 novembre 2015 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, monsieur FOHLEN, conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de : Madame Christine AUBRY-CAMOIN, Président ; Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller ; Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller, qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Viviane BALLESTER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 décembre 2015

ARRÊT : Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 décembre 2015, Signé par Madame Christine AUBRY-CAMOIN, Président et Madame Viviane BALLESTER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS - PROCÉDURE - DEMANDES :

La SAS ESPACE COPIEURS IMPRESSIONS, présidée par Monsieur X., s'est immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés le 27 mai 2003.

La SARL à associé unique BUREAU D’ÉTUDES C., qui a pour gérant Monsieur C., s'est immatriculée audit Registre le 7 février 2011.

Le 26 avril 2011 un « bon de commande » numéro 3002 pour la location financière de matériels de photocopie-copie-imprimante-scanner-fax a été établi sur un imprimé de la première société ; il a été signé par la seconde société ainsi que par 2 personnes de la société ECI « la direction « sous réserve d'acceptation » » et « le vendeur », et précise notamment :

- « 22 loyers trimestriels de 520 euros » ;

- « reprise ou conditions spéciales : Participation aux indemnités de résiliation de SOPREBUR pour un montant de 2.964 euros 07 HT » ;

- « sous réserve d'acceptation de la direction de ECI ».

Le même jour un « contrat de maintenance » toujours sur un imprimé de la société ECI a été conclu entre celle-ci et le Bureau d’Études C.

Ce dernier a le 30 avril 2011 soit 4 jours plus tard déclaré annuler cette commande sans indiquer de motifs, ce qui a été refusé par la société ECI le 20 mai. Par courrier du 27 mai le Bureau d’Études C. a précisé ne pas s'être engagé à reprendre le reliquat du contrat de maintenance/crédit SOPREBUR.

Le 3 août 2011 la société ECI a fait assigner le Bureau d’Études C. devant le Tribunal de Commerce de TOULON, qui par jugement du 14 mars 2013 a :

* constaté qu'en l'état des réserves non levées [sur le montant du rachat du contrat SOPREBUR] le bon de commande n° 3002 ne peut être considéré comme constituant un contrat régulièrement formé entre la société ECI et le Bureau d’Études C. ;

* débouté la société ECI de toutes ses demandes ;

* dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

* laissé à la charge de la société ECI les entiers dépens.

 

La SAS ESPACE COPIEURS IMPRESSIONS a régulièrement interjeté appel le 11-12 avril 2013. Par conclusions du 24 août 2015 elle soutient notamment que :

- sa directrice générale a ratifié le contrat le jour même de celui-ci 26 avril 2011, puisque le lendemain la société BNP PARIBAS a donné son accord pour financer le matériel du Bureau d’Études C., ce qui démontre que la direction d'elle-même avait accepté le bon de commande avant le 30 ; le Bureau d’Études C. ne peut invoquer une absence d'acceptation par elle-même ;

- elle s'est obligée à participer aux indemnités de résiliation de SOPREBUR pour un montant de 2.964 euros 07 HT, qui est clair et précis ; cet engagement n'a pas été une condition essentielle de celui des parties ; l'éventuelle omission d'informer le Bureau d’Études C. de la nécessité de résilier le contrat de maintenance ne saurait être sanctionnée par le défaut de formation du contrat ;

- le Code de la Consommation est inapplicable vu le rapport direct entre le contrat et l'activité même secondaire du Bureau d’Études C., lequel ne peut fonctionner sans photocopieur-copieur-imprimante-scanner-fax ; l'intéressé ne pouvait donc annuler le 30 avril 2011 sa commande du 26 ;

- tous les prix indiqués sont logiquement HT puisque le Bureau d’Études C. est une société commerciale ;

- le bon de commande valant contrat a été signé au siège du Bureau d’Études C. qui pouvait légitimement croire que la signataire avait qualité pour engager celui-ci, d'autant qu'elle est l'épouse du gérant ; par la suite ce dernier n'a pas remis en cause les pouvoirs apparents de celle-là ;

- le Bureau d’Études C. ne prouve pas le dol commis par elle-même ; elle ne peut être tenue d'une obligation de conseil à l'égard d'un contrat conclu avec un tiers.

L'appelante demande à la Cour, vu les articles 1134 et 1153 alinéa 4 du Code Civil, L. 121-22 ancien du Code de la Consommation, de réformer le jugement et statuant à nouveau de :

- condamner le Bureau d’Études C. à :

* prendre possession des matériels commandés Ie 26 avril 2011 sous astreinte de 250 euros 00 par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir ;

* lui payer la somme de 3.000 euros 00 à titre de dommages et intérêts ;

* lui payer la somme de 2.500 euros 00 en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- débouter le Bureau d’Études C. de l'ensemble de ses demandes.

 

Concluant le 29 mai 2014 la SAS BUREAU D’ÉTUDES C. répond notamment que :

- le bon de commande comporte la signature du vendeur de la société ECI mais pas celle de la direction de celle-ci qui n'est pas engagée d'autant que figure la mention « sous réserve d'acceptation de la direction de ECI » ; aucun contrat n'a pu se former, la société ECI ne démontrant pas avoir accepté avant la rétractation d'elle-même du 30 avril 2011 ; une 3ème personne (la société BNP PARBIAS bailleur) n'a pas non plus donné son consentement ;

- le montant du rachat du contrat SOPREBUR était un élément substantiel de la négociation car intitulé « reprise ou conditions spéciales » ; en omettant sciemment de l'informer qu'elle ne prendrait pas en charge une éventuelle indemnité de résiliation la société ECI a usé de manœuvres et réticences dolosives pour conclure le contrat ; le contrat mentionne la résiliation du crédit-bail mais pas celle du contrat de maintenance ;

- elle a signé le contrat de maintenance avec la société ECI pour des prix unitaires, mais pas pour des forfaits auxquels elle n'a pas donné son accord ;

- à titre subsidiaire elle bénéficie du Code de la Consommation (droit de renoncer à la commande dans les 7 jours), car son activité d'ingénierie hydraulique n'a aucun rapport direct avec l'activité commerciale de la société ECI ; aucun matériel ou logiciel tel qu'un photocopieur ou un ordinateur en rapport direct avec l'activité d'elle-même n'est inclus dans le contrat ;

- le bon de commande a été signé non par son gérant mais par sa salariée épouse de ce dernier qui ne pouvait engager elle-même ; ce document mentionnait que ledit gérant était un homme ;

- le bon de commande n'indique pas le montant total TTC.

L'intimée demande à la Cour, vu les articles L. 121-22 et L. 121-25 du Code de la Consommation, L. 223-18 du Code de Commerce, 1998, 1108, 1109, 1116 et 1153 alinéa 4 du Code Civil, de confirmer le jugement et en conséquence de :

- débouter la société ECI de toutes ses demandes ;

- condamner la même à payer la somme de 1.500 euros 00 au titre de l'artic1e 700 du Code de Procédure Civile.

 

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 octobre 2015.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE L’ARRÊT :

La signature de la direction de la société ECI figure sur l'exemplaire du bon de commande du 26 avril 2011 communiqué par elle, mais pas sur celui communiqué par le Bureau d’Études C. Ce dernier ne démontre pas que cette signature a été apposée avant qu'il ne déclare le 30 suivant annuler sa commande, d'autant que la société BNP PARIBAS LEASE GROUP financeur du matériel donné en location a exprimé son accord dès le 27. C'est donc à tort que le jugement a retenu qu'aucun contrat n'a pu se former à l'égard de la société ECI.

Par application de l'article 1998 du Code Civil le mandant qu'est le Bureau d’Études C. peut être engagé vis-à-vis de la société ECI sur le fondement d'un mandat apparent, si la croyance de celle-ci à l'étendue des pouvoirs de la mandataire Madame C. est légitime car elle supposait que les circonstances autorisaient la société ECI à ne pas vérifier les limites exactes de ces pouvoirs. Madame C. a non seulement signé le bon de commande du 26 avril 2011 au nom de son mari gérant du Bureau d’Études C., mais a de plus apposé le cachet commercial de ce dernier. En outre la première contestation de ce bon formulée le 30 par le Bureau d’Études C. n'a jamais porté sur le défaut de pouvoir de Madame C. pour le signer. Enfin la grande proximité entre un mari et sa femme justifie que la société ECI puisse légitimement croire que la seconde représente parfaitement le premier. C'est par suite à tort que le Bureau d’Études C. prétend ne pas être engagé vis-à-vis de la société ECI.

Le Code de la Consommation ne s'applique pas aux produits et services en relation directe avec l'activité professionnelle du Bureau d’Études C. ; même si ce dernier s'occupe d'ingénierie hydraulique et non de matériels de photocopie-copie-imprimante-scanner-fax, ces derniers sont utiles sinon indispensables à cette activité et de ce fait sont dans cette relation directe ; ainsi le contrat du 26 avril 2011 n'est pas soumis audit Code.

La reprise du contrat SOPREBUR par la société ECI concerne la « Participation aux indemnités de résiliation (...) pour un montant de 2.964 euros 07 HT » ; le Bureau d’Études C. ne communique aucune pièce relative à ce contrat ce qui empêche la Cour de déterminer à quoi correspondent ces indemnités ; et le bon de commande du 26 avril 2011 ne précise pas s'il s'agit du contrat de crédit-bail ou de maintenance. C'est donc à tort que le Tribunal a retenu des réserves non levées sur cette participation.

Les documents contractuels émanant de la société ECI précisent logiquement que sont HT toutes les sommes auxquelles le Bureau d’Études C. s'engage, et la qualité de société commerciale de celui-ci n'oblige nullement à ce que les sommes soient mentionnées TTC.

Le contrat de maintenance du 26 avril 2011 indique :

- pour l'exemplaire de la société ECI des prix, des abonnements et des forfaits ;

- pour celui du Bureau d’Études C. uniquement des prix et des abonnements.

Cette divergence n'est cependant pas suffisamment importante au point de pouvoir invalider le principe de ce contrat.

Le Bureau d’Études C. est contractuellement tenu vis-à-vis de la société ECI à exécuter le bon de commande du 26 avril 2011 ; mais la circonstance que ce dernier remonte aujourd'hui à 56 mois rend totalement infondée la demande de cette société en livraison forcée des matériels concernés, qui par essence se périment vite.

L'absence fautive d'exécution par le Bureau d’Études C. du contrat auquel il est pourtant tenu a causé à la société ECI un préjudice (impossibilité de percevoir les loyers afférents aux matériels) justifiant la somme de 3.000 euros 00 qu'elle réclame à titre de dommages et intérêts.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

DÉCISION :

La Cour, statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire.

Infirme le jugement du 14 mars 2013.

Condamne la SARL BUREAU D’ÉTUDES C. à payer à la SAS ESPACE COPIEURS IMPRESSIONS la somme de 3.000 euros 00 à titre de dommages et intérêts.

Vu l'article 700 du Code de Procédure Civile condamne la SARL BUREAU D’ÉTUDES C. à payer à la SAS ESPACE COPIEURS IMPRESSIONS une indemnité de 2.500 euros 00 au titre des frais irrépétibles.

Rejette toutes autres demandes.

Condamne la SARL BUREAU D’ÉTUDES C. aux entiers dépens de première instance et d'appel, avec application de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

Le GREFFIER.                                Le PRÉSIDENT.