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CA LYON (8e ch.), 5 avril 2016

Nature : Décision
Titre : CA LYON (8e ch.), 5 avril 2016
Pays : France
Juridiction : Lyon (CA), 8e ch.
Demande : 14/04096
Date : 5/04/2016
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
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CERCLAB - DOCUMENT N° 5568

CA LYON (8e ch.), 5 avril 2016 : RG n° 14/04096

Publication : Jurica

 

Extrait : « Le principe de cette solidarité tel que fixé par l'article 1200 du code civil est que tous les codébiteurs sont tenus au même objet, à la même dette, quelle que soit la raison de cette dernière, sa cause. Chacun est donc obligé de la totalité de la dette. Sur cette base contractuelle ordinaire dans les contrats de location, la Cour de cassation a eu l'occasion de préciser que la solidarité stipulée entre les deux preneurs d'un local d'habitation ne cesse pas du fait que l'un d'eux donne congé. Par suite, ce preneur reste tenu solidairement des loyers et charges échues après son départ à raison du maintien dans les lieux de l'autre preneur.

La haute juridiction n'a donc pas estimé à cette occasion qu'il y avait lieu de relever le caractère abusif au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation d'une telle clause effectivement imposée par le bailleur et générale pour porter sur l'ensemble des obligations sans limitation dans le temps autre que la durée du bail. Au reste, un tel texte protecteur des consommateurs ne vise qu'à les protéger d'éventuels abus de position dominante de la part de professionnels, ce que ne semble pas être la SCI Z. qui a au moins les apparences d'une SCI familiale.

Le juge du provisoire ne peut donc que constater l'absence de contestation sérieuse sur la validité d'une telle clause et confirmer la décision déférée qui en retient le caractère effectif et contraignant avant que le juge du fond n'ait éventuellement à se prononcer sur ce point. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE LYON

HUITIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 5 AVRIL 2016

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 14/04096. Décision du Tribunal d'Instance de NANTUA, Référé, du 27 mars 2014 : R.G. n° 13-000102.

 

APPELANTE :

Mme X.

Représentée par la SELARL CABINET B., avocat au barreau de l'AIN

 

INTIMÉS :

M. Y.

Représenté par Maître Stéphanie M., avocat au barreau de LYON (toque 678) (bénéficie d'une aide juridictionnelle partielle numéro 2014/XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

SCI Z.

représentée par madame Angèle Z., Représentée par Maître Josette C., avocat au barreau de l’AIN

 

Date de clôture de l'instruction : 2 novembre 2015

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 8 février 2016

Date de mise à disposition : 5 avril 2016

Audience présidée par Claude MORIN, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Charlotte LENOIR, greffier en période de préaffectation.

Composition de la Cour lors du délibéré : - Claude MORIN, président, - Dominique DEFRASNE, conseiller, - Catherine ZAGALA, conseiller

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Claude MORIN, président, et par Marine DELPHIN-POULAT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Selon contrat de bail du 18 juillet 2012 renfermant une clause résolutoire, la SCI Z. a donné en location à madame X. et à monsieur Y., tenus solidairement au paiement des loyers, une maison d'habitation sise [adresse], moyennant un loyer mensuel de 650 euros outre 30 euros de provision sur charges.

Le couple formé par ces deux locataires devait se séparer postérieurement, monsieur Y. restant seul sur place.

Madame X. a donné son congé à la SCI Z. selon courrier recommandé du 13 mars 2013, prenant effet au 15 avril 2013.

Après le départ de madame X., monsieur Y. ne conteste pas avoir cessé de payer les loyers jusqu'à son départ.

Dans ces conditions, la SCI Z. a fait délivrer à chacun des deux locataires le 18 septembre 2013 un commandement de payer les loyers visant la clause résolutoire du bail consenti, pour la somme de 2.567,06 euros au titre des loyers et charges impayés à cette date.

Ce commandement étant resté sans effet, la SCI Z. a donc fait délivrer le 22 novembre 2013 aux époux X. et Y. une assignation devant le juge des référés du tribunal d'instance de NANTUA aux fins de voir constater l'acquisition de la clause résolutoire et ordonner l'expulsion des locataires ainsi que de voir condamner solidairement les locataires au paiement de l'arriéré des loyers compté pour 6.569 euros au 31 janvier 2014.

Seul monsieur Y. comparaissait à l'audience.

Il était alors indiqué que le locataire restant avait quitté les lieux avec remise des clés le 3 février 2014 ce qui entraînait désistement d'instance de la part de la SCI Z. pour tout ce qui concernait la demande de constatation de la résiliation du bail et ses conséquences ordinaires, seule la demande de condamnation provisionnelle et solidaire des deux défendeurs étant maintenue.

Par ordonnance de référé en date du 27 mars 2014, le juge des référés du tribunal d'instance de NANTUA a :

- constaté le désistement des demandes tendant à la résiliation du bail et à l'expulsion des locataires,

- condamné solidairement et à titre provisionnel monsieur Y. et madame X. à payer à la SCI Z. la somme de 6.534,12 euros au titre des loyers et charges impayés au 3 février 2014, loyer prorata temporis du mois de février 2014 inclus, outre intérêts au taux légal à compter du commandement de payer,

- débouté les parties de toute demande plus ample ou contraire,

- condamné in solidum monsieur Y. et madame X. à payer à la SCI Z. la somme de 250 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum monsieur Y. et madame X. aux dépens de l'instance.

Madame X., seule, a interjeté appel à l'encontre de cette décision.

Elle demande à la cour de dire et juger que la clause de solidarité prévue au bail est abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation dans la mesure où elle ne comporterait pas de durée, ne comporterait pas l'objet précis des obligations des locataires, et aurait été imposée par la SCI, bailleur professionnel. Il conviendrait dans ces conditions de la dire non écrite, de constater dès lors qu'elle a donné congé à la SCI Z. selon lettre recommandée avec avis de réception du 13 mars 2013, celui-ci prenant effet le 13 juin 2013, de dire en conséquence qu'elle n'est redevable au titre des loyers impayés que d'une somme de 487 euros et par compensation, après soustraction du dépôt de garantie, uniquement d'une somme de 162 euros envers la SCI Z.

A titre subsidiaire, elle demande à bénéficier des plus larges délais de paiement.

En tout état de cause, elle entend obtenir des deux intimés condamnation à lui payer une somme de 1.000 euros chacun au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et condamnation aux dépens.

A l'opposé, monsieur Y. conclut à la confirmation de la décision déférée et à la condamnation de madame X. à lui payer la somme de 1.000 euros par application des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 et subsidiairement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il est ainsi répliqué que la clause de solidarité a été approuvée par madame X. lors de la signature du bail, que celle-ci ne cesse pas de la volonté d'une seule des parties même lorsqu'un des deux locataires quitte officiellement le logement loué en commun et en informe le bailleur.

Pour ce qui la concerne, la SCI Z. soutient à son tour qu'il convient de confirmer la décision déférée et de condamner l'appelante à lui payer une somme de 1.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens de première instance et d'appel. Elle ne développe aucune argumentation contestant la position de madame X. sur le caractère prétendument abusif de la clause de solidarité, elle s'oppose par contre à l'octroi de tout délai de paiement en faveur de cette partie.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR QUOI LA COUR :

Le juge des référés et la cour à sa suite sont les juges de l'évident et de l'incontestable.

Présentement, le bail liant les trois parties contient bien la clause selon laquelle pour l'exécution de toutes les obligations résultant de ce bail contrat, il y aura solidarité et indivisibilité entre les parties signataires.

Le principe de cette solidarité tel que fixé par l'article 1200 du code civil est que tous les codébiteurs sont tenus au même objet, à la même dette, quelle que soit la raison de cette dernière, sa cause. Chacun est donc obligé de la totalité de la dette.

Sur cette base contractuelle ordinaire dans les contrats de location, la Cour de cassation a eu l'occasion de préciser que la solidarité stipulée entre les deux preneurs d'un local d'habitation ne cesse pas du fait que l'un d'eux donne congé. Par suite, ce preneur reste tenu solidairement des loyers et charges échues après son départ à raison du maintien dans les lieux de l'autre preneur.

La haute juridiction n'a donc pas estimé à cette occasion qu'il y avait lieu de relever le caractère abusif au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation d'une telle clause effectivement imposée par le bailleur et générale pour porter sur l'ensemble des obligations sans limitation dans le temps autre que la durée du bail.

Au reste, un tel texte protecteur des consommateurs ne vise qu'à les protéger d'éventuels abus de position dominante de la part de professionnels, ce que ne semble pas être la SCI Z. qui a au moins les apparences d'une SCI familiale.

Le juge du provisoire ne peut donc que constater l'absence de contestation sérieuse sur la validité d'une telle clause et confirmer la décision déférée qui en retient le caractère effectif et contraignant avant que le juge du fond n'ait éventuellement à se prononcer sur ce point.

A titre subsidiaire, madame X. fait justement valoir qu'elle vit seule avec un salaire voisin du SMIC, qu'elle rembourse un crédit à raison de 215 euros par mois.

Cette partie apparaît être un débiteur malheureux et de bonne foi qui, en équité, est victime du comportement irresponsable de son ancien mari qui, à son départ, a cessé de payer tout loyer pendant 10 mois jusqu'à la restitution du logement à son propriétaire.

Il échet de la faire bénéficier des dispositions de l'article 1244-1 du code civil et donc des plus larges délais de paiement en mettant à sa charge un remboursement à la SCI Z. d'une somme de 100 euros par mois durant 23 mois, le solde étant payable le 24ème mois.

Il échet en équité de limiter à la somme de 250 euros en cause d'appel la condamnation de madame X. sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dans ses rapports avec la SCI Z. Il convient par contre de débouter sur le même fondement monsieur Y. de toute demande de ce chef.

Les dépens d'appel sont à la charge de madame X. qui succombe dans sa demande de réformation de la décision déférée.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Confirme la décision déférée en ce qu'elle condamne au provisoire et à titre provisionnel solidairement monsieur Y. et madame X. à payer à la SCI Z. les dépens de première instance et une somme au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que la somme de 6.534 euros au titre des loyers et charges impayés au 3 février 2014, outre intérêts, pour un logement sis [...],

Ajoutant à cette décision,

Condamne madame X. complémentairement en cause d'appel à payer à la SCI Z. une somme de 250 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute monsieur Y. de sa demande de ce chef,

Faisant application des dispositions de l'article 1244-1 du code civil, accorde à madame X. des délais de paiement,

L'autorise à se libérer de sa dette dans ses rapports avec la SCI Z. par le versement d'une somme de 100 euros durant 23 mois, le solde restant dû étant exigible le 24ème mois,

Dit qu'à défaut de ce faire pour une seule échéance au plus tard le 15 de chaque mois, il y aura déchéance du terme, le solde restant dû devenant immédiatement exigible sans qu'il y ait lieu à mise en demeure préalable,

Dit que le premier versement aura lieu le mois suivant la signification du présent arrêt,

Condamne madame X. aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par ceux des mandataires des parties qui en ont fait la demande.

LE GREFFIER                                LE PRÉSIDENT