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CA BORDEAUX (1re ch. civ. sect. A), 21 septembre 2016

Nature : Décision
Titre : CA BORDEAUX (1re ch. civ. sect. A), 21 septembre 2016
Pays : France
Juridiction : Bordeaux (CA), 1re ch. sect. A
Demande : 15/00196
Date : 21/09/2016
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 12/01/2015
Référence bibliographique : Juris-Data n° 2016-024311
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CERCLAB - DOCUMENT N° 5964

CA BORDEAUX (1re ch. civ. sect. A), 21 septembre 2016 : RG n° 15/00196 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Mme Y. et Mme X. ne peuvent valablement soutenir qu'elles auraient été d'office et à leur insu soumises à des dispositions contractuelles échappant au code de la consommation, alors que les conditions générales annexées à l'offre préalable, qui leur sont opposables car revêtues de leur paraphe, stipulent de manière très apparente quels sont les contrats exclus du champ d'application des articles L. 311-1 et suivants du code de la consommation, avec en particulier un paragraphe en caractères gras sur fond grisé I A intitulé Bien financé à usage professionnel-prix d'achat supérieur à 21.500 euros et que le paragraphe II des mêmes conditions générales, tout aussi apparentes et lisibles, détaille les stipulations applicables aux financements soumis au code de la consommation.

Le fait que les locataires n'aient pas entendu signer leur exemplaire de l'offre est sans conséquence sur la validité du contrat dès lors que l'exemplaire produit par le bailleur contient bien les deux signatures des locataires qui étaient donc valablement engagées. »

2/ « Se fondant sur les dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation, les appelantes demandent à la cour de considérer comme abusif et donc non écrit l'article 5 des conditions générales du contrat, relatif à la vente du bien après résiliation du contrat. Toutefois, ainsi que la société intimée le rappelle à juste titre, l'article 5 précité, qui offre aux locataires la possibilité de présenter eux-mêmes un acquéreur, ne peut être appliqué à l'espèce ; s'agissant de dispositions réservées aux contrats entrant dans le champ d'application des articles L. 311-1 et suivants du code de la consommation. »

3/ « C'est en vain que les appelantes concluent à la nullité de cette restitution pour vice du consentement sur le fondement des articles 1109 et 1112 du code civil dès lors que l'accord intervenu sur ce point ne constitue pas une convention susceptible de donner lieu à annulation pour cause d'erreur sur la substance, mais un simple document par lequel le bailleur prend acte de la restitution de son véhicule comme suite à la résiliation effective du contrat de location avec option d'achat, et reçoit dans le même temps mandat pour vendre. »

4/ « Par ailleurs, le bailleur n'était pas contractuellement tenu d'informer le locataire de la possibilité de présenter un tiers en qualité d'acquéreur et aucune perte de chance ne peut être alléguée dès lors qu'aucune offre ferme d'achat n'avait été faite par écrit par un tiers et notamment par Mme B. »

 

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE SECTION A

ARRÊT DU 21 SEPTEMBRE 2016

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 15/00196 (Rédacteur : Jean-Pierre FRANCO, conseiller). Nature de la décision : AU FOND. Décision déférée à la cour : jugement rendu le 18 novembre 2014 par le Tribunal d'Instance de BORDEAUX (RG : 14/002838) suivant déclaration d'appel du 12 janvier 2015.

 

APPELANTES :

X. épouse Y.

née le [date] à [ville], de nationalité Française, demeurant [adresse]

W. épouse X.

née le [date] à [ville], de nationalité Française, demeurant [adresse]

représentées par Maître B. substituant Maître Noëlle L. de la SELARL CABINET L., avocats au barreau de BORDEAUX

 

INTIMÉE :

SAS PRIORIS

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [adresse], représentée par Maître William M. de la SCP M. B. B.-M., avocat au barreau de BORDEAUX

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 912 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 juin 2016 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Jean-Pierre FRANCO, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Catherine FOURNIEL, président, Jean-Pierre FRANCO, conseiller, Catherine BRISSET, conseiller.

Greffier lors des débats : Véronique SAIGE

ARRÊT : - contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Par déclaration en date du 12 janvier 2015, Mme Y. et Mme X. ont relevé appel total du jugement du 18 novembre 2014 par lequel le tribunal d'instance de Bordeaux les a condamnées solidairement à payer à la société Prioris la somme de 8.309,84 euros avec intérêts au taux légal à compter du 18 septembre 2013 ainsi que la somme de un euro au titre de l'indemnité conventionnelle avec intérêts au taux légal à compter du 18 septembre 2013, au titre d'un contrat de location avec option d'achat en date du 7 juin 2010 concernant le financement d'un véhicule automobile.

 

Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées le 24 mai 2016, les appelantes demandent à la cour, au visa des articles L. 111-1, L. 132-1 du code de la consommation, ensemble les articles 1109 et 1112 du Code civil :

- de réformer le jugement,

- de constater les manquements de la société Prioris à son obligation précontractuelle d'information concernant les données financières du contrat et de la condamner en conséquence à leur payer la somme de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts,

- de déclarer abusive est donc réputée non écrite la clause imposant aux preneurs de restituer le véhicule,

- de dire que le consentement à la restitution du véhicule a été vicié au sens des […] articles 1109 et 1112 du Code civil et de constater en conséquence sa nullité,

- de constater qu'elles ont été privées du droit de présentation du véhicule à un tiers acquéreur ce qu'il leur a causé un préjudice qui doit être indemnisé par une indemnité de 4.400 euros,

- subsidiairement de leur accorder un délai de grâce conforme aux dispositions des articles 1244 et suivants du Code civil,

- de condamner la société Prioris à leur payer à chacune une indemnité de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elles font principalement valoir :

- que les mentions figurant à l'offre préalable de location avec option d'achat rendait impossible une parfaite information sur l'ensemble des engagements financiers dès lors que le montant des loyers figurait en pourcentages,

- que la société Prioris ne démontre pas les avoir informées de l'absence de règles protectrices des droits du consommateur,

- qu'elles n'ont pas été informées, lors de la résiliation du contrat par courrier du 18 mars 2013 de la possibilité qui leur était offerte de vendre elles-mêmes le véhicule à l'amiable à meilleur prix dans un délai de 30 jours,

- que leur consentement a été vicié lors de la reprise du véhicule.

 

Par dernières conclusions déposées et notifiées le 27 mai 2016, la société Prioris sollicite la confirmation du jugement et réclame en outre la condamnation solidaire de Mme Y. et de Mme X. à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle conteste tout manquement dans le formalisme de l'offre de financement, qui n'était pas soumise aux dispositions du code de la consommation, et tout abus lors de la restitution du véhicule qui demeurait sa propriété.

Aucun vice du consentement ne peut selon elle être invoqué, au regard des dispositions des articles 1112 et 1115 du code civil.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées pour plus ample exposé des faits de l'espèce, des prétentions et moyens des parties.

 

L'ordonnance de clôture a été rendue le 31 mai 2016.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1 - Sur la validité de l'offre préalable :

Selon offre préalable en date du 10 juin 2010, acceptée le même jour, la société Prioris a consenti à Mme Y. née X. et à Mme X. née W., en qualité de colocataires, une location avec option d'achat portant sur un véhicule d'occasion de marque Mini Cooper, d'un prix de 22.300 euros TTC, vendu par le garage B. Auto.

Le montant des 36 loyers mensuels, du dépôt de garantie et le coût total de la location sont exprimés, de manière lisible, en pourcentage du prix de vente du véhicule.

Elles avaient donc la possibilité de calculer aisément le montant des échéances à leur charge, par une simple application du pourcentage au prix de vente TTC du véhicule mentionné précisément sur l'offre (22.300 euros TTC) qui correspondait exactement au prix de vente du véhicule Mini Cooper par la société B. Automobiles de [ville M.], selon facture du 16 juin 2010, faisant suite à une commande préalable numéro 89XX29.

Les appelantes étaient donc parfaitement en mesure de connaître les caractéristiques essentielles de l'opération de financement, et en particulier les échéances mensuelles, conformément à l'article L. 111-1 du code de la consommation (les autres dispositions de ce même code, spécifiques aux opérations de crédit, étant inapplicables en l'espèce compte tenu du montant du financement - 22.300 euros - qui est supérieur au seuil prévu par les articles L. 311-1 alinéa 2 et D. 311-1 du code de la consommation dans leur rédaction alors en vigueur).

Il sera relevé à cet égard que les échéances appelées (381,80 euros) correspondent bien à 22.300 x 1,712 %.

Mme Y. et Mme X. ne peuvent valablement soutenir qu'elles auraient été d'office et à leur insu soumises à des dispositions contractuelles échappant au code de la consommation, alors que les conditions générales annexées à l'offre préalable, qui leur sont opposables car revêtues de leur paraphe, stipulent de manière très apparente quels sont les contrats exclus du champ d'application des articles L. 311-1 et suivants du code de la consommation, avec en particulier un paragraphe en caractères gras sur fond grisé I A intitulé Bien financé à usage professionnel-prix d'achat supérieur à 21.500 euros et que le paragraphe II des mêmes conditions générales, tout aussi apparentes et lisibles, détaille les stipulations applicables aux financements soumis au code de la consommation.

Le fait que les locataires n'aient pas entendu signer leur exemplaire de l'offre est sans conséquence sur la validité du contrat dès lors que l'exemplaire produit par le bailleur contient bien les deux signatures des locataires qui étaient donc valablement engagées.

L'article I B des conditions générales stipulait expressément que le contrat prenait effet dès sa signature ; le point de départ de la location étant fixé à la date de réception du bien par les locataires et l'article 2 relatif à la possibilité de se rétracter ne concernait que les contrats soumis au code de la consommation. Les appelantes ne peuvent prétendre avoir cru pouvoir se rétracter postérieurement à l'offre.

Elles soutiennent, tout aussi vainement, ne pas avoir signé l'adhésion à l'assurance, ce qui est contraire :

- aux renseignements figurant à la rubrique prestations facultatives souscrites faisant l'objet de signatures (les options Assurance proches et Pertes pécuniaires sont cochées),

- à la phrase figurant dans le cadre acceptation de l'offre, juste au-dessus de la signature des deux locataires : « Nous soussignées Y. Née X. et Mme X. née W. reconnaissons que le contenu de la présente offre permet d'exercer utilement l'ensemble des choix et notamment celui de la souscription ou non d'une assurance et déclarons en conséquence accepter solidairement la présente offre préalable avec assurances.

Après avoir pris connaissance des condition particulière et générale de l'offre et des notices comportant les extraits des conditions générales des assurances et des prestations nous reconnaissons rester en possession d'un exemplaire de cette offre. »

- à l'exemplaire Bailleur de l'adhésion par Mme Y. le 10 juin 2010 des assurances Proches et protection permis, et à l'assurance de biens Perte pécuniaire (pièces 10).

Les appelantes ne démontrent donc nullement que le bailleur ait manqué à une quelconque obligation précontractuelle.

Il convient en conséquence de les débouter de leur demande de dommages-intérêts.

 

2 - Sur les conditions de restitution du véhicule :

Se fondant sur les dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation, les appelantes demandent à la cour de considérer comme abusif et donc non écrit l'article 5 des conditions générales du contrat, relatif à la vente du bien après résiliation du contrat.

Toutefois, ainsi que la société intimée le rappelle à juste titre, l'article 5 précité, qui offre aux locataires la possibilité de présenter eux-mêmes un acquéreur, ne peut être appliqué à l'espèce ; s'agissant de dispositions réservées aux contrats entrant dans le champ d'application des articles L. 311-1 et suivants du code de la consommation.

A la suite de l'interruption dans le paiement des échéances à compter du 25 octobre 2012, puis de rappels et mises en demeure infructueuses adressées les 5 février et 4 mars 2013, avec inscription au FICP le 14 février 2013, et enfin de l'envoi par le bailleur d'une lettre de résiliation irrévocable de la location avec option d'achat, Mme W., agissant tant pour son compte personnel que comme mandataire de sa fille Mme Y. a signé le 27 mars 2013 (et non 7 mars 2007) un accord de restitution amiable du véhicule, en donnant à la société Prioris mandat de vente.

C'est en vain que les appelantes concluent à la nullité de cette restitution pour vice du consentement sur le fondement des articles 1109 et 1112 du code civil dès lors que l'accord intervenu sur ce point ne constitue pas une convention susceptible de donner lieu à annulation pour cause d'erreur sur la substance, mais un simple document par lequel le bailleur prend acte de la restitution de son véhicule comme suite à la résiliation effective du contrat de location avec option d'achat, et reçoit dans le même temps mandat pour vendre.

En toutes hypothèses, et à supposer même que le bailleur ou son mandataire ait effectivement appelé Mme Y. au téléphone sur son lieu de travail pour l'inciter à restituer la voiture, une telle demande ne pourrait être imputée à faute que si elle présentait les caractéristiques d'un abus de droit, ce qui n'est pas démontré en l'espèce.

Il sera précisé, à cet égard, que dans son attestation du 6 avril 2015, non conforme aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile car non manuscrite, Mme B. se borne à relater les affirmations que lui a faites Mme Y., sur l'appel pressant d'un huissier, mais elle n'a pas assisté personnellement à une discussion au cours de laquelle l'huissier en charge du recouvrement aurait refusé le principe d'une vente de la voiture à un tiers.

Par ailleurs, le bailleur n'était pas contractuellement tenu d'informer le locataire de la possibilité de présenter un tiers en qualité d'acquéreur et aucune perte de chance ne peut être alléguée dès lors qu'aucune offre ferme d'achat n'avait été faite par écrit par un tiers et notamment par Mme B.

Enfin, il n'est pas allégué que le prix obtenu lors de la vente aux enchères soit manifestement inférieur à la valeur moyenne d'un véhicule de ce type, mis en circulation en octobre 2009, avec 40.767 km au compteur.

Au vu du décompte de créance, conforme aux stipulations contractuelles, et qui n'a donné lieu dans son détail à aucune contestation, il convient de confirmer le jugement, en ce qu'il a à bon droit condamné solidairement les locataires, conformément à l'article 1134 du code civil à payer au bailleur la somme principale de 8.309,95 euros, outre intérêt au taux légal à compter du 18 septembre 2013 date de mise en demeure, après avoir procédé à une réduction à 1 euros du montant de la clause pénale en l'espèce manifestement excessive, et après avoir déduit les acomptes (330,72 euros) et le prix de vente (10.100 euros).

 

3 - Sur les délais de paiement :

Les appelantes ne justifient ni l'une ni l'autre du montant de leurs revenus et de leurs charges, et n'ont effectué depuis l'assignation aucun versement même minime au titre de la partie de leur dette non contestée, en dépit du délai de fait de deux ans dont elles ont bénéficié depuis l'introduction de l'instance.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de délais sur le fondement de l'article 1244-1 du code civil.

Le caractère infondé de l'appel justifie sur le principe l'application de l'article 700 du code de procédure civile, mais l'équité commande toutefois de réduire à 800 euros la demande formée de ce chef à hauteur d'appel.

Échouant en leur appel, Mme Isabelle Y. et Mme Sylviane X. seront déboutées de leur demande pour frais irrépétibles et supporteront les dépens d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute Mme Y. et Mme X. de l'ensemble de leurs demandes,

Condamne in solidum Mme Y. et Mme X. à payer à la société Prioris la somme globale de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum Mme Y. et Mme X. aux dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jean-Pierre FRANCO, conseiller, en remplacement légitime de Madame Catherine FOURNIEL, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.