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CA RIOM (3e ch. civ. et com.), 23 mars 2016

Nature : Décision
Titre : CA RIOM (3e ch. civ. et com.), 23 mars 2016
Pays : France
Juridiction : Riom (CA), 3e ch. civ. et com.
Demande : 15/00256
Date : 23/03/2016
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 2/02/2015
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CERCLAB - DOCUMENT N° 5544

CA RIOM (3e ch. civ. et com.), 23 mars 2016 : RG n° 15/00256

Publication : Jurica

 

Extrait : « Il résulte de l'article L. 121-22 du code de la consommation, concernant le démarchage à domicile et applicable au 20 mai 2010 date du jour de la signature du contrat litigieux, que la protection du consommateur ne peut pas s'appliquer aux contrats de fournitures de services qui ont un rapport direct avec l'activité professionnelle exercée par le cocontractant.

En l'espèce, il n'est pas contestable que l'assurance souscrite par M. X. l'était pour son activité professionnelle de menuisier ainsi que le démontre indubitablement le « contrat multirisque professionnelle » d'assurance versé par ses soins (pièce 8) qui précise que le risque professionnel couvert est lié directement à l'activité de menuiserie de l'appelant et que le bien est situé à [ville V.]. Ce document comporte en sus de la signature de l'appelant le tampon « Menuiserie Charpente X. » avec l'indication du numéro de Siret démontrant que l'engagement concerne directement l'entreprise et les besoins de sa couverture en assurance professionnelle.

En outre, le contrat passé avec le cabinet ROUX mentionne que la mission d'évaluation des dommages portera sur les bâtiments, les matériels et les « marchandises », ce dernier élément démontrant, là encore, s'il était besoin, que l'on s'inscrit dans un rapport direct avec l'activité professionnelle. De plus, dans ce contrat, il n'est fait aucune mention du code de la consommation et il convient donc de considérer que les parties n'ont pas entendu se placer sous ce régime juridique. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE RIOM

TROISIÈME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 23 MARS 2016

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 15/00256. Arrêt rendu le vingt-trois mars deux mille seize, Sur APPEL d'un jugement rendu le 1er décembre 2014 par le Tribunal de grande instance d'Aurillac (R.G. n° 13/00557) et d'un jugement en rectification d'erreur matérielle rendu le 11 décembre 2014 (RG n° 14/00823).

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré : M. François RIFFAUD, Président, Mme Anne ROBERT, Conseillère, M. Philippe JUILLARD, Conseiller

En présence de : Mme Carine CESCHIN, Greffière, lors de l'appel des causes et du prononcé

 

ENTRE :

APPELANT :

M. X.

Représentants : Me Jean-Antoine MOINS de la SCP MOINS, avocat au barreau d'AURILLAC - Me Sébastien RAHON, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

 

ET :

INTIMÉ :

SELARL MDP MANDATAIRES JUDICIAIRES ASSOCIS, représentée par Me Patrick-Paul DUBOIS, ès-qualités de mandataire liquidateur du Cabinet ROUX RHONE ALPES AUVERGNE

Représentants : Maître Dominique PEROL, avocat au barreau de LYON (plaidant par Me Florian GROBON) - Maître Sophie LACQUIT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

 

DÉBATS : Après avoir entendu en application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, à l'audience publique du 28 janvier 2016, sans opposition de leur part, les avocats des parties, M. Riffaud et M. Juillard, magistrats chargés du rapport, en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré.

ARRÊT : Prononcé publiquement le 23 mars 2016 par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; Signé par M. François Riffaud, président, et par Mme Carine Ceschin, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Dans la nuit du 18 au 19 mai 2010, M. X., artisan assuré auprès de la MAAF, a été victime d'un incendie dans sa menuiserie située à VEZE (15). Il a signé un contrat le 20 mai 2010 avec le cabinet ROUX afin d'évaluer certains dommages concernant ce sinistre.

Par jugement du tribunal de grande instance d'Aurillac en date du 26 novembre 2012, monsieur X. obtiendra la condamnation de son assureur à lui payer les sommes de 295.000 euros et de 72.000 euros.

Le cabinet ROUX est représenté par son liquidateur, la SELARL MDP MANDATAIRES JUDICIAIRES ASSOCIES à la suite de sa liquidation judiciaire prononcée par le tribunal de commerce de Lyon le 14 juin 2012.

Arguant que le contrat le liant avec le cabinet ROUX ne respecterait pas les obligations d'ordre public du code de la consommation, mais également de sa mauvaise exécution, monsieur X. a saisi le tribunal de grande instance d'Aurillac qui a rendu un premier jugement le 1er décembre 2014, comportant une erreur matérielle corrigée par une nouvelle décision, le 11 décembre 2014, qui l'a débouté de ses demandes et condamné à payer à la SELARL MDP MANDATAIRES JUDICIAIRES ASSOCIES, es qualité de liquidateur du CABINET ROUX, la somme de 20.805.49 euros à titre d'honoraires et celle de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration reçue le 2 février 2015 M. X. a interjeté appel de ce jugement.

* * *

Par conclusions signifiées le 1er décembre 2015, il demande la réformation de la décision et sollicite la nullité du contrat, l'irrecevabilité et le mal fondé des demandes de l'intimé ; subsidiairement, d'ordonner à ce dernier de justifier de ses prestations qui ne pourront lui ouvrir droit qu'au paiement d'une somme de 18.350 euros ; par ailleurs, l'indemniser à hauteur de 30/000 euros en raison des manquements du cabinet ROUX qui a omis de solliciter les pertes d'exploitation qu'il était en droit d'obtenir de son assureur, sauf à ordonner une expertise à cette même fin ; enfin ordonner le paiement par l'intimé d'une somme totale de 41.546.75 euros comprenant le remboursement de la somme de 20.805.49 euros réglée par le concluant après le jugement attaqué et celle de 20.741.26 euros payée par la MAAF, ce, afin d'éviter une double indemnisation en faveur de l'intimé. Il souhaite également que cette condamnation porte intérêts au taux légal à compter du 18 mars 2015 et à tout le moins à compter des présentes écritures, outre le bénéfice de la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et la distraction des dépens en faveur de maître RAHON.

Il fait valoir que son assureur la MAAF a contesté l'estimation établie par le cabinet ROUX et qu'il a été nécessaire de saisir la justice pour obtenir gain de cause, le 26 novembre 2012, démontrant ainsi la mauvaise qualité du travail effectué. Il ajoute que les règles du démarchage doivent s'appliquer et que les manquements au contrat doivent aboutir à son annulation. Il estime qu'il n'existe pas de lien direct entre son activité et le sinistre qui concerne ses biens propres et ceux de son épouse.

Subsidiairement, il estime que l'intimé n'a pas exécuté convenablement le contrat. En effet, aucune rencontre en vue de la reconstruction du bien n'a été organisée, aucune demande d'acompte n'a été sollicitée, ni aucun soutien accordé lors de la procédure judiciaire durant laquelle le montant de l'indemnisation retenu par le cabinet ROUX a été critiqué. Dès lors, les honoraires ne sont pas justifiés, d'autant que ce professionnel a omis de prévoir une indemnisation au titre de la perte d'exploitation et que le premier juge n'a pas statué sur ce moyen aboutissant pourtant à une demande d'un montant de 30.000 euros. Enfin, il conviendra d'appliquer la vétusté retenue par l'assurance pour limiter l'indemnisation à la somme de 18.350 euros, étant précisé que le tribunal a omis de se prononcer sur ce moyen.

S'agissant des comptes entre les parties, en raison du paiement de la somme de 20.805.49 euros dans le cadre de l'exécution provisoire, il en demande la restitution tout comme de la somme versée par son assureur la MAAF à hauteur de 20.741.26 euros. Il précise qu'il convient d'éviter une double indemnisation de l'intimé, tout en reconnaissant que ce dernier a donné instruction le 17 novembre 2015 à son huissier de restituer la somme de 20.805.49 euros.

* * *

La SELARL MDP MANDATAIRES JUDICIAIRES ASSOCIES, es qualité de liquidateur du CABINET ROUX, par conclusions signifiées le 13 janvier 2016, sollicite la confirmation de la décision frappée d'appel, le débouté de toutes les demandes de M. X. et l'octroi d'une somme de 8.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre la distraction des dépens.

Elle soutient que l'appelant est de mauvaise foi et veut bénéficier de l'indemnisation obtenue grâce au cabinet ROUX tout en ne le réglant pas d'honoraires. Elle estime que le code de la consommation n'est pas applicable car le contrat souscrit est en rapport avec l'activité professionnelle de monsieur X. Le code civil doit donc s'appliquer au contrat parfaitement licite et accepté le 4 juillet 2011.

Elle décrit les travaux effectués en exécution du contrat (visite, rencontres avec l'assureur et l'assuré, chiffrage des dommages à hauteur de 370.612 euros pour un résultat d'indemnisation à hauteur de 367.000 euros par voie judiciaire).

Elle affirme qu'il appartient à l'appelant de prouver l'inexécution fautive du concluant. En outre, monsieur X. n'hésite pas à formuler une demande nouvelle, à hauteur de 30.000 euros dans ses conclusions du 16 juin 2014, en sollicitant, plus de 4 ans après le sinistre, un préjudice de perte d'exploitation qui n'a jamais été demandé lors du procès engagé contre son assureur la MAAF qui ne couvrait pas ce risque. Cette demande sera rejetée comme celle visant à limiter les honoraires à la somme de 18.350 euros car la vétusté n'est pas opposable au cabinet ROUX en application de la règle de l'effet relatif des contrats.

Elle conclut ne pas avoir perçu deux fois ses honoraires car elle a donné instruction de rembourser à l'appelant la somme détenue par son huissier (20.805.49 euros) dans le cadre de l'exécution du jugement déféré.

* * *

L'ordonnance de clôture est intervenue le 21 janvier 2016.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur l'application du code de la consommation et des règles du démarchage :

Il résulte de l'article L. 121-22 du code de la consommation, concernant le démarchage à domicile et applicable au 20 mai 2010 date du jour de la signature du contrat litigieux, que la protection du consommateur ne peut pas s'appliquer aux contrats de fournitures de services qui ont un rapport direct avec l'activité professionnelle exercée par le cocontractant.

En l'espèce, il n'est pas contestable que l'assurance souscrite par M. X. l'était pour son activité professionnelle de menuisier ainsi que le démontre indubitablement le « contrat multirisque professionnelle » d'assurance versé par ses soins (pièce 8) qui précise que le risque professionnel couvert est lié directement à l'activité de menuiserie de l'appelant et que le bien est situé à [ville V.]. Ce document comporte en sus de la signature de l'appelant le tampon « Menuiserie Charpente X. » avec l'indication du numéro de Siret démontrant que l'engagement concerne directement l'entreprise et les besoins de sa couverture en assurance professionnelle.

En outre, le contrat passé avec le cabinet ROUX mentionne que la mission d'évaluation des dommages portera sur les bâtiments, les matériels et les « marchandises », ce dernier élément démontrant, là encore, s'il était besoin, que l'on s'inscrit dans un rapport direct avec l'activité professionnelle. De plus, dans ce contrat, il n'est fait aucune mention du code de la consommation et il convient donc de considérer que les parties n'ont pas entendu se placer sous ce régime juridique.

En conséquence, la réglementation applicable au démarchage ne trouve pas à s'appliquer à l'espèce et le jugement sera confirmé de ce chef par substitution des présents motifs.

 

Sur l'exécution du contrat :

Pour contester le paiement des honoraires du cabinet ROUX, l'appelant invoque une mauvaise exécution du contrat qu'il lui appartient de démontrer, étant précisé que M. X. n'a jamais contesté les honoraires de l'intimé, dont la facture est en date du 5 juillet 2011, allant même jusqu'à faire bénéficier ce dernier d'une délégation de paiement, signée le 4 juillet 2011, afin de faire régler cette dette par son assureur.

Il est constant que l'intimé devait procéder, au regard de ses engagements contractuels, à une évaluation des dommages, ce qu'il a normalement réalisé ainsi que le démontre la lettre d'acceptation des dommages signée le 4 juillet 2011 par l'appelant à destination de son assureur la MAAF. Il est tout autant établi qu'une demande d'acompte a été effectuée par l'intimé comme le précise le dernier paragraphe de la pièce 4 de l'appelant en provenance de l'expert de l'assurance (SERI LACROIX) et en date du 13 décembre 2010. Ce document apporte également la preuve qu'une « réunion de pointage » a été effectuée entre les deux experts (de l'assuré et de l'assurance).

En outre, le jugement du tribunal d'Aurillac, en date du 26 novembre 2012, ayant statué sur le procès opposant M. X. à son assurance la MAAF n'évoque pas le moindre manquement contractuel imputable au cabinet ROUX.

De plus, l'indemnisation obtenue par l'appelant (367.000 euros) est tout à fait proche de celle qui avait été réclamée par l'intimé (370.000 euros), démontrant là encore un certain professionnalisme de ce dernier.

Enfin, s'agissant de la perte d'exploitation qu'aurait omis de demander le cabinet ROUX, il suffit d'indiquer que M. X. revendique une telle indemnité mais ne démontre aucunement que son contrat d'assurance couvrait un tel risque alors qu'il lui appartient de rapporter une telle preuve.

En conséquence, il y a lieu de considérer que le cabinet ROUX a convenablement exécuté ses obligations contractuelles à l'égard de M. X. et il s'ensuit que le jugement sera confirmé de chef par substitution des présents motifs.

 

Sur le montant des honoraires du cabinet ROUX :

M. X. conteste les honoraires estimant qu'il convient d'y appliquer un coefficient de vétusté et que seule la somme de 18.350 euros serait à régler à l'intimé. Or, la lecture du contrat permet de constater que l'honoraire prévu ne comporte pas d'application d'un coefficient de vétusté qui ne concerne que les relations contractuelles entre l'assuré, M. X., et l'assureur, la MAAF ; contrat qui n'est pas opposable à l'intimé en application de l'effet relatif des conventions prévu par l'article 1165 du code civil.

En outre, il est indiqué dans le contrat litigieux au terme d'une mention manuscrite 'honoraires limités à 5% hors taxes', que l'honoraire se calcule à partir du montant de l'indemnisation, dont il n'est pas contesté qu'elle a atteint la somme de 367.000 euros devant le tribunal d'Aurillac, sans que cette juridiction ne précise s'il s'agit d'une somme hors taxes ou toutes taxes comprises. Dès lors, le montant hors taxes de l'honoraire pourrait être de 18.350 euros, en retenant pour base de calcul la somme de 367.000 euros, auquel il conviendrait d'ajouter la TVA à 19.6 % pour parvenir à une somme légèrement supérieure à celle finalement sollicitée et acceptée par la cour à hauteur de 20.805.49 euros. En effet, il n'appartient pas à la présente juridiction d'accorder une somme supérieure à celle demandée.

Enfin, il est établi qu'une erreur dans les paiements des honoraires a été commise dans la mesure où les honoraires ont été réglés directement par l'assurance et par le recours à un huissier - pour des montants d'ailleurs légèrement différents, mais cette la situation est en voie de régularisation entre les parties ainsi que cela ressort de leurs dernières conclusions.

Toutefois, afin d'éviter toute difficulté et sans rendre une décision en deniers ou quittances qui est une forme d'arrêt à proscrire, il convient de confirmer le jugement, par substitution de motifs, et de condamner M. X. payer à l'intimé la somme de 20.805.49 euros TTC à titre d'honoraires.

 

Sur le surplus des demandes :

Succombant en appel comme en première instance M. X. devra supporter, outre les dépens auxquels il a été condamné en première instance et l'indemnité mentionnée à l'article 700 du code de procédure civile, la charge des dépens d'appel et une indemnité complémentaire de 3 000 euros.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, mis à la disposition des parties au greffe de la juridiction ;

Confirme le jugement déféré ;

Y ajoutant ;

Condamne M. X. aux dépens d'appel et à payer à la SELARL MDP MANDATAIRES JUDICIAIRES ASSOCIES, es qualité de liquidateur du CABINET ROUX, une indemnité complémentaire de 3.000 euros en application l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le greffier,    Le président,

C. Ceschin     F. Riffaud