6044 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Déséquilibre injustifié - Exécution du contrat - Contraintes d’exécution - Professionnel - Contraintes techniques
- 6041 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Déséquilibre injustifié - Exécution du contrat - Contraintes d’exécution - Professionnel - Contraintes de gestion
- 6042 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Déséquilibre injustifié - Exécution du contrat - Contraintes d’exécution - Professionnel - Possibilité de l’exécution
- 6043 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Déséquilibre injustifié - Exécution du contrat - Contraintes d’exécution - Professionnel - Contraintes juridiques
- 6108 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Modification du contenu du contrat - Modification unilatérale - Droit antérieur au décret du 18 mars 2009 - Caractéristiques du bien ou du service - Principe
- 6272 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Internet - Fourniture d’accès (5) - Obligations du fournisseur
- 6185 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Indices - Déséquilibre injustifié - Contraintes d’exécution
- 6009 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Principes généraux - Appréciation globale
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6044 (22 décembre 2020)
PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION
NOTION DE CLAUSE ABUSIVE - APPRÉCIATION DU DÉSÉQUILIBRE SIGNIFICATIF
DÉSÉQUILIBRE INJUSTIFIÉ - EXÉCUTION DU CONTRAT
CONTRAINTES D’EXÉCUTION - PROFESSIONNEL - CONTRAINTES MATÉRIELLES ET TECHNIQUES
Présentation. Compte tenu de l’environnement hautement technologique des sociétés modernes, les aspects techniques de l’exécution des obligations du professionnel ne peuvent rester sans répercussions sur le contenu juridique du contrat. Les décisions recensées illustrent fréquemment cette réalité.
V., par exemple, pour une décision résumant l’ensemble du contexte dans lequel s’inscrit l’examen d’une clause d’un contrat d’accès à l’internet : appréciation « en considération des dispositions légales, de l’appréciation donnée par la Commission des clauses abusives sur des clauses similaires mais non identiques, du contexte technique dans lequel s’inscrit l’activité d’un fournisseur d’accès à l’Internet et de l’économie globale du contrat en raisonnant, pour des besoins de sécurité juridique, sur un modèle abstrait de consommateur moyen ». TGI Nanterre (6e ch.), 3 mars 2006 : RG n° 04/03016 ; site CCA ; Cerclab n° 3181 ; Juris-Data n° 2006-308052.
Les décisions recensées montrent aussi que cet argument est strictement contrôlé par les juges.
A. ILLUSTRATIONS DE CLAUSES PRENANT EN COMPTE LES CONTRAINTES TECHNIQUES PESANT SUR LE PROFESSIONNEL
Nature de l’obligation. Sur la prise en compte des contraintes techniques dans l’appréciation de la nature de l’obligation d’un fournisseur d’accès internet, V. Cerclab n° 6272.
V. pour l’adaptation nécessaire des règles de preuve aux modalités particulières d’exécution du contrat : en choisissant de faire un dépôt dans un automate, le client a accepté un processus qui exclut tout pointage contradictoire entre lui et la banque ; si cette clause peut apparaître abusive, dans la mesure où la banque fait seule le décompte des sommes effectivement versées et où le déséquilibre existe entre les parties au contrat, il n’en demeure pas moins qu’il ne peut pas être procédé autrement, dès lors que le client a choisi ce mode de dépôt de ses espèces. CA Paris (15e ch. B), 31 janvier 2008 : RG n° 06/20021 ; Cerclab n° 1178 ; Juris-Data n° 2008-358585, sur appel de T. com. Bobigny (8e ch.), 18 février 2005 : RG n° 03/01720 ; jugt n° 2005/00264 ; Cerclab n° 1341 (problème non examiné sous l’angle clause abusives ; condition non potestative).
Modification des caractéristiques du bien ou du service fournis. L’influence des contraintes techniques a été prise en compte dès le décret n° 78-464 du 24 mars 1978, dont l’art. 3 al. 2, devenu l’ancien art. R. 132-2 C. consom. lors de la codification de la partie réglementaire du Code de la consommation (décret n° 97-298 du 27 mars 1997), disposait que « toutefois, il peut être stipulé que le professionnel peut apporter des modifications liées à l’évolution technique, à condition qu’il n’en résulte ni augmentation des prix ni altération de qualité et que la clause réserve au non-professionnel ou consommateur la possibilité de mentionner les caractéristiques auxquelles il subordonne son engagement. » Le texte présuppose que l’offre du professionnel s’inscrit dans un progrès technique permanent, qui est, a priori, bénéfique pour le consommateur. Il a été aussi appliqué dans les hypothèses où la modification des caractéristiques techniques est imposée par l’évolution de la réglementation (V. plus généralement Cerclab n° 6108).
Comp. pour une hypothèse où l’argument est jugé artificiel : est « potestative, dépourvue de cause juste et abusive » la clause d’un contrat de chantier paysagiste qui autorise le professionnel à remplacer les plants prévus par d’autres, en fonction des disponibilités, en ce qu’elle confère au vendeur professionnel une prérogative dépendant de sa seule volonté qui ne trouve sa contrepartie dans aucun avantage consenti à l'acheteur consommateur, alors que le professionnel sait parfaitement, en fonction de la date du devis et du calendrier des travaux prévus, quels plants seront disponibles en fonction de la saison considérée ; disposant de plusieurs fournisseurs, il lui appartient de s'organiser et de leur passer commande en temps utile pour satisfaire ses clients. CA Montpellier (1re ch. sect. B), 8 juin 2016 : RG n° 14/02183 ; Cerclab n° 5648 (selon l’arrêt, il est évident que la clause permet de substituer des plants moins onéreux à ceux prévus, sous couvert d'une pseudo indisponibilité), sur appel de TGI Montpellier, 13 janvier 2014 : RG n° 11/02936 ; Dnd.
Date de prise d’effet du contrat. V. par exemple : CA Paris (pôle 5 ch. 11), 30 mars 2018 : RG n° 15/08688 ; Cerclab n° 7532 (téléphonie mobile ; art. 4.2 ; il est légitime que l'opérateur dispose d'un délai pour traiter les demandes d'abonnement envoyées par voie postale, délai qui disparaît en cas de souscription dans les points de vente où l'instruction de la demande est immédiate ; N.B. le contrat prévoyait un délai de deux jours), confirmant TGI Paris, 24 février 2015 : RG n° 13/01136 ; Dnd - TGI Paris (ch. 1-4 soc.), 30 octobre 2018 : RG n° 13/03227 ; Cerclab n° 8256 (fourniture de gaz et d’électricité ; IV-B-1 - art. 3.1 ; IV-B-2 - art. 4.2 ; IV-B-3 - art. 4.2 ; clause pouvant prévoir une date de mise en service dans la première facture, sans contrevenir à l’art. L. 224-7-1° C. consom., compte tenu des contraintes techniques de mise en service et de la mention dans le contrat d’un délai prévisionnel de 5 ou 10 jours selon les cas, la mention d’un délai approximatif de 21 jours en cas de changement de fournisseur n’étant pas critiquable dès lors qu’il s’agit d’un délai maximal).
Exécution dépendant d’un tiers. N’est pas abusive la clause retardant la prise d’effet du contrat avec dégroupage total à la date du raccordement, qui ne constitue pas une cause exonératoire de responsabilité. Cass. civ. 1re, 31 mars 2011 : pourvoi n° 10-11831 ; arrêt n° 365 ; Cerclab n° 2849 (N.B. le terme de « cause » exonératoire est conforme à la version mise en ligne sur Legifrance, alors que le terme de « clause » serait sans doute plus approprié), rejetant le pourvoi contre Jur. proxim. Marseille, 12 janvier 2009 : RG n° 91-08-000971 ; Cerclab n° 562 (problème non examiné ; exécution correcte du contrat, le fournisseur n’ayant facturé les services que lorsque la ligne était opérationnelle le 2 août 2007, alors que le contrat avait été conclu… le 26 mars 2007 ; contrat avec dégroupage total ayant été retardé par le refus de France Télécom de mettre en place les opérations de câblage, situation apparemment exceptionnelle).
V. pour la nécessité de transmettre des informations personnelles du consommateur pour la réalisation de sa carte de paiement : la clause, qui indique de manière précise que le client peut s'opposer à la diffusion des informations ne crée pas de disproportion, dès lors que les précisions qui sont apportées, quant à l'obligation ou non de motiver l'opposition sont suffisantes et que l'obligation de motivation qui concerne « les traitements automatisés ou non afin de permettre la fabrication de la carte, la gestion de son fonctionnement et d'assurer la sécurité des paiements » n'est pas abusive, puisqu’il est en effet indispensable au traitement des cartes bancaires que des informations soient communiquées aux organismes concernés, ce qui justifie que l'opposition à cette divulgation ait à être motivée. CA Paris (15e ch. B), 3 avril 2008 : RG n° 06/18279 ; Cerclab n° 2602 ; Juris-Data n° 2008-365292.
V. pour l’appréciation du délai d’exécution d’ordres sur des instruments financiers : CA Aix-en-Provence (8e ch. C), 15 novembre 2018 : RG n° 17/04057 ; arrêt n° 2018/407 ; Cerclab n° 7731 (portefeuille d'instruments financiers et contrats d'assurance-vie, investis en OPCVM ; absence de preuve d’un déséquilibre significatif dans la clause prévoyant l'aménagement d'un délai d'exécution maximal des ordres de 10 jours, alors que ces ordres ne sont pas passés sur des marchés offrant une cotation en continu, mais portent sur des supports ne présentant pas le même degré de liquidité ; prestataire ne tirant au surplus aucun avantage ou désavantage dans le délai d’exécution), sur renvoi de Cass. 14 avril 2015 : pourvoi n°14-11.396 ; Dnd, cassant CA Aix-en-Provence (8e ch. C), 17 octobre 2013 : Dnd, sur appel TGI Marseille, 14 décembre 2010 : Dnd.
Dès lors que la clause ne concerne que la garantie optionnelle d’assistance, qui permet à l’assuré d’obtenir en urgence une réparation, il est justifié que cette garantie soit assortie de l’obligation pour l’assuré de confier les réparations au prestataire agréé par l’assureur, qui doit, pour fournir la prestation, disposer de la disponibilité et de la compétence suffisante ; il est normal que l’assureur le contrôle, puisque c’est lui qui sera, aux termes du contrat, tenu du prix des réparations. CA Versailles (3e ch.), 17 janvier 2019 : RG n° 16/03662 ; Cerclab n° 8166 (arrêt notant aussi que l’assuré a le choix entre une garantie de base lui permettant de s’adresser au professionnel de son choix et de solliciter le remboursement du prix de cette prestation, et une garantie facultative, lui permettant d’obtenir une prestation par un professionnel agréé par l’assureur, et prise en charge par cette dernière), confirmant TGI Nanterre (7e ch.), 10 septembre 2015 : RG n° 14/08226 ; Dnd.
Entretiens et réparations. Dès lors que l’exécution du contrat suppose l’utilisation de biens, meubles ou immeubles, susceptibles de se détériorer, de tomber en panne ou d’être endommagés par un événement extérieur, et que par ailleurs, le professionnel est tenu d’assurer la continuité de la prestation promise, il est légitime qu’il insère des clauses précisant les modalités de son invervention et les inconvénients qui peuvent en résulter pour le consommateur. Les illustrations de ces situations, décrites à l’occasion de l’examen des contrats concernés, sont très nombreuses : entretien et réparation d’un réseau d’approvisionnement en eau, gaz ou électricité, entretien et réparation d’un immeuble, mise à niveau et réparation de réseaux informatiques, etc.
Pour une illustration : n’est pas abusive la clause réservant au fournisseur le droit d’interrompre de façon exceptionnelle le service, pour effectuer des travaux de maintenance et/ou d’amélioration de son réseau, après avoir prévenu les abonnés sur son site au moins 24 heures à l’avance, mais sans indemnisation, dès lors qu’une telle clause, selon le jugement, semble répondre davantage à l’exécution de ses obligations par le fournisseur lequel, dans un régime de libre concurrence, a tout intérêt à réduire au minimum les désagréments subis par le consommateur dont il rejoint nécessairement les préoccupations. TGI Nanterre (6e ch.), 3 mars 2006 : RG n° 04/03016 ; site CCA ; Cerclab n° 3181 ; Juris-Data n° 2006-308052 (clause modifiée pour mettre en place une notification aux abonnés et confirmer le caractère exceptionnel de cette faculté).
Contraintes dans la gestion globale d’un réseau d’électricité. Admission de la clause stipulant que « les heures réelles de début et de fin des périodes tarifaires peuvent s’écarter de quelques minutes des horaires indiqués sur les factures », dès lors que le distributeur justifie que ce décalage de quelques minutes, en l’occurrence minime et pouvant se produire lors des basculements entre les heures creuses et les heures pleines, ne constitue qu’une incidence strictement technique de cette option tarifaire pouvant prévaloir sur les dispositions strictes du code de la consommation en raison des nécessités d’intérêt général en rapport avec les conditions d’exploitation de ce service de production et de distribution d’électricité (signal de basculement se traduisant par un appel de puissance qu’il est important de lisser pour des raisons de sécurité et d’optimisation économique). TGI Paris (ch. 1-4 soc.), 30 octobre 2018 : RG n° 13/03227 ; Cerclab n° 8256 (IV-B-1 – art. 4.1 ; jugement estimant que cette clause ne procède en définitive que d’un souci d’information plus exhaustive et transparente vis-à-vis du consommateur ; V. aussi IV-B-2 - art. 7.1 pour une autre clause similaire, avec des motifs – peu clairs – selon lesquels, dès lors que les sociétés EDF ou ENEDIS ne spécifient pas que le consommateur ne supportera pas les conséquences financières de ce décalage de périodes tarifaires, cette clause apparaît suffisamment explicite sur cette absence d’imputation financière vis-à-vis du consommateur dans ce cas de figure).
B. UTILISATION INVERSÉE DE L’ARGUMENT
Obligation du professionnel de prendre en compte les contraintes techniques. Les décisions recensées illustrent une utilisation inversée de l’indice : le professionnel ne peut faire abstraction des contraintes techniques inévitables.
V. par exemple, admettant le caractère abusif des clauses niant cette réalité : CA Nîmes (1re ch. civ. A), 24 octobre 2013 : RG n° 12/05281 ; Cerclab n° 4487 (contrat de vente et d’installation de cuisine ; prise en compte de la nécessité de la prise de mesures précises et d’une étude technique préalable pour déclarer abusives les clauses prévoyant un engagement ferme et définitif du consommateur, sans faculté de rétractation, même en cas de modification des travaux impliquant une modification du prix), sur appel de TGI Alès, 22 août 2012 : Dnd.
Obligation du professionnel de prendre en compte les améliorations techniques. Pour une utilisation directe de l’argument : la Commission des clauses abusives recommande que soient éliminées des contrats d’abonnement autoroutier les clauses permettant, en cas de perte ou de vol de la carte d’abonnement, de prévoir un délai d’invalidation excédant trois jours à compter de la mise en opposition effectuée par lettre simple, télex ou, sous réserve de confirmation écrite, télécopie. Recomm. 95-01/4° : Cerclab n° 2163 (l’exposé des motifs précise que les possibilités techniques permettent une paralysie rapide de la carte). § La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet d’imposer l’envoi de pièces originales afin de valider le contrat. Recomm. n° 99-02/2 : Cerclab n° 2193 (téléphones portables ; l’original n’est pas plus probant qu’une copie certifiée). § La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de considérer que l’absence de contestation d’une facture, après l’écoulement d’un délai déterminé suivant son envoi, vaut acceptation de nouvelles conditions du contrat. Recomm. n° 99-02/17 : Cerclab n° 2193 (téléphones portables ; clause évoquée prévoyant un délai de 15 jours ; clauses de consentement implicite abusives, supprimant la nécessité d’un engagement exprès et préalable du consommateur, alors que des moyens de confirmation rapide sont possibles).
V. pour les techniques de vol de voiture : est abusive la clause qui, par sa définition de l'effraction (forcement de la direction, détérioration des contacts électriques permettant la mise en route de tout système de protection antivol en phase de fonctionnement), permet à l'assureur de limiter à des indices prédéterminés la preuve du sinistre, alors qu'en application de l’anc. art. 1315 C. civ., cette preuve est libre, et que par ailleurs, un tel mode de preuve, qui ne correspond plus à la réalité des moyens électroniques actuels (en vente libre sur Internet) mis en œuvre pour démarrer la majeure partie des véhicules sans jamais devoir la forcer, vide ainsi la garantie de sa substance. CA Paris (pôle 2 ch. 5), 23 novembre 2020 : RG n° 19/13559 ; Cerclab n° 8665, sur appel de TGI Créteil, 9 mai 2019 : RG n° 18/09880 ; Dnd.
Pour une utilisation indirecte de l’argument : compte tenu de l’évolution technologique constante que connaît le monde de la copie, la clause d’un contrat de maintenance d’un photocopieur prévoyant une durée de cinq ans pendant laquelle le consommateur, qui a acheté la matériel, ne peut sous aucun prétexte mettre un terme au contrat, présente un caractère abusif de même que celle empêchant toute résiliation même en cas de vente ou de destruction du matériel. TI La Roche-sur-Yon, 7 octobre 1999 : RG n° 11-99-000258 ; Cerclab n° 993, confirmé sans cet argument par CA Poitiers (1re ch. civ.), 4 décembre 2002 : RG n° 99/03645 ; arrêt n° 654 ; Legifrance ; Cerclab n° 599 (arrêt visant l’impossibilité de résiliation en cas de vente ou de destruction et l’absence de réciprocité).
C. LIMITES DE L’ARGUMENT
Présentation. Comme pour les contraintes juridiques pesant sur le professionnel (Cerclab n° 6043), la réalité de l’existence de contraintes techniques et la légitimité de leur prise en compte n’autorise pas pour autant le professionnel à en tirer des conséquences qui lui soient exagérément favorables.
Impossibilité d’invoquer des contraintes pratiques contre une règle légale. Pour une illustration, sous l’angle des clauses illicites : l'art. R. 231-8-II CCH ne distinguant pas entre les trois cas de remboursement qu'il prévoit (absence de réalisation des conditions, non-respect de la date d’ouverture du chantier, faculté de rétractation), est illicite la clause qui exclut le second cas, le constructeur ne pouvant légitimement procéder à une distinction en raison de considérations pratiques. CA Paris (pôle 4 ch. 6), 11 mars 2016 : RG n° 15/01832 ; Cerclab n° 5562 ; Juris-Data n° 2016-005111 (arg. : le contrat de construction est gouverné par des considérations de forme, dans une optique de protection du maître d'ouvrage ; N.B. le troisième cas n’est pas mentionné dans la même clause, mais dans une autre, ce que la cour ne juge pas reprochable), sur appel de TGI Paris, 18 novembre 2014 : RG n° 13/14352 ; Dnd.
Absence de caractère insurmontable de la contrainte technique. V. par exemple : la Commission des clauses abusives recommande d’éliminer les clauses obligeant le consommateur, sous peine de perdre le bénéfice de la garantie, à faire réparer l’objet défectueux chez le fabricant ou chez un réparateur agréé, lorsqu’une telle clause n’est justifiée ni par la sécurité des consommateurs, ni par la technicité de l’objet, ou lorsque le réseau du réparateur n’est pas accessible dans des conditions normales. Recomm. 79-01/9° (clauses abusives contraires à l’art. 35 de la loi du 10 janvier 1978 et interdites par l’art. 2 du décret de 1978). § Pour d’autres illustrations, V. aussi : CA Montpellier (1re ch. sect. B), 8 juin 2016 : RG n° 14/02183 ; Cerclab n° 5648 ; précité A (plants choisis par un paysagiste) - CA Lyon (8e ch.), 24 avril 2018 : RG n° 16/05995 ; Cerclab n° 7543 ; Juris-Data n° 2018-006912 (construction de maison individuelle avec plan ; clause n° 6 ; clause initiale abusive ne prévoyant pas de délai pour déposer le permis et clause modifiée également contestée, l’arrêt estimant que le délai de six semaines dans la clause modifiée par les constructeurs est trop long dans la mesure où, les plans étant déjà établis à la date de signature du contrat, un délai de quinze jours apparait suffisant).
Cette hypothèse a notamment été examinée dans les contrats de vente de voiture, pour justifier, sous peine de perdre la garantie contractuelle, que le consommateur s’adresse exclusivement au constructeur et à son réseau, pour l’entretien, les réparations et la fourniture de pièces détachées. L’invocation de la technicité des interventions et des exigences de sécurité n’a pas été admise lorsqu’elle servait à justifier une exclusivité générale. V. par exemple : Cass. civ. 1re, 14 novembre 2006 : pourvoi n° 04-15646 ; arrêt n° 1433 ; Bull. civ. I, n° 488 ; Cerclab n° 2801 ; D. 2006. AJ 2980, obs. Rondey ; Contr. conc. consom. 2007, chron. 2, G. Raymond ; RLDC 2007/36, n° 2432, note Sauphanor-Brouillaud ; RDC 2007. 337, obs. Fenouillet (vente de voiture ; prestations banales, ne requérant pas une technicité particulière et ne mettant pas en cause la sécurité, ce qui ne justifie pas l’intervention exclusive du réseau du constructeur) - Cass. civ. 1re, 14 novembre 2006 : pourvoi n° 04-17578 ; arrêt n° 1435 ; Bull. civ. I, n° 489 (arrêt n° 3) ; Cerclab n° 2803 ; D. 2006. AJ 2980, obs. Rondey ; Contr. conc. consom. 2007, chron. 2, G. Raymond ; RLDC 2007/36, n° 2432, note Sauphanor-Brouillaud ; RDC 2007. 337, obs. Fenouillet (vente de voiture ; idem) - TGI Grenoble (6e ch.), 31 janvier 2002 : RG n° 2000/02123 ; jugt n° 26 ; Site CCA ; Cerclab n° 3166 ; Juris-Data n° 167015 (la technicité ou la sécurité du consommateur, pour des produits aussi commun que des véhicules automobiles, ne permet pas au constructeur ou à ses concessionnaires de dire qu'ils seraient les seuls sur le marché à pouvoir assurer l'entretien, les révisions ou les réparations), confirmé par CA Grenoble (1re ch. civ.), 1er juin 2004 : RG n° 02/01499 ; arrêt n° 333 ; Cerclab n° 7049 - CA Grenoble (1re ch. civ.), 7 novembre 2005 : RG n° 03/02668 ; arrêt n° 688 ; Cerclab n° 3131 ; Juris-Data n° 308385 (vente de voiture ; clause imposant l’entretien dans le réseau pour des prestations qui peuvent être banales, ne requérant pas une technicité particulière, ou ne mettant pas en cause la sécurité), infirmant TGI Grenoble, 3 juillet 2003 : RG n° 2002/01872 ; Dnd. § Comp. admettant l’argument : CA Grenoble (1re ch. civ.), 1er juin 2004 : RG n° 02/01499 ; arrêt n° 333 ; Cerclab n° 7049 (la clause excluant de la garantie contractuelle anti-corrosion les dégâts résultant de travaux réalisés en dehors du réseau qui « se justifie par la sécurité des consommateurs et par la technicité de l'objet, n’est pas contraire à la recommandation nº 79-02 de la Commission des clauses abusives du 27 juin 1978 »).
V. aussi : CA Paris (pôle 5 ch. 11), 12 octobre 2018 : RG n° 16/08227 ; Cerclab n° 8160 (accès internet ; caractère abusif de la clause qui autorise l’opérateur à procéder à une compensation entre les sommes restant dues par l'abonné et le dépôt de garantie « sauf contestations sérieuses », dès lors qu’elle fait référence en termes généraux à la notion de « contestation sérieuse » sans se référer à celles définie par le code de procédure civile ou la jurisprudence), confirmant TGI Paris, 23 février 2016 : RG n° 13/10357 ; Dnd.
Définition insuffisamment restrictive de la contrainte technique. V. par exemple : la Commission des clauses abusives recommande, dans les contrats de location d’emplacement de camping, l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de permettre au professionnel de délivrer au consommateur un emplacement autre que celui qui était prévu au contrat, pour effectuer des travaux ou emménagements, sans réserver cette possibilité aux travaux nécessités par l’urgence manifeste. Recomm. n° 05-01/3° : Cerclab n° 2170 (considérant n° 3 : sauf urgence, les travaux peuvent être effectués pendant les périodes de fermeture des campings).
Conséquences excessives de la contrainte technique. V. par exemple : la Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de prévoir des délais de préavis pour la résiliation d’un ordre permanent de paiement du client, d’une durée non justifiée par des impératifs techniques. Recomm. n° 05-02 : Cerclab n° 2171 (comptes bancaire de dépôt ; 5 et considérant n° 6-5 - arg. : l’écoulement de ces délais peut conduire à laisser s’opérer un paiement non voulu, voire créer un découvert dont le coût et le risque, comme l’émission de chèque sans provision, sont à la charge du client ; 9 et considérant n° 6-9 : dates de valeur non justifiées par les délais techniques de réalisation de l’opération). § V. aussi : TGI Nanterre (6e ch.), 9 février 2006 : RG n° 04/02838 ; Cerclab n° 3994 (accès internet ; absence de justification technique de la clause prévoyant un délai pouvant aller jusqu’à 40 jours pour une résiliation par le client, alors que la résiliation par le professionnel peut prendre effet deux jours après l’envoi d’une mise en demeure) - TGI Nanterre (1re ch. sect. A), 2 juin 2004 : RG n° 02/03156 ; site CCA ; Cerclab n° 3993 (fournisseur d’accès internet ; clause abusive majorant forfaitairement chaque session de quinze secondes de connexion bien que le professionnel prétende qu’elle correspond pour lui à un temps d’établissement de la connexion, alors que pour le consommateur, il s’agit d’un service sans contrepartie), confirmé par adoption de motifs par CA Versailles (1re ch. 1re sect.), 15 septembre 2005 : RG n° 04/05564 ; Cerclab n° 3146 ; Juris-Data n° 2005-283144 ; Lamyline.
Information insuffisante du consommateur avant une intervention. Sur la nécessité d’une information effective du consommateur : Recomm. n° 2014-01/30 : Cerclab n° 5000 (fourniture de gaz naturel et d'électricité ; caractère abusif des clauses ayant pour objet ou pour effet de prévoir des modes d’avertissement ne garantissant pas l’information effective du consommateur ou non-professionnel sur l’interruption programmée de la fourniture d’énergie ; commission estimant insuffisante, notamment, la communication par voie de presse ou d’affichage).