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CA RIOM (1re ch. civ.), 22 juin 2006

Nature : Décision
Titre : CA RIOM (1re ch. civ.), 22 juin 2006
Pays : France
Juridiction : Riom (CA), 1re ch. civ.
Demande : 05/02268
Date : 22/06/2006
Nature de la décision : Infirmation
Décision antérieure : TGI CLERMONT-FERRAND (1re ch. civ.), 29 juin 2005
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 613

CA RIOM (1re ch. civ.), 22 juin 2006 : RG n° 05/02268

Publication : Juris-Data n° 313445

 

Extrait : « Attendu qu'il ressort des documents au dossier qu'est bien intervenu, entre l'EURL DU A., représentée par ses gérants, les époux X., et M. Z., le 14 décembre 2002, un contrat d'ordre de mission, expressément régi, selon ses propres énonciations, par la loi du 22 décembre 1972, portant au verso le rappel de plusieurs dispositions de cette loi et notamment la possibilité d'une annulation de commande pendant un délai de sept jours ; qu'ainsi, les parties ont, expressément, entendu se placer dans le champ d'application de cette loi et du Code de la Consommation ; qu'il est acquis et jugé que la loi sur le démarchage est bien applicable à la fourniture de services et notamment à la visite effectuée par le démarcheur d'un cabinet d'expertise auprès d'un agriculteur, après un sinistre dans son exploitation ; que si le champ d'application de la loi est limité aux personnes physiques, la liberté contractuelle ouvre aux cocontractants la faculté de se placer sous le régime de dispositions légales qui, au regard de la délimitation légale de leur champ d'application, ne seraient pas applicables et que, dès lors, des dispositions protectrices relatives au démarchage peuvent, par ce biais, protéger une personne morale comme l'EURL DU A. ; que le contrat litigieux, qui concerne l'expertise d'un sinistre, échappe à la compétence professionnelle des époux X., agriculteurs et qu'ainsi, les dispositions de la loi du 22 décembre 1972 sont bien susceptibles d'être invoquées ».

 

COUR D’APPEL DE RIOM

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 22 JUIN 2006

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 05/02268.

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré : M. Gérard BAUDRON, Président, M. Claude BILLY, Conseiller, M. Bruno GAUTIER, Conseiller

En présence de : Mme Sylviane PHILIPPE, Greffier lors de l'appel des causes et du prononcé

Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de CLERMONT-FERRAND, décision attaquée en date du 29 juin 2005, enregistrée sous le n° 04/2711

 

ENTRE :

M. X.

Mme Y. épouse X.

EARL du A.

[adresse], représentés par Maître Martine-Marie MOTTET, avoué à la Cour, assistés de Maître PAILLONCY de la SCP CHASSAIGNE-PAILLONCY, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND, APPELANTS

 

ET :

M. Z.

[adresse], [minute page 2] représenté par Maître Sébastien RAHON, avoué à la Cour, assisté de Maître Sophie GAUMET, substituant Maître Claude AUJAMES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND, INTIMÉ

 

Après avoir entendu à l'audience publique du 29 mai 2006 les représentants des parties, avisés préalablement de la composition de la Cour, celle-ci a mis l'affaire en délibéré pour la décision être rendue à l'audience publique de ce jour, indiquée par le Président, à laquelle a été lu le dispositif de l'arrêt dont la teneur suit, en application de l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu le jugement rendu le 29 juin 2005 par le Tribunal de Grande Instance de Clermont-Ferrand qui a rejeté l'ensemble des demandes formées par les époux X. et l'EURL DU A. contre M. Z. ;

Vu les conclusions d'appel signifiées par les époux X. et L'EURL DU A., le 12 mai 2006, tendant à faire juger nul le contrat signé avec M. Z. et obtenir le remboursement de la somme de 9.379,76 € ;

Vu les conclusions signifiées par M. Z., le 15 mai 2006, tendant à la confirmation de la décision déférée ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR :

Attendu que les époux X., qui exploitent en société, par le biais de l'EURL DU A., ont été victimes, le 11 décembre 2002, d'un incendie, qui a ravagé un de leurs bâtiments agricoles ; qu'après avoir déclaré le sinistre auprès de leur assureur, le GAN, ils ont confié la défense de leurs intérêts à Z., expert, aux termes d'un contrat d'ordre de mission, en date du 14 décembre 2002 ; qu'un accord est intervenu avec l'assureur sur le montant des dommages subis et sur l'indemnité à revenir aux exploitants, selon deux procès-verbaux d'expertise, en date du 7 mars 2003 mais que, par acte du 2 juillet 2004, les époux X. ont assigné M. Z. en nullité du contrat intervenu entre eux et en paiement de l'indu, perçu directement de l'assureur, soutenant que la convention n'était pas conforme aux exigences légales du Code de la Consommation, réclamant le remboursement du paiement indu de la somme de 9.379,76 € et, subsidiairement, la différence entre le montant des honoraires et celui effectivement réglé à ce titre par l'assureur; que, par la décision déférée, le premier juge a rejeté leur demande, en relevant que le contrat litigieux ne relevait pas du Code de la Consommation et que la somme de 9.379,67 €, contractuellement prévue, était bien due, même si l'assureur avait, en vertu du contrat d'assurance souscrit, limité la garantie « honoraire expert » à la somme de 2.431 € ;

[minute page 3] Attendu qu'en leurs écritures d'appel, les appelants maintiennent que l'ordre de mission du 14 décembre 2002 a été établi sur un formulaire pré-rempli, qui relève des dispositions des articles L. 121-21 et suivants du Code de la Consommation, régissant le démarchage à domicile, notamment en donnant expressément la possibilité d'annuler la commande, conformément aux dispositions de la loi du 22 décembre 1972 ; qu'ils soutiennent qu'ainsi les cocontractants sont expressément convenus de placer leurs relations contractuelles dans le cadre des dispositions du Code de la Consommation qui impose, à peine de nullité, la présence de diverses mentions légales, inexistantes en l'espèce et notamment le lieu de conclusion du contrat, la date du sinistre, le prix global à payer et la reprise textuelle de certaines dispositions ; que, subsidiairement, ils entendent faire limiter la rémunération de l'expert à la somme de 2.341 € prise en charge par l'assureur, soutenant n'avoir jamais voulu consentir des honoraires supérieurs à ceux prévus, au terme de leur contrat d'assurance ; que M. Z. conclut à la confirmation, soulignant qu'il n'y a jamais eu démarchage à domicile et des dispositions du Code de la Consommation ne bénéficiant qu'aux seules personnes physiques, alors que le contrat d'ordre de mission a été régularisé par l'EURL DU A., représentée par ses gérants, pour les besoins de l'activité professionnelle d'agriculteur; que, s'agissant des honoraires, il maintient qu'ils ont été contractuellement fixés, dans le cadre du contrat d'ordre de mission, à 5 % du montant des dommages subis, conformément aux usages en la matière et qu'il a perdu la somme de 9.379,76 € dans le cadre d'une délégation d'honoraires parfaitement régulière ;

Attendu qu'il ressort des documents au dossier qu'est bien intervenu, entre l'EURL DU A., représentée par ses gérants, les époux X., et M. Z., le 14 décembre 2002, un contrat d'ordre de mission, expressément régi, selon ses propres énonciations, par la loi du 22 décembre 1972, portant au verso le rappel de plusieurs dispositions de cette loi et notamment la possibilité d'une annulation de commande pendant un délai de sept jours ; qu'ainsi, les parties ont, expressément, entendu se placer dans le champ d'application de cette loi et du Code de la Consommation ; qu'il est acquis et jugé que la loi sur le démarchage est bien applicable à la fourniture de services et notamment à la visite effectuée par le démarcheur d'un cabinet d'expertise auprès d'un agriculteur, après un sinistre dans son exploitation ; que si le champ d'application de la loi est limité aux personnes physiques, la liberté contractuelle ouvre aux cocontractants la faculté de se placer sous le régime de dispositions légales qui, au regard de la délimitation légale de leur champ d'application, ne seraient pas applicables et que, dès lors, des dispositions protectrices relatives au démarchage peuvent, par ce biais, protéger une personne morale comme l'EURL DU A. ; que le contrat litigieux, qui concerne l'expertise d'un sinistre, échappe à la compétence professionnelle des époux X., agriculteurs et qu'ainsi, les dispositions de la loi du 22 décembre 1972 sont bien susceptibles d'être invoquées ; qu'au terme de celles-ci, le contrat écrit doit comporter, à peine de nullité, un certain nombre de mentions et, notamment, la reproduction, de manière apparente, des articles L. 121-23 à L. 121-26 du Code de la Consommation, la simple constatation, par le juge, de l'absence des mentions obligatoires exigées par le texte suffisant à justifier la nullité du contrat conclu ; que le contrat doit, notamment, comprendre, à peine de nullité, un formulaire détachable, destiné à faciliter l'exercice de la faculté de renonciation par le client ; qu'il est acquis qu'en l'espèce, ce formulaire détachable fait défaut ainsi que, particulièrement, la mention du prix global à payer, et les [minute page 4] modalités exactes de son calcul, affectées d'une relative indétermination en raison du caractère sommaire et elliptique de la mention manuscrite portée au contrat : « 5 % des dommage » ; qu'au reste, M. Z. ne discute pas l'irrégularité du contrat au regard des dispositions du Code de la Consommation, se bornant à soutenir qu'il échappait à son champ d'application ; qu'au regard des irrégularités invoquées et constatées, il y a bien lieu, par infirmation, de déclarer nul le contrat d'ordre de mission intervenu entre l'EURL DU A. et M. Z. et de condamner ce dernier à rembourser la somme de 9.379,76 € indûment perçue ; que le contrat invoqué étant nul, il appartiendra aux parties de redéfinir, amiablement ou sous arbitrage judiciaire, les conditions de l'intervention de M. Z. et, notamment, la juste rémunération à laquelle il peut prétendre, au regard du travail qu'il a effectué au profit de l'EURL DU A. ; que l'équité commande d'allouer à cette dernière, pour les frais non taxables inutilement exposés par ses soins, dans la présente procédure, une somme de 1.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et contradictoirement, Infirme en totalité la décision déférée ;

Statuant à nouveau,

Prononce la nullité du contrat d'ordre de mission intervenu le 14 décembre 2002 entre l'EURL DU A. et M. Z. ;

Condamne M. Z. à payer à l'EURL DU A. la somme de 9.379,76 € en remboursement de celle indûment perçue et ce avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 2 juillet 2002, valant mise en demeure ;

Condamne M. Z. à verser à l'EURL DU A. une somme de 1.000 € par application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Condamne M. Z. aux dépens de première instance et d'appel et dit qu'il sera fait application des dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Le présent arrêt a été signé par M. BAUDRON, président, et par Mme PHILIPPE, greffier présent lors du prononcé.

Le Greffier.      Le Président.