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CA VERSAILLES (1re ch. sect. 2), 12 avril 2016

Nature : Décision
Titre : CA VERSAILLES (1re ch. sect. 2), 12 avril 2016
Pays : France
Juridiction : Versailles (CA), 1re ch. sect. 2
Demande : 14/02336
Date : 12/04/2016
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 26/03/2014
Référence bibliographique : Juris-Data n° 2016-007888
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CERCLAB - DOCUMENT N° 5586

CA VERSAILLES (1re ch. sect. 2), 12 avril 2016 : RG n° 14/02336

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « L'article L. 141-4 du code de la consommation issu de la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 stipule que le juge peut soulever d'office toutes les dispositions de ce code. Selon les mentions du jugement, l'organisme prêteur a bien été invité, à l'audience du 14 novembre 2013, à présenter ses observations éventuelles sur la forclusion de l'action du prêteur et sur l'éventuelle déchéance du droit aux intérêts du prêt tirée du caractère abusif et aggravant de la clause figurant dans les conditions générales précisant les conditions du remboursement par anticipation, mais celui-ci a maintenu l'intégralité de ses demandes initiales qu'il a soutenues pour un plus ample exposé de ses moyens. Ce faisant, le tribunal a respecté le principe du contradictoire et la SA CMP BANQUE est déboutée de sa demande sur ce point. »

2/ « Aux termes de l'article L. 311-29 du code de la consommation, « l'emprunteur peut toujours, à son initiative, rembourser par anticipation et sans indemnité, en partie ou en totalité, le crédit qui lui a été consenti ». L'offre de crédit dont s'agit, par l'exigence qu'il impose à l'emprunteur à l'article 4 b) d'informer par un préavis d'un mois signifié par lettre recommandée le prêteur de son intention de rembourser le crédit de façon anticipée, ajoute à l'un des modèles types fixé par le comité de réglementation bancaire, prévu par l'article L. 311-13 du code de la consommation. De plus, il apparaît que le prêteur peut, de son côté, demander à l'emprunteur le remboursement immédiat du capital, en cas de défaillance, sans avoir à respecter de délai, ce qui est constitutif d'un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Il convient donc de considérer cette clause, comme abusive, quand bien même elle ne figurerait pas dans la liste des clauses considérées ou présumées abusives par le Décret n° 2009-302 du 18 mars 2009, applicable à l'espèce.

Cependant le caractère abusif de la clause ne peut entraîner de déchéance du droit aux intérêts, comme il a été jugé en première instance, sur le fondement de l'article L. 311-33 du code de la consommation, qui prévoit que : « […] » Cette clause, qualifiée d'abusive, doit être réputée non écrite, aux termes mêmes de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa version issue de loi du 2008-776 du 24 août 2008, lequel ne prévoit pas d'autre sanction. Cette disposition a d'ailleurs été reprise dans les mêmes termes par la loi n°2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation transposant en France la directive 2011/83 UE du Parlement Européen et du Conseil du 25 octobre 2011 relative au droit des consommateurs, modifiant les directives 93/13/CEE et 1999/44/CE et abrogeant les directives 85/577/CEE et 97/7/CE. Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé, en ce qu'il a reconnu le caractère abusif de la clause, mais infirmé en ce qui concerne la déchéance des intérêts et l'indemnité de résiliation. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

PREMIÈRE CHAMBRE DEUXIÈME SECTION

ARRÊT DU 12 AVRIL 2016

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 14/02336. Code nac : 53B. DÉFAUT. AFFAIRE : Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 16 janvier 2014 par le Tribunal d'Instance de SAINT-GERMAIN EN LAYE : R.G. n° 11-13-000.

LE DOUZE AVRIL DEUX MILLE SEIZE, La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

 

APPELANTE :

SA CMP BANQUE

prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège, Représenté par Maître Bertrand R. de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617, assisté de Maître Philippe B., Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R146

 

INTIMÉE DEFAILLANTE :

Madame X.

née le [date] à [ville]

 

Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 17 novembre 2015 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Serge PORTELLI, président et Mme Claire MORICE, Conseiller chargé du rapport

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : M. Serge PORTELLI, Président, Mme Claire MORICE, Conseiller, Mme Véronique CATRY, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Marie-Pierre QUINCY,

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Le 23 juillet 2009, la société anonyme CRÉDIT MUNICIPAL DE PARIS (CMP) BANQUE a consenti à Mme X. un prêt personnel avec assurance d'un montant de 17.000 euros au taux effectif global (TEG) de 9,14 % l'an et nominal de 8,30 % l'an, remboursable en 108 mensualités d'un montant de 223,97 euros. La société CMP BANQUE a prononcé la déchéance du terme le 10 janvier 2013, suite à des échéances impayées et a mis en demeure Mme X. de lui payer la somme de 16.281,61 euros, puis l'a fait assigner, le 6 mai 2013 en paiement de la somme principale de 17.567,74 euros assortie des intérêts au taux de 8,30 % l'an à compter du 12 avril 2013, à titre de solde restant dû en vertu du prêt, de 300 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée et une somme de 400 euros au titre des frais irrépétibles, outre les entiers dépens. Mme X., bien que régulièrement assignée en l'étude d'huissier, n'a pas comparu et n'a pas été représentée.

Par jugement réputé contradictoire, le tribunal d'instance de Saint Germain en Laye a :

- condamné Mme X. à payer à la SA CMP BANQUE une somme de 11.196,21 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 6 mai 2013, à titre de solde du crédit consenti le 23 juillet 2009,

- rejeté les autres demandes,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamné Mme X. aux entiers dépens.

La SA CMP BANQUE a interjeté appel de cette décision le 26 mars 2014. Par conclusions du 23 juin 2014, elle demande à la Cour de :

- infirmer le jugement rendu le 16 janvier 2014 par le tribunal d'instance de Saint-Germain en Laye,

Statuant à nouveau :

- condamner Mme X. au paiement de la somme de 19.125,76 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 8,30% non comptabilisés depuis le 23 juin 2014, et continuant à courir jusqu'à parfait paiement,

- condamner Mme X. à lui payer la somme de 500 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction pour ceux le concernant au profit de Maître Emmanuel J., AARPI JRF AVOCATS, conformément aux dispositions de l'article 699 du de procédure civile.

Mme X., à qui ont été signifiées les conclusions le 25 juin 2014, ne s'est pas constituée.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 8 octobre 2015.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Le tribunal a jugé que la SA CMP BANQUE n'était en droit de réclamer que la somme de 11.196,21 euros qui représentait le capital emprunté de 17.000 euros sous déduction des remboursements effectués à hauteur de 5.803,73 euros, compte tenu de l'absence de versement postérieurement à la déchéance du terme.

Il a considéré comme abusive la clause, insérée au terme des conditions générales du contrat de prêt litigieux, stipulant au cas de remboursement par anticipation « vous devrez en avertir CMP-BANQUE par lettre recommandée, moyennant un préavis d'un mois et régler au CMP-BANQUE le montant du remboursement à la date d'exigibilité d'une échéance mensuelle », en ce qu'elle apparaissait en contradiction avec les dispositions de l'ancien article L. 311-29 du code de la consommation qui prévoient notamment que l'emprunteur peut toujours, à son initiative, rembourser par anticipation le crédit qui lui a été consenti, sans considération de délai ou préavis. Il a aussi jugé que la déchéance du droit aux intérêts était encourue, cette clause aggravant la situation de l'emprunteur par rapport aux prévisions du modèle-type prévu par l'ancien article R. 311-16 du code de la consommation.

Il a aussi décidé que la SA CMP BANQUE ne pouvait prétendre au paiement de l'indemnité prévue par les articles L. 311-30 et D. 311-11 du code de la consommation.

La SA CMP BANQUE, à l'appui de sa demande d'infirmation de ce jugement, estime que le tribunal d'instance a violé les dispositions de l'article 16 du code de procédure civile, en ne soumettant pas aux débats la question du caractère abusif de la clause litigieuse pour lui permettre d'y répondre et en ne réouvrant pas le débat au cours de son délibéré, s'il découvrait que la régularité de la clause litigieuse lui paraissait critiquable. Elle estime que la clause litigieuse n'est pas abusive, puisqu'elle ne contrarierait en rien les termes de la loi, qui se limitent à interdire la perception d'une indemnité et dans la mesure où le préavis limité à un mois est circonscrit dans le temps et est destiné à lui permettre de s'organiser d'un point de vue technique.

 

SUR LE NON RESPECT DU CONTRADICTOIRE :

L'article L. 141-4 du code de la consommation issu de la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 stipule que le juge peut soulever d'office toutes les dispositions de ce code.

Selon les mentions du jugement, l'organisme prêteur a bien été invité, à l'audience du 14 novembre 2013, à présenter ses observations éventuelles sur la forclusion de l'action du prêteur et sur l'éventuelle déchéance du droit aux intérêts du prêt tirée du caractère abusif et aggravant de la clause figurant dans les conditions générales précisant les conditions du remboursement par anticipation, mais celui-ci a maintenu l'intégralité de ses demandes initiales qu'il a soutenues pour un plus ample exposé de ses moyens.

Ce faisant, le tribunal a respecté le principe du contradictoire et la SA CMP BANQUE est déboutée de sa demande sur ce point.

 

SUR LE CARACTÈRE ABUSIF DE LA CLAUSE LITIGIEUSE :

Aux termes de l'article L. 132-1 du code de la consommation : « sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. » Le Décret 2009-302 du 18 mars 2009 a dressé la liste des clauses considérées comme abusives et celle des clauses présumées abusives.

Aux termes de l'article L. 311-29 du code de la consommation, « l'emprunteur peut toujours, à son initiative, rembourser par anticipation et sans indemnité, en partie ou en totalité, le crédit qui lui a été consenti ».

L'offre de crédit dont s'agit, par l'exigence qu'il impose à l'emprunteur à l'article 4 b) d'informer par un préavis d'un mois signifié par lettre recommandée le prêteur de son intention de rembourser le crédit de façon anticipée, ajoute à l'un des modèles types fixé par le comité de réglementation bancaire, prévu par l'article L. 311-13 du code de la consommation. De plus, il apparaît que le prêteur peut, de son côté, demander à l'emprunteur le remboursement immédiat du capital, en cas de défaillance, sans avoir à respecter de délai, ce qui est constitutif d'un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Il convient donc de considérer cette clause, comme abusive, quand bien même elle ne figurerait pas dans la liste des clauses considérées ou présumées abusives par le Décret n° 2009-302 du 18 mars 2009, applicable à l'espèce.

Cependant le caractère abusif de la clause ne peut entraîner de déchéance du droit aux intérêts, comme il a été jugé en première instance, sur le fondement de l'article L. 311-33 du code de la consommation, qui prévoit que : « Le prêteur qui accorde un crédit sans saisir l'emprunteur d'une offre préalable satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 311-8 à L. 311-13 du code de la consommation est déchu du droit aux intérêts et l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu. Les sommes perçues au titre des intérêts, qui sont productives d'intérêts au taux légal à compter du jour de leur versement, seront restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû. »

Cette clause, qualifiée d'abusive, doit être réputée non écrite, aux termes mêmes de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa version issue de loi du 2008-776 du 24 août 2008, lequel ne prévoit pas d'autre sanction. Cette disposition a d'ailleurs été reprise dans les mêmes termes par la loi n°2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation transposant en France la directive 2011/83 UE du Parlement Européen et du Conseil du 25 octobre 2011 relative au droit des consommateurs, modifiant les directives 93/13/CEE et 1999/44/CE et abrogeant les directives 85/577/CEE et 97/7/CE.

Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé, en ce qu'il a reconnu le caractère abusif de la clause, mais infirmé en ce qui concerne la déchéance des intérêts et l'indemnité de résiliation.

 

SUR LES COMPTES :

Il est produit le contrat, la lettre de déchéance du terme du 10 janvier 2013 avec mise en demeure de payer une somme de 16.281,61 euros, l'historique du compte, le tableau d'amortissement et le décompte de la créance du 12 avril 2013, avec actualisation du 23 juin 2014. La créance est certaine, liquide et exigible.

Au vu des pièces produites, il convient de condamner Mme X. à payer à la SA CMP BANQUE (BANQUE DU CRÉDIT MUNICIPAL DE PARIS) la somme de 19.125,76 euros en principal, arrêtée au 18 décembre 2012, avec intérêts au taux de 8,30 % non comptabilisés à compter du 23 juin 2014 et continuant à courir jusqu'à parfait règlement, comprenant l'indemnité légale à 8 % pour 958,13 euros.

Mme X., qui succombe à l'action, est condamnée aux dépens d'appel.

Il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de la SA CMP BANQUE les frais exposés en cause d'appel, au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et par défaut,

Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qui concerne la déchéance du droit aux intérêts et l'indemnité de résiliation,

Vu le contrat de crédit souscrit le 23 juillet 2009 entre la société anonyme CRÉDIT MUNICIPAL DE PARIS (CMP) BANQUE et Mme X.,

Dit que la clause prévue à l'article 4 b) de ce contrat reconnue abusive est réputée non écrite, aux termes de l'article L. 132-1 du code de la consommation et n'entraîne ni déchéance du droit aux intérêts, ni suppression de l'indemnité de résiliation,

Condamne Mme X. à payer à la SA CMP BANQUE (BANQUE DU CRÉDIT MUNICIPAL DE PARIS) la somme de 19.125,76 euros en principal, arrêtée au 18 décembre 2012, avec intérêts au taux de 8,30 % non comptabilisés à compter du 23 juin 2014 et continuant à courir jusqu'à parfait règlement, comprenant l'indemnité légale à 8 % pour 958,13 euros,

Déboute la SA CMP BANQUE (BANQUE DU CRÉDIT MUNICIPAL DE PARIS) de ses autres demandes,

Condamne Mme X. aux dépens d'appel, dont distraction pour ceux le concernant au profit de Maître Bertrand R., AARPI JRF AVOCATS, conformément aux dispositions de l'article 699 du de procédure civile.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Serge PORTELLI, Président et par Madame QUINCY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,               Le Président,